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Mod`ele des sph`eres dures in´elastiques

7.4.1 Introduction

Les milieux granulaires (poudres, sables, ...) sont caract´eris´es par les pro-pri´et´es suivantes : la taille des particules est tr`es sup´erieure aux ´echelles ato-miques (au moins plusieurs centaines de microm`etres) ; les interactions entre les particules se manifestent sur des distances tr`es inf´erieures aux dimensions

2Je rappelle bien entendu que la r´ealisation exp´erimentale, sans invitation des autorit´es comp´etentes, est r´epr´ehensible tant sur le plan moral que sur le plan p´enal.

3Je vous laisse la responsabilit´e de r´ealiser un dispositif exp´erimental dans votre cuisine pour v´erifier la v´eracit´e de ces r´esultats, mais je ne prends pas en charge les d´egˆats occasionn´es.

7.4 Mod`ele des sph`eres dures in´elastiques

de celles-ci ; lors des collisions entre particules, une partie de l’´energie cin´etique est transform´ee en ´echauffement local au niveau du contact ; compte tenu de la masse des particules, l’´energie d’agitation thermique est n´egligeable devant l’energie gravitationnelle et l’´energie inject´ee dans le syst`eme (g´en´eralement sous forme de vibrations).

En l’absence d’apport continu d’´energie, un milieu granulaire transforme tr`es rapidement l’´energie cin´etique re¸cue en chaleur. Au niveau macroscopique (qui est celui de l’observation), le syst`eme apparaˆıt comme dissipatif. Compte tenu de la s´eparation importante entre les ´echelles de temps et celle entre les longueurs microscopiques et macroscopiques, on peut consid´erer que le temps de collision est n´egligeable devant le temps de vol d’une particule, c’est `a dire que la collision entre particules peut ˆetre suppos´ee instantan´ee. Comme les interactions sont `a tr`es courte port´ee et que les particules sont peu d´eformables (pour des collisions “pas trop violentes”), on peut supposer que le potentiel d’interaction est un potentiel de coeur dur. La derni`ere caract´eristique, `a prendre en compte, est la dissipation de l’´energie cin´etique du syst`eme : au moment d’une collision, l’´energie cin´etique des particules n’est pas conserv´ee. Pour deux particules de mˆeme masse, on a

|v1|2+|v2|2 = e(|v01|2+|v02|2) (7.15) o`u e est appel´e le coefficient de restitution. La quantit´e de mouvement reste bien entendu conserv´ee lors de la collision :

v1+ v2 = v01+ v02. (7.16)

7.4.2 D´efinition

Ainsi le syst`eme des sph`eres dures in´elastiques est d´efini comme un ensemble de particules sph´eriques interagissant par un potentiel r´epulsif infiniment dur. En supposant que la composante tangentielle de la vitesse est conserv´ee au cours de la collision, on obtient alors les r`egles suivantes de collision :

v0i,j = vi,j±1 + e2 [(vj− vi).ˆn]ˆn (7.17) avec

ˆ

n= r1− r2

|r1− r2|. (7.18)

On obtient alors un mod`ele particuli`erement adapt´e pour une ´etude en simu-lation de Dynamique Mol´eculaire. Nous avons vu, au chapitre 3, le principe de la Dynamique Mol´eculaire pour des sph`eres dures (´elastiques) ; l’algorithme de simulation pour des sph`eres dures in´elastiques est fondamentalement le mˆeme. Une premi`ere diff´erence intervient dans l’´ecriture des r`egles de collisions qui, bien ´evidemment, doivent respecter l’´equation (7.17). Une deuxi`eme diff´erence apparaˆıt durant la simulation, car le syst`eme perd r´eguli`erement de l’´energie.

7.4.3 R´esultats

Cette propri´et´e de perte d’´energie a plusieurs cons´equences : d’une part, pour garder l’´energie constante en Dynamique Mol´eculaire, il est n´ecessaire

de fournir une ´energie externe au syst`eme, d’autre part, l’existence de cette perte d’´energie est `a l’origine du ph´enom`ene d’agr´egation des particules. Cela se traduit par le fait que, mˆeme si l’on part avec une distribution uniforme de particules dans l’espace, le syst`eme ´evolue spontan´ement aux temps longs vers une situation o`u les particules se regroupent par amas. La densit´e locale de ces derniers est tr`es sup´erieure `a la densit´e uniforme initiale ; corr´elativement, il apparaˆıt des r´egions de l’espace, o`u la densit´e de particules devient tr`es faible. Quand la densit´e des particules augmente, il se produit un ph´enom`ene qui va bloquer rapidement la simulation : il s’agit de l’effrondrement in´elastique. Comme les particules perdent de l’´energie au cours des collisions, on peut se trouver dans la situation o`u trois particules (pratiquement align´ees) vont ˆetre le si`ege de collisions successives. Dans cet amas de trois particules, le temps entre collisions va diminuer au cours du temps jusqu’`a tendre vers z´ero. De fa¸con asymptotique, on assiste `a un “collage de deux particules” entre elles4.

L’effet qui peut apparaˆıtre dans une simulation entre une particule “enca-dr´ee” par deux voisines peut ˆetre compris en consid´erant le ph´enom`ene ´el´emen-taire du rebondissement d’une seule bille in´elastique, sur un plan, soumise `a un champ de pesanteur. On appelle h la hauteur `a laquelle la bille est lˆach´ee. Au premier contact avec le plan, le temps ´ecoul´e est t1 =p2h/g et la vitesse avant la collision est √

2gh. Juste apr`es le premier contact avec le plan, la vitesse devient e√

2gh. Au second contact, le temps ´ecoul´e est

t2= t1+ 2et1 (7.19)

et pour le ni`eme contact, on a tn= t1 Ã 1 + 2 n−1 X i=1 ei ! . (7.20)

Ainsi, pour un nombre infini de collisions, on a t=t1 µ 1 + 2e 1− e ¶ (7.21) =t1 1 + e 1− e (7.22)

Un temps fini s’est ´ecoul´e jusqu’`a la situation finale o`u la bille est au repos sur le plan, et cela n´ecessite un nombre infini de collisions.

Pour la simulation, un tel ph´enom`ene conduit `a un arrˆet de l’´evolution de la dynamique. Au del`a de l’aspect gˆenant pour la simulation, nos hypoth`eses physiques concernant la collision ne sont plus valables aux tr`es faibles vitesses. Quand la vitesse de la particule devient tr`es petite, celle-ci devient inf´erieure `a la vitesse d’agitation thermique, qui est certes faible, mais finie dans la r´ealit´e. Physiquement, le coefficient de restitution d´epend en fait de la vitesse de col-lision et n’est constant que pour des vitesses relatives au moment du choc qui restent macroscopiques. Quand les vitesses tendent vers z´ero, le coefficient de restitution tend vers 1,et les collisions entre particules redeviennent ´elastiques.

7.4 Mod`ele des sph`eres dures in´elastiques

Finalement, mˆeme si on s’attend que des sph`eres in´elastiques finissent par voir d´ecroˆıtre leur ´energie cin´etique jusqu’`a une valeur ´egale `a z´ero (en l’ab-sence d’une source ext´erieure qui apporterait de l’´energie pour compenser la dissipation li´ee aux collisions), la simulation des sph`eres in´elastiques ne permet d’atteindre cet ´etat d’´energie nulle, car celle-ci est stopp´ee bien avant, d`es qu’une sph`ere se trouve dans la situation de collisions multiples entre deux partenaires. Si l’on souhaite avoir une mod´elisation proche de l’exp´erience, il est n´eces-saire de tenir compte des conditions aux limites proches de l’exp´erience : pour fournir de l’´energie de mani`ere permanente au syst`eme, il y a g´en´eralement un mur qui effectue un mouvement vibratoire. A cause des collisions entre les particules et le mur qui vibre, cela se traduit par un bilan net positif d’´energie cin´etique inject´ee dans le syst`eme, ce qui permet de maintenir une agitation des particules malgr´e les collisions in´elastiques entre particules.

En conclusion, le mod`ele des sph`eres in´elastiques est un bon outil pour la mod´elisation des milieux granulaires, si ceux-ci conservent une agitation suf-fisante. En l’absence d’injection d’´energie, ce mod`ele ne peut d´ecrire que les ph´enom`enes prenant place dans un intervalle de temps limit´e.

Chapitre 8

Cin´etique lente, vieillissement.

Contenu

8.1 Introduction . . . . 93 8.2 Formalisme . . . . 94 8.2.1 Fonctions de corr´elation et de r´eponse `a deux temps. . 94 8.2.2 R´egime de vieillissement et lois d’´echelle . . . 95 8.2.3 Vieillissement interrompu . . . 96 8.2.4 “Violation” du th´eor`eme de fluctuation-dissipation . . 96 8.3 Mod`ele d’adsorption-d´esorption . . . . 97 8.3.1 Introduction . . . 97 8.3.2 D´efinition . . . 97 8.3.3 Cin´etique . . . 98 8.3.4 R´eponse lin´eaire `a l’´equilibre . . . 99 8.3.5 Mˆemes les bˆatonnets vieillissent ! . . . 100 8.3.6 Algorithme . . . 100 8.4 Conclusion . . . . 102

8.1 Introduction

Nous avons vu, au chapitre pr´ec´edent, que la physique statistique pouvait d´ecrire des ph´enom`enes qui ´etaient en dehors d’un ´equilibre thermodynamique. Les situations physiques consid´er´ees entraˆınaient le syst`eme `a ´evoluer vers un ´etat hors d’´equilibre. Une autre classe de situations physiques, rencontr´ees fr´e-quemment sur le plan exp´erimental, concerne les syst`emes dont le retour `a un ´etat d’´equilibre est tr`es lent.

Quand le temps de relaxation est tr`es sup´erieur au temps de l’observation, les grandeurs, que l’on peut mesurer dans une exp´erience (ou une simulation num´erique), d´ependent plus ou moins fortement de l’´etat du syst`eme. Cela si-gnifie que, si l’on effectue deux exp´eriences sur le mˆeme syst`eme, `a quelques jours voire quelques ann´ees d’intervalle, les grandeurs mesur´ees diff`erent. Pen-dant longtemps, une telle situation a repr´esent´e un frein dans la compr´ehension du comportement de ces syst`emes.

Depuis une dizaine d’ann´ees, grˆace `a l’accumulation de r´esultats exp´erimen-taux (verres de spins, vieillissement des polym`eres plastiques, milieux granu-laires,...), `a l’´etude th´eorique des ph´enom`enes de croissance de domaines (simu-lation et r´esultats exacts), et `a la dynamique des mod`eles de spins (avec d´esordre gel´e), il apparaˆıt qu’il existe une certaine forme d’universalit´e des propri´et´es de non-´equilibre.

L’activit´e scientifique portant sur cette physique statistique hors d’´equilibre est, `a l’heure actuelle, tr`es importante. Une grande partie des lois propos´ees provenant des d´eveloppement th´eoriques, restent `a ce jour des conjectures. La simulation num´erique, permettant de d´eterminer le comportement pr´ecis de l’´evolution des syst`emes, constitue un apport important pour une meilleure connaissance de la physique de ces syst`emes.