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Chapitre III : Etude de la dévitrification et caractérisation structurale des vitrocéramiques

IV. Etude des vitrocéramiques codopées par ErF 3 et YbF 3

IV.4. Morphologie et composition des vitrocéramiques codopées

Ayant mis en lumière une différence de pouvoirs nucléants entre ErF3 et YbF3, nous

avons voulu savoir si cette différence avait une influence sur la morphologie (taille, forme) des cristallites des vitrocéramiques codopées et si les deux types d’ions Ln3+ étaient incorporés dans les mêmes cristallites. En effet, dans le cas de composés multi-dopés, il est légitime de se demander si les cristallites sont homogènes en taille et en concentration, ou si certaines sont dopées par Er3+ et d’autres par Yb3+.

IV.4.a. Morphologie des cristallites IV.4.a.α. Etude par DRX

Les diagrammes de DRX des vitrocéramiques de composition GPFV+xEr+2Yb où x=[0 ; 0.5 ; 1] et des vitrocéramiques de composition GPFV+0.5Er+yYb, où y=[1.5 ; 2 ; 2.5 ; 3.5] ont été enregistrés. Les tailles des cristallites L et le taux de cristallisation RDRX, déduits

Concentration en LnF3 L (nm) RDRX (%) a (Ǻ) Série à xEr+2Yb

x=0 ; y=2 27.1 ± 0.5 nm 26 ±2 5.822 ± 0.005

x=0.5 ; y=2 16.3 ± 0.5 nm 29 ±2 5.809 ± 0.005

x=1 ; y=2 11.2 ± 0.5 nm 29 ±2 5.797 ± 0.005 Série à 0.5Er+yYb

x=0.5 ; y=1.5 19.6 ± 0.5 nm 24 ±2 5.839 ± 0.005

x=0.5 ; y=2 16.3 ± 0.5 nm 29 ±2 5.809 ± 0.005

x=0.5 ; y=2.5 12.0 ± 0.5 nm 29 ±2 5.778 ± 0.005

x=0.5 ; y=3.5 8.7 ± 0.5 nm 29 ±2 5.779 ± 0.005

Tableau III.10 : Evolution des paramètres cristallographiques de la phase cristalline dans

les vitrocéramiques de composition GPFV+xEr+2Yb et GPFV+0.5Er+yYb.

Les vitrocéramiques codopées contiennent des cristallites dont la taille varie, selon la composition, entre 10 et 30 nm. La taille des cristallites, dans la série des vitrocéramiques GPFV+xEr+2Yb, diminue à mesure que la concentration en ErF3 augmente, le taux de

cristallisation RDRX restant constant par ailleurs. De même, dans la série GPFV+0.5Er+yYb, la

taille des cristallites diminue quand la teneur en YbF3 augmente, RDRX restant constant

également.

Dans une série, l’ajout d’un fluorure de terres rares (ErF3 ou YbF3) conduit à la diminution de

la taille des cristallites résultant de l’augmentation du nombre de germes. Ceci est une preuve supplémentaire du caractère nucléant de ErF3 et YbF3 pour la phase ß-PbF2.

IV.4.a.ß. Etude par MET de la vitrocéramique GPFV+1Er+2Yb

Deux images MET en champ sombre de la vitrocéramique GPFV+1Er+2Yb, issue d’un recuit de 10h à 360°C, sont présentées sur la Figure III.16.

Des cristallites sphériques, distribuées de manière homogène dans le matériau sont observées. La morphologie de cet échantillon codopé ressemble plus à celle d’un échantillon monodopé par ErF3 (Figure III.5) qu’à celle d’un échantillon monodopé par YbF3 (Figure III.9a).

La taille moyenne des cristallites est évaluée par l’analyse de plusieurs images MET à 12.5 ± 0.5 nm avec un écart-type de 3 nm, ce qui est cohérent avec l’analyse du diagramme de DRX qui donne une taille moyenne de 11.2 ± 0.5 nm.

Figure III.16 : Images MET de la vitrocéramique GPFV+1Er+2Yb à différents grossissements.

Dans les vitrocéramiques codopées, les nanocristallites (de 10-30 nm) ont une forme sphérique et sont réparties dans tout le matériau, gardant une morphologie plus proche de celle des composés monodopés par ErF3 que de celle des vitrocéramiques monodopées

par YbF3. ErF3, qui a le plus fort pouvoir nucléant, gouverne le processus de

nucléation/croissance de la phase ß-PbF2.

L’homogénéité de taille et de morphologie des nanocristallites laisse penser qu’elles ont toutes des compositions similaires et qu’il n’y a pas une partie des cristallites dopée par des ions Er3+, et l’autre partie dopée par Yb3+. Afin de déterminer la composition exacte de ces cristallites, nous avons analysé leur paramètre de maille et avons effectué une microanalyse par EDX.

IV.4.b. Composition des cristallites

IV.4.b.α. Analyse du paramètre de maille a

Nous allons, tout d’abord, analyser le paramètre de maille a des cristallites de différentes vitrocéramiques codopées. Les valeurs de a sont reportées dans le Tableau III.10. Pour une teneur fixe en l’un des fluorures de terres rares, l’ajout de l’autre diminue le paramètre de maille. Cette diminution est d’autant plus grande que la quantité de dopants ajoutée est importante. L’évolution des paramètres de maille dans chaque série prouve que les cristallites de ß-PbF2 incorporent les ions Er3+ et les ions Yb3+.

Pour compléter cette étude et conclure à la ségrégation, ou non, des deux types d’ions dans une même cristallite, la vitrocéramique de composition GPFV+1Er+2Yb est analysée par microscopie électronique.

IV.4.b.ß. Microanalyse des cristallites

Pour connaître la composition exacte des cristallites, et, en particulier, la concentration des cristallites en ions terres rares, nous avons dissous la phase amorphe de cette vitrocéramique dans une solution de HF aqueux. Les cristallites extraites ont été analysées par EDX (Figure III.17). On peut observer, sur cette image, une zone moirée, probablement due la superposition de deux cristallites d’orientation différente.

Figure III.17 : Cristallites extraites de la vitrocéramique GPFV+1Er+2Yb

L’analyse d’un grand nombre de cristallites donne des résultats homogènes sur la composition des cristallites (Tableau III.11).

Pb Er Yb F

% atomique expérimental 24.5 (± 0.5) 1.2 (± 0.1) 5.5 (± 0.4) 68.9 (± 0.3)

% atomique attendu 23.9 2.5 4.6 69.0

Tableau III.11 : Composition des nanocristallites de la vitrocéramique GPF+1Er+2Yb. Les écarts-types sont indiqués entre parenthèses

A chaque mesure, les deux ions sont détectés, toujours dans les mêmes proportions. Ceci révèle que ces deux ions Er3+ et Yb3+ entrent bien ensemble dans les mêmes cristallites de ß- PbF2, formant des cristallites composées d’une solution solide mixte Pb1-x-yErxYbyF2+x+y.

Dans le cas contraire, c’est-à-dire si certaines cristallites étaient très riches en Er3+ et d’autres très riches en Yb3+, on aurait eu des écarts importants de composition d’une mesure à l’autre. La composition des cristallites mesurée est Pb0.78Er0.04Yb0.18F2.22, alors que, pour une

ségrégation totale, on s’attendait à Pb0.77Er0.08Yb0.15F2.23. Les cristallites ne sont donc pas

aussi riches en Ln3+ que prévu. Mais il faut noter que ce taux de dopage attendu est très élevé et dépasse la limite de solubilité des ions Er3+ et Yb3+ dans ß-PbF2 [2].

Le rapport expérimental Yb/Pb est quasiment identique à celui attendu, reflétant une incorporation totale des ions ytterbium dans les nanocristallites. La teneur en Er3+ des cristallites est, quant à elle, inférieure à celle attendue d’un facteur 2. Les ions Er3+ semblent être moins bien incorporés aux cristallites que les ions Yb3+. Ceci est plutôt inattendu car les ions Er3+ sont plus solubles que les ions Yb3+ dans ß-PbF2 et ont un pouvoir nucléant plus

élevé.

L’explication de la mauvaise incorporation des ions Er3+ dans les cristallites peut venir du

taux de dopage élevé attendu. Il est probable qu’une fois la limite de solubilité de Ln3+ dans ß-

PbF2 atteinte, les ions restant ne soient plus incorporés dans les cristallites. On peut penser

que les ions Yb3+, plus nombreux, entrent en premier dans les cristallites, puis ce sont les ions Er3+ minoritaires, jusqu’à atteindre la limite de solubilité maximale des lanthanides dans ß- PbF2. Ici, comme le taux de dopage est élevé, tous les ions Er3+ ne peuvent pas être

incorporés.

Ainsi, dans l’échantillon GPFV+1Er+2Yb, le taux de ségrégation pour les ions Yb3+ est proche de 100%, tandis que les ions Er3+ entrent moins facilement dans les cristallites (taux de ségrégation de 40% environ), probablement à cause du dépassement de la limite de solubilité.

Les analyses de DRX et EDX nous ont permis de souligner la double ségrégation des ions Er3+ et Yb3+ dans les cristallites formant une solution solide Pb1-x-yErxYbyF2+x+y.