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Chapitre I : Synthèse bibliographique et contexte de la thèse

3. Vers de nouvelles générations de barrière environnementale

3.1. Modification de la couche supérieure

3.1.1. Ajouts d’alumine ou de composés riches en alumine (mullite, YAG)

Des modifications peuvent être apportées aux couches supérieures de l’EBC dans le but de réduire la vitesse d’oxydation de la TGO. Lee a testé l’ajout d’oxydes (Al2O3 et/ou TiO2) ou de composés contenant de l’alumine (YAG : Y3Al5O12 et/ou mullite : 3Al2O3,2SiO2) dans la couche supérieure (DSYb) [Lee, 2019]. Les compositions des couches modifiées, élaborées par projection plasma sont détaillées en Tableau I.5. Les cinétiques d’oxydation sous cyclage thermique (cycle de 1 h à 1316°C puis 20 min à T < 100°C, 90 % H2O + 10 % O2, vgaz = 10 cm/s en zone chaude) des couches d’oxyde des EBC modifiées sont comparées avec celle de la TGO de l’EBC de référence Si/DSYb (voir Figure I.31). Nom du groupe Identifiant de l’EBC Yb2Si2O7 Mullite Al2O3 Y3Al5O12 (YAG) TiO2 Référence (baseline) B 100 0 0 0 0 I 6A ≈94-98 0 6 0 0 M2Y 1,39 0 2,33 0 3M 2,78 0 0 0 2Y 0 0 2,33 0 M5Y 1,39 0 4,66 0 II M ≈ 98 1,39 0 0 0 AT 0 1 0 1 MT 1,39 0 0 1

Tableau I.5 : Compositions des EBC modifiées (en % massique) [Lee, 2019].

Figure I.31 : Epaisseur de la TGO des systèmes EBC à base d’ajouts (groupe I et II) en fonction du temps d’exposition (1316°C, 90 % vol H2O + 10 % vol O2) [Lee, 2019]. Les épaisseurs sont comparées avec celle de la TGO du système de référence (baseline) Si/DSYb (a) Groupe I ; (b) Groupe II.

L’ajout d’alumine ou de composés oxydes contenant de l’alumine tels que la mullite ou le YAG en teneur suffisante (Groupe I) réduit l’épaisseur de la TGO d’environ 80 % par rapport à l’EBC de référence. En revanche, en cas d’ajout combiné de TiO2 et d’un composé oxyde contenant de l’alumine (AT et MT), les cinétiques de croissance de la TGO sont proches de celles du système de référence. Les auteurs prédisent une amélioration moyenne de la durée de vie de l’ordre de 20 % pouvant même atteindre 60 % avec les ajouts les plus prometteurs (1,39 % massique mullite + 2,33 % massique YAG).

Des images MEB en coupe des TGO formées sont présentées en Figure I.32. Une fissuration verticale au sein de la TGO et à l’interface TGO/DSYb comparable au système de référence (Figure I.32 a) est visible dans le cas du système AT (DSYb + 1 % massique Al2O3 + 1 % massique TiO2,Figure I.32 b). Une fine couche de TGO adhérente et ne présentant pas de fissuration marquée est observée pour le système M5Y (DSYb + 1,39 % massique mullite + 4,66 % massique YAG, Figure I.32 c). Dans le cas de la couche supérieure modifiée contenant la teneur massique la plus élevée d’alumine (6A, Figure I.32 d et Figure I.32 e), une couche continue gris clair se situe à l’interface TGO/EBC au premier temps (observable à 100 h, 500 h) puis disparaît à 1000 h. Des précipités gris clair se sont formés dans la sous-couche (encerclés sur les images). Des analyses EDS ont identifié cette couche et ces précipités comme des silicates d’ytterbium et d’aluminium. Ces silicates probablement formés par réaction des précipités MSYb avec les oxydes modificateurs, ont migré de la couche supérieure à la couche de liaison en passant par la TGO, qu’ils sont venus enrichir en Yb et Al.

L’hypothèse proposée pour expliquer la diminution de l’épaisseur de la TGO est une modification par Al et Yb de la structure de la SiO2, qui devient moins perméable aux espèces oxydantes. En effet, dans ces travaux, les cinétiques de croissance de la TGO sont paraboliques, révélatrices d’une oxydation contrôlée par la perméation des espèces oxydantes à travers la TGO. Les auteurs annoncent une absence de fissuration pouvant laisser penser que la TGO est amorphe.

Il convient de noter que des cinétiques paraboliques ont été identifiées et que les épaisseurs de TGO avant l’optimisation sont plus élevées que les épaisseurs généralement mesurées sur les systèmes Si/RE2Si2O7. Cette différence est vraisemblablement due à une porosité importante des revêtements. Lorsque la couche supérieure est dense, les cinétiques d’oxydation sont linéaires, plus faibles et limitées par la diffusion des espèces oxydantes à travers la couche supérieure [Richards et al., 2016]. De plus, des analyses complémentaires semblent être requises de manière à valider l’hypothèse avancée. Les auteurs n’ont pas cherché à caractériser la structure de l’oxyde formé. Même si une absence de fissuration est annoncée, quelques fissures sont observables sur les images et interrogent sur la capacité des ajouts à amorphiser l’oxyde. Ces fissures pourraient se propager après des durées plus longues de tests et amorcer une délamination du revêtement. Du fait des faibles épaisseurs des TGO mesurées et des faibles teneurs (< 2 % massique), l’analyse des pointés EDS reste semi-quantitative, il est possible que le signal de zones à proximité ait également interféré.

Figure I.32 : Vue en coupe au MEB de la TGO et analyse EDS des systèmes EBC modifiés après cyclage thermique (cycle de 1 h à 1316°C puis 20 min à T < 100°C, 90 % H2O/10 % O2, vgaz = 10 cm/s en zone chaude)[Lee, 2019]. (a) Système de référence (Si/DSYb) après 1000 h ; (b) M5Y (Si/DSYb +1,39 % massique mullite + 4,66 % massique YAG) après 1000 h ; (c) AT (Si/DSYb + 1 % massique Al2O3 + 1 % massique TiO2) après 1000 h ; (d) 6A (Si/DSYb + 6 % massique Al2O3) après 500 h ; (e) 6A (Si/DSYb + 6 % massique Al2O3) après 500 h.

3.1.1. Ajout d’une couche intermédiaire à base de SiC et de RE

2

Si

2

O

7 Klem et al. parviennent quant à eux à retarder la formation de la TGO à l’interface Si/EBC par report de l’oxydation en volume dans une couche intermédiaire contenant des particules oxydables SiC [Klemm et al., 2020]. Ce concept a été testé avec succès en banc d’essai de combustion (1200°C, 100 m/s, 100 h, PH2O = 0,2/bar) sur un système tricouche (voir Figure I.33 A) composé d’une sous-couche en silicium élaborée par APS, une sous-couche intermédiaire composée de DSYb et de SiC élaborée par SPPS et une couche supérieure en MSYb élaborée par SPPS. Les espèces oxydantes O2 et H2O en traversant le revêtement, réagissent avec les grains de SiC et forment à leur surface de la silice (voir Figure I.33 B). Elles ne peuvent pas atteindre l’interface Si/EBC puisqu’elles sont piégées par SiC. Lorsque l’oxydation se poursuit, les particules de SiC continuent de s’oxyder, jusqu’à être totalement oxydées. La volatilisation de la silice formée créé des pores au sein de la couche intermédiaire (voir Figure I.33 B). Le rôle de la couche intermédiaire a alors atteint sa limite : les espèces oxydantes peuvent

maintenant diffuser jusqu’à la sous-couche et former par réaction avec le silicium la TGO (Figure I.33 C).

Figure I.33 : Vue en coupe au MEB d’un composite SiCF/SiC(N) revêtu par un système tricouche Si/(DSYb+SiC)/MSYb après test en banc d’essai de combustion (1200°C, 100 h, PH2O/bar = 0,2, P = 1 atm, vgaz = 100 m/s) [Klemm et al., 2020] (A) Vue générale ; (B) Détail de l’interface (DSYb+SiC)/ MSYb ; (C) Détail de l’interface Si/(DSYb+SiC).

Ainsi, les modifications de la couche supérieure proposées dans la littérature ralentissent la cinétique d’oxydation de la TGO. Les problématiques de contraintes engendrées par la croissance de la TGO et la transformation de phase de la cristobalite ne sont pas résolues mais uniquement retardées. Seul l’ajout d’alumine pourrait avoir un effet sur la structure cristalline de la TGO, mais celui-ci reste à confirmer par des analyses détaillées. Pour résoudre les problématiques liées aux contraintes générées par la croissance de l’oxyde, il semble préférable de travailler sur la modification de la sous-couche.