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I. Revue de littérature

5 Performance de l’écosystème entrepreneurial

5.3 Discussion

Il n’existe donc pas de véritable consensus concernant la mesure de la performance

des systèmes d’accompagnement à l’entrepreneuriat ni de celle des startups

innovantes. Les auteurs d’Incubateur et pépinières d’entreprises mettent également

l’accent sur une absence de standardisation et d’homogénéisation des modèles

(Philippe Albert, Michel Bernasconi & Lynda Gaynor, 2003). Pourtant, différents

chercheurs comme Cullière (2003), Berger-Douce (2005) ou encore Laviolette et Loué

(2007) ont montré que le fait de recourir à un accompagnement via ces structures était

un atout pour les entreprises en démarrage. De plus « l’accompagnement a été

dépeint [...] comme un réel atout pour le lancement et la pérennisation des entreprises

(Maalel, 2016, page 16). » Pour Messeghem et Sammut (2010), les structures

d’accompagnement ont même un rôle essentiel pour transformer un projet en

entreprise pérenne.

La revue de littérature dressée par Maalel (2016) attribue également des rôles

bénéfiques aux incubateurs. Notamment en matière de taux de survie et

d’augmentation du taux de croissance (Sherman, 1999), d’apprentissage avec un

processus qui permet aux incubés d’accroitre leurs connaissances et d’acquérir des

compétences entrepreneuriales transverses (Laviolette et Loué, 2007). Ils confèrent

également un rôle de légitimité avec une réduction du scepticisme des différents

partenaires (Cullière, 2005). Ainsi, la réputation et l'image positive d'un incubateur

peuvent aider à améliorer la légitimité d'une nouvelle entreprise (Aerts et al., 2007) et

lui faciliter le passage à l’étape suivante.

On révèle néanmoins des limites à cet accompagnement et le risque d’isolement au

sein des incubateurs. Messeghem et Sammut (2010) alertent ainsi quant à une

exagération de la protection de l’entrepreneur face aux pressions environnementales.

De plus, ils relèvent un risque de non-correspondance entre les besoins des créateurs

et le soutien proposé.

Il est en effet également établi que certaines structures d’accompagnement ne

réalisent pas leur mission principale et ne parviennent pas à aider les entrepreneurs

dans la réalisation de leurs projets. D’autres études montrent qu’en effet, certains

types d’accompagnement semblent se révéler peu bénéfiques pour l’entrepreneur et

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Julien et Marchesnay signalent dès 1992 que malgré la densité des réseaux mis en

place, l’accompagnement des jeunes entrepreneurs souffre de nombreuses carences.

De même, d’après les auteurs d’Incubateurs et pépinières d’entreprise,« la majorité

des entreprises accueillies considèrent les conseils offerts par les incubateurs comme

peu significatifs (Philippe Albert, Michel Bernasconi & Lynda Gaynor, 2003, page 36).

Pour Messeghem et Sammut (2010) elles peuvent conduire à l’isolement des

entrepreneurs du fait d’une surprotection contre les pressions environnementales ou

du sentiment de non-correspondance entre ses besoins et le soutien qu’il reçoit. Ils

estiment que « l’entrepreneur est souvent seul, même lorsqu’il trouve refuge dans des

structures d’accompagnement (Messeghem et Sammut, 2010). » Certains chercheurs

ont dressé un portrait plus sombre des structures d ‘accompagnement, ainsi d’après

Cullière (2003) « [elles] paraissent peu légitimes, c’est-à-dire peu attractives, aux yeux

des dirigeants de TPE et ce en dépit du potentiel de transferts de savoir-faire qu’elles

représentent ». Les travaux de Rice (2002) limitent le rôle de certaines structures

d’accompagnement à un simple hébergement et un accès à des facilités.

Albert, Bernasconi et Gaynor (2003) dans « incubateurs et pépinières d’entreprises »

estiment qu’actuellement, les domaines qui nécessitent d’être améliorés pour une

meilleure satisfaction des entreprises sont notamment la formation des entrepreneurs

ainsi que la qualité et la quantité des conseils prodigués par les structures

d’accompagnement. D’après une étude publiée en 2015 par le cabinet de conseil

Capgemini, bien que ces centres reçoivent des investissements de la part de

nombreuses organisations et que certains y voient des avantages significatifs, la

création d'une structure d’accompagnement prospère s'avère un défi. Le rapport

affirme ainsi que 80 à 90 % de ces structures ne tiennent pas leurs promesses

(Capgemini Consulting and Altimeter global report reveals leading businesses continue

to struggle with innovation, with traditional R&D model ‘broken’ – Capgemini Juillet

2015).

Malgré ces constats et comme l’ont fait remarquer Hackett et Dilts (2004) ainsi que

Maalel (2016), il existe un réel manque de recherches sur l’évaluation de la

performance des structures d’accompagnement. De même pour Bayad et al (2010),

l’état des recherches ne permet pas de dégager des caractéristiques ayant un impact

sur la réussite entrepreneuriale.

Il parait important pour les startups d'identifier les services d'appui spécifiques qui

contribuent à leur réussite. Il en va de même pour les structures d’accompagnement

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qui auraient avantage à connaitre quelles pratiques apportent une plus-value

importante dans le développement des entreprises qu’elles supportent.

Cependant, peu de recherches ont permis de mettre en exergue quels facteurs

s’avéraient décisifs dans le succès ou l’échec des projets accompagnés.

Il existe donc un manque de preuves empiriques qui permettent de déterminer quels

sont les mécanismes les plus favorables au succès et à la pérennisation d’une jeune

entreprise. Pourtant, identifier ces mécanismes permettrait aux acteurs de

l’accompagnement de concentrer leurs efforts sur les aspects identifiés comme

propices aux succès et à la survie des entreprises.

On note ici l’existence d’un paradoxe des structures d’accompagnement puisqu’elles

sont à la fois des acteurs entraînant la survie, la croissance et la pérennité des

entreprises accompagnées mais elles engendrent également la solitude et l’isolement

de l’entrepreneur. De plus, l’absence de véritable mesure des actions mises en place

par ces organismes amène à se questionner sur la performance réelle de ces structures

d’accompagnement et les véritables attentes des entrepreneurs quant au soutien dans

l’exécution de leur projet.

Ce constat nous amène à nous interroger quant à la pertinence du modèle et à le

mettre en parallèle avec le modèle américain qui s’avère d’une efficacité redoutable.

En effet, la Silicon Valley et San Francisco dominent nettement le classement en

matière d’écosystèmes dynamiques pour les startups (Les Etats Unis centre du monde

pour les startups loin devant l’Europe – Les Echos, Août 2015).

Aux Etats-Unis les incubateurs à succès tels que Ycombinator ou 500startups sont nés

dans un écosystème déjà mature et concentré géographiquement avec la présence des

GAFA et de nombreux investisseurs professionnels et d’entrepreneurs à succès,

capables d’aider leurs startups au niveau financier et opérationnel. Ce sont en effet,

les entrepreneurs et financiers à succès qui forment le socle de l’écosystème américain

et non l’inverse comme en France. C’est d’ailleurs outre Atlantique qu’est né le modèle

de startup studio et qui y a connu un franc succès avec notamment Betaworks, studio

lancé en 2007 à New York et spécialisé dans les entreprises de médias (Start-up

Studios : Vers La Production – Forbes, Janvier 2018).

En investissant massivement dans les startups qu’ils accompagnent, les studios offrent

les meilleures chances en donnant la capacité de sortir rapidement des projets en

prenant de solides positions sur un segment donné. Des montants plus importants

permettent en effet aux jeunes entreprises de concentrer leurs actions sur le

développement sans devoir consacrer un temps, très souvent jugé trop important à la

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recherche de financements. Ils offrent ainsi une plus grande rapidité d’action, en

mettant rapidement les projets à exécution et en testant le marché quasi

instantanément. Ce phénomène qui commence à prendre l’ampleur en France reste

néanmoins marginal, notamment en ce qui concerne le domaine de la santé.

Ainsi, nos travaux ont pour but d’éclairer sur le sujet en prenant en compte le point de

vue des accompagnateurs et des accompagnés. Pour cela, nous interrogerons à la fois

les accompagnateurs, dans leur pratique et sur ce qu’ils estiment propice à la réussite

des projets qu’ils soutiennent, et les entrepreneurs afin de dégager des idées

communes dans les mécanismes qui ont contribués ou qu’ils jugent importants dans

leur réussite.

Notre recherche a pour but d’analyser les mécanismes d’accompagnement et les

dispositifs de soutien à l’entrepreneuriat mis en place en France. Nous chercherons à

évaluer leurs avantages mais aussi leurs carences. Pour cela, nous procédons à

l’examen de l’apport et le positionnement des structures d’accompagnement et leurs

interventions auprès des porteurs de projets. Notre enquête s’intéresse ainsi aux

services qu’elles fournissent pour aider l’entrepreneur dans le développement de son

entreprise. D’autre part, nous cherchons à recueillir le point de vue des entrepreneurs

et la réalité du terrain ainsi que leurs attentes en matière d’accompagnement. Ainsi

nous pourrons rendre un premier avis quant au fonctionnement du startup studio, à

l’acceptation et la viabilité de ce modèle en France dans les jeunes entreprises du

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II. Enquête terrain

1. Méthodologie de recherche

Après avoir passé en revue les caractéristiques et les apports des différents systèmes

d’accompagnement à l’entrepreneuriat ainsi que la façon dont leur performance était

mesurée, nous av

ons donc choisi d’interroger le terrain et d’explorer ce qui est fait en pratique. Notre

objectif est de faire un état des lieux représentatif de la réalité sur l’accompagnement

en France afin de répondre à la problématique soulevée.

Le but de la recherche étant de mettre en évidence les caractéristiques de

l’accompagnement qui apparaissent bénéfiques aux yeux des accompagnés mais aussi

des accompagnants. Pour cela, nous avons choisi de réaliser une enquête terrain et

une étude qualitative à but exploratoire a été privilégiée.

Nous avons donc réalisé des entretiens auprès de ces acteurs puis cherché à extraire

les aspects récurrents jugés comme propices au développement des projets

entrepreneuriaux.

Dans cette partie, nous présenterons le panel de participant et le mode de collecte

d’informations et l’échantillon d’interviewés choisis pour répondre à notre

problématique : « Les apports du startup studio pour les jeunes entreprises du secteur

de la santé en France ». Nous procéderons ensuite à l’analyse des données recueillies

pour éclaircir et étayer les éléments de la partie théorique afin de déterminer en quoi

ce concept peut répondre à la problématique de l’accompagnement à

l’entrepreneuriat en France.

Dans un second temps, nous tenterons d’apporter des éléments de réponse quant à

l’apport de ce nouvel acteur et de mesurer sa valeur par rapport aux autres structures

d’accompagnement existantes, leurs avantages et leurs inconvénients ainsi que la

place que le studio peut occuper au sein de cet écosystème dans le secteur de la santé.

C’est sous l’angle de l’accompagnement de startups existantes que nous

questionnerons nos interviewés.

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