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Il existe une multitude d'études emp1r1ques développant le problème des motivations des enseignants en début de carrière, mais elles sont peu nombreuses à étudier ce que deviennent plus tard, au cours de la carrière, les motivations initiales. c'est l'une des questions importantes que nous soulevons dans cette étude, et dans ce chapitre en particulier.

Le répondant était d'abord interrogé sur sa trajectoire professionnelle, puis on lui demandait à quel moment il avait choisi l'enseignement, les raisons de ce choix et s'il avait eu des hésitations avant de se décider pour cette carrière. Enfin, on lui demandait s'il rechoisirait aujourd'hui l'enseignement, en le priant d'expliquer sa réponse.

4. 1. LES TRAJECTOIRES PROFESSIONNELLES

Parmi les différentes voies menant à l'enseignement, nous avons distingué trois parcours : les "trains directs" (études universitaires à Genève ou à Lausanne, puis l'enseignement) regroupant 95 cas; le passage de l'enseignement primaire à l'enseignement secondaire (10 cas); les études menées ailleurs, suivies d'un temps de travail dans l'enseignement secondaire d'un autre canton ou à l'étranger (45 cas).

Parmi ceux qui passent directement de l'université à l'enseignement, il en est quelques-uns qui n'ont aucune exper1ence préalable de la vie, en dehors de l'enseignement (72 personnes). Et si l'on exclut un vécu antérieur d'études et de voyages à l'étranger (401. des cas) et de responsabilités avec des enfants (271. des cas), il y a en fait peu de gens qui ont exercé une autre profession, ou méme une activité indépendante (277. des cas). Si l'on prend tout l'échantillon, ces réponses ne représentent que 171. de l'ensemble. Dans la plupart des.

cas, la durée de ces expériences n'est q~e d'un à deux. ans (517. des cas).

4.2. LES MOTIVATIONS POUR L'ENSEIGNEMENT

Celles-ci sont nombreuses : plus de 3 par personne, du fait du jeu des réponses multiples. Nous les avons ciassées en 3 catégories. Nous avons intitulé la première celle des "motivations actives", qui impliquent un choix délibéré de la part de la personne. Elles constituent quantitativement 637. de l'ensemble des réponses. Voici les plus fréquemment énoncées : "contact avec les jeunes" (50 cas); "amour de la branche" (45 cas); "découverte, succès lors des premières expériences" (39 cas); "désir de faire partager ses connaissances" (35

"succ~s scolaire en tant qu'il~ve" (16 cas); "pente naturelle en fonction des études" (14 cas); "volonté de puissance, aime diriger" (7 cas); "compenser son éducation" (4 cas).

Quant i ce que nous avons appelé les "mot~vations matérielles", elles constituent 261. des réponses. Parmi les motivations, nous relevons : "moyen de gagner sa vie, de devenir indépendant" (49 cas);

"avantages matiriels, conditions de travail favorables" (25 cas);

"liberté d'action, flexibilité et diversiti du travail" (15 cas);

"sécuriti de l'emploi" (11 cas); "profession fiminine"(lO cas);

"statut social" (3 cas).

La derni~re catégorie (91. des réponses) regroupe les motivations que nous avons appelées "passives" : "faute de mieux, par ilimination"

( 34 cas); "enlisement, entrée provisoire, puis trop difficile de changer" ( 5 cas).

Lorsque nous comparons les enseignants selon les établissements où ils enseignent, nous rencontrons des différences de motivations assez fortes. Par exemple, proportionnellement, les réponses du C.O. sont plus nombreuses qu'au Collège pour les items suivants (par ordre décroissant) "contacts avec les jeunes", "succès scolaire en tant qu'élève", "pente naturelle", "impact sur les jeunes", "liberté et

fl~xibilité du travail". Au Collège, les réponses privilégient (par ordre décroissant) : "moyen de gagner sa vie", "amour de la branche",

"découverte, plaisir", "faute de mieux", "désir de faire partager ses connaissances".

Les différences entre hommes· et femmes méritent aussi d'être relevées. Par exemple, les hommes privilégient les motifs suivants (dans l'ordre) "découverte, plaisir", "moyen de gagner sa vie",

"contact avec les jeunes" et "faute de mieux". Quant aux femmes, les motivations mises en avant sont : "amour de la branche", "contacts avec les jeunes", "moyen de gagn~r sa vie". On relève que, de façon

génér~le, .les motifs matériels sont moins présents chez. les femmes que chez les hommes et on a l'impresson, chez elles, d'un choix de

carri~re fait plus tôt et plus fermement.

4.3. MOTIVATIONS INITIALES ET SUITE DE LA CARRIÈRE

Est-ce que les motivations initiales influencent le déroulement de la carrière? Par le truchement de tableaux "croisés", nous avons tenté de mettre en relation certaines données afin de compléter les iMdications que fournit déji 1:étude des itinéraires-type contenue dans le chapitre précédent. La motivation de départ ne s'avère pas, en fait, prédire la ·suite de façon très fiable, en grand partie parce que cette motivation est multiple. Toutefois, dans les cas extrêmes

(uniquement des motifs "actifs" ou ~matériels"), on voit que des motivations "actives" annoncent souvent une phase harmonieuse de stabilisation, ainsi qu'un bilan positif de la carrière. En revanche, les motivations uniquement "matérielles" annoncent des problèmes pour la suite de la carrière.

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4.4. HESITATIONS A CHOISIR L'ENSEIGNEMENT

Les h~sitations relatives au choix de l'enseignement constituent-elles des obstacles à des débuts harmonieux ou à la

"stabilisation" dans la carr1ere ? Les réponses des maitres à cette question font apparaitre un certain équilibre : 56X de "non" et 44X de

"oui". Cependant, il s'agit souvent de "non mais" et de "oui mais".

Voici comment sont regroupées ces réponses : "non" (55 cas); non, mais pas sûr de la branche à enseigner, du niveau et du type des élives" (16 cas); "non, mais pas sûr de vouloir s'engager définitivement" (10 cas); "oui, parce qu'autant ou plus intéressé par d'autres voies" (35 cas); "oui, parce qu'intéress~ par d'autres débouchés pour le mime diplôme (21 cas); "oui, entre l'enseignement et un autre travail social" (6 cas).

Pour la phase des débuts, la présence ou l'absence d'h~sitations ne parait pas influencer la vie en classe dés les premières années. En revanche, ceux qui n'hésitent pas vivent plus fréquemment leur première phase comme une "ouverture ou une découverte", ils paraissent plus souvent avoir atteint une certaine "maitrise pédagogique" et mentionnent beaucoup plus le problime de la "surcharge" après 6 à 10 ans de carrière.

4.5.

RECHOISIR OU NON L'ENSEIGNEMENT

Les r~ponses à cette question, qui donne des indications·

importantes sur l'indice de satisfaction du corps enseignant, offrent un tableau plut6t rassurant. Seul 12% de l'échantillon ne rechoisirait pas l'enseignement. La moitié dit "oui", sans nuances. Si l'on ajoute.

ceux qui rechoisiraient l'enseignement, en changeant éventuellement de cahier des charges, on arrive à BOZ qui redeviendraient enseignants.

Enfin, 4Z disent qu'ils rechosiraient "faute de mieux".

En ce qui concerne les différences entre établissements, une tendance assez claire se dégage les enseignants du Collège rechoisiraient l'enseignement, ceux du Cycle sont partagés, ils y mettent davantage de nuances ou répondent carrément "non" .

. Quant aux différences entre hommes et femmes, elles sont encore plus marquées. Les femmes répondent plus fréquemment "oui" sans nuances que les hommes et plus rarement "oui, faute de mieux".

Globalement, les femmes sont plus satisfaites, ce qui corrobore les tendances des autres recherches empiriques analogues à la nôtre. Cètte

sati~faction est-elle liée au fait que les femmes occupent plus souvent des emplois à temps partiel ? En mettant en relation le poste·

occupê et le désir de rechoisir l'enseignement, nous nous apercevons que 1~ plein temps prédispose davantage au "non, je ne rechoisirais pas" et que le temps partiel prédispose au "oui, je rechoisirais".

En ce qui concerne les comparaisons entre groupes de disciplines, nous pouvons constater que les diffêrences ne sont pas tris fortes.

4.6. LES RAISONS DE RECHOISIR OU NON L'ENSEIGNEMENT

Quelles sont donc les raisons avanc~es pour ne pas rechoisir l'enseignement ? Par ordre décroissant nous trouvons les motifs suivants : "regret d'autres voies envisag~es et abandonn~es" (26 cas);

"actuellemen~. d'autres voies sont possibles" (10 cas); "trop de risques de cristallisation et de routine" (6 ~as); "rentabilit~

douteuse" (trop êpuisant pour trop peu d'impact) (5 cas); "travail social inadéquat" (ou "rechoisirait dans un autre domaine social") (3 cas).

Quant aux raisons données pour rechoisir, elles sont très nombreuses (17 thèmes). En ne retenant que celles choisies par au moins 51. des répondants, on en réduit le nombre à 10. Les voici :

"aime l'enseignement, fait pour ça" (54 riponses); " aime le contact a v e c 1 e s j e u n.e s " ( 4 3 ) ; " a v a n t a g e s ma t é r i e 1 s " ( 19 ) ; " po s s i bi 1 i t é d e mener une vie de famille en parallèle" (19) "plaisir de faire partager ses connaissances" ( 18); "indépendance, autonomie, peu de contraintes dans le travail" (17); "satisfaction intellectuelle, amour de la branche" (16); ''tient à être utile socialement" (11); "peut poursuivre une deuxième carrière en parallèle" (11); "variét~. créativit~ dans le travail" (8).

4.

7.

RECHOISIR ET PHASES DE LA CARRIERE

Pour la première phase de la carrière, il y a deux variables qui distinguent "ceux qui rechoisissent" des autres : les "dêbuts faciles"

et "ouverture, aventure, dicouverte". Dans la phase médiane de la carrière, on remarque qu'il y a une concordance très nette entre "ceux qui rechoisiraient" et ceux qui ont une v1s1on positive de l'enseignement, ceux qui parlent, par exemple, d'élèves "stimula~ts".

0~ mime, ceux qui ont vécu un moment de doute face à la poursuite de

1~ carrière, ou qui ont eu une réelle "crise professionnelle", ont tendance à ne pas rechoisisir l'enseignement.

Enfin, le fait de rechoisir ou non l'enseignement devrait concorder avec le contenu de la dernière phase de la carrière. Bien entendu, on n'est plus dans le domaine de la "prédiction", mais dans celui de la corrélation. En effet, ceux qui ne rechoisiraient pas l'enseignement bu qui le choisiraient "faute de mieux" sont nettement plus enclins à évoquer une troisième phase de remise en question" ou de

"désenchantement" et à ne pas évoquer la variante "satisfaction, iquilibre", al6rs que c'est l'inverse pour ceux qui rechoisiraient la même .carrière.

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