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alba and Picea abies in the Western Alps.

8.1.2 Mortalité du Sapin et de l’Epicéa 1 Bien estimer la mortalité

Les modèles de mortalité en forêt sont difficiles à calibrer. La mortalité est un phéno- mène rare (de l’ordre de 1% d’individus par an) qui nécessite d’importants jeux de données étalés dans le temps et dans l’espace afin d’observer suffisamment d’événements de morta- lité (Hawkes,2000). Les données de mortalité sont d’autant plus difficile à obtenir pour les gros arbres qui sont moins nombreux du fait de la dynamique naturelle et de l’exploitation d’arbres arrivant à maturité dans les forêts gérées.

On distingue souvent la mortalité régulière de la mortalité irrégulière (Lee, 1971). La mortalité régulière est associée à une diminution progressive de la vitalité qui peut être due à la compétition dans le jeune âge (Peet and Christensen,1987) ou à la senescence (Mac-

Farlane et al., 2002). La mortalité irrégulière est la conséquence de perturbations externes

aléatoires comme les tempêtes, les chutes de blocs, les avalanches. Afin de recouvrir ces deux types de processus, on peut estimer la mortalité à partir de deux variables explicatives complémentaires : la croissance et le diamètre de l’arbre. La croissance, est un indicateur synthétique de la vitalité qui dépend très fortement de la compétition dans le jeune âge. Le diamètre est un bon indicateur de la sensibilité aux perturbations. Les gros arbres ayant un houppier plus développé sont plus sensibles aux coups de vent et aux fortes chutes de neige (Canham et al., 2001; Peltola et al., 1999) et semblent être plus sensibles aux at- taques d’insectes (Zolubas, 2003) alors que les jeunes arbres sont plus sensibles aux feux

et à l’abroutissement (Muller-Landau et al., 2006). Le diamètre est également fortement corrélé à l’âge et constitue une bonne variable explicative de la sénescence.

Les modèles de mortalité intégrant les deux covariables sont peux nombreux (Hawkes,

2000). La méthode statistique couramment utilisée pour estimer un modèle de mortalité multivarié est une régression logistique linéaire de la croissance et du diamètre (Monserud,

1976; Wunder et al., 2007). La technique d’estimation repose le plus souvent sur des don-

nées exhaustives de placettes permanentes mesurant l’évolution du diamètre de tous les arbres au cours du temps et notant les événements de mortalité entre census (Monserud,

1976; Wunder et al., 2007). Le carottage étant une méthode de mesure pouvant entraîner

une augmentation des maladies et de la mortalité au sein des peuplements, tous les arbres de la placette ne peuvent être carottés pour quantifier l’accroissement radial. La croissance est donc obtenue à partir des différences en diamètre entre deux mesures. Il faut donc au minimum trois census pour estimer la mortalité entre le 2ième et le 3ième census à partir du

diamètre au 3ième census et de la croissance entre le 1er et le 2ième census. Les dispositifs

de placettes permanentes sont coûteux et nécessitent un entretien sur le long terme. Ils ne sont pas toujours disponibles. Des méthodes d’estimation de la mortalité en fonction de la croissance basées sur des mesures de carottes pour un sous-échantillon d’arbres morts et vivants ont donc été développées (Kobe et al., 1995; Wyckoff and Clark, 2000). Notre approche propose d’étendre ces méthodes à un modèle multivarié afin d’obtenir un esti- mation de la mortalité en fonction du diamètre et de la croissance lorsqu’un dispositif de placettes permanentes n’est pas disponible.

Les modèles de regression logistique linéaire sont des modèles paramétriques. Ces mo- dèles sont peu souples car ils font l’hypothèse d’une forme a priori pour la surface de réponse mortalité en fonction du diamètre et de la croissance. Ils conduisent à un biais dans l’estimation de la mortalité sur les portions de courbes où la relation est fortement non-linéaire (Fig. 4.3 et Fig. 5.5). Les modèles paramétriques sont également dépendants de la distribution des données car l’estimation en un point dépend de l’estimation en tous les autres points du jeux de données. Compte-tenu du fort déséquilibre des jeux de données pour la mortalité due au faible nombre d’individus pour les gros diamètres, l’estimation de la mortalité pour des diamètres supérieurs à 45 cm est souvent biaisée. L’approche semi-paramétrique que nous proposons permet de contourner ces difficultés car elle ne suppose pas de forme a priori pour la relation entre covariables et réponse et parce que les estimations ne dépendent pas de la distribution des données. L’approche semi-paramétrique permet d’interpréter finement les différences entre espèces pour la mortalité aux diamètres extrêmes.

D’un point de vue écologique, la mortalité aux diamètres extrêmes est importante car elle caractérise les traits d’histoire de vie des espèces du point de vue de la tolérance à l’ombre (pour les faible diamètres) et de la longévité (pour les forts diamètres). Tolérance à l’ombre et longévité déterminent en partie la dynamique des espèces en mélange (Pacala

8.1.2.2 Différences entre espèces

Le Sapin et l’Epicéa présentent un taux de mortalité minimum autour de 45 cm de DBH. De 0 à 45 cm de DBH, la mortalité diminue progressivement, ce qui est dû en partie à une diminution de la compétition et en partie à une diminution de la sensibilité aux perturbations extérieures de type feux ou abroutissement. Au-delà de 45 cm de DBH, la mortalité augmente progressivement à cause d’une augmentation de la sénescence et de la sensibilité aux perturbations de type attaques d’insectes, coups de vents, chute de neige et interaction entre ces facteurs (Fig. 5.2). On observe également une diminution forte de la mortalité des deux espèces avec la croissance (Fig. 5.4).

Le modèle non-paramétrique permet de distinguer des différences nettes entre espèces pour la mortalité du Sapin et de l’Epicéa. A faible croissance (Croissance < 20/100 mm.an−1),

l’Epicéa a une mortalité plus importante (18.42%)que le Sapin (10.21%) (Fig. 5.4). De même, à faible diamètre (DBH < 15 cm), l’Epicéa a un taux de mortalité plus élevé (3.76%) que le Sapin (2.75%). A faible diamètre, les arbres sont dominés par les arbres de la canopée et reçoivent peu de lumière. A plus faible niveau de lumière, la croissance est ralentie. Ces résultats peuvent être associés à la plus forte tolérance à l’ombre du Sapin dans les jeunes stades. L’Epicéa, moins tolérant à l’ombre, est exclu lors de la fermeture de la canopée.

Pour de gros diamètres (DBH ≥ 45 cm), l’Epicéa a un taux de mortalité supérieur (0.45% pour la plus grosse classe de diamètre : DBH ≥ 75 cm) à celui du Sapin (0.32%). Cela confirme les connaissances a priori sur les deux espèces. L’Epicéa, l’espèce à croissance la plus rapide et à enracinement superficiel, est plus sensible aux coups de vent que le Sapin. De même l’Epicéa est connu pour être plus sensible aux attaques d’insectes xylophages et de champignons au stade adulte (Wasser and Frehner, 1996) (Sec. 2.2 et Fig. 2.6). Ces résultats contribuent à limiter la longévité de l’Epicéa et à limiter sa compétitivité par rapport au Sapin au stade adulte.

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