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IV Structure des phases organo-minérales

IV. A.3 I NFLUENCE DU TAUX D ’ HUMIDITE DU MATERIAU

L’objet de ce paragraphe est d’observer les modifications structurales liées à l’augmentation du taux d’humidité des phases organo-minérales. En effet, il apparaît que le composé obtenu sans polymère est identifié par DRX comme la phase C4AH19, c'est-à-dire la phase la plus hydratées

des composés de type C4AHx, bien que la caractérisation ait eu lieu sur la poudre obtenue après

séchage sous vide. La phase C4AHx présente donc un caractère hygroscopique important, et la

quantité d’eau dans l’interfeuillet est à l’origine d’une augmentation de la distance interfoliaire. De même, dans les composés organo-minéraux l’hydratation mène à un gonflement du matériau, observable à l’œil et lié par une augmentation de la distance basale mesurée par DRX. Nous avons réalisé l’expérience d’hydratation sur les composés obtenus par addition retardée des polymères x2,3(N13,5)P23 et x5(N5)P23. Pour l’étude de l’avancement de l’hydratation dans les premières 24 heures, les poudres séchées issues de la synthèse sont introduites dans un dessiccateur sous argon et dans milieu à 100 % d’humidité sur les supports utilisés lors de la caractérisation par DRX. Ils en sont sortis à différents temps, la surface de l’échantillon est aplanie et l’échantillon est caractérisé par DRX. Dans le cas de l’hydratation après trois jours, la poudre séchée est placée dans un capillaire, lui-même introduit dans le milieu humide. Le capillaire est fermé après les trois jours et l’échantillon est alors caractérisé dans la gamme de 2θ telle que 1°<2θ<10 °. Nous verrons dans le paragraphe IV.B.3 que cette gamme n’est pas suffisante pour détecter la réflexion caractéristique de la phase polymère- AFm au maximum d’hydratation. Nous ne pouvons alors interpréter les résultats ci-dessous qu’en termes de modification de la taille de l’espace interfoliaire au cours du temps, par rapport à la phase séchée : les réflexions caractéristiques de la distance interfoliaire sont en réalité des harmonique de la réflexion correspondant à la distance basale du matériau. Nous constatons par cette expérience que l’hydratation est progressive au cours du temps et que le maximum est atteint au bout de trois jours. Les diffractogrammes suivants sont obtenus :

Figure 23 : Diffractogrammes aux petits angles de la phase organo-minérale obtenue par addition retardée du polymère x2,3(N13,5)P23 immergée pendant différents temps dans une atmosphère à 100 %

d'humidité : avant immersion (a), 24h après immersion (b), 3 jours après immersion (c)

Figure 24 : Diffractogrammes aux petits angles de la phase organo-minérale obtenue par addition retardée du polymère x5(N5)P23 immergée pendant différents temps dans une atmosphère à 100 % d'humidité :

On observe que l’hydratation des phases organo-minérales est progressive et n’engendre pas de dégradation de la structure lamellaire du matériau. Par DRX dans ces conditions, on observe une augmentation de la distance basale dans le cas de l’intercalation des polymères x2,3(N13,5)P23 et x5(N5)P23.

Ce phénomène est réversible : le composé hydraté à 100 % est placé dans une atmosphère à humidité ambiante. On observe des craquelures macroscopiques sur l’échantillon et la diminution des distances basales mesurées par DRX pour retrouver la distance basale du composé avant hydratation : des diffractogrammes sont acquis à différents temps sur des composés laissés à l’air après une humidification à 100 %, on observe une diminution de la distance basale sur des temps cours : quelques dizaines de minutes (une demi heure) suffisent au composé à perdre son excédent d’eau :

Figure 25 : Diffractogrammes aux petits angles de la phase organo-minérale obtenue par addition retardée du polymère x5(N5)P23, humidifiée à 100 % et laissée sous argon à humidité ambiante pendant différents temps : avant immersion (a), à 100 % d’humidité (b), composé porté à 100% d’humidité puis laissé 30 min

à humidité ambiante (c), composé porté à 100% d’humidité puis laissé 2h à humidité ambiante (d)

On note que, pendant ces expériences, le composé est placé sous argon et ne subit pas la carbonatation par l’air.

D’autre part, la caractérisation des phases a été effectuée par RMN, comme précédemment sur

les phases C4AHx modifiée par l’ajout retardé de 2g/L des polymères x5(N5)P23,

x8,3(N5,5)P23, x6,7(N3,8)P114 et x3(N13,7)P23OH. Pour ce faire, la poudre du composite est introduite dans le rotor et humidifié par l’ajout d’une goutte de D2O, de sorte à former une pâte.

Les spectres d’aluminium et de TRAPDOR obtenus sont présentés sur les Figure 26 et Figure 27 :

Figure 26 : Spectre RMN de l'aluminium dans les composés humidifiés au D2O, synthétisés par addition retardée

Figure 27 : Spectres de différence obtenus lors de l'expérience TRAPDOR effectuée sur les composés humidifiés au D2O, synthétisés par addition retardée des polymères

La RMN de l’aluminium met en évidence que la position du pic d’aluminium ne dépend pas

non plus du polymère en présence de D2O : dans tous les cas, le maximum du pic est à

10,1 ppm. Cette valeur du déplacement chimique du pic de l’aluminium reste supérieure à celle observée dans la phase AFm sans polymère (9,3 ppm) et la présence de polymère influe sur l’environnement chimique de l’aluminium : le polymère reste à proximité des feuillets. D’autre part, nous observons la formation d’aluminium en environnement tétraédrique (d = 80 ppm) ce qui est caractéristique d’une dissolution de phase AFm dans les conditions de notre expérience. Ceci est un phénomène mineur et nous pouvons considérer que la majeure partie de l’aluminium reste dans les feuillets, et que nous continuons à travailler sur la phase polymère- AFm. Du point de vue des polymères, nous constatons un affinement des pics en TRAPDOR par rapport aux spectres de différences obtenus sur les composés séchés. Néanmoins, de même que dans le cas des phases polymère-AFm séchées, les protons dont le spectre est modifié par l’irradiation de l’aluminium restent préférentiellement ceux des greffons. Ce résultat est en bon accord avec l’hypothèse que le polymère prend, dans le composé humidifié, une configuration dans laquelle la chaîne principale serait « entourée » par les greffons. Ce sont ainsi les protons des greffons qui se trouvent préférentiellement à proximité de la phase minérale.

La phase HDL intercalée est donc sensible à l’humidité ambiante. La question est de savoir si l’augmentation de la taille de l’espace interfoliaire dans un milieu humide est directement liée au gonflement du polymère ou au caractère hygroscopique des feuillets minéraux. La phase C4AH19 est la phase connue la plus hydratée des composés de type C4AHx. En effet, les fortes

interactions électrostatiques au sein de ce composé impliquent que la distance entre les feuillets est limitée. La distance basale ne mesure pas plus de 10 Å : le composé n’accepte pas la présence de plus de molécules d’eau dans son espace interfoliaire. Néanmoins, une fois que le polymère est introduit entre les feuillets, le réseau des liaisons hydrogène est bouleversé et l’insertion des molécules d’eau dans l’espace interfoliaire devient alors plus facile. Les molécules d’eau pourraient alors gonfler le polymère et la distance interfoliaire augmenterait sous l’effet de la pression. Dans cette hypothèse, nous pouvons envisager que la pelote gonfle jusqu’à ce que le polymère ait atteint sa taille maximum : celle qu’il a en solution. Il convient alors de s’intéresser à la conformation du polymère dans l’espace interfoliaire. Ceci est l’objet du paragraphe IV.B.