Naissance et petite enfance dans le monde romain
1. Natalité et société
Dans la société romaine, concevoir un enfant était une tâche sérieuse. La morale traditionnelle faisait de la procréation la finalité essentielle du mariage :
« C'est en vue d'avoir des enfants et de s'assurer une postérité, et non pas simplement pour le plaisir physique, que la plupart des femmes sont mariées» (Soranos, Gynaecia, 1.11).
La maternité était aussi un devoir civique. Tous les cinq ans, les censeurs rappelaient à chaque homme qu'il était marié pour avoir des enfants (procreandorum liberorum causa). Le mari pouvait ré pudier sa femme pour cause de stérilité. Vers la fin de la République, ce devoir semble avoir suscité de moins en moins de vocations spontanées. Pour des raisons économiques et sociales, les familles aisées ne cherchent alors plus à avoir une nombreuse descendance. En 131 avant J.-C., le censeur Metellus Macedonicus ne craint pas de tenir ce discours pour exhorter les Romains à se marier :
« Si nous pouvions vivre sans épouse, citoyens, nous nous passerions de tout cet ennui. Mais puisque la nature a imposé aux générations de ne pouvoir ni vivre avec elles sans trop de désagrément, ni vivre du tout sans elles, il faut regarder le salut et l'avenir plutôt qu'un plaisir sans durée» (Aulu-Gelle, Nuits attiques, 1.6.1-2).
Auguste tente d'enrayer la chute du nombre des naissances en instaurant une politique nataliste; en 18 avant J.-C. et en 9 de notre ère, il met en place un appareil juridique qui pénalise le célibat et l'adultère en offrant divers privilèges aux parents d'au moins trois enfants (jus trium liberorum). Ces lois (Lex Julia de maritandis ordi
nibus, Lex Julia de adulteriis coercendis, et Lex Papia Poppaea)
furent renouvelées et complétées par ses successeurs, mais sans
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sir à encourager la natalité (Eyben 1980-1981 ; Olsen 1999 : 139-184; Treggiari 1991 : 60-80).
2. La conception
a. A quel âge se marie-t-on?
A Rome, il était commun de se marier jeune. On estime au jourd' h�i que la �lu part des jeunes filles se mariaient vers l'âge de 16 ans, mais une- umon pouvait être légalement conclue dès 14 ans pour le� garçons_ et 12 ans seulement pour les filles (Saller 1994 : 25-42). Bien conscients des dangers d'une grossesse précoce, les médecins r�comn:iandai�nt instamment aux familles d'attendre que la jeune fil_le soit pubere ava?t de la donner en mariage. Pas tant pour des raisons morales, mais parce qu'une grossesse prématurée pourrait compromettre sa fonction reproductrice. L'accouchement ferait cou rir de graves dangers à la trop jeune mère
« en tous cas, au moment de l'accouchement, il (le foetus) mettrait en péril la fille enceinte, en se frayant un passage à travers la zone d e l'orifice utérin, encore étroite et incomplètement formée » (Sora nos, Gynaecia, 1.10).
Soranos note que les règles apparaissent généralement vers la quatorzième année, mais conseille prudemment d'attendre encore quelques années pour éviter tout risque. D'autres médecins, tel Rufus d'Ephèse, répètent les mêmes recommandations. Leur insistance suggère �ue Ales intérêts politico-familiaux durent souvent passer avant le b1en-etre de la future épouse (Gourevitch 1984: 109-111).
b. Quand faut-il concevoir un enfant?
Aujourd'hui nous savons que la période de fécondité maxi ma�e chez la �emme intervient vers le treizième jour après les règles. Mais les Anciens plaçaient cette période à la fin de la menstruation. Faute de connaître le phénomène de l'ovulation, les médecins esti maient que les règles étaient une sorte de purification (katharsis) ou de purge (purgatio) nécessaire à l'équilibre du corps féminin. Avant les règ�es, �xplique Soranos, l'utérus s'alourdit progressivement, co�gestlonne par le sang qui s'y accumule. A l'issue de cette purifi cation, la matrice allégée est censée offrir le terrain idéal pour une
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conception, un terrain moyennement chaud, moyennement humide, · où la semence masculine peut se fixer.
Cette compréhension erronée du cycle �éminin f�t lo�rde de conséquences. En appliquant les bons conseil� des me?ecms, le: femmes pratiquaient une contraception involo�taire ; certa1�es ont du se croire stériles parce qu'elles ne se retrouvaient pas encemtes
mal-gré de multiples tentatives soigneusement préparées. . .
Pour reprendre courage, elles pouvaient tenter d�-smvre dive�s traitements médico-magiques, composés de sang de hevre, de testi cules de coq, de poudre de matrice de hase ... (Vons 2000: 1�4-178). La sagesse populaire situait la période la pl�s �avorable au p_rmtemps et au moment de la pleine lune, parce que, d1sa1t-on, les qualités de la semence augmentent jusqu'à la pleine lune et diminuent ensuite.
Soranos cite ces croyances, mais pour mieux les balayer « II n'est pas besoin de longs raisonnements pour ridiculiser ces po sitions : le témoignage des faits suffit. Nous observons en effet des grossesses en cours ou arrivant à terme à toutes les époques de l'année» (Gynaecia, 1.12).
Pour lui, la période propice se situe juste après les règles, « au·
moment où se manifeste un élan instinctif vers l'union intime». Le corps féminin, semblable à la terre nourricière, réclame encore quel ques soins, même si la notion de plaisir féminin suscite beaucoup de méfiance:
« le cultivateur nettoie d'abord sa terre, en fait disparaître tous les corps étrangers, et alors seulement l'ensemence; de même nous re commandons de n'aller au-devant de la semence d'où doit naître un
homme qu'avec un corps préalablement reposé» (Gynaecia, 1.12).
Les deux conjoints peuvent s'y préparer en observant dans les
semaines qui précèdent un régime de vie équilibré, en évitant les aliments gras et l'excès de vin qui alourdissent le corps et le n�ndent déficient. Oribase (IVe s. ap. J.-C.) propose à l'homme qm veut émettre une semence vigoureuse de consommer des aliments nourris sants et flatulents qui augmentent la quantité de sperme, comme les oignons, les pois chiches, les fèves, les poulpes et les pignons �oux ... (Oribase, Coll. med. 14.66 = éd. Daremberg I� 600�60�), tandis que Pline lui recommande de manger du fenoml (Histoire naturelle, 20.157).
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Quand l'enfant, après plusieurs tentatives, ne s'annonçait tou jours pas, le secours d'une divinité était bienvenu (Aubert 2003). En Gaule romaine, le pèlerin pouvait se rendre dans l'ùn des nombreux sanctuaires associés au culte de l'eau. Consacré à la déesse Sequana, le complexe religieux des Sources de la Seine a ainsi livré une grande quantité d'ex-voto concrétisant le désir d'avoir un enfant, ou offerts en remerciement pour une naissance ou la guérison d'un nou veau-né : des représentations de seins et de bassins féminins sculptés dans la pierre, le bois ou en tôle de bronze, des figures de bébés em maillotés, généralement en calcaire (Coulon 1994: 14-17; Deyts 2003).
3. La grossesse
a. La grossesse et la santé
Dans l' Antiquité déjà, on se demandait s'il fallait considérer la grossesse comme un événement favorable à la santé de la femme voire nécessaire à son équilibre, ou, au contraire, comme une sorte d; longue maladie. Les avis des médecins étaient partagés. L'opinion de Soranos est nuancée. Il classe la grossesse parmi les événements naturels, tout en l'assimilant à une longue maladie parce qu'elle en traîne divers problèmes de santé plus ou moins graves, de l'affaiblissement au vieillissement prématuré.
« Ce n'est pas forcément parce qu'une chose est utile qu'elle est aus si salutaire : ainsi menstruation et conception sont utiles en vue de la procréation d'êtres humains, sans être pour autant salutaires aux femmes enceintes» (Gynaecia, 1.13).
Il va même plus loin. Il est l'un des premiers à oser affirmer qu'une femme peut avoir une santé parfaitement équilibrée même en étant vierge ou sans enfants, en somme, qu'elle peut exister hors de son rôle traditionnel d'épouse et de mère (Gourevitch 1984: 105-108).
b. La formation de l'embryon
Soranos divise la surveillance de la grossesse en trois étapes. Le souci du premier mois consiste à conserver la semence déposée dans l'utérus. La conception ne se produit pas instantanément, elle
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consiste en « la rétention prolongée de la semence» (Gynaecia,
1.14). Il faut donc veiller à ce que la matrice reste bien f�rmée po�r
que le sperme puisse s'y fixer et subir cette tra�sform�tion myste
rieuse, souvent comparée à une sorte de coagulation, qm en fera peu
à peu un être propre, le foetus. . .
Les médecins antiques pensaient que la femme avertie pouvait
sentir son utérus se refermer. Cette idée reçue est associée à la croyance que l'utérus est un organe doué d'une sensibilité particu lière, capable de se déplacer dans le ventre �n causant tou�es sortes de malaises. Une longue tradition lui attribuait même une vie propre, indépendante de la volonté de la femme, jusqu'à le comparer à « un·
animal dans l'animal», selon l'expression d' Arétée de Cappadoce au Ier siècle de notre ère (Signes et causes des maladies aiguës, 2.11).
La femme porte ainsi toute la responsabilité du succès de la
conception. Pour retenir la semence, on lui conseil�e d' ét_endre aus
sitôt les jambes en les croisant et de se reposer. Apres avmr_ passé un
ou deux jours allongée au lit, la femme peut se lever, mais en �es
pectant un mode de vie approprié. Soranos rec�mmand� d'éviter
« toute agitation du corps et de l'esprit» qm pourrait �auser
l'expulsion de la semence fraîchement coagulée, sans oubher les coups, les chutes, la fatigue, et même la toux, les étei:nuements et
l'utilisation de sièges trop durs ... (Gynaecia, 1.16). Il aJoute que les
rapports sexuels sont aussi à proscrire, et cela j�squ'à la fin de la
grossesse. Au bout de quelques jours, la coagulation de la semence
est achevée, l'embryon commence à se former.
« Quant apparaissent, au dixième jour de la co�ce�tion, de� maux de tête, des vertiges et des éblouissements, le degout des ahmen�s, le mal de coeur, c'est signe qu'un être humain est en formation»
(Pline, Histoire naturelle, 7.41).
c. Envies et nausées
La surveillance de la seconde étape de la grossesse vise surt�ut à
soulager les troubles digestifs des premiers mois (�ausées, �ala1�es, aigreurs), et les fameuses envies (en gre� kitta _ou kis�a, en latm pi�a) d'aliments inattendus. De quoi pouvait av01r envie une Romame enceinte? De goûts acides, nous dit Soranos
« les femmes en proie à cet état ont l'estomac comme chaviré, avec
Naissance et petite enfance dans le monde romain 273 trop d'humeurs, et présentent des nausées ( ... ) mais aussi des envies pour des mets insolites - terre, charbon, vrille de vigne, fruits verts et acides ... » ( Gynaecia, 1.17).
Mais à celles qui mangeraient de la terre ou du charbon, attention aux marques de naissance sur la tête du bébé! (Hippocrate, De la
superfétation, 18). Certains excès passaient pour être particulière ment néfastes. Selon Pline, là femme enceinte devait s'abstenir de consommer des aliments trop salés sous peine de voir son bébé naître sans ongles (Pline, Histoire naturelle, 7.42).
Les médecins antiques expliquent ces symptômes de dégoût et d'envies par le déséquilibre qui se produit dans le corps de la femme au début de la grossesse. L'embryon est encore trop petit pour se nourrir de tout le sang qui continue de s'accumuler, comme chaque mois, dans le corps maternel, et la femme a tendance à manger pour deux, ce qui encombre son estomac.
Pour calmer ces troubles, le seul remède est la diète. Soranos le répète : « On ne tiendra aucun compte de ce qui se dit, à savoir qu'à deux êtres vivants il faut plus de nourriture». Il prescrit de ne consommer que des aliments légers, digestes, comme la volaille, en petite quantité, et d'éviter les plats difficiles à digérer, comme les crudités, qui peuvent être irritantes. Avec beaucoup de sens psycho logique, il autorise les femmes à suivre leude limite rs envies, mais à condition
r la quantité des produits nocifs et de les prendre pendant le
repas, associés à de la nourriture saine pour qu'ils ne lèsent pas l'estomac.
d. L'imprégnation par le regard
On croyait aussi que l'état psychologique de la mère pouvait influencer la formation de l'embryon. Soranos rend son lecteur at tentif aux conséquences des émotions maternelles. Il raconte com ment un tyran de Chypre très laid força son épouse à contempler de belles statues au cours de leurs rapports amoureux afin d'éviter de transmettre sa disgrâce physique à sa progéniture. L'entreprise fut couronnée de succès, puisqu'il eut, dit-on, de beaux enfants (Gynae cia, 1.12). D'autres exemples démontrent les dangers du phénomène. La vision d'un singe peut causer la naissance d'êtres simiesques; Soranos conseille même aux femmes « d'arriver sobres au rapport
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sexuel», parce que les visions extravagantes que procure l'ivresse
pourraient influencer la formation du foetus. .
Comment comprendre le succès de cette croyance qm perdure jusqu'au XIXe siècle? On pouvait lui tro�v�r une explicatio� ra�ion nelle dans les théories antiques sur la vision. Pour les Epicunens, tous les corps émettent un flux ininterrompu d'im�ges
?u
simulacresqui parviennent aux yeux et produisent la sensation vi�uelle_ (A,�lu Gelle, Nuits attiques,
5.16.2-3).
Le corps de l'embryon nsquait � etre transformé par une sorte d'imprégnation par le regard de sa me�e au cours de la grossesse. Mais per�onne n'a vrai�en� e�sayé d'e�phquer comment les simulacres pouvaient passer de 1 oeil a la matnce pour y modeler la semence (Gourevitch1987).
e. Fille ou garçon?
D'autres croyances entouraient la grossesse. A défaut de pou
-voir déterminer le sexe de l'enfant, on essayait de le deviner en ob servant le corps de la femme enceinte. En vertu de la soi-disante supériorité biologique masculine, les méde�ins hippocra�iques re connaissaient la femme portant un garçon a sa bonne mme, celle enceinte d'une fille à sa pâleur et ses nausées. Les mouvements du bébé étaient aussi jugés instructifs : déjà développés a� bout de
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jours, les garçons avaient la réputation de bouger plus v10lemrnent et plus fréquemment que les filles, formées se�lement au �out de_90
jours, et déjà moins vigoureuses. Le côté dr01t étant associé au pnn cipe masculin, le gauche au fé�nin, un n,iamel�n gauche plus vo_lu mineux devait annoncer la naissance d une fille. Un test rapideconsistait à faire un petit pain avec de la farine mêlée au lait de la future mère. Si la boule durcissait à la cuisson, le bébé serait un gar çon, l'apparition d'une fente annonçait une fille (Hippocrate, Mala dies des femmes,
216
=éd.Littré VIII416-417).
Soranos rejette la validité de toutes ces idées reçues ;
l'observation des faits suffit à les contredire :
« ces opinions ressortissent à la croyance_ p_lutôt qu'à la véri:é, da�s la mesure où nous observons, dans la réahte constatable, tantot le re sultat indiqué, tantôt le résultat contraire » ( Gynaecia, 1.15).
f La durée de la grossesse
Le souci majeur de la dernière étape de la grossesse était
Naissance et petite enfance dans le monde romain 275 �'é�iter un accouchement prématuré. Les médecins croyaient en l existence de deux types de grossesse, une courte de sept mois 1 ongue e d neu f , d' a ix m01s pl. e. ms. Le bébé né à sept mois f ·t , , une
d' , . . , . , ru1 a
t�rme un �ycl� cou�t, eta1t J�g� fragile, mais viable, tandis que
1
_ e�fant né a hmt_ m01s, prodmt machevé d'une grossesse longue, eta1t réputé non viable. Cette opinion avait l'avantage d'offrir un explicatio� déculpabilisante à la mort d'un nouveau-né. Si J'enfan� succombait, la sage-femme et le médecin pouvaient le justifier en affirmant qu' i_l s' �gis sait d'un enfant de huit mois, quitte à juger que la femme avait du se tromper sur le moment de la conception (Han
son
1987).
. Où_ plaçait-a� le terme d'une grossesse normale? Pour les ju-nstes antiques, la reponse est claire : la durée maximale d'une gros sesse est de dix mois. On connaît toutefois des exceptions. L'empereur Hadrien aurait eu la générosité d'admettre qu'une gros sesse pouvait durer davantage dans le cas d'une femme « d'une chasteté indiscutable » qui accoucha onze mois après la mort de son mari ... (A ulu-Gelle, Nuits attiques,
3.16.12).
4.L'accouchement
a. La sage-femme
A Rome, la future mère accouchait chez elle, assistée d'une sage-femme et de quelques aides, des parentes ou des voisines. Les inscriptions désignent ces praticiennes de différents noms suggérant des compétences plus ou moins étendues. Certaines femmes étaient s_implement ?es �ccoucheuses (opstetrix ou obstetrix), d'autres, qua hfiées de medecms (medica ou iatroma, iatromaea et iatromea, déri vés du grec iatros le médecin), pratiquaient probablement aussi les accouchements. La plupart avaient un statut modeste ; esclaves ou affranchies, elles étaient attachées au service de grandes familles aisées (Gourevitch 1996 : 2086-2092). Quelques-unes, toutefois, ont certainement exercé à leur compte, comme Julia Piéris, obstetrix à Trèves qui, dit son épitaphe, « ne fit jamais de mal
à
personne » ( CILXIII 3706).
Soranos attend d'elles des compétences d'un niveau élevé:
« Le sujet apte à devenir sage-femme doit posséder une instruction
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travail, de la discrétion : il lui faut une sensibilité vive, des membres bien proportionnés, de la robustesse, certains auteurs réclament aussi des doigts longs et fins, aux ongles ras» (Gynaecia, 1.2).
Des exigences qu'il tient à préciser plus loin:
« Nous appelons sage-femme parfaite celle qui s'est exercée dans toutes les parties de la thérapeutique : il faut en effet traiter certains cas par le régime, d'autres par la chirurgie, tandis que d'autres en core s'améliorent grâce à des médicaments -elle est capable de faire des prescriptions, de voir le général et le particulier, de rassurer les patientes, compatir à leurs souffrances - sans avoir eu forcément des enfants elle-même» (Gynaecia, 1.2).
Le jour venu, la sage-femme devait avoir à disposition de l'eau chaude et de l'huile d'olive, des compresses, des éponges douces, des paquets de flocons de laine brute, un coussin et des bandelettes
pour le nouveau-né. Mais la pièce essentielle de l'équipement des
plus fortunées était un fauteuil sur lequel avait lieu l'expulsion. Le siège était découpé en forme de demi-lune, avec un dossier incliné pour que la parturiente puisse s'appuyer, et des accoudoirs en forme
de I1 (pi) à agripper.
Un fauteuil de ce type est figuré sur le relief en terre cuite pro venant de la tombe d'une sage-femme, Scribonia, à Ostie (1ère moitié du ne s. ap. J.-C.). La femme est installée sur le fauteuil et se tient aux poignées. Debout derrière elle, une assistante la tient solidement pour l'empêcher de glisser. Devant elle, la sage-femme est assise sur un tabouret bas. Elle a les bras nus pour être plus libre de ses mou vements. Elle est en train de vérifier de la main l'état d'avancement du travail, mais elle évite de regarder sa patiente comme le recom mande Soranos
« que la sage-femme se garde de fixer avec insistance les parties gé nitales de la femme en couches, afin que par pudeur celle-ci ne
contracte son corps» (Gynaecia, 2.1).
Les cheveux de la parturiente sont dénoués afin qu'aucun lien n'entrave magiquement le passage de l'enfant. A défaut de fauteuil
obstétrical, l'accouchement pouvait aussi se faire sur un lit ou un