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Les monitorages auditifs s’intéressant à la vascularisation cochléaire lors de chirurgies de

CHAPITRE 3 ETUDE DU MAINTIEN DE L’INTEGRITE DES FONCTIONS AUDITIVES LORS

A) Etat de l’art

A.3) Les monitorages auditifs s’intéressant à la vascularisation cochléaire lors de chirurgies de

Technique PEAp (latence onde V et interpic I-V) ECoG (onde N1)

PAC direct OEA (PDA)

Invasif NON OUI NON

Continu NON POSSIBLE NON

Temps

d’acquisition Jusqu’à plusieurs minutes Quelques secondes Quelques secondes

Faux positif OUI OUI (mais rare) NON

Faux négatif OUI (37,5%) OUI (mais rare) OUI (atteinte du nerf)

Avantages

Informations sur l’ensemble de la voie

auditive

Information rapide sur le nerf cochléaire

Grande sensibilité à la vascularisation

Limites

- Détection tardive - Non distinction entre

lésion du nerf et vascularisation - Absence en préopératoire - Artefacts et interférences électriques importantes - Positionnement de l’électrode - Non distinction entre lésion

du nerf et vascularisation - Impossible pour les neurinomes de grade IV - Manque d’informations sur certaines parties du nerf auditif

(CAI)

- Sensibilité importante au bruit et aux pertes auditives >

40 dB

- Aucune information sur nerf cochléaire

Tableau 6 : Synthèse des différents monitorages auditifs lors de chirurgie dans l’angle pontocérébelleux

Les techniques précédentes sont les plus populaires et s’intéressent en grande partie au monitorage du nerf cochléaire (Tableau 6). Cependant, malgré la conservation macroscopique du nerf cochléaire et du labyrinthe, des surdités postopératoires sont souvent retrouvées. En effet, il est établi que le maintien d’une vascularisation cochléaire performante est indispensable pour la préservation de l’audition dans les chirurgies de l’APC. Il est aussi admis que l’apport sanguin artériel de la cochlée est de type terminal et est assuré par l’artère labyrinthique. L’artère labyrinthique est donc à l’origine de l’alimentation sanguine de toute la cochlée, y compris la strie vasculaire dans l’organe de Corti. Un des rôles de la strie vasculaire est de maintenir le potentiel endolymphatique cochléaire essentiel à l’activité des CCE. Pour cette raison, en cas d’ischémie cochléaire, par exemple l’atteinte de l’artère labyrinthique, le potentiel

(OEA) (Chapitre 1 C.2) Les produits de distorsion des otoémissions acoustiques), des réponses acoustiques émises lors de la contraction des CCE en réponse à des sons, et le potentiel microphonique cochléaire (PMC) (Chapitre 1C.1) Le potentiel microphonique cochléaire), un signal électrique produit lors de la transduction des canaux ioniques des CCE de la base de la cochlée en réponse à une stimulation sonore. Ces deux mesures auditives reflètent les mécanismes actifs des CCE de la cochlée et sont donc sensibles à des souffrances de la vascularisation cochléaire.

L’ischémie cochléaire peut survenir sous différentes formes et différents degrés de sévérité durant les chirurgies de l’APC (Mom et al., 2014, 2000; Telischi et al., 1999; Morawski et al., 2004). L'intervention de secours par administration de médicaments vasoactifs est concevable (Bischoff et al., 2008; Scheller et al., 2007; Mom et al., 2014) à condition que l'ischémie soit détectée sous quelques dizaines de secondes et ne soit pas due à un dommage terminal, par exemple une section de l'artère labyrinthique, le seul apport sanguin à la cochlée. La détection de l’ischémie cochléaire lors des chirurgies de l’APC montre alors un grand intérêt.

Plusieurs études se sont donc concentrées sur le monitorage de la vascularisation cochléaire, en priorité au moyen des OEA, sous la forme des produits de distorsion acoustique (PDA), mais aussi à l’aide du PMC. Des travaux fondamentaux ont été réalisés chez l’animal, en cherchant une relation entre les variations du débit sanguin cochléaire mesuré par vélocimétrie laser Doppler et les variations de la réponse de la fonction cochléaire monitorée par la mesure continue des PDA et du PMC, lors de gestes de compression ou d’occlusion volontaires de l’artère labyrinthique (Mom et al., 1997; Morawski et al., 2006; Bohórquez et al., 2005; Yavuz et al., 2005). L’expérience a montré une bonne corrélation entre les deux paramètres et l’amplitude des PDA et du PMC s’est révélée être un outil très sensible aux variations de la vascularisation cochléaire. Les changements de l’amplitude des PDA sont par exemple survenus entre 5 à 8 secondes après la compression de l’artère labyrinthique.

A ma connaissance, seule l’équipe de Winzenburg s’est intéressée à la faisabilité de l’enregistrement peropératoire du PMC (extrait de l’ECoG) chez l’homme (Winzenburg et al., 1993), et cela via une technique invasive et une technologie plus ancienne. Elle n’a par contre signalé aucune altération spécifique du PMC concomitante aux manœuvres chirurgicales malgré les bons résultats obtenus plus récemment en laboratoire sur l’animal. Les PDA ont été de leur côté bien plus sollicités chez l’homme, pour exploiter cette haute sensibilité des CCE à l'ischémie cochléaire en pratique chirurgicale. Plusieurs équipes ont ainsi obtenu une bonne

aptitude de l’état des PDA à suivre la vascularisation cochléaire : les PDA ont détecté efficacement les ouvertures labyrinthiques et les interruptions vasculaires (Morawski et al., 2004). L’équipe du professeur Mom (Mom et al., 2014) a quant à elle pu décrire trois évènements vasculaires et profils de dégradations de l’amplitude des PDA rapportés à la fonction auditive postopératoire (Figure 41). Le premier profil « P1 » correspond à une perte abrupte et définitive du signal des PDA et donne lieu à une cophose postopératoire. Ce profil est attribué à un saignement aigu de l’artère labyrinthique. Le second profil « P2 » apparaît lors de la dissection tumorale et s’identifie par une diminution progressive et complète de l’amplitude des PDA. Le mécanisme précis entraînant la perte progressive du signal n’est pas identifié mais il conduit toujours à une cophose postopératoire. Le dernier profil « P3 » intervient lors de fluctuations des PDA qui peuvent durer jusqu’à des dizaines de minutes avant de récupérer totalement le niveau d’amplitude initial du signal. Ce profil est assigné à des phénomènes de vasospasme sur l’artère labyrinthique qui retentissent de manière plus ou moins prononcée sur l’audition postopératoire en fonction de la durée et de la fréquence des spasmes.

Malgré ces résultats probants, les PDA rencontrent plusieurs limitations : il est rare d’obtenir des PDA pour une perte auditive neurosensorielle supérieure ou égale à 40 dB à la meilleure fréquence et sa mesure est facilement parasitée par les bruits extérieurs alors que le bloc opératoire produit des bruits d’intensité minimale de 70 dB. Il est alors difficile de maintenir une mesure continue en PDA et d’utiliser durant toute la surveillance les mêmes paramètres fréquentiels.

L’équipe de Yokoyama (Yokoyama et al., 1999) s’est intéressée à l’utilisation du PMC dans des conditions de surdité et a permis de montrer l’acuité du PMC à donner une réponse relativement grande, malgré un seuil audiométrique élevé chez des patients allant se faire opérer pour exérèse du NA. Le PMC paraît alors être une bonne alternative aux PDA, en étant aussi sensible à l’état de fonctionnement des CCE et donc à la vascularisation de la cochlée et en ayant l’avantage d’être robuste à la perte auditive des patients et au bruit présent au bloc opératoire.

Figure 41 : Les trois profils de dégradation des réponses cochléaires par la mesure des PDA (Adapté de Mom et al., 2014) – a) dégradation brutale, b) dégradation progressive, c) fluctuations

A.4) Apports d’une recherche clinique utilisant le potentiel microphonique cochléaire