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Chapitre 1 : Introduction

1.5 Les neuropeptides opioïdes

Les neuropeptides sont de petits composés qui, à l'instar des neurotransmetteurs, peuvent influencer la conduction de l'influx nerveux entre les neurones. Leur effet peut s'exercer à la manière d'un neurotransmetteur, d'un neuromodulateur ou d'un facteur neurotrophique (Graybiel, 1990; Zhang et al., 2006). À l'opposé des neurotransmetteurs, il n'y a cependant pas de mécanisme permettant la recapture et le recyclage des neuropeptides suite à l'activation du récepteur; ils sont dégradés par internalisation ou via des enzymes et doivent être synthétisés à nouveau dans le corps cellulaire (Roques, 2010).

Au niveau du cerveau, les GB correspondent à un des endroits les plus concentrés en neuropeptides, avec le striatum comme source de synthèse principale (Graybiel, 1986). Les trois neuropeptides striataux les plus connus sont le peptide neurokinine substance P et les peptides opioïdes enképhaline (ENK) et dynorphine (DYN) (Samadi et al., 2007; Huot et al., 2013).

Le striatum est l'une des structures du cerveau ayant le plus haut taux de peptides et récepteurs opioïdes (Steiner & Gerfen, 1998). La préproenképhaline-A (PPE-A) ou pré- enképhaline (pENK), le précurseur du peptide opioïde ENK, s'exprime dans les neurones striatopallidaux de la voie indirecte du circuit moteur des GB et peut générer la leucine (Leu)-ENK et la méthionine (Met)-ENK (Noda et al., 1982; Samadi et al., 2007; Huot et al., 2013). La préproenképhaline-B (PPE-B) ou pré-dynorphine (pDYN), le précurseur du peptide opioïde DYN, est retrouvé dans les neurones striatonigraux de la voie directe et se différencie en Leu-ENK, DYN-A, DYN-B, alpha- et beta- endorphine (Horikawa et al., 1983; Samadi et al., 2007; Huot et al., 2013).

L'action des peptides opioïdes se fait via l'activation de plusieurs classes de récepteurs opioïdes qui sont couplés à des protéines G. Les trois principaux sont μ, δ et κ (Samadi et al., 2006). Le récepteur μ est activé par les endorphines et est localisé dans toutes les structures des GB (Wang et al., 1993). Pour le récepteur δ, les ligands sont la Met-ENK et la Leu-ENK et il est retrouvé dans presque toutes les régions des GB, à l'exception de la

SNc (Quock et al., 1999). Activé par la DYN, le récepteur κ est également présent dans la majorité des structures des GB, sauf le GPe et le NST (Chavkin et al., 1982). Malgré l'affinité de chaque peptide pour un récepteur en particulier, il est intéressant de noter qu'ils peuvent également se lier aux autres types de récepteurs (Corbett et al., 2006). La signalisation des trois classes de récepteurs influence plusieurs processus incluant l'inhibition de : l'adénylate cyclase; des canaux Ca2+ voltage-dépendants et de la libération de transmetteurs, ainsi que l'activation : de la conductance du K+; de la MAPK et de la protéine kinase C (Samadi et al., 2006).

Implication des neuropeptides opioïdes dans la MP et la DIL

Plusieurs changements concernant les peptides et les récepteurs opioïdes ont été observés dans la MP et lorsque la DIL se développe. Comme mentionné précédemment, la lésion des neurones dopaminergiques induit une diminution des niveaux d'ARNm de pDYN et une augmentation de ceux de pENK (Cenci et al., 1998; Morissette et al., 1999; Meissner et al., 2003; Bishop et al., 2009). L'administration de la L-DOPA fait augmenter la quantité d'ARNm de pDYN, sans que ceux de pENK redescendent (Cenci et al., 1998; Morissette et al., 1999; Calon et al., 2002; Henry et al., 2003). En ce qui concerne les récepteurs, il fut observé chez le modèle du primate MPTP traité à la L-DOPA, pendant l'effet « ON » et dyskinétique, que la quantité de récepteurs δ dans le striatum était inchangé, mais que la signalisation contrôlée par ceux-ci était suractivée (Aubert et al., 2007; Hallett & Brotchie, 2007). Dans les mêmes conditions d'observations, les niveaux du récepteur κ étaient réduits dans le GPe et le GPi et la signalisation découlant de ceux-ci était également suractivée (Chen et al., 2005; Aubert et al., 2007). Une étude chez le rat lésé au 6-OHDA a démontré que les niveaux de récepteurs δ sont augmentés dans les cortex moteur et prémoteur des animaux dyskinétiques sacrifiés pendant l'état « OFF » comparativement à ceux non dyskinétiques (Johansson et al., 2001). En ce qui concerne les récepteurs κ dans les mêmes conditions chez le rat, il y a une diminution de ceux-ci aux niveaux du striatum et de la SN, mais pas de différence au niveau du GP (Johansson et al., 2001).

Le rôle exact des peptides opioïdes dans la MP et dans la DIL est encore aujourd'hui une question non résolue. Bien que les niveaux de ceux-ci augmentent dans les deux situations et que l'établissement d'une corrélation directe suggèrerait un effet causal (Henry et al., 2001), les résultats de certaines études vont à l'encontre de cette conclusion. Il n'y aurait peut-être pas de lien direct entre la DIL et la hausse des peptides opioïdes (Quik et al., 2002). En effet, il a été suggéré que la régulation à la hausse des peptides opioïdes serait plutôt une réponse compensatoire afin d'atténuer les changements pathologiques et de tenter de conserver l'homéostasie dans les GB, mais qu'avec la progression de la maladie et l'exposition répétée à la L-DOPA, ce mécanisme finirait par s'épuiser (Schneider et al., 1999; Meissner et al., 2003; Samadi et al., 2006). Un premier élément de preuve vient du fait que les antagonistes opioïdes augmentent la DIL chez le modèle de primate MPTP déjà dyskinétique (Samadi et al., 2003). Allant dans la même direction, il fut démontré que la morphine, un agoniste opioïde, peut diminuer la DIL (Samadi et al., 2004). De plus, l'administration de L-DOPA et de naltrexone, un antagoniste opioïde non sélectif, chez des singes parkinsoniens n'ayant reçu aucun traitement autre que la toxine MPTP (de novo) a bloqué pendant 14 jours l'effet antiparkinsonien du traitement et lorsque le blocage cessa, les effets thérapeutiques ont été accompagnés d'une DIL (Samadi et al., 2005). Au niveau de la dégénérescence des neurones dopaminergiques, il fut récemment montré qu'une surexpression de pENK au niveau du striatum chez des souris MPTP pourrait avoir un effet neuroprotecteur et augmente l'activité locomotrice (Bissonnette et al., 2014). Donc, l'activation du système opioïdergique striatal aurait un effet potentiel protecteur et compensatoire au niveau de la MP et des effets secondaires de la dopathérapie.

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