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CHAPITRE 3 ETUDE DU MAINTIEN DE L’INTEGRITE DES FONCTIONS AUDITIVES LORS

D) Discussion

D.1) Les avantages du PMC par rapport aux autres techniques de monitorage

Le PMC est un potentiel électrique qui provient des courants de mécanotransduction de la transmission du son à travers les cellules ciliées externes de la base de la cochlée. Les raisons pour lesquelles, indépendamment de la fréquence du stimulus sonore, les contributions basales dominent celles du lieu où est accordé la fréquence de stimulation sur la cochlée sont : la proximité de l'électrode de recueil et le fait que la moyenne spatiale favorise les groupes cellulaires qui réagissent en phase, une propriété du trajet d'onde à la base qui disparaît plus apicalement, près du lieu de résonance. Les courants de mécanotransduction de la base dépendent de deux facteurs : l'intégrité des CCE, qui n’est pas directement menacée par la chirurgie dans l’APC à moins que la capsule otique ne soit endommagée mécaniquement ; et le potentiel endocochléaire, qui dirige le flux ionique à travers les canaux ioniques ouverts lors de la mécanotransduction. Le potentiel endocochléaire diminue en quelques secondes chaque fois que la vascularisation cochléaire est compromise (Shi X, 2011), ainsi le PMC devrait refléter ces événements de manière rapide et sensible, comme cela a été confirmé dans les modèles animaux (Mom et al., 1997 ; Yavuz et al., 2005 ; Bohórquez et al., 2005).

Une alternative au PMC, qui a déjà été testée antérieurement, avec une sensibilité similaire à la vascularisation cochléaire sont les PDA générés dans la cochlée en réponse à une paire de sons purs aux fréquences voisines f1 et f2. Les PDA à 2f1-f2 reflètent l’électromotilité des CCE situées principalement dans la région cochléaire accordée aux stimuli (Avan et al., 2013). Comme pour le PMC, l’amplitude des PDA dépend de l'intégrité des CCE et de la capacité des CCE à amplifier le son, ce qui nécessite un potentiel endocochléaire important. Pour détecter les épisodes de réduction du flux sanguin cochléaire, la région cochléaire explorée, soit basale avec le PMC ou apicale avec les PDA, n'a pas d'importance car une diminution du potentiel endocochléaire affecte la spire cochléaire sur toute sa longueur. Il a été démontré dans les modèles animaux que les PDA détectent l'ischémie cochléaire en quelques secondes (Telischi et al., 1999) ce qui a amené à leur utilisation pour la surveillance peropératoire des neurinomes de l’acoustique (Morawski et al., 2004 ; Mom et al., 2014). Bien que le taux d'échantillonnage

entre 1,5 et 3 kHz chaque fois que le spectre de bruit changeait durant la chirurgie, ce qui prenait du temps, un temps durant lequel la mesure était évidemment interrompue (Mom et al., 2014). Ainsi, le monitorage peropératoire des PDA n’a pas offert une vision complète de ce qui se passe pendant les interventions chirurgicales, contrairement au PMC dans le présent travail, qui a nécessité un taux d'échantillonnage de 6 points par minute.

Le PMC n'est qu'une des composantes d'un enregistrement électrocochléographique (ECoG) qui contient également le potentiel d'action composé constitué à partir des réponses distales et synchrones des fibres nerveuses cochléaires au début du stimulus sonore. Dans le passé, l'ECoG a été utilisé pour la surveillance peropératoire des neurinomes de l’acoustique principalement après l'extraction du PAC et l'élimination du PMC au moyen de stimuli sonores à polarité alternée. Dans la plupart des publications, une électrode transtympanique a été utilisée (Winzenburg et al., 1993 ; Morawski et al., 2007 ; Gouveris et Mann, 2009) alors qu'une électrode extratympanique, comme dans le présent travail, a également été testée avec succès dans deux expérimentations (Winzenburg et al., 1993 ; Mullatti et al., 1999). Le PAC a montré dans ces travaux une réponse à l'ischémie cochléaire ou aux traumatismes mécaniques en augmentant son seuil et sa latence. Cependant, il n'est pas directement sensible à la fonctionnalité du nerf cochléaire.

Les PEAp dérivés des électrodes de surface sont quant à eux, en théorie, appropriés pour détecter les dommages peropératoires du nerf cochléaire, qui peut se caractériser par une augmentation du seuil et des latences des ondes III et V sans modifier l'onde I. Le principal inconvénient des PEAp par rapport au PMC provient de la moyenne d'environ 1000 points au- dessus du seuil de réjection du bruit (à un taux de 20 / s) pour une identification claire des altérations des ondes à un niveau de stimulation donné, ce qui prend plusieurs minutes (Neu et al., 1999 ; Yamakami et al., 2009 ; Oh et al., 2012 ; Aihara et al., 2014). Une deuxième limitation drastique des PEAp, qui n’est pas rare de rencontrer pour les neurinomes de l’acoustique, est l'absence préopératoire des ondes III et V. Une dernière limitation est que l'onde I des PEAp est 2,5 fois plus petite que son homologue le PAC (Mullatti et al., 1999) et que sans son identification, il devient impossible de séparer les événements liés à l'ischémie cochléaire et ceux liés à une lésion du nerf cochléaire.

Techniquement, le PMC a permis une surveillance efficace de la vascularisation de la cochlée. Pour tous les patients (dans les deux groupes), le PMC peropératoire a été enregistré en continu du début à la fin de l’intervention sans problème d’acquisition, sauf pendant des intervalles de

temps de quelques dizaines de secondes pendant le fraisage, l'aspiration ou la cautérisation à la mono ou bipolaire, où le bruit électrique important a déclenché le rejet des données. Néanmoins, les perturbations du signal lors de ces manœuvres sont aussi reportées avec toutes les autres techniques énumérées plus haut.

De plus, dans notre série consécutive de patients proposés à l’inclusion, seuls 6 patients atteints d’un neurinome de l’acoustique ont été exclus à cause d’une amplitude du PMC insuffisante (contre 31 inscrits). 44% (N= 22) des patients inscrits n'avaient pas de PDA préopératoire convenable en lien avec une perte auditive > 40 dB. Les deux tiers des patients atteints de neurinome de l’acoustique avaient des tumeurs de stade III ou IV dont 59% (N=13) avec des PEAp absents ou altérés excluant une surveillance basée sur les PEAp.

D.2) La signification des dégradations peropératoires du PMC par rapport aux