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La deuxième étape dans la conception de notre générateur stochastique d’événements de houle consiste à modéliser l’occurrence des événements afin de reconstruire des séries temporelles réalistes d’événements de houle. En effet, de nombreuses applications comme l’estimation de l’évolution morphodynamique du trait de côte ou encore l’estimation de la probabilité d’occurrence des fenêtres météorologiques pour les opérations en mer, né-cessitent de modéliser la manière dont s’enchaînent les événements. Par exemple, des événements de houle de forte intensité associées à des temps d’inter-arrivée faibles aug-menteraient sans doute les risques d’érosion. Par ailleurs, une longue durée entre deux événements successifs favoriserait les opérations marines (installation des plates-formes offshores, des convertisseurs d’énergie de vagues, maintenance des systèmes en mer, etc.). Pour modéliser l’occurrence des événements, il nous faut, dans un premier temps, défi-nir un temps d’inter-arrivée entre les événements, puis modéliser la distribution empirique des données du temps d’inter-arrivée.

6.3.1 Temps d’inter-arrivée des événements de houle

Nous définissons le temps d’inter-arrivée noté I comme la durée entre les dates de dé-but de deux événements successifs. Cette définition du temps d’inter-arrivée est illustrée dans la figure6.25(à gauche). Dans la même figure à droite est représentée la distribution mensuelle des données de I. Contrairement à certains paramètres du SEM notamment l’énergie des événements (E), il n’ y a pas d’effet de saisonnalité notable dans les distri-butions de I ; la distribution de I est à peu près semblable pour tous les mois. Même si les

événements de houle les plus intenses surviennent pendant l’été, la fréquence d’occurrence des événements quant à elle est relativement constante au long de l’année.

60 80 100 120 140 160 180 200 220 240 260 0 5 10 15 Pw (kW.m −1 ) time (h) I 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 Month I (day)

Figure 6.25 – Définition du temps d’inter-arrivée entre deux événements de houle suc-cessifs (à gauche) ; distribution mensuelle des données du temps d’inter-arrivée (droite)

6.3.2 Modélisation de la distribution du temps d’inter-arrivée des événements de houle

Généralement la fréquence d’événements aléatoires indépendants est modélisée par une loi de Poisson. Cela implique que le temps d’inter-arrivée entre événements successifs suit une loi exponentielle (Ross, others[1996]). Or, les distributions marginales de I obtenues à partir des données sont différentes de celle d’une loi exponentielle. La figure6.26(à gauche) montre l’histogramme de la distribution empirique de I pour le mois d’août. On peut y voir que cette distribution n’est pas celle d’une loi exponentielle. D’autres types de lois qui permettent de modéliser de façon plus générale la distribution du temps d’inter-arrivée, notamment la loi de Weibull (McShane et al.[2008]) et la loi Gamma (Sim [1992],Miller, Bhat[1997]) sont souvent utilisées. Entre la loi de Weibull (figure 6.26, à droite) et la loi Gamma (figure 6.26, au centre), la dernière modélise mieux les données de I et a donc été retenue pour la modélisation des temps d’inter-arrivée. La loi Gamma est très flexible dans la modélisation du temps d’inter-arrivée et il faut remarquer que la loi exponentielle est un cas particulier de la loi Gamma. Remarquons cependant que le modèle Gamma, pour ce mois, surestime légèrement les valeurs de I qui dépassent 7 jours, ce qui conduirait dans la simulation à des temps d’inter-arrivée légèrement plus longs. mais, cela ne risque pas d’affecter de manière conséquente la simulation parce que l’effectif de I pour lequel

I > 7jours est très faible.

Le temps d’inter-arrivée est corrélé avec la durée de l’événement qui le précède. En effet, tant qu’une tempête reste active dans la zone de génération des houles, il y a moins de chance d’en voir apparaître une autre dans la même zone. Ainsi, au point d’observation des houles, si un événement de forte intensité dure dans le temps, la probabilité de détecter un nouvel événement dans la même direction est faible, conduisant dans ce cas à de longs temps d’inter-arrivée. Or, la durée de l’événement est elle-même corrélée à ses paramètres caractéristiques notamment à son énergie (E) et à la distance parcourue par les houles (d). Par exemple, la durée de l’événement de houle est d’autant plus longue que cet événement a été généré loin du point d’observation. En conséquence, il est prévisible que I soit aussi

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 I(day) Empirical Exponential 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 Gamma empirical D* = 0.36 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 Weibull empirical D* = 0.8

Figure 6.26 – Histogramme de I (à gauche) ; Diagramme quantile-quantile entre distri-bution empirique de I et les lois Gamma (au centre) et de Weibull (à droite) (cas du mois d’août) 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000 1 2 3 4 5 6 7 8 9 E (kWh.m−1) I(day) 20001 3000 4000 5000 6000 7000 8000 9000 10000 2 3 4 5 6 7 8 9 d (km) I(day)

Figure 6.27 – Nuage de points entre I et E (à gauche) et entre I et d (à droite)(cas du mois d’août)

corrélé à E et à d comme le montrent les nuages de points de la figure 6.27. Si nous voulons simuler des temps d’inter-arrivée représentatifs des observations, il est nécessaire de prendre en compte cette corrélation entre I et les paramètres de l’événement qui le précède.

En tenant compte du fait que la loi marginale de I est bien modélisée par une loi Gamma et que I est corrélé aussi bien à E et d qu’avec Tmax, il nous a paru raisonnable de simuler I conditionnellement à ces paramètres en utilisant un GLM (Section 6.2.3). Ce GLM utilise la loi Gamma comme distribution de I et une fonction lien canonique inverse :

g (E(I)) = β0+ β1E + β2d + β3Tmax (6.27)

où E(I) est l’espérance de I et g la fonction lien inverse. Les valeurs des coefficients β sont renseignées dans le tableau 6.12.

Le diagnostic du modèle est présenté dans la figure6.28qui s’interprète comme indiqué plus haut dans la section6.2.3. Sur la partie gauche sont représentés les résidus en fonction des valeurs prédites de I. Les résidus sont quasiment distribués de manière symétrique autour de zéro. Sur la partie droite est représentée la racine carrée des résidus normalisés. La tendance n’est pas horizontale comme elle le serait si le modèle était parfait. On remarque que la variance croit légèrement avec les valeurs prédites, ce qui se traduirait

Variables explicatives Estimation (βi)

E −1.44 × 10−6

d −0.51 × 10−6

Tmax −1.57 × 10−2

Ordonnée à l’origine 1.1

Table 6.12 – Coefficients du GLM exprimant I en fonction de E, τ, d, Tmax.

0.15 0.20 0.25 0.30 0.35 0.40 0.45 −0.5 0.0 0.5 Predicted values Residuals glm(I ~ E + Tmax + d) Residuals vs Fitted 25 71 75 0.15 0.20 0.25 0.30 0.35 0.40 0.45 0.0 0.5 1.0 1.5 Predicted values S td . d e vi a n ce r e si d . glm(I ~ E + Tmax + d) 25 71 75

Figure 6.28 – Diagnostic du GLM exprimant I en fonction de E, τ, d, Tmax.

dans la simulation par une variabilité importante autour de la moyenne des grandes valeurs de I. Nous montrons comme résultat de simulation I dans la figure6.29 la comparaison entre la distribution jointe du couple {d, I} simulé et celle de référence. On note dans l’ensemble une bonne ressemblance même si on surestime par la loi Gamma des valeurs de I > 7 jours comme évoqué plus haut, et s’il existe une variabilité importante de la variance des résidus pour ces points. Toutefois, cela n’a pas d’influence significative sur la reconstruction de la climatologie des houles car très peu de points sont finalement concernés.

Avec la simulation des événements de houle individuels et une modélisation adaptée de l’occurrence des événements, nous disposons des deux éléments qui constituent notre générateur d’événements de houles. Il est maintenant possible de reconstruire des séries temporelles d’événements de houle sur des durées plus longues que les 21 années de données de hindcast. Même si nous avons statistiquement validé la simulation des événements de houles individuels et le modèle d’occurrence des événements, il est important de valider les séries temporelles d’événements reconstruites afin de s’assurer qu’elles peuvent être utilisées avec confiance pour des applications en génie océanique et côtier.

2000 4000 6000 8000 10000 0 2 4 6 8 10 d(Km) I (Days) Reference 2000 4000 6000 8000 10000 0 2 4 6 8 10 d(Km) I (Days) Simulation

Figure 6.29 – Distributions jointes de {d, I} : référence (à gauche) et simulée (à droite) (Cas du mois d’août). Les contours sont régulièrement espacés de 0.01 entre 0.01 et 0.04

6.4 Reconstruction et validation des séries temporelles