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I. Revue de littérature

1.4 Mortalité des startups

Les startups évoluent donc dans un environnement instable et concurrentiel. Il s’agit

d’un environnement paradoxal et leur création se heurte à des phénomènes parfois

contradictoires puisqu’elle doit « favoriser un processus de destruction créatrice où le

repérage des capacités réelles est une tâche toujours délicate, où les grandes

ambitions ne manquent pas (Philippe Albert, Michel Bernasconi, & Lynda Gaynor,

2003, préface). » De plus, il s’agit d’une entreprise quiest d’abord locale, mais dont les

marchés auxquels elle doit se confronter sont souvent mondiaux, comme une part des

capitaux qu’elle doit attirer, ce qui conduit à une environnement concurrentiel

territorial problématique. Ajoutons à cela que la création d’entreprise relève

d’initiatives non centralisées et requiert pour être efficace de savoir procéder en

réseau large (Philippe Albert, Michel Bernasconi, & Lynda Gaynor, 2003).

Pour Witmeur (2016), encore trop d’entreprises innovantes échouent, il estime que le

« cap des trois ans » est difficile à passer pour les jeunes entreprises et que lorsque

celles-ci y parviennent, le résultat est régulièrement inférieur aux prévisions de départ.

Les études réalisées sur le sujet montrent que ces difficultés sont notamment liées aux

limites des équipes entrepreneuriales.

D’après Philippe Bloch dans Startup Academy, « La croissance génère toujours de la

complexité. Multiplication d’intervenants non décisionnaires ou pas toujours

clairement identifiés, incapacité à trancher ou arbitrer les conflits, rivalités, jalousies,

politique interne trop souvent préférée à l’action, lenteur de la prise de décisions,

précautionnisme juridique, […] manque de courage, etc. Tout concourt à foncer droit

dans le mur, sans que personne ne s’en alarme ou ne mette les pieds dans le plat. A

une époque où mieux vaut privilégier dix projets imparfaits censés aboutir rapidement

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et portés par de petites équipes métissées plutôt qu’un excellent mégaprojet

mobilisant des centaines d’experts qui verra peut-être le jour dans cinq ans (Philippe

Bloch, 2018). »

De plus le rapport au temps est devenu un enjeu stratégique dans la survie des projets.

Si le temps est mal géré, cela signifie souvent que l’argent ne suivra pas, m’étant en

grand danger l’entreprise dans son ensemble. Autrefois « Les entreprises géraient du

temps long, et devaient affronter plusieurs challenges successifs. Elles doivent

aujourd’hui réagir en permanence à une multitude de menaces et de ruptures

simultanées de toutes sortes qui les empêche de raisonner à long terme. L’innovation

était une phase transitoire entre deux époques de stabilité. Elle avançait de façon

séquentielle, en mode projet, avec un début et une fin (Philippe Bloch, 2018, page

16). » ainsi qu’avec un budget alloué à sa mise en œuvre. « Désormais pratiquée de

façon beaucoup plus agile et intuitive, elle est devenue une obligation permanente

pour toute entreprise soucieuse de sa survie (Philippe Bloch, 2018), page 16). » En

effet, cette agilité et rapidité de mise en œuvre d’actions s’avère un atout primordial

pour faire en sorte qu’un produit ou un service reste numéro un sur le marché, mais

puisse également ne serait-ce que survivre. « Savoir s’extraire de l’urgence et prendre

le temps de capter les signaux faibles sur le terrain avant les autres devient plus

précieux que d’accumuler les seules compétences techniques (Philippe Bloch, 2018,

page 26). »

Les problématiques rencontrées par une startup sont donc nombreuses et les raisons

d’échouer multiples. Avec des moyens humains et financiers limités ainsi qu’une

incertitude sur le business model, l’adoption de l’offre par le marché est la condition

sine qua non de la vente et donc de la croissance de l’entreprise. Cependant, un des

problèmes majeurs auxquels sont confrontées les startups est justement l’absence de

véritable besoin sur le marché visé. Ainsi, une étude CBInsight réalisée sur 101 startups

révèle les principales raisons pour lesquelles ces dernières échouent (The top 20

Reasons Startups Fail, 2018 – CB Insight). En premier lieu revient d’ailleurs l’absence

de marché, ce qui rappelle l’importance de tester les idées au préalable, de les

confronter au marché et à la population ciblée. En effet, le succès d’une innovation est

caractérisé par la rencontre entre une idée et un marché, mais un trop grand nombre

d’entrepreneurs pense davantage « technologie » et oublient d’étudier son

adéquation avec le marché́. Dans de forte imprédictibilité des phénomènes de marché,

cela relève finalement d’une mauvaise écoute de ses usagers. Ainsi, trop de startups

cherchent à obtenir un produit parfait avant même de se confronter au marché et, de

fait, trop de dépenses sont consacrées à la R&D sans engendrer de revenus.

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Vient ensuite le manque de ressources financières, à la fois cause et conséquence de

l’échec.

Nous l’avons vu, pour être en mesure de mener à bien de tels projets, un fondateur

ainsi qu’une équipe qualifiée sont primordiaux. L’équipe dirigeante doit être

solidement armée pour faire face aux nombreux obstacles qui se dressent sur le

chemin du succès. On retrouve ainsi en troisième position des raisons d’échec d’une

startup, des problèmes concernant l’équipe. Malgré une idée de départ parfois

excellente, le profil du/des porteurs de projet peut être un frein au développement

des affaires, cela peut venir par exemple d’un manque de formation à la gestion d’une

entreprise. On constate néanmoins que le diplôme a un impact positif sur le taux

d’échec lors de la première année, mais qu’il n’est plus déterminant ensuite.

Le montant investi lors du démarrage de l’entreprise semble également jouer sur le

taux de survie des sociétés. Toujours selon l’Insee, c’est à partir de 40000€ de capital

investi au démarrage qu’une progression significative des chances de pérennité

apparait. « A ce niveau d’investissement financier, 65% des entreprises de la

génération 2010 sont encore présentes après cinq ans en région (Six entreprises sur

dix encore actives cinq ans après leur création - Insee Flash Hauts-de-France). »

De fait, parvenir à réunir les conditions optimales pour mener à bien de tels projets est

complexe et le parcours d’entrepreneur se révèle semé d’embuches. Ainsi, bon

nombre d’entre eux se sont vu contraint de déposer le bilan après seulement quelques

mois d’activité.

Les cinq premières années de vie constituent la période durant laquelle la jeune

entreprise est la plus vulnérable. Selon Wydden, le taux de pérennité moyen des

entreprises passe de 66,3% à 3 ans à 51% à 5 ans (Les chiffres clés des entreprises en

France en 2019 - Wydden). Elle fait en effet face à des défis et des obstacles majeurs

tels que le manque de ressources, le manque d'information en termes d'opportunités

d'affaires, de réseautage inadéquat, et l'absence de soutien aux entreprises (Hung,

Talib et Rani, 2010). Selon l’Insee, 49,5% des startups françaises sont en échec dans les

cinq années qui suivent leur création (Insee). Qu’il s’agisse d’un ciblage mal réalisé,

d’une dispersion de l’activité, d’un échec de levée de fonds, ou d’une mésentente au

sein de l’entreprise, les causes de l’échec se répètent bien souvent. Toujours d’après

l’Insee, ce sont «les trois premières années d’existence [qui] sont les plus difficiles à

passer pour l’entreprise (Six entreprises sur dix encore actives cinq ans après leur

création – Insee Flash Hauts-de-France). »

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