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La nécessité de la permanence de la régulation libérale

II. MATÉRIEL ET MÉTHODE

III.1 MOTIVATIONS CONDUISANT À LA PARTICIPATION

III.2.2 La nécessité de la permanence de la régulation libérale

Dans le département de l’Eure, la régulation libérale des demandes de soins non programmés couvre toute la période de permanence des soins telle que définie par la loi. Les régulateurs jugent cette disposition indispensable, pour des raisons d’ordre déontologique d’une part, pour une raison d’efficacité d’autre part. Elle permet en outre de maintenir la rémunération à un niveau attractif.

III.2.2.1 Un devoir déontologique

La continuité de la régulation libérale, y compris en nuit profonde, permet d’assurer une continuité des soins de type médecine générale et de répondre ainsi à un devoir déontologique.

« Je trouve que c’est un peu notre devoir de continuer à réguler… on ne peut pas ne pas apporter de réponse à la population ».

De plus, ceci permet de montrer que les médecins généralistes restent impliqués dans la permanence des soins bien qu’il n’y ait plus de garde effectrice entre minuit et huit heures du matin. Ainsi le fait de réguler les appels sur toute la période de fermeture des cabinets libéraux a aussi un effet déculpabilisant.

« En tant que médecin libéral, j’ai bonne conscience de savoir qu’il y a un système de réponse quand je ferme mon cabinet ».

III.2.2.2 La compétence spécifique des médecins généralistes libéraux

La nécessité d’assurer une régulation libérale continue est renforcée par la nature des appels des patients qui relèvent pour l’essentiel de la médecine de ville.

« 95% des appels, c’est de la médecine générale, donc c’est le travail du médecin généraliste que de réguler ça ».

En effet, les régulateurs libéraux ont le sentiment d’être plus compétents que leurs collègues hospitaliers pour gérer ce type d’appels parce qu’ils se rapprochent plus de leur exercice quotidien. Ceci se fait au bénéfice des patients.

« On sait les rassurer, les calmer, parce qu’on fait ça toute la journée dans notre cabinet ; je ne suis pas certain qu’un médecin du 15 aura cette faculté ».

Ce sentiment est renforcé par l’expérience de la grève de l’hiver 2002 pendant laquelle les médecins hospitaliers ont assuré seuls la régulation de la permanence des soins.

« On a tous des souvenirs de moments où il n’y avait ni régulateur ni effecteur, au moment de la grève, où il y avait une inadéquation de la réponse qui était manifeste ».

Ainsi, l’engagement des médecins généralistes dans la régulation des appels est vécu comme un moyen d’optimiser les réponses aux demandes des patients et d’éviter des consultations inutiles.

« C’est évident qu’on a une pratique beaucoup plus efficiente que nos collègues hospitaliers qui, faute de savoir vraiment ce qui se passe, ont de toute façon recours à l’effecteur ».

Certains estiment cependant que la régulation des appels relevant de la permanence soins pourrait aussi être assurée par une infirmière spécifiquement formée à cet exercice, à l’image de ce qui se pratique dans les pays anglo-saxons, notamment pour déterminer ce qui relève ou non d’une consultation médicale.

« Une infirmière qui a une longue pratique des services porte pourrait très bien faire un guidage ».

Néanmoins, les régulateurs libéraux considèrent être les plus compétents pour répondre aux demandes de conseils médicaux.

« Quand c’est grave, c’est toujours facile de protocoliser, de codifier. Quand ce n’est pas grave, on apporte des conseils médicaux que nous seuls pouvons donner ».

Si les régulateurs libéraux estiment être les plus compétents pour gérer la permanence des soins, ils reconnaissent bien volontiers qu’ils ne sont pas les mieux formés pour assurer la régulation de l’aide médicale urgente. L’organisation du système prévoit, en effet, que les régulateurs libéraux ne gèrent que les appels relevant de la permanence des soins. Un premier

niveau de régulation est effectué d’une part par le patient qui choisit d’appeler le numéro de la PDS et non le 15, et d’autre part par les PARM. Ainsi les régulateurs libéraux ne sont théoriquement pas confrontés à l’urgence vitale qui est du ressort du régulateur hospitalier. Cette répartition des rôles est jugée indispensable.

« Si ce n’était pas préalablement trié par le patient et les PARM, je ne ferais pas de régulation ».

En effet, les régulateurs libéraux ne se considèrent pas compétents pour gérer l’aide médicale urgente parce qu’elle s’écarte trop de leur exercice quotidien.

« En l’absence du système tel qu’il est avec le régulateur du 15 qui prend les urgences présumées vitales, moi, je n’y vais plus…Parce que ce n’est plus le même métier ».

En revanche, ils s’estiment tout à fait compétents pour déceler un appel relevant de l’aide médicale urgente qui aurait été mal orienté et ainsi le rebasculer vers le régulateur hospitalier.

« il peut arriver qu’il y ait des erreurs d’aiguillage de la part des PARM… ça d’accord, mais ça, ça fait parti de mon boulot de les repêcher dans la masse ».

III.2.2.3 Le maintien de l’attractivité de la rémunération

Enfin, la régulation en nuit profonde est aussi jugée nécessaire pour maintenir une rémunération attractive. En effet, les régulateurs ont le sentiment que la rémunération à 3C de l’heure est insuffisante entre vingt heures et minuit, période où le flux d’appels est le plus important. Ceci est compensé par la rémunération horaire identique entre minuit et huit heures du matin, période où l’activité est moindre et permet de dormir quelques heures. Ainsi, si la régulation se terminait à minuit, la plupart ne seraient plus volontaire.

« On considère qu’on n’est pas très bien payé en début de nuit et plutôt mieux payé en deuxième partie de nuit, si on supprime la deuxième partie de nuit, ça devient tout de suite beaucoup moins intéressant ».