I. Les plantes face aux sollicitations mécaniques
I.1 Nature des signaux mécaniques perçus par la plante
Dans leur environnement naturel, les plantes sont soumises à deux types de signaux
mécaniques : des signaux mécaniques internes (pression de turgescence, poids propre d’un
organe…) et externes (vent, animaux, nature du sol, présence d’un obstacle). La capacité des
plantes à percevoir et à répondre à ces stimuli est primordiale, afin de modifier de manière
appropriée leur physiologie et leur développement.
I.1.1 Signaux mécaniques internes
Lors de leur croissance, les plantes font face à des sollicitations mécaniques internes, qui
sont perçues à différents niveaux d’organisation. Dans un état physiologique normal, les
cellules se trouvent en état de turgescence constant. La pression de turgescence exerce une force
homogène et multidirectionnelle sur les parois cellulaires et est le moteur de la croissance
cellulaire (Schopfer, 2006). Toutefois, les forces générées par cette pression de turgescence
diffèrent suivant la forme et la structure de ces parois. Si on considère une paroi structurellement
homogène, sans contraintes extérieures, la croissance sous la pression de turgescence devrait se
faire de manière isotrope et entraîner la formation d’une sphère. Les propriétés mécaniques de
la paroi peuvent varier au sein d’une cellule et sont principalement déterminées par
l’arrangement spatial des microfibrilles de cellulose qui lui confèrent une forte résistance à la
déformation dans des directions privilégiées. Typiquement, dans les couches récemment
déposées des parois primaires d’une cellule en élongation, les microfibrilles de cellulose sont
orientées perpendiculairement à l’axe longitudinal de la cellule. Cette orientation particulière
détermine le sens de la croissance cellulaire, dans ce cas, selon l’axe longitudinal. Les propriétés
mécaniques internes de la paroi contribuent donc à l’orientation de la croissance cellulaire.
Au sein d’un tissu organisé, les cellules, étroitement liées entre elles, interagissent
mécaniquement avec les cellules avoisinantes (Schopfer, 2006). Ces contraintes, produites par
un différentiel de croissance des cellules sont appelées autocontraintes (Fournier et al., 1994;
Moulia, 2000). Des études suggèrent que la mécanoperception de ces sollicitations internes au
sein d’un tissu jouerait un rôle clé pour la synchronisation de la morphogénèse (Moulia et al.,
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des microtubules
1était parallèle à l’orientation des autocontraintes maximales rencontrées au
sein du méristème apical caulinaire (Figure 1 A) (Hamant et al., 2008). En modifiant ces
signaux mécaniques par ablation de cellules internes du méristème primaire, les auteurs ont
observé une réorientation des microtubules parallèlement à la direction des signaux. Plus
récemment, il a été montré que les cellules pouvaient également ressentir les signaux
mécaniques générés par leur propre forme. Ainsi, la forme des cellules en puzzle crée un modèle
de contraintes qui contrôle l’orientation des microtubules, guidant le renforcement de la paroi
cellulaire (Figure 1 B) (Sampathkumar et al., 2014).Ces résultats suggèrent que les signaux
mécaniques internes régulent la morphogenèse en coordonnant l’orientation des constituants du
cytosquelette.
Figure 1 : Rôle des microtubules dans la régulation morphogénétique par les signaux mécaniques.
(A) Relation entre l’orientation des contraintes les plus fortes et la direction des microfibrilles dans le
méristème d’Arabidopsis thaliana. D’après Hamant et al. (2008). (B) Les forces mécaniques régulent
la forme des cellules en puzzle de l’épithélium des cotylédons d’A. thaliana, en contrôlant l'organisation
des microtubules et le dépôt de cellulose. D’après Sampathkumar et al. (2014).
Enfin, à l’échelle de l’organisme entier, les plantes sont soumises en permanence à la
gravité terrestre. Ainsi, les variations du poids propre des organes de la plante au cours de sa
croissance engendrent des contraintes au sein des tissus sous l’effet de la gravité. Par exemple,
la croissance des branches est modifiée par le poids des fruits (Alméras et al., 2004). Si leurs
tiges sont inclinées, les plantes sont capables de se redresser en fonction du signal gravitationnel
perçu. En combinant des approches de cinématique du redressement et de modélisation
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Les microtubules, constituants principaux du cytosquelette, sont notamment impliqués dans l’organisation du dépôt des microfibrilles de cellulose dans la paroi, et plus particulièrement dans la localisation et le guidage de la cellulose synthase, site de la synthèse de la cellulose.