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CHAPITRE 1 Revue de la littérature

1.3 Les instabilités du front de flamme

1.3.1 Notions fondamentales

Les instabilités de surface se déclinent en trois types: l’instabilité gravitationnelle, l’instabilité thermodiffusive et l’instabilité hydrodynamique.

1.3.1.1 Instabilité gravitationnelle

À cause de la gravité, un fluide léger se situant sous un fluide lourd cherchera à remonter au- dessus du fluide lourd. Par exemple, dans une flamme en expansion sphérique, les gaz brûlés de la moitié supérieure de la sphère sont plus chauds, donc plus légers, que les gaz frais situés de l’autre côté du front de flamme. Dans cette situation, les gaz chauds poussent sur le front de flamme afin de s’élever, ce qui déstabilise le front. Ce mécanisme est nommé instabilité gravitationnelle (Law, 2006, p. 459). Toutefois, cette instabilité a un impact significatif seulement à des vitesses de flamme inférieures à 0,15 m/s (Qiao, Kim et Faeth, 2005). Son impact sur les carburants hydrogénés ayant des vitesses de flamme élevées est donc mineur comparé à l’impact des deux autres types d’instabilité. L’instabilité gravitationnelle est donc négligée dans ce travail.

1.3.1.2 Instabilité thermodiffusive

L’instabilité thermodiffusive est principalement causée par la non-équidiffusion, c’est-à-dire par l’écart entre les flux de diffusion thermique et massique (Law, 2006). Cet écart entre les flux de diffusion est représenté par le nombre de Lewis (Le), défini par l’équation (1.1) comme étant le ratio de la diffusivité thermique sur la diffusivité massique du réactif déficient du mélange air-carburant. Dans l’équation (1.1), α représente la diffusivité thermique du mélange air-carburant et Dij est la diffusivité massique du réactif déficient i se diffusant vers j (où j peut être soit l’ensemble des autres réactifs du mélange, soit uniquement le N2 puisqu’il représente plus de 50% de la fraction volumique des autres réactifs). En plus

de la non-équidiffusion, un aspect important de l’instabilité thermodiffusive est la courbure du front de la flamme, qui aide à stabiliser la flamme en concentrant (dispersant) la diffusion thermique des bosses (creux) du front de flamme.

= (1.1)

Le fonctionnement du mécanisme d’instabilité thermodiffusive est schématisé à la Figure 1.6. Dans la zone I, la courbure de flamme fait que la diffusion thermique (flèche pleine) concentre la chaleur de la flamme vers les gaz frais, ce qui les préchauffe et favorise la combustion, tandis que la diffusion massique (flèche pointillée) nuit à la propagation en dispersant les réactifs. Dans la zone II, la courbure de la flamme est responsable d’une diffusion thermique dispersant la chaleur de la flamme dans les gaz frais, ce qui tend à diminuer l’augmentation de la température des gaz frais et causant ainsi un ralentissement de la propagation de la flamme. Pendant ce temps, la diffusion massique concentre les espèces réactives vers le front, ce qui soutient la propagation de la flamme. Si les deux flux de diffusion sont égaux (Le = 1), les effets positifs et négatifs s’annulent mutuellement et la propagation demeure constante dans les deux zones. Si la diffusivité thermique est plus grande (Le > 1), alors la perte de chaleur dans la zone II est plus grande que l’arrivée de nouveaux réactifs frais et la propagation du front diminue. Au contraire dans la zone I, la diffusion thermique préchauffe suffisamment les gaz frais et favorise la propagation du front. Ceci permet au front de flamme de la zone I de rattraper son retard sur le front de la zone II et ainsi la flamme est stabilisée. Toutefois, si la diffusion massique est la plus grande (Le < 1), le gain en espèces réactives dans la zone II surpassera les pertes thermiques, accélérant ainsi la propagation du front. Dans la zone I, la dispersion des réactifs sera trop rapide par rapport au potentiel de préchauffe offert par la diffusion thermique et la propagation du front est réduite. Au final, la bosse et le creux s’amplifieront chacun de leur côté, augmentant le plissement général du front.

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Figure 1.6 Schématisation du mécanisme d’instabilité thermodiffusif (adaptée de Law (2006) et Williams (1985))

En réalité, la transition entre flamme stable et instable ne se fait pas précisément à Le = 1,00. Les bosses et les creux sont des courbures dans la flamme. Or, la courbure est autostabilisante puisqu’elle entraîne une augmentation locale de la vitesse dans la zone I et une diminution locale de la vitesse dans la zone II (Law, 2006). Grâce à l’effet stabilisateur de la courbure, des flammes dans lesquelles la diffusivité massique domine légèrement peuvent tout de même être stables. Conséquemment, à cause de la courbure, la flamme ne devient instable que lorsque Le est inférieur à une certaine valeur critique Le*. La valeur exacte de Le* est légèrement inférieure à 1 (Addabbo et al., 2002; Vu, Park, Kwon, Bae, Yun et al., 2010) et peut être calculée théoriquement avec les équations présentées soient par Addabbo et al. (2002) ou par Law, Jomaas et Bechtold (2005). Le mécanisme thermodiffusif est l’addition des effets de la non-équidiffusion et de la courbure.

Lorsque le nombre de Lewis est inférieur à la valeur critique Le*, la flamme est inconditionnellement instable en toutes circonstances à cause des effets thermodiffusifs (Law

et al., 2005). La flamme est alors instable dès son apparition. Lorsque le nombre de Lewis est supérieur à cette valeur critique, le mécanisme thermodiffusif aidera à stabiliser la flamme. Cette dernière demeure toutefois vulnérable à la cellularité générée par les instabilités hydrodynamiques.

1.3.1.3 Instabilité hydrodynamique

Darrieus et Landau ont été les premiers à montrer qu’une flamme pré-mélangée était intrinsèquement instable (Williams, 1985) à cause de phénomènes hydrodynamiques. Le mécanisme hydrodynamique considère qu’une flamme infiniment mince sépare les gaz frais de masse volumique ρu et les gaz brûlés de masse volumique ρb. Cette brusque variation de la masse volumique subie par les gaz traversant la flamme cause les instabilités hydrodynamiques. Le mécanisme hydrodynamique est schématisé à la Figure 1.7 qui présente un front de flamme perturbé agissant comme discontinuité entre le mélange frais air- carburant à gauche et les gaz brûlés à droite. Au départ, la flamme est parfaitement plane et se propage à vitesse constante Su0. Si ce front de flamme est perturbé (tel qu’illustré sur la Figure 1.7), un tube de courant, dont l’aire (A) est égale loin en amont et en aval de la flamme, doit converger (diverger) à l’approche des segments concaves (convexes) du font de flamme. Afin de maintenir la conservation de la masse et de la quantité de mouvement, l’écoulement dans la section convergente doit accélérer. La vitesse locale des gaz frais (Su) devient alors supérieure à la vitesse de flamme Su0 et le front de flamme est repoussé vers les gaz brûlés. Au contraire, la vitesse des gaz diminue dans la section divergente permettant au front de flamme de s’avancer vers les gaz frais. Ce mécanisme est par conséquent absolument instable. L’intensité de l’instabilité est proportionnelle au ratio d’expansion thermique (σ), définit par σ = ρu/ρb: en effet, plus le saut de masse volumique est grand, plus le tube de courant se déforme à l’approche du front de flamme perturbé, ce qui augmente le différentiel entre la vitesse locale des gaz et la vitesse de flamme.

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Figure 1.7 Schématisation du mécanisme d’instabilité hydrodynamique (adaptée de Law (2006))

L’instabilité hydrodynamique est aussi liée à l’épaisseur de la flamme (lf), une dimension caractéristique définie comme étant

= ⁄ ⁄( ) (1.2)

où λ et sont respectivement la conductivité thermique et la capacité thermique massique à pression constante prise à la température moyenne des gaz avant et après combustion (Law et al., 2005). Une réduction de l’épaisseur de flamme favorisera l’instabilité de deux façons (Kwon et al., 2002; Sun, Liu, Bao et Liu, 2012). Premièrement, il y a une diminution de l’influence de la courbure ce qui, tel que mentionné précédemment, facilite la déstabilisation de la flamme. Deuxièmement, la réduction de l’épaisseur de la flamme augmente l’intensité du couple baroclinique, qui dépend du gradient de pression au travers de la flamme. Puisque

ce gradient de pression augmente avec une réduction de l’épaisseur de la flamme, le développement des instabilités hydrodynamiques est favorisé. Comme le montre l’équation (1.2), les carburants plus réactifs, qui ont une vitesse de flamme élevée, ont intrinsèquement une faible épaisseur de flamme. La flamme est aussi plus mince quand la pression est élevée. Un mélange stable à la pression atmosphérique deviendra rapidement instable avec une hausse de la pression.

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