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Les préjugés sont grands et la méconnaissance du contexte psychosocial et, des motivations des « percés » amène à considérer cette pratique comme pathologique. La plus grande partie de la littérature publiée jusqu’à, il y a peu de temps, sur le sujet était imprégnée d’un fond de discrimination. La présence de modifications corporelles, comme les tatouages ou le piercing était en effet, associée à des comportements psychopathologiques ou antisociaux, dès lors, qu’il y a dérogation aux règles sociales « conventionnelles ». Ces pratiques étaient alors, associées et, traitées, notamment par les générations de diverses cultures à tendance conservatrice, comme étant une « attitude » malsaine et, un fléau ravageur, diffusé auprès des générations montantes [1].

On parlait justement, avec aisance et, non sans subjectivité « d’estropier le corps », « d’atteinte à l’intégrité physique due à la mode », « de destruction volontaire du propre tissu corporel »... Dans la société actuelle, où les piercings « transpercent » sans tabous les couches sociales, le recours à des interprétations discriminatoires et la considération de ces pratiques comme exclusivement pathologiques ne sont plus d’actualité.

Il est cependant certain, que l’association « blessure volontaire– perversion » se conçoit facilement. Mais le piercing n’a rien à voir avec un plaisir pathologique de la douleur ; la douleur qui accompagne le piercing n’est qu’un effet secondaire.

La question s’impose, alors ; pourquoi se faire percer ?

Aucune réponse ne pourrait être livrée avec certitude et précision. Car, il pourrait exister autant de motivations, que d’adeptes du piercing ; soucis de rébellion envers la société, contre l’autorité parentale, souhait d’individualiser son corps vis-à-vis de la « masse », phénomène d’identification à des personnages connus du monde du cinéma, de la chanson, du sport mondial,… quête de réappropriation du corps, passant par la souffrance de celui-ci, recherche de vertus sexuelles (augmentation du plaisir sexuel pour le ou la partenaire), possibilité de bénéfices spirituels, raisons esthétiques, faire montre de courage et d’audace, désir d’appartenance à une communauté, un groupe, pression des pairs…

Les motivations sont donc, multiples et variées. C’est pourquoi, l’association piercing-érotisme, sadomasochisme et fétichisme, n’est probablement pas applicable à la situation actuelle et, ne peut être maintenue comme seule explication du phénomène. D’ailleurs, dans une enquête réalisée auprès des lecteurs de la revue Body Art (revue spécialisée sur le piercing, le tatouage et autres pratiques de modifications corporelles à visée esthétique), plus de 80 % des sujets interrogés déclarent n’être « ni sadomasochistes, ni fétichistes, ni exhibitionnistes, ni narcissiques » [1].

3. Epidémiologie

Les statistiques en la matière sont assez abondantes, pour permettre de définir les zones où, cette pratique est plus amplement répandue ou, au contraire, considérée comme « exception » passagère.

Selon une étude Néo-zélandaise portant sur 966 jeunes adultes, 9% des hommes et 29% des femmes ont subi des perçages autres que celui du lobe de l’oreille. On pourra déduire la diffusion du phénomène dans le rang des filles, plus que celui des garçons [4]. Parmi les questionnés, 4 hommes (0.8%) et 3 femmes (0.6%) avaient un piercing génital. Plus souvent, ce sont les hommes, qui portent un piercing génital, que les femmes. Alors que la prévalence globale du phénomène est inversement répartie. Un constat, qui s’expliquerait par des raisons anatomiques. En effet, il est naturellement, moins de surface accessible chez les femmes, que chez les hommes [4].

Une étude épidémiologique récente, réalisée en Angleterre, réalisée au moyen d’un questionnaire envoyé à la population, a permis d’estimer à 10% des adultes, les sujets qui avaient – ou avaient eu – un piercing au cours de leur vie, avec, en moyenne 1,7 piercing par personne [5].

La pratique du piercing concerne, selon l’étude, trois fois plus de femmes que d’hommes. La prévalence diminue toutefois, avec l’âge, le phénomène touchant essentiellement la catégorie des 16/24 ans (27,4%). Dans cette tranche d’âge, près de la moitié des femmes porte un piercing.

Plus d’un quart (27,5%) des participants ont rapporté la survenue de complications, nécessitant une fois sur deux, une consultation auprès de la personne ayant réalisé le piercing, chez un pharmacien ou, chez un médecin de premier recours. Les piercings oraux et péri-oraux constituaient également une source notable de consultations auprès des dentistes [5].

4. « Professionnel » du piercing

La dénomination «perceur», employée pour désigner les personnes qui réalisent ces actes, recouvre une grande catégorie de « professionnels », regroupés sous une hétérogénéité de statuts et, de techniques et, reconnus, pour la disparité du niveau d’intérêt accordé à la sécurité, notamment hygiénique des clients et, des pratiques commerciales adoptées.

Quelques-unes des nombreuses boutiques de piercing, tenues par des « perceurs », qui ont pu développer un savoir-faire technique et, accumuler une expérience remarquable, qui en font leur notoriété, sont devenues de véritables références dans le domaine. Les « professionnels » du piercing, forts de leurs connaissances en anatomie, en physique et chimie des matériaux, en antisepsie ou en stérilisation, sont souvent d’origine autodidacte. Certains, s’inspirent de l’expérience référentielle et, plus avancée de l’Amérique du Nord, et sont reliés à des réseaux internationaux [6].

L’Association of Professional Piercers (APP) américaine est la plus importante organisation de perceurs existante. Elle organise un congrès annuel à Las Vegas, où convergent des centaines de « professionnels »venant du monde entier. Plusieurs associations se sont récemment créées un peu partout, dans les pays Européens [6].

Certains perceurs réalisent également des tatouages, des scarifications ou encore, plus exceptionnellement, des implants sous-cutanés de corps étrangers ou du «branding» (marquage au fer rouge).

Plus récemment, sont apparus sur le marché, des « coiffeurs-perceurs », opérant dans des salons de coiffures et, même des « perceurs ambulants », qui exercent à domicile ou, selon la demande, transportent leur matériel spécialisé, pour se déplacer et intervenir carrément chez les clients.

Le piercing est parfois réalisé par la personne elle-même. La fréquence même approximative, de l’«auto-piercing», est impossible à connaître en l’absence d’études fiables. L’incidence des complications infectieuses en est donc, inconnue. Mais, les expériences étrangères suggèrent, que les accidents (toutes complications confondues) seraient plus fréquents dans ce cas [6].