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1.4 Spectres et données spectrales

1.4.1 La notion de spectre

Dans le cadre des spectroscopies Raman et de uorescence, la notion de spectre est diérente. Ces diérences trouvent leurs origines au c÷ur même des principes physiques régissant chacune de ces spec-troscopies.

1.4.1.1 Spectre de uorescence

Les spectres de uorescence sont dépendants de la longueur d'ondeλdes radiations émises. Contraire-ment à la spectroscopie Raman, la spectroscopie de uorescence est forteContraire-ment dépendante de la longueur d'ondeλedu faisceau excitateur.

Ainsi, un spectre de uorescence est dépendant de deux paramètres :

la longueur d'onde excitatriceλe;

la longueur d'onde émiseλpar l'échantillon après interaction avec le rayon incident.

Deux types diérents de spectres sont ainsi exploitables en spectroscopie de uorescence, en fonction du paramètre variable.

Dénition :

Spectre de uorescence d'excitation : le spectre d'excitation traduit, pour une transition d'émis-sion xée, la variation de l'intensité du rayonnement de uorescence en fonction de la longueur d'ondeλe du rayonnement d'excitation.

Spectre de uorescence d'émission : le spectre d'émission est déterminé en enregistrant la variation de l'intensité du rayonnement de uorescence en fonction de la longueur d'onde de uorescence λpour une longueur d'onde d'excitationλexée.

Un troisième type de spectre est également enregistrable en spectroscopie de uorescence. Il s'agit d'une généralisation de la notion de spectres d'excitation et d'émission. Pour toutes les longueurs d'onde d'excitation, tous les spectres d'émission sont mesurés. Ces spectres sont appelés spectres d'excitation-émission. Mais l'acquisition de ces familles de spectres demande beaucoup de temps et de manipulations.

De plus, en chaque point de mesure, une matrice de données est enregistrée. Sinlongueurs d'onde d'ex-citation etmlongueurs d'onde d'émission sont utilisées lors d'une expérimentation,nspectres d'émission oumspectres d'excitation sont enregistrés en un point de mesure, c'est-à-diren×mintensités de uores-cence. Par comparaison, un seul spectre Raman est enregistrable en un point de mesure. La visualisation des spectres est alors dicile lorsque les points de mesures quadrille une surface de l'échantillon. Deux dimensions supplémentaires sont à prendre en considération, à savoir l'axe de déplacement suivant les x et l'axe de déplacement suivant les y. Une pratique est alors couramment employée an de limiter le volume des données. Pour une longueur d'onde d'excitation xée, les intensités des longueurs d'onde d'émission comprises dans une bande spectrale sont intégrées. Les mesures sont répétées pour diérentes longueurs d'onde d'excitation et diérentes bandes d'intégration. Les bandes d'intégration sont techni-quement réalisées par des ltres optiques transparent dans une bande spectrale bien dénie. Chaque conguration expérimentale (longueur d'onde excitatrice et ltre) est numérotée et pour chacune l'inten-sité du rayonnement de uorescence est mesurée. Un spectre dans ce cas est la variation de l'intenl'inten-sité du rayonnement de uorescence en fonction de la conguration expérimentale. Une illustration est présentée

1.4. Spectres et données spectrales 27 sur la gure 1.10. An de les diérencier des spectres d'excitation-émission, ces spectres sont dénommés spectres hybrides.

Remarque : les spectres de uorescence s'expriment en fonction des longueurs d'onde d'excitationλe et d'émissionλ, contrairement aux spectres Raman qui utilisent les nombres d'onde ν.¯

Composition d'un spectre de uorescence : À la uorescence de l'échantillon s'ajoutent des phé-nomènes perturbateurs dus à la présence de nombreuses espèces dans le milieu de mesure. La composition classique d'un spectre de uorescence est la suivante [91] :

le spectre de uorescence de l'espèce chimique analysée proprement dit ;

le spectre de uorescence parasite d'un constituant majoritaire du milieu de mesure dont les niveaux d'énergie sont très proches de ceux de l'élément à analyser ;

les eets de ltres : certaines espèces chimiques présentes dans le milieu de mesure peuvent absorber le rayonnement d'excitation (on parle alors d'eet de préltre) ou le rayonnement de uorescence (on parle alors d'eet de postltre) ;

le spectre Raman : ce phénomène de faible intensité ne devrait pas gêner l'acquisition d'un spectre de uorescence ; cependant, lorsque les constituants principaux du milieu de mesure sont très actifs en Raman, les signaux de uorescence peuvent être perturbés ;

des phénomènes instrumentaux :

? le courant noir8: ce signal correspond au bruit enregistré par les détecteurs en l'absence de signal ;

? la réponse spectrale de l'instrumentation : l'ecacité du détecteur et la transmission et/ou la réexion des éléments optiques du spectromètre sont fonctions de la longueur d'onde. Le spectre enregistré est donc donné par la convolution entre le spectre Raman de l'échantillon et la réponse de l'appareil.

Remarque : les phénomènes parasites décrits n'aectent pas systématiquement tous les spectres en-registrés. Ils dépendent de l'instrumentation et de l'application considérée. Des prétraitements ecaces pour éliminer ces eets seront présentés à la section 2.3.4, page 48.

Exemples : La gure 1.9 présente le spectre d'émission à365 nmde l'acide férulique libre. Cet acide est l'un des principaux constituants du c÷ur du grain de blé.

La gure 1.10 quant à elle illustre la notion de spectre hybride. L'intensité de uorescence de la lignine 7 a été acquise pour diérentes congurations expérimentales qui seront décrites dans le chapitre 3. La lignine 7 est l'une des principales espèces uorescentes présente dans le grain d'orge.

Remarques : Peu de caractéristiques sont extractibles à la vue du spectre hybride de la lignine 7 car pour diérentes congurations expérimentales le même laser et des ltres optiques à bande passante

8dark current en anglais

400 450 500 550 600 650

Fig. 1.9 Spectre d'émission à365nmde l'acide férulique libre

Fig. 1.10 Spectre hybride de la lignine 7

se recouvrant ont pu être utilisé. L'information disponible est redondante et aucune logique n'est imposée à l'axe des abscisses de ces spectres. De plus, même si une logique se dégageait, le peu d'échantillon disponible par spectre limite les interprétations possibles.

Par contre, le spectre d'émission de l'acide férulique libre enregistré pour un laser excitateur de longueur d'onde de 365 nmautorise quelques remarques. Ce spectre est principalement caractérisé par une forme de type variations lentes que nous appellerons une "bosse". Contrairement à la spectroscopie Raman, des pics étroits ne sont pas les formes privilégiées de la spectroscopie de uorescence. Par contre, la forme du spectre dans son ensemble amène l'identication du composé chimique analysé.

Une propriété commune évidente aux spectres hybrides et d'émission est la positivité de leurs inten-sités.

1.4.1.2 Spectre Raman

Un spectre Raman fournit des informations vibrationnelles et rotationnelles d'un échantillon. Mais ces informations ne sont pas mesurées directement. Lors de l'interaction entre l'échantillon et le faisceau incident, les électrons mis en jeu passent brièvement par un état virtuel d'énergie beaucoup plus forte que les transitions vibrationnelles et rotationnelles de l'échantillon. En quittant cet état, les électrons absorbent une partie de l'énergie du photon incident (eet Stokes) ou lui en restituent une partie (eet anti-Stokes). Les photons diusés par le spécimen biologique n'ont plus la même énergie, donc la même fréquence, que les photons incidents. Mais ces photons diusés ne caractérisent pas à eux seuls les états vibrationnels. L'information pertinente correspond à l'énergie absorbée ou restituée par rapport à celle du photon incident. Ainsi, la diérence νdif f = ν0−νi entre la fréquence des photons incidents ν0 et la fréquence des photons diusésνi est porteuse d'information sur les états vibrationnels. Et c'est parce que c'est une diérence que les spectres Raman sont indépendants de la longueur d'onde des radiations

1.4. Spectres et données spectrales 29 incidentes.

Remarque : les spectres Raman ne s'expriment pas en fonction de la fréquence, ou de la longueur d'onde comme les spectres de uorescence, mais en fonction d'une grandeur qui est proportionnelle à la fréquence, à savoir le nombre d'onde ¯ν. Cette grandeur est dénie par l'équation (1.2), page 12, dans laquelleν doit être remplacé par νdif f, c'est-à-direν¯= νdif fc .

Toutes ces informations sont synthétisées par un spectre Raman, dont une dénition possible peut se formuler par :

Dénition : Un spectre Raman représente l'évolution de l'intensité des ondes électromagnétiques diu-sées par un échantillon biologique excité par une source laser en fonction de la diérence entre les nombres d'ondes des photons incidents et les nombres d'ondes des photons diusés.

Composition d'un spectre Raman : Un spectre Raman ne devrait être théoriquement constitué que des pics caractéristiques des énergies de vibrations et de rotations de la molécule ou du composé étudié. Or comme pour toute instrumentation et comme pour la spectroscopie de uorescence, les spectres expérimentaux sont le résultat de plusieurs phénomènes [40] :

le spectre Raman de l'espèce étudiée proprement dit ;

le spectre du support sur lequel repose l'échantillon. Pour ne pas dénaturé le spectre Raman du spécimen, ce support sera choisi pour sa faible activité Raman, ou alors, le cas échéant, pour son activité Raman localisée dans des bandes spectrales diérentes de celles du spectre d'intérêt ;

un fond du uorescence : il correspond à la uorescence parasite de l'échantillon lui-même ;

des phénomènes instrumentaux :

? le courant noir ;

? la réponse spectrale de l'instrumentation ;

? les rayons cosmiques : lors de l'enregistrement d'un spectre Raman, des raies très intenses à une seule longueur d'onde apparaissent de façon aléatoire.

Remarque : les phénomènes qui parasitent un spectre Raman sont éliminés par des prétraitements ou par l'adaptation des conditions d'enregistrement. Les méthodes usuellement employées pour mettre en forme les spectres Raman seront développées à la section 2.4.4, page 60.

Exemples : An d'imager la dénition ci-dessus, quelques exemples de spectres Raman sont donnés ci-dessous. Ces spectres correspondent aux spectres de référence des principaux produits utilisés dans les applications qui seront décrites dans le chapitre 4.

Les supports de mesure : Dans toute expérimentation de spectroscopie Raman, l'échantillon à analyser est placé sur un support dont la nature dière d'une application à l'autre. Les enregistrements

de spectres sont réalisés sur des supports transparents (pour laisser passer la lumière diusée) et possédant une faible activité Raman (pour ne pas cacher l'information vibrationnelle de l'échantillon étudié). Pour les spécimens organiques, l'utilisation des supports de uorine (CaF2) ou de uorure de baryum (BaF2) est privilégiée. Comme visible sur la gure 1.11, la uorine possède un pic Raman étroit et unique centré au nombre d'onde 325cm−1.

400 600 800 1000 1200 1400 1600 0.5

Fig. 1.11 Spectre Raman de référence de la uorine (CaF2)

400 600 800 1000 1200 1400 1600 0

Fig. 1.12 Spectre de parane sur support de uorine

La parane : En médecine, la parane est couramment employée pour enrober les échantillons biologiques. La parane est un excellent conservateur et permet ainsi de répertorier les échantillons dans des bibliothèques, sans crainte de leur destruction par le temps. Une acquisition sur support en uorine (CaF2) du spectre caractéristique de la parane est montré sur la gure 1.12. L'inuence du support est visible au nombre d'onde325cm−1et repéré par une èche rouge sur la gure. La parane est constituée quant à elle de pics étroits. Les principales vibrations de ce composé sont traduites par les pics localisés aux nombres d'onde890 cm−1,1063 cm−1, 1133cm−1, 1172cm−1, 1296cm−1, 1418cm−1, 1441cm−1 et1463cm−1.

Remarques : Les exemples présentés ci-dessus illustrent les caractéristiques communes à la plupart des spectres Raman. Ils sont composés de pics étroits localisés aux nombres d'onde auxquels la molécule considérée vibre. Pour certains composés, la uorescence est beaucoup plus forte que le signal Raman sous-jacent. Les informations vibrationnelles sont obsolètes dans ce cas sans traitements supplémentaires.

Une autre caractéristique des spectres est la positivité de leurs intensités. En eet, l'intensité récep-tionnée à une longueur d'onde donnée est proportionnelle au nombre de photons diusés par la matière analysée.

Les propriétés intrinsèques à la spectroscopie Raman seront décrites et analysées à la section 2.4.3, page 59.

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