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n°3, rue de l’Argenterie, Hôtel Pomier-Layrargues

Eglé Leenhardt (1818-1893), sœur de Charles, épouse d’Eugène André Pomier Layrargues 9 n°16, rue du Clos René Emile, Maurice et Jules Pomier-Layrargues

(1849-1920) 10

n°5 bis, place de la Croix de Fer,

(place de l’Observatoire, actuelle place Laissac)

Cécile Castelnau (1832-1902)

11 n°19, rue Durand Max Leenhardt (1853-1941)

12

n°1, rue Nationale

(actuelle rue Foch)

Hôtel Castelnau

Emile Castelnau (1836-1902),

13

rue Dauphine

(intégrée dans la rue Saint-Guilhem)

Maison Bazille

Pierre Leenhardt (1853-1913), fils de Charles Leenhardt

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n°7, rue des Casernes)

(actuelle rue Marceau)

Maison Bazille

René Leenhardt (1828-1886) (docteur en médecine)

Le plaisir de la table et des yeux est tout aussi grand lors des visites à l’agronome Gaston Bazille (1819-1894), qui occupe le luxueux hôtel Périer situé au n° 11 de la Grand-Rue (aujourd’hui Grand-Rue Jean Moulin). Ces visites sont aussi l’occasion de créer ou d’alimenter un nouveau réseau d’amis et de connaissances, extérieur à la famille. C’est très certainement lors d’une de ces civilités qu’il peut rencontrer le propriétaire de l’hôtel d’en face, qui n’est autre que

le grand collectionneur Alfred Bruyas, parent par alliance120. Bien qu’aucune lettre ne soit retrouvée pour confirmer des échanges suivis entre le peintre et le collectionneur, nous avons la certitude que Max Leenhardt connaissait les œuvres conservées dans l’hôtel Plantade, situé au numéro 8 de la Grand-Rue121. Une phrase perdue dans un courrier du peintre nous révèle la proximité des échanges entre les deux hommes : « La mort de M. Bruyas m’a bien peiné 122», et nous confirme au travers de quelques mots une parfaite connaissance des chefs-d’œuvre amassés par l’érudit « J’espère qu’il a tout laissé en règle pour nous assurer sa collection. »123. Ceci nous pousse à penser qu’une véritable intimité intellectuelle existe entre eux. La similitude de leur conception de la beauté de la nature tend à corroborer cette proximité de pensée. Elle se construit au fil de lectures communes ou de discussions notamment autour des écrits de Victor Cousin, dont ces passages expriment leur idée : « En s'élevant donc par l'art, on s'élève pour l'art, qui nous offre les degrés pour monter à Dieu et nous révéler à lui, non à la froide vanité d'un certain monde, auquel on a déjà assez donné pour lui appartenir ! […] Le peintre avec sa peinture s’est souvent plus rapproché de Dieu que nous, quand il est peintre. Quoi qu'il en soit, à celui-là le sentiment véritable et le génie complet de son Art, à la fois poète, philosophe, grand peintre. 124» La proximité des familles Bruyas, Leenhardt et Bazille s’affirme par l’adhésion de Gaston Bazille, Abel Leenhardt et Alfred Bruyas aux mêmes comités et associations locales, dont la Société Artistique de l'Hérault125 et de la Société des Beaux-Arts de Montpellier. Nous constatons que les noms d’Abel Leenhardt, de Jules Leenhardt, de Gaston Bazille, d’Alfred Westphal, sont mentionnés dans les comités fondateurs des principaux cercles et sociétés scientifiques, culturelles et sociales locales. Ils y côtoient d’autres personnalités de la vie locale et parfois nationale, dont Henri Marès, Alexandre Cabanel… Ces personnages marquants de la vie locale

120 La famille catholique du banquier Louis Bruyas se trouve liée en 1867 aux Bazille suite au mariage conclu entre Marc Bazille et Suzanne, fille du banquier André Tissié, associé des Bruyas. Leur fils, Alfred Bruyas (15 août 1821 – 1er janvier 1877) se consacre à la promotion et la collection d'œuvres d'artistes contemporains.

121 Grace à l’inventaire testamentaire, rédigé le 20 novembre 1876, nous avons une idée précise des œuvres présentes dans la collection d’Alfred Bruyas. C’est une soixantaine de tableaux et près de soixante-dix-huit dessins, de Camille Corot, Thomas Couture, Eugène Delacroix, Narcisse Díaz de la Peña, Gustave Doré, Théodore Géricault, Dominique Ingres, Jules Laurens, Charles Matet, Jean-François Millet, Théodore Rousseau, Eugène Fromentin, Philippe-Joseph Tassaert, Marcel Verdier, Constant Troyon, et encore Gustave Courbet, qui ont pu être observés par le jeune Max Leenhardt sur les murs de l’hôtel Plantade. Il légua sa collection composée de soixante tableaux, soixante-dix-huit dessins, et dix-huit bronzes de Barye au musée.

122 Archives privées, Correspondances de Max Leenhardt à sa mère du 5 janvier 1876, p. 4, Coll. G. J., France, n° inv. JG 0052 à 0053 P.02 123 Ibid. A travers l’inventaire de la donation Bruyas, nous avons une idée des œuvres admirées par Max Leenhardt durant sa jeunesse, et qu’il retrouva sur les murs du Musée Fabre quelques années plus tard. Ce sont des œuvres de Corot, Millet, Rousseau, Troyon, Fromentin et Courbet.

124 BORDES Philippe, JOURDAN Aleth, Courbet à Montpellier. Catalogue d’exposition, Musée Fabre, Montpellier, Ville de Montpellier, Comité du millénaire, 5 novembre -29 décembre 1985, p. 27

125 Alfred Bruyas appartient à la Société des amis des arts de Montpellier qu’il s'efforce de soutenir depuis 1845, d’après, BERNIER Georges, BERNIER Rosamond, L’œil, n°443, 1992, p. 24.

montpelliéraine semblent avoir souvent l’occasion de converser à propos de passions communes, parfois en présence du peintre.

La disparition de Frédéric Bazille affecte tous les membres de la famille. Max Leenhardt trouve un réconfort salvateur auprès de son petit-cousin maternel, Eugène Castelnau (1827-1894), président de la Société Artistique de l'Hérault à ce moment.

Figure 16 : Liens de parenté entre Max Leenhardt et Eugène Castelnau, d’après la Base Geneanet du 13/01/2016

Cet ancien élève de Charles Gleyre (1808-1874), doué d’un sens aigu de la psychologie, utilise le don artistique du jeune homme pour le sortir de sa dépression en l’attirant dans un périple au cœur de l’Italie. Avec obstination et ténacité, il le soutient, endossant tour à tour le rôle de professeur de peinture, de conseiller ou de chargé de relations commerciales. Il lui décroche des commandes officielles avec l’appui de son frère Albert Castelnau, alors député de l'Hérault.

Au même moment Gaston Bazille126 prend volontairement de nombreux engagements publics tant au niveau local, dans des missions de conseiller municipal à l’urbanisme, qu’aux niveaux national et internationales en tant que sénateur de l'Hérault (1879-1888) et président de la Société Centrale d'Agriculture de l'Hérault, pour lutter contre le phylloxéra, en compagnie de Gustave Planchon127 et de Jules Lichtenstein128. Peu d’éléments permettent d’affirmer que

126 Selon le Dictionnaire des Parlementaires français (1789-1889), rédigé par Adolphe Robert, Edgar Bourloton et Gaston Cougny, nous trouvons dans le tome 1 que Gaston Bazille (1819 – 1894) père de Frédéric Bazille, fut président de la Société Centrale d'Agriculture de l'Hérault avant de devenir membre du Conseil supérieur de l'agriculture et du commerce. Il est élu sénateur de l’Hérault, le 5 janvier 1879. Ami de Gustave Planchon, il devient propriétaire du domaine de Saint-Sauveur où il mit en pratique les premiers essais contre le phylloxéra.

127 Gustave Planchon (1833-1900) est pharmacien, professeur agrégé de médecine à l’Université de Montpellier. Il est le frère de Jules Planchon (1823-1888) découvreur du phylloxéra.

128 Jules Lichtenstein (1818 – 1886) est apparenté par sa femme (Eugénie) à la famille Bazille. Il fut un naturaliste et entomologiste renommé pour sa découverte du puceron du phylloxéra. Il publia de nombreux ouvrages en tant que membre de l’Académie de Montpellier (1883).

l’artiste reçoit directement un quelconque appui de Gaston Bazille. Toutefois, il est troublant de croiser le nom de ce notable dans certain jury de concours de commande publique auxquels l’artiste participe. Par ailleurs, il apparaît impossible que celui-ci n’engage aucune intervention pour soutenir l’ami intime de son fils disparu. Les échanges épistolaires sont eux-mêmes exempts de toute information à ce sujet. Seul les choix de Max Leenhardt de travailler sur la lumière et certains sujets (hérons, nègre…), peuvent être perçu comme un écho aux recherches engagées par Bazille. Du moins, Gaston Bazille peut-il en avoir cette perception, et ressentir soudain le désir de jouer les mécènes ?

Nous pouvons aussi souligner qu’il a toutes les raisons de porter sur le jeune artiste un regard paternel, étant donné qu’il est uni à Camille Vialars129, dont le frère Eugène130 a lui-même épousé Eglé (Antonie) Leenhardt, sœur d’Abel Leenhardt. Deux unions qui rapprochent leurs familles. De nombreuses allusions à des séjours à Bagnères-de-Luchon131 chez les Vialars attestent l’intimité des deux familles.

Figure 17 : Liens de parenté entre Max Leenhardt et Frédéric Bazille, d’après la Base Geneanet du 13/01/2016

Il est très probable que ce soit auprès de ce fervent amoureux de la botanique que le peintre a découvert par ailleurs les sciences de la terre. Toutes les visites aux Bazille sont autant d’occasions de découvertes d’animaux ou de végétaux, en compagnie de Jules et de Gustave Planchon, de Gaston Bazille et de Jules Lichtenstein (1818-1886)132, dont les campagnes sont voisines sur la butte d’Aiguelongue. En compagnie de ces parents, le peintre parcourt la garrigue et les vallons des environs de la ville, finissant par en connaître le moindre muret, bosquet ou sentier, pour en conter toute la beauté sans la dénaturer. En ce temps-là, les chemins de

129 Camille Vialars (1821-1928) est originaire de Bagnères-de-Luchon.

130 Eugène né Vialars devenu Pomier-Layrargues par ordonnance royale, décède en 1873.

131 De nombreux séjours sont évoqués dans la correspondance du peintre, depuis une lettre à sa grand-mère le 06 août 1864, de Luchon (n° inv. JG 008 à 009), jusqu’à un séjour estival mentionné dans son journal de 1894-1910, dans lequel il fait état d’un départ pour Luchon le 1er juillet 1896 (n° inv. Tome I, N. H. 0000-J02 à 0132-J02.). 132 Il est l’instigateur de la création de la Compagnie des Salins du Midi,

campagne n’ont pas de nom. En partant du chemin de la Justice, il faut emprunter le chemin creux de Méric, laisser à gauche la Campagne Planchon, pour atteindre la crête de Méric avant de redescendre par Maillac, propriété des Lichtenstein133. A cette date, le chemin de la Justice134

s’engage dans la rue de Ferran, étroite et sinueuse, flanquée de murs de pierres sèches, pour découvrir l’entrée de la Campagne Planchon qui résiste tant bien que mal à la pression immobilière, et arriver enfin au parking du parc de Méric. Quant à la campagne de Maillac, elle est doucement grignotée par les lotissements et disparaît dans un dédale de ruelles.

Ce ne sont pas les seuls membres de la famille que Max Leenhardt fréquente régulièrement, sur Montpellier et ses environs. En effet, son père Abel est le sixième enfant d’une fratrie comprenant neuf frères et sœurs : l’aînée (Eglé) Antonie (1818-1893)135, puis Charles (1820-1900)136, suivi d’Antoine (1821- ?)137, Henri (1822-1904)138, Inès (1833-1878)139, René (1835-1915)140 et le dernier André (1838-1916)141. De plus, tous eurent tous une nombreuse descendance. Le nombre de cousins germains au premier degré s’élève à une vingtaine d’individus, implantés dans tous les rouages de l’économie.

133 WESTPHAL Alexandre, Villa Louise, op. cit., p. 100 et 101.

134 Depuis l’entre deux guerre, le modeste chemin de la Justice est devenu l’avenue de la Justice à Castelnau. 135 Eglé Antonie Jeanne Leenhardt (1818 - 1893) épouse en 1837 Eugène Pomier-Layrargues (né Vialars). Elle eut un frère aîné mort en bas âge, Aymé (1817-1822).

136 Charles Leenhardt (1820 - 1900) épouse en 1844 Juliette Bazille. 137 Antoine Leenhardt (1821 - ) épouse en Eugénie Pomier Layrargues 138 Henri Leenhardt (1822 - 1904) épouse en 1845 Sophie Imer. 139 Inès Leenhardt (1833 - 1878) épouse en 1855 Gaston Westphal. 140 René Leenhardt (1835 - 1915) épouse en 1864 Florence Doxat.

141 André Leenhardt (1838 - 1916) épouse en premières noces Gabrielle Imer (le 11 mai 1871), puis sa sœur Jeanne Clotilde Jane Imer (le 22 décembre 1890).

Figure 18 : Schéma de situation de Max Leenhardt, d’après IL

Il est utile de préciser qu’en 1876, la dynastie Leenhardt et alliés compte environ 650 membres résidant à Montpellier, forte alors de 55 258 habitants142 dont 2 395 protestants.

142 Les statistiques de l’évolution de la population de Montpellier est extraite : Des villages de Cassini aux communes d'aujourd'hui [archive] sur le site de l'École des hautes études en sciences sociales, code Insee 34 3 99 172

Figure 19 : Schéma des lignées de la dynastie Leenhardt, d’après IL.

Bien que les Leenhardt ne représentent à cette date que 1,18% de la population, ils occupent dans la ville méridionale 60% des postes de l’économie, des finances, de la banque, de la justice, de l’administration, de la médecine et de l’enseignement. Ils jouent donc un rôle prépondérant dans la vie publique, notamment de Montpellier. Nous rejoignons sur ce point Patrick Cabanel qui affirme « que cette minorité religieuse a eu un rôle bien supérieur à son importance numérique » dans la destinée de cette ville143. En bref, ils sont partout comme le souligne André Gide dans son livre Si le grain ne meurt : « Il y avait là, dit-il, des Westphal, des

143 CABANEL Patrick, Itinéraires protestants en Languedoc, XVIe – XXe siècle : Hérault, Rouergue, Aude, Roussillon, tome 3, Montpellier, Les Presses du Languedoc, 2000, p. 87.

Leenhardt, des Castelnau, des Bazille, parents les uns des autres.144» La majorité d’entre eux réside dans de beaux immeubles de style haussmannien, équipés de toutes les commodités modernes depuis les années 1855. C’est à cette période qu’est entreprise la rénovation du tissu urbain orchestrée par leurs parents, Jules Pagézy145, en qualité de maire, et Gaston Bazille, en tant qu’adjoint chargé de l’urbanisme.

Figure 20 : Liens de parenté entre Max Leenhardt et Jules Pagézy, d’après Base Geneanet du 13/01/2016

Leur soutien n’est pas des moindres, puisque c’est la banque privée familiale146 qui permet à la commune d’obtenir les fonds d’investissement nécessaires à cette opération. Mais, ils capitalisent également sur ce projet en finançant personnellement des projets immobiliers tel que la construction d’immeubles de rapport. C’est en tant que dépositaires de la banque privée familiale qu’ils s’associent au projet de modernisation de la ville, avec l’aménagement de nouveaux quartiers à la périphérie du centre-ville. Celui des Casernes (actuel quartier Gambetta) en fait d’ailleurs partie. Situé à moins d’un kilomètre de celui de la rue Saint-Roch. Nous y trouvons Edmond Castelnau au numéro 28, mais aussi les frères René et Charles Leenhardt. René Leenhardt est installé au numéro 7 de la rue des Casernes) (actuelle rue Marceau), alors que Charles Leenhardt a acquis l’ancienne demeure de campagne du Gouverneur des Etats du Languedoc ainsi que ses jardins l’ensemble étant situé au numéro 27 cours des Casernes (actuel cours Gambetta)). Dans sa correspondance, le peintre fait de nombreuses allusions à ses parents et cousins. Néanmoins, il est difficile de déterminer la régularité de leurs entrevues compte tenu du manque d’informations à ce sujet. Cette proximité s’enracine dans le temps autour d’une

144 André Gide séjourna quelques temps chez les Castelnau, dans leur hôtel sis 12 rue Salle l’Evêque. Il suivit une partie de sa scolarité dans les établissements montpelliérains. GIDE André, Si le grain ne meurt, Paris, Gallimard, 1955, p. 107.

145 Jules Pagézy (1846-1899) est docteur en droit. Il devient avocat avant d’être élu Maire de la ville de Montpellier en 1860. Il est apparenté aux Leenhardt par alliance avec les Pomier-Layrargues. D’après, Planchon Jules-Emile, Notice sur M. Jules Pagézy, ancien maire, ancien Député et Sénateur, Secrétaire honoraire de la Société centrale d’Agriculture de l’Hérault, Waltener, Lyon, 1888, 8 p.

146 Ainsi, Scipion Bazille (1793-1853) fut l’un des promoteurs de la ligne de chemin de fer Montpellier-Toulouse en 1846, alors qu’il était membre du conseil d’administration de la Banque de France.

passion commune de l’art, comme nous constatons dans une lettre des premières années parisiennes : « J’ai étudié avec oncle Charles ce matin à déjeuner, avant d’aller ensemble visiter les expositions de tableaux de divers cercles147. » Cette passion est appréhendée tout de même selon des points de vue bien différents. Le notable y perçoit une des facettes de la culture et de la notoriété, et l’artiste un moyen d’expression, une mise à nu de sentiments profonds et intimes. Toute commande de la part d’un notable apparaît comme un exercice de style et non comme une réelle compréhension de sa sensibilité. Cette perception est bien restituée par le peintre lorsqu’il confie à Eugène Burnand : « Je suis dans la plus grande anxiété et ne crois pas avoir le droit, à toi mon confident et ami, de tarir un sujet d’une aussi grave préoccupation ; car j’en suis encore tout bouleversé après ce que je viens d’entendre aujourd’hui. Il lui faut une garrigue ! Non vrai, c’est à ne pas y croire : oncle Charles se prenant d’une passion pour dame garrigue et me chargeant moi de faire sa déclaration. 148» Néanmoins, Charles Leenhardt est par son implication même dans la vie socio-économique locale, un appui incontournable dans la carrière du peintre. Par son appartenance à la majorité des comités locaux et son statut de président de la Chambre de commerce, il est très impliqué dans la vie de la politique locale. C’est ainsi qu’il lui obtient jusqu’en 1900 un nombre non négligeable de commandes, sur lesquelles nous reviendrons dans un chapitre suivant. Ce sont là les seuls témoignages directs que nous ayons.

A compter de 1879, nous savons que les visites au 27 cours Gambetta se multiplient à la suite du décès de Léopold Nègre (1852-1879)149. En effet, la belle demeure entourée de jardins abrite au rez-de-chaussée le patriarche Charles Leenhardt, et aux étages ses enfants dont sa fille Suzanne (1856-1921)150 qui vient de perdre son époux Léopold Nègre (1852-1879), fils d’Auguste Nègre (1816-1872)151, emporté par la fièvre typhoïde. Le jeune ménage habitait depuis peu l’un

147 Archives privées, Correspondances de Max Leenhardt à sa mère du 24 février 1877, p. 4, Coll. G. J., France, n° inv. JG 0069 à 0070 P. 02 148 UNIL, Unithèque, Fonds manuscrits, BCU-Lausanne (Suisse), IS 4989 : Fonds Burnand : IS 4989 / UNIL 0 : Correspondances de Max Leenhardt à Eugène Burnand : les années parisiennes (2ème période), du 24 novembre 1888, p. 1 et 2, Unithèque, Lausanne (Suisse). Il est surpris de la manière dont ses proches lui imposent des commandes, comme s’il était disponible et corvéable.

149 Auguste Nègre eut trois enfants d’Adèle Vincent : Emile, Sélim et Elisa. Cette dernière lia la famille Nègre à celle des Hugues en épousant Gustave Hugues, pasteur à Montauban.

150 Suzanne Leenhardt (1856-1921) épouse en 1878 le négociant Léopold Nègre, qui décède alors qu’il commence des études théologiques à Toulouse pour devenir pasteur. Elle convolera en secondes noces avec Samuel Dautheville, professeur d’astronomie à l’Université des Sciences de Montpellier.

151 Auguste Nègre eut trois enfants d’Adèle Vincent : Emile, Sélim et Elisa. Cette dernière lia la famille Nègre à celle des Hugues en épousant Gustave Hugues, pasteur à Montauban. Il était l’heureux propriétaire du domaine de l’Hermitier qui reçut de nombreuses visites d’Eugène Burnand. Les terres de l’Hermitier avoisinent celle du Rieucoulon, propriété des Bourrely également apparentés aux Leenhardt.

des appartements du second étage. Suzanne reçoit le réconfort quotidien de son frère aîné Roger (1845-1898) et de son épouse Juliette Victorine Lichtenstein (1853-1881). Ces derniers occupent l’un des deux appartements du premier étage. Depuis l’enfance, une étroite complicité unit les deux cousins Max et Suzanne, mais peut-être d’avantage Max et Léopold Nègre, tous deux liés par une affection fraternelle à Pierre Leenhardt, Guillaume Garnier152 et Henri Westphal153. De nombreuses années durant, la bande d’amis se retrouve autour de l’arbre de Noël d’Henri, invalidé par une maladie incurable. Ces veillées sont des moments intenses de partage et de piété. Nous connaissons la relation privilégiée qui unissait ce petit groupe grâce à un conte pour enfants écrit par Max Leenhardt en 1913 pour une veillée organisée à l’école du Dimanche de la rue Brueys154, mais aussi à travers le récit des dix jours d’agonie d’Henri Westphal faite par Alexandre Westphal155. La foi extrême qu’Henri conserve malgré l’ombre de la mort156, est communicative. Elle est à l’origine d’une conviction religieuse plus ou moins affirmée chez ses amis : Léopold Nègre entreprend des études de théologie à la suite de cette disparition ; le frère d’Henri, Alexandre (1861-1951), devient pasteur. Quant à Max Leenhardt présent jusqu’au dernier souffle au chevet de son ami, nous sommes en droit de nous interroger sur l’impact possible de ce drame sur sa vision de la vie, sa foi et sa production.

Nous trouvons sur ce boulevard d’autres parents, les Michel, dont le fils du même âge est un ami du peintre. Il s’agit d’André Michel (1853-1925)157, fils de Théophile Michel158, propriétaire de la Maison Rigal sise 18 du boulevard Jeu de Paume. André Michel (1853-1925)159

est l’ami intime de Léopold Nègre et de Max Leenhardt, comme en témoigne Suzanne

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