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Les notions de violence et les droits des personnes âgées

Dans le document Éthique professionnelle des infirmiers(es) (Page 34-38)

1. Notions de violence et de contrainte dans les soins

a) Qu’est ce que la violence?

Le mot violence signifie brutaliser, contraindre par la force quelqu’un, le torturer, le menacer.

On entend par violence le fait d’agir sur quelqu’un ou de le faire agir contre sa volonté en employant la force ou l’intimidation. Exemples : faire violence à la loi signifie lui donner un sens forcé, faire violence à quelqu’un, c’est le contraindre en le brutalisant ou en l’opprimant.

La violence peut être physique, morale ou psychique.

La violence physique se caractérise par une atteinte à J’intégrité corporelle d’une personne.

Le violence morale ou psychique est le fait de soumettre une personne à une pression morale en le maintenant en état de stress permanente ayant des répercussions néfastes sur la personne.

b) Par contrainte on entend la violence exercée contre quelqu’un, une entrave à la liberté d’action de quelqu’un. Ici la contrainte est beaucoup plus psychique.

Dans le cadre des soins, la violence aussi bien que la contrainte peut s’exercer dans les deux sens :

Du soignant vers le soigné d’une part et, Du soigné vers le soignant d’autre part.

c) La violence et la contrainte exercées du soignant vers le soigné

L’on remarque très souvent que la violence et la contrainte exercées par un soignant sur un patient sont dues pour la plupart des cas à une incompétence du premier tant sur le plan des droits de l’homme et de la déontologie professionnelle que sur le plan des connaissances et pratiques ; cela peut aussi être dû à ses problèmes privés. Les quelques exemples patents de cas de violence observés dans la pratique des soins sont :

- Le mauvais accueil du patient ou accueil belliqueux.

- L’absence de l’écoute.

- L’imposition d’achat par le patient du médicament que l’on possède.

- La mauvaise identification.

- La mauvaise préparation psychologique et physique.

- Le non-respect de la dignité humaine dans l’examen en groupe des malades préalablement mis à poils.

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- L’excision des femmes.

- L’incision sans anesthésie.

- Les injections, pansements ou autres soins pratiqués dans des conditions draconiennes, ce qui fait courir au malade des risques élevés d’accident et même des graves complications.

Quant à la contrainte, nous proposons pour exemples les cas ci-après : - L’administration forcée d’un traitement à un enfant, à un malade mental.

- Le don de sang (isogroupe, isorhésus) à un patient ayant perdu massivement du sang et refusant toute transfusion, malgré le fait que sa vie soit en danger (cas des convenances religieuses ou autres)

- L’exigence d’une rémunération immédiate et en espèce avant un soin (mendicité ou corruption).

- Les paroles désobligeantes vis-à-vis d’un patient.

- La révision utérine sans anesthésie ou sans collaboration de la cliente.

- La réduction d’une entorse au vif sans anesthésie.

L’on observe que la finalité de la violence est beaucoup plus malheureuse pour le soigné et, quant à la contrainte, pour un malade conscient, l’on peut réussir à obtenir la collaboration de celui-ci si l’on lui explique le bien-fondé du soin.

d) La violence et la contrainte exercées du soigné vers le soignant :

D’entrée de jeu l’on remarque que l’agressivité ou la violence d’un malade envers le soignant rend ce dernier désemparé et mal-en-point. Dès lors le soignant ne pratique le soin que malgré lui, par contrainte du devoir ; il en résulte la perte de la dextérité ou la maladresse.

En effet un malade peut être agressif ou antipathique à cause de l’anxiété due à sa maladie, à son pronostic fatal ou à la peur de mourir.

Aussi le malade peut être violent à cause du manque de confiance envers l’équipe toute entière ou quelques membres seulement de l’équipe.

En définitive, nous disons qu’en temps normal, la violence, aussi bien que la contrainte sont des aspects négatifs dans la réussite d’un soin étant donné qu’ils vont à l’encontre du respect des droits de l’homme. L’on observe aussi que le soignant et le soigné sont deux entités inséparables, raison pour laquelle un soin devrait se « négocier » afin d’obtenir la collaboration du malade d’une part, la disponibilité et le dévouement du soignant d’autre part ; ceci montre bien que le soin entre dans la relation soignant / soigné qui doit se passer dans des conditions meilleures possibles (confiance, sympathie, douceur, respect).

Par ailleurs, l’on peut être amené a contraindre un patient dans un soin, à l’instar d’un enfant, d’un malade mental ou d’un comateux, car c’est pour son intérêt. Sinon il est conseillé d’obtenir le consentement éclairé du malade ou tout au moins éclairer la famille ou tout autre responsable du patient avant le soin contraignant.

La violence aussi bien que la contrainte ne sont permises ni en éthique ni en morale.

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2. Droits des personnes âgées

a) Introduction

Comme tout être humain, les personnes âgées ont droit au respect de leur dignité. Elles ont le droit à leur sécurité et à leur liberté.

En effet, du fait de leur âge avancé, leur physiologie est entamée et ceci fait d’elles les groupes vulnérables.

À ce titre les personnes âgées méritent donc une protection, une attention particulière.

En France, seuls 5 à 6 % des personnes âgées de plus de 65 ans vivent en institution (Établissement pour les vieillards). Cependant la très grande majorité de vieillards vivent en milieu ouvert, à leur propre domicile ou auprès de leurs enfants. Ainsi, ceux qui sont soignés ou hébergés en institution sont cependant les plus fragiles, à la fois parce que leur fragilité est une cause d’entrée en Établissement et parce que la transplantation et la vie en établissement collectif comportent des risques spécifiques.

Il est donc tout à fait légitime de se préoccuper des droits et libertés des personnes âgées vivant en institution.

b) Approche juridique

Il n’est peut être pas superflu de rappeler qu’un vieillard en Institution reste un citoyen à part entière. Tant qu’il n’est pas placé sous un régime d’incapacité légale ou qu’il n’est pas inconscient au sens médical, il est supposé jouir intégralement des droits et prérogatives attachés à la capacité

juridique, notamment de ses droits politiques, publics et privés. Ses libertés fondamentales sont garanties par la constitution :

- de l’égalité des droits entre les citoyens ;

- de la liberté de faire ce qui n’est pas expressément interdit ; - de la communication des pensées et des opinions ;

- du droit à la santé, à la sécurité, au repos, aux loisirs, aux moyens d’existence ; - du droit à la culture.

On peut y ajouter le droit à la protection contre l’immixtion arbitraire dans la vie privée, la famille, le domicile ou la correspondance qui figure dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (Assemblée Générale des Nations Unies, le 10 octobre 1948).

Ceci comporte un certain nombre de conséquences pour la vie en établissement. Le règlement intérieur est censé ne comporter aucune limitation des libertés fondamentales.

Sa seule finalité est d’assurer la bonne marche de l’établissement. La liberté d’aller et venir ne doit pas être entravée.

Mais la réalité concrète vient rapidement infléchir le droit pur et dur. On admet que les restrictions imposées par le règlement intérieur sont celles liées aux contraintes de la vie collective, et que la liberté d’aller, de venir et de sortir doit s’accommoder des horaires de la collectivité.

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L’approche juridique devient difficile lorsqu’il se présente un conflit d’obligation : la façon dont un soignant croit devoir exercer son devoir d’assistance à personne en danger peut être considérée par le malade comme une immixtion intolérable dans sa vie privée ; elle peut aussi précipiter une crise fatale.

En outre, les personnes placées sous un régime d’incapacité légale, et même les personnes inconscientes gardent encore des droits.

L’approche juridique est donc indispensable, certes, mais elle n’est pas suffisante. Elle doit être incluse dans une démarche plus dynamique, plus globale, collant davantage à la pratique quotidienne, plus vivante, qui est la démarche éthique.

c) Approche éthique

Pour illustrer notre propos, nous aurons recours à l’analyse que fait P. Ricœur de ce qu’il appelle l’intention éthique. Cette notion est, pour lui, sous-tendue par un réseau conceptuel en forme de triangle, qu’il désigne par les termes de « Pôle-je », « Pôle-tu » et « Pôle-il » (neutre).

Au « Pôle-je » l’auteur trouve une liberté en première personne qui se pose elle-même, qui veut être et qui s’atteste au moyen d’action, de tâche et de réalisation.

Nous pouvons remplacer le terme liberté par celui d’autonomie, entendu non au sens gérontologique courant comme l’absence d’infirmité, d’incapacité et de handicaps, mais plutôt dans son sens étymologique comme la liberté fondamentale de se déterminer soi-même, agir à la guise et de guider sa vie. Cette autonomie-là est précisément limitée par ce que nous avons rappelé plus haut la fragilité des personnes âgées en Institution, qui résulte de la maladie du vieillissement et de leurs conséquences ; notamment d’une plus grande habilité des mécanismes homéostatiques physiques, psychiques et sociaux.

Le « Pôle-tu » : c’est la position dialogique de la liberté en seconde personne... « Je veux que la liberté soit dans une relation d’absolue réciprocité, de parfaite réversibilité, si bien qu’on peut partir du tu comme du je ».

Pour le vieillard en institution, le « Pôle-tu » concerne tous les autres : ses compagnons dans l’institution, le personnel, sa famille et ses proches, avec toutes les sources de conflits potentiels que représentent les autres.

C’est là qu’intervient donc le « Pôle-il », c’est-à-dire la méditation par la règle, qui tient dans l’ordre éthique la même disposition que l’objet entre deux sujets. Cette règle préexiste dans l’institution comme ailleurs, par exemple sous la forme de prescriptions juridiques, mais aussi de valeurs et d’objectifs à atteindre.

En somme, les droits des personnes âgées en institution occupent l’espace souvent constitué par le recoupement de quatre notions :

- leur liberté et leurs désirs propres, - tout ce qui concourt à leur fragilité, - l’espace de liberté des autres,

- les régulations institutionnelles et politiques.

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En ce qui concerne les soins, la multiplicité des intervenants et le système de travail par tâches (tournée de température, tournée de tension, tournée de change) accentuent leur caractère agressif, décousu, illogique, arbitraire, impersonnel et en dernière analyse pathogène. Il a été d’ailleurs démontré que l’effort de soin global personnalisé, concrétisé par ce que les infirmières appellent la démarche de soins, réduit de façon significative la dépendance et la mortalité en gériatrie.

En effet, l’objectif de tout soin en gériatrie, c’est l’autonomie du patient. Ceci implique qu’il soit considéré comme un sujet. Il a donc droit à être écouté. Il est important qu’on lui signifie que sa démarche a été entendue, et qu’on lui ménage des espaces concrets de décision.

Il est primordial qu’un soin ou une activité soit proposé plutôt qu’imposé.

À cet effet Junod a attiré l’attention sur les dérapages qui guettent les soins aux personnes âgées : - tendance à ignorer les demandes non exprimées,

- tendance à vouloir tout maîtriser à la place du patient, - tendance à banaliser,

- tendance à médicaliser des situations demandant d’autres approches.

Enfin, l’institution hébergeant les personnes âgées doit se donner les moyens d’assurer des soins palliatifs de qualité.

En définitive cinq exigences apparaissent fondamentales :

1- L’âge ne doit pas réduire le droit aux soins : le droit des personnes âgées de recourir à la médecine et de recevoir les soins nécessaires doit être un principe intangible. Il ne peut être question de faire primer l’âge sur la pathologie.

2- Les soins ne doivent pas réduire le droit à une vie chaleureuse : chez les personnes âgées, le besoin de soins, une fois apparu, se relève le plus souvent durable. Il convient donc de dispenser les soins sans remettre en cause l’équilibre de vie de la personne. Ainsi, le droit à une existence personnelle doit primer.

3- Il faut faire reculer les limites du maintien à domicile : le souhait des personnes âgées de rester aussi longtemps que possible à leur domicile est évident et connu, car pour une personne âgée, quitter sa famille implique anxiété et dépression.

4- Il faut éviter la multiplication des transferts et donc la « hiérarchisation » des institutions de soins : chacun aspire à vieillir dans le milieu qui lui est familier. Tout transfert est un choc qui laisse inévitablement des séquelles profondes.

5- Le besoin de soins ne doit pas être isolé de l’amont : s’il est essentiel de répondre au besoin de soins, il est impossible d’ignorer les autres : besoins élémentaires, besoins domestiques, corporels, relationnels.

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Chapitre XI

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