• Aucun résultat trouvé

Chapitre II: Environnement Expérimental

II. 5.4.2.3 Analyse des faciès de rupture

III.2. Analyse quantitative de d’aluminisation

III.2.1. Plan d’essais de corrosion par immersion dans un bain

III.2.2.2. Morphologies des couches intermétalliques

La Figure III.3 présente les différentes morphologies caractéristiques de la couche d’alliage, observées au MEB en coupe. Ces micrographies indiquent que les couches intermétalliques formées lors de la corrosion statique se distinguent par:

 Leur composition chimique (contraste différent en mode BSE),  Leur morphologie (taux de porosité),

 Leurs propriétés mécaniques (présence éventuelle de micro-fissures).

Les couches se présentent sous forme de strates, qui peuvent être continues (cf. Figure III.3.a) ou discontinues (cf. Figure III.3.c), et dont l’interface avec l’acier est parfois rugueuse (cf. Figure III.3.b). Dans certains cas (notamment au niveau des coins de l’éprouvette), la corrosion est hétérogène et présente une interface irrégulière (cf. Figure III.3.d).

La nature et la morphologie de la couche d’alliage et de ses composantes changent également avec les conditions expérimentales. À titre d’exemple, les planches représentées en Annexe B1 illustrent l’évolution en fonction de la durée et la température d’immersion de l’interface acier/couche d’alliage pour des bains d’aluminium de composition AS7G à 750 °C et AlSi9Cu3 à 600, 650 et 700 °C. Le nombre et l’épaisseur de ces couches semblent croître avec la durée d’immersion.

On distingue généralement trois couches (cf. Figure III.4 et Figure III.5)):

 La couche (C1) compacte et continue, et de contraste clair (donc constituée par des éléments chimiques de numéro atomique élevé);

 La couche (C2), située au-dessus de la couche (C1), poreuse et parfois discontinue. Cette couche biphasée est constituée par une matrice plus foncée (donc composée d’éléments chimiques plus légers), dans laquelle apparaissent des phases polygonales claires de taille plus ou moins homogène. De par sa morphologie, cette couche est parfois dénommée «composite» ou «solution solide» dans la littérature [2, 3];

 La couche (C3) se forme entre la couche (C1) et l’acier. Elle semble constituée d’éléments chimiques plus lourds que la couche (C1), car elle apparaît plus claire que cette dernière en contraste de phase. Cette couche, compacte, semble toutefois fragile (elle est traversée par de nombreuses fissures).

Il semble que les couches (C1) et (C2) se forment simultanément, car elles se forment quelles que soient les conditions de température et de temps. La couche (C3) apparaît d’autant plus tard que la température est plus basse: dès la première heure d’immersion à haute température (700 °C), beaucoup plus tard à 600 et 650 °C.

Les épaisseurs respectives de ces couches sont parfois difficiles à déterminer, du fait de leur irrégularité et de l’inter-pénétration des phases (pas d’interface franche). Ce phénomène est particulièrement marqué pour les essais de faisabilité à 750 °C menés avec l’alliage AS7G (cf. Figure III.4). Par contre, dans le cas des essais utilisant un bain d’AlSi9Cu3, les frontières entre les différentes couches intermétalliques sont beaucoup plus nettes et bien définies.

Interaction «Solide/Liquide»: aluminisation de l’acier par immersion à haute température 79

Figure III.3 : Différentes morphologies de la couche d’alliage formée sur les éprouvettes de corrosion statique (MEB/BSE): a) couches intermétalliques continues (ADC3trempé pendant 16 h dans un bain d’AlSi9Cu3 à 650 °C), b) multicouches avec interface rugueuse et fragile (ADC3trempé pendant 9 h dans un bain d’AlSi9Cu3 à 700 °C), c) couches intermétalliques discontinues (SMV3 trempé pendant 15 min dans un bain d’AS7G à 750 °C), d) corrosion hétérogène (SMV3 trempé pendant 2 h dans un bain d’AS7G à 750 °C)

Figure III.4 : Morphologies de la couche d’alliage entre l’AS7G à 750 °C (2 h) et l’SMV3 (a) et l’ADC3 (b)

Figure III.5 : Morphologies de la couche d’alliage entre l’AlSi9Cu3 et l’ADC3

a) trempé à 600 °C pendant 100 h, b) trempé à 650 °C pendant 1h et c) trempé à 650 °C pendant 100 h

d a acier c b acier acier ADC3 SMV3 a b a b c C2 C1 C3

L’interface avec l’acier présente toutefois une rugosité importante pour les températures de bain de 700°C (notamment à partir de 25 heures d’immersion), ce qui pourrait s’expliquer par un phénomène d’aluminisation hétérogène de l’acier (cf. Figure III.3.b et Figure III.4). L’étude de la cinétique de la croissance des couches sera présentée plus loin dans ce chapitre (cf. § III.3.3, p. 107).

On observe que des nuances d’acier différentes (ADC3 et SMV3) modifient légèrement la morphologie et l’épaisseur des phases formées, notamment lorsque la durée d’immersion est significative (1 h ou plus). Ces différences affectent principalement la couche (C2), qui présente des phases polygonales plus grosses et plus denses pour la nuance ADC3 (cf. Annexe B1).

Sundqvist constate également des différences de morphologie entre les phases intermétalliques formées lors de l’aluminisation de deux types d’aciers à outils (AISI H13 et QRO-90), dont la teneur en silicium est différente [4]. Bouayad rapporte pour sa part que, dans le cas des fontes, une augmentation de la teneur en silicium et en carbone diminue considérablement l’épaisseur des couches intermétalliques formées [5].

En revanche, dans le cas des essais aux températures inférieures à 700 °C en utilisant l’AlSi9Cu3, les frontières sont beaucoup plus franches et les couches sont mieux délimitées alors que l’interface acier/intermétallique reste quant à elle très rugueuse pour les essais à 700 °C (cf. Annexe B1). L’analyse morphologique et quantitative des produits d’aluminisation se restreint donc à ces essais. La couche d’alliage est dans ce cas-là (avec l’AlSi9Cu3) constituée d’au moins deux couches juxtaposées et d’une troisième couche, compacte et interne, révélée d’autant plus tôt que la température est plus élevée. Cette dernière couche, désignée par le repère 3, correspondant à son ordre chronologique d’apparition, apparaît à 700 °C dès la première heure d’immersion et présente beaucoup de fissurations, témoignant ainsi de sa fragilité. La couche compacte externe, désignée par (C1), est surmontée de la couche adjacente (C2) qui est très poreuse (couche composite [2, 3]). Ces couches (C1) et (C2) apparaissent quelles que soient les conditions expérimentales. L’épaisseur de la première semble approximativement constante quelles que soient les conditions d’immersion, alors que celle de la deuxième varie avec le temps et la température.

Les Figure III.6.a et b représentent une vue en coupe de l’échantillon trempé pendant respectivement une heure et quatre heures dans un bain d’AlSi9Cu3 à 600 °C. Cette micrographie montre que dans les premiers stades de l’interaction, la couche (C1) semble se décomposer dans la couche (C2) (cf. Figure III.6.a), témoignant de la diffusion de certains éléments de la couche compacte (C1) vers la couche composite (C2), en direction de l’alliage d’aluminium. Les deux couches présentent en effet des contrastes chimiques semblables, ce qui renforce cette hypothèse. Lorsque le processus est stabilisé, les deux couches présentent un aspect beaucoup plus homogène et la transition entre les deux couches est plus nette (cf. Figure III.6.b).

Interaction «Solide/Liquide»: aluminisation de l’acier par immersion à haute température 81

Figure III.6 : Vues détaillées de l’interface entre la couche interne compacte (C1) et la couche poreuse (C2). Éprouvette en ADC3 trempée dans un bain d ’AlSi9Cu3 à 600 °C, pendant 1 heure (a), et 4 heures (b)

Les mêmes constatations ont été rapportées dans diverses études utilisant des alliages similaires [2, 4, 6, 7]. Fraser et al. [8] précisent que les mêmes phases composent les deux couches bien que leur système de cristallisation respectif soit différent. Une étude approfondie, menée quelques années plus tard, a cependant distingué plusieurs phases sur la base d’analyses par DRX [2]. Le rapport entre les épaisseurs de ces couches est révélé dépendre de la teneur en fer dans l’alliage d’aluminium qui elle- même est liée au taux de dissolution de la matrice [3]. En effet, Winkelman [3] considère la couche (C2) comme une «mise en suspension» dans l’alliage d’aluminium de la phase composant la couche (C1). Il introduit le terme de «zone de réaction» pour décrire ces phases intermétalliques dont la morphologie résulte d’une transformation graduelle d’une structure compacte en une structure fragmentée. Un enrichissement en fer du bain d’aluminium, en fusion, se traduit par une augmentation de l’épaisseur de la couche compacte (C1) au détriment de la couche composite (C2), qui s’accompagne d’une réduction de l’épaisseur équivalente totale. Winkelman définit ainsi la couche semi-solide comme une «couche flottante», due à la dissolution de l’intermétallique dans le métal. En effet, la vitesse de diffusion est ralentie à l’état solide, correspondant à une structure compacte (C1), qui est plus épaisse dans l’alliage riche en fer. Dans le cas où la couche (C1) est fine, la diffusion se fait alors principalement à travers la couche composite dont l’aspect poreux favorise le transport de matière et accélère par conséquent la dissolution de la couche intermétallique.

Des analyses par EDS ont montré que les porosités dans la couche (C2) (zones sombres sur la Figure III.6.b) sont riches en aluminium. La couche composite peut donc être considérée comme une solution solide. Le taux de porosité, mesuré par analyse d’images sur des micrographies MEB au grandissement x1000, est d’environ 19% dans la couche d’intermétalliques (C2), formée à 600 et 650 °C. Ce taux reste constant lorsque la durée d’immersion dans le bain augmente. Par contre, la répartition des porosités à 700 °C est moins homogène, la couche composite présentant des «bandes» de compacité plus forte (cf. Figure III.3.b). Le taux de porosité est donc globalement plus faible.

a) b) C2 C2 C1 Résine Al C1