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Chapitre 2 Modélisation des modulateurs électro-optiques

2.3. Le modulateur en anneau

2.3.2. Modélisation de l’anneau : équations du résonateur

Dans ce paragraphe, nous allons donner les équations qui régissent le fonctionnement d’un modulateur en anneau. Pour cela, nous commençons par expliquer les différentes hypothèses sur lesquelles reposent ces équations afin de préciser leur domaine de validité. Puis, nous exposons la méthode dite « round-trip » qui aboutit à l’expression du spectre de transmission de l’anneau, suivi d’une discussion sur les principaux paramètres intervenant dans la modélisation. Les équations seront enfin combinées avec la modulation de l’indice effectif via la jonction PN (section 2.1) pour aboutir dans le paragraphe suivant au modèle analytique du modulateur.

Principales hypothèses – Domaine de validité des équations

1. Le modèle présenté est valable uniquement pour la configuration all-pass de l’anneau. Des équations similaires peuvent être dérivées pour la configuration add-drop [107] [95]. Mais nous ne les exposerons pas ici car les modulateurs en anneau réalisés dans cette thèse utilisent la configuration all-pass. A noter toutefois que l’asservissement dynamique des modulateurs nécessitera d’utiliser des anneaux add-drop [83].

2. La deuxième hypothèse consiste à se placer dans le cas d’ondes monomodes, ce qui est vérifié car seul le mode TE d’ordre 0 est excité. Les modes d’ordres supérieurs ne peuvent pas se propager dans l’anneau car ils sont limités par les dimensions du guide. Le mode TM d’ordre 0 pourrait également se propager dans un guide droit mais les pertes par courbure sont plus importantes dans l’anneau que pour le mode TE donc il n’est pas excité.

3. La troisième hypothèse concerne la propriété dite de faible couplage. Elle s’applique quand le temps de relaxation des photons est grand devant le temps caractéristique de couplage de la cavité. Ceci permet de découpler les aspects temporel et spatial, c’est-à-dire qu’on considère que seule l’amplitude du champ optique varie au cours du temps et non sa répartition spatiale.

4. Enfin la dernière hypothèse suppose qu’il n’y a pas de couplage entre des ondes se propageant en sens horaire et antihoraire, les ondes se propageant toujours vers l’avant. Cette hypothèse n’est en général pas vérifiée. En effet, les mesures expérimentales démontrent bien souvent un dédoublement des pics de résonance de l’anneau, caractéristique de la rétrodiffusion des ondes (Figure 2.10 (a)). La rétrodiffusion dans un anneau est due d’une part à la rugosité des surfaces du guide d’onde et d’autre part aux réflexions au niveau du coupleur directionnel. La rétrodiffusion est un phénomène relativement compliqué à modéliser car la rugosité est un procédé statistique. De plus la rétrodiffusion est très dépendante de la longueur d’onde considérée. La rétrodiffusion peut être à l’origine de pénalité en puissance élevée jusqu’à 4 dB et ainsi avoir un impact important sur le budget en puissance d’un lien optique [108]. L’IMEC [109] et le centre de technologie nano-photonique de Valence (Espagne) [110] [111] ont tous deux proposé une

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modélisation permettant de reproduire très précisément les spectres de transmission de l’anneau en présence de rétrodiffusion, même lorsque le dédoublement des pics est asymétrique. L’IMEC [112] propose également une approche permettant d’éliminer la rétrodiffusion en incorporant un réflecteur accordable dans l’anneau. Ce réflecteur prend la forme d’un interféromètre de Mach-Zehnder dont les sorties sont bouclées (Figure 2.10 (b)). Nous avons décidé de ne pas prendre en compte la rétrodiffusion car comme nous le montrerons dans le Chapitre 3, les anneaux que nous cherchons à concevoir ont un facteur de qualité faible. Or diminuer le facteur de qualité, c’est-à-dire augmenter les pertes dans l’anneau et le couplage permet de négliger la propagation des ondes vers l’arrière et le dédoublement des pics est plus rare.

(a) (b)

Figure 2.10. (a) Exemple d’un pic de résonance dédoublé mesuré pour un anneau all-pass de rayon 8 µm (couplage de 2% et de 20000 visés) (b) Schéma de l'anneau avec le réflecteur [112]

Approche « round-trip »

Cette approche fait intervenir les amplitudes des champs optiques à chaque port du coupleur entre l’anneau et le guide adjacent. Elle présente l’avantage de donner une solution sur toute la largeur du spectre et n’est pas réduite aux fréquences / longueurs d’onde proches de la résonance considérée. Cette méthode est décrite dans les travaux [113] et [95]. Les différentes notations utilisées ici sont illustrées à la Figure 2.11.

 , , ′, et ′ sont les amplitudes complexes des champs optiques aux entrées et sorties du coupleur.  et sont respectivement les coefficients en amplitude de couplage direct (self-coupling) et de couplage croisé

(cross-coupling). et sont donc les rapports de division de puissance du coupleur. En supposant qu’il n’y ait pas de pertes dans le coupleur, ils vérifient l’égalité + = .

 est le coefficient en amplitude de pertes pour un tour dans l’anneau (round-trip loss). Il inclut les pertes de propagation dans l’anneau, les pertes dues au rayon de courbure, les pertes due à la rugosité des surfaces, les pertes dues aux porteurs libres de la jonction PN et les pertes dans le coupleur. est relié à l’atténuation de puissance dans l’anneau par la relation = e�p − .

 � = est le déphasage apporté lorsqu’un tour de l’anneau est effectué (round-trip phase shift), avec l’indice effectif de l’anneau, le périmètre de l’anneau et la longueur d’onde de l’onde se propageant dans l’anneau.

Figure 2.11. Structure de l'anneau pour une approche round-trip

Les interactions dans l’anneau sont décrites par le système d’équations (2-17).

′ ′

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= − = − + = e�p − � = − �− � � = | | = ++ cos �cos � = � = = = √ ℚ = √ − = √ − = � = = ++ [dB] = log = − + ( ℚ − ) = − ( − ) (2-17)

En réorganisant ce système, nous obtenons l’expression (2-18) du champ optique de sortie en fonction du champ d’entrée, et ainsi l’expression (2-19) de la transmission de l’anneau qui est le rapport entre la puissance de sortie et d’entrée.

(2-18)

(2-19) La cavité entre en résonance quand le déphasage « round-trip » � est un multiple de 2π. Nous retrouvons alors l’expression de la longueur d’onde de résonance (2-13). La transmission de l’anneau est minimale à la résonance et correspond à la profondeur maximale du pic de résonance. Le rapport entre la transmission maximale (pour un déphasage multiple de π) et la transmission minimale est appelé taux d’extinction on-off et est donné par la relation (2-22). Le couplage critique est défini par la condition = . Au couplage critique, est infini ce qui correspond à

l’égalité entre les pertes dans la cavité et les pertes de couplage direct. Les conditions < et > sont respectivement appelées conditions de sous-couplage et de sur-couplage.

(2-20) (2-21) (2-22) La largeur à mi-hauteur , le facteur de qualité ℚ et la finesse peuvent être exprimés en fonction des coefficients

, et [95] :

(2-23) (2-24) (2-25) Le formalisme obtenu par l’approche round-trip est celui utilisé par la suite pour définir le modèle du modulateur en anneau. Nous reviendrons dans les paragraphes suivants sur la caractérisation de l’anneau et notamment nous expliciterons davantage le rôle du facteur de qualité dans l’étude des anneaux.

Discussion sur la modélisation

Avant de poursuivre avec le modèle analytique du modulateur en anneau, nous formulons ici quelques remarques sur la mise en équation du spectre de transmission de l’anneau.

1. A partir de l’équation (2-19), et en considérant proche de la longueur d’onde de résonance , on aboutit à l’expression (2-26) de la transmission sous la forme d’un pic Lorentzien. Cette expression n’est valable qu’autour du pic considéré. Les détails des calculs sont donnés dans l’Annexe 1.

(2-26)

2. Les sources de pertes au sein de l’anneau sont relativement nombreuses. Nous ne pouvons toutefois pas modéliser précisément chacun des phénomènes car certains sont difficilement quantifiables. Par exemple, les pertes par rugosité à la surface des guides dépendent de la qualité du procédé de fabrication et nous ne pouvons en donner qu’une estimation. Nous allons cependant diviser le terme de pertes en deux termes distincts :

 [Np. m ] tient compte des pertes dues au dopage de la jonction PN. Il sera explicité dans le paragraphe (2.3.3) suivant.

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[Np. m ] = [dB. m ] ∗ln

= ∗ +

� = e�p − + − cos �

+ − cos �

[NP. m ] tient compte des autres pertes de l’anneau, c’est-à-dire des pertes de propagation, de courbure, de rugosité mais aussi les pertes dans le coupleur entre l’anneau et le guide adjacent. Ce terme ne fera pas l’objet d’une étude approfondie. Il a été estimé via plusieurs mesures sur différents types d’anneaux à une valeur de 500 dB/m (115 Np/m).

Pour rappel, la conversion des pertes en dB/m (décibel par mètre) vers des Np/m (Néper par mètre) se fait selon la relation suivante (2-27) :

(2-27) L’atténuation dans l’anneau s’exprime alors comme (2-28) où la distinction est faite entre la longueur totale de l’anneau (son périmètre) et la longueur de la section active de l’anneau, c’est-à-dire la longueur de la jonction PN incluse dans l’anneau.

(2-28) 3. La troisième remarque concerne les coefficients de couplage et . Ceux-ci sont considérés comme constants. Or une modélisation plus précise du coupleur directionnel, comme cela a été réalisé dans les travaux [114] et [115], montre que les coefficients de couplage dépendent directement de la longueur d’onde. Ceci implique d’importantes variations du spectre de transmission de l’anneau. Mais notre étude étant restreinte à une zone peu étendue de longueur d’onde (de 1270 nm à 1330 nm environ), nous pouvons faire l’hypothèse d’un couplage constant. Par ailleurs, comme le coupleur n’est pas idéal, il faut ajouter un facteur de perte dans l’équation de la transmission de l’anneau (2-19) pour prendre en compte les pertes dans le coupleur. L’expression (2-19) devient alors (2-29). De manière approximative, nous considérons que l’atténuation due au couplage est égale aux pertes multipliées par la longueur de couplage .

(2-29) 4. Une approche faisant intervenir l’énergie dans la cavité et non les amplitudes des champs optiques peut également être utilisée pour modéliser le fonctionnement de l’anneau. Cette approche repose sur la théorie des modes couplés et permet de décrire la dynamique temporelle de l’anneau. Cette méthode est intéressante car elle est très générale et s’adapte à toute géométrie d’anneaux et de configuration. En particulier, elle permet d’inclure facilement des phénomènes non-linéaires. La mise en équation de cette approche est expliquée dans l’Annexe 2. Les liens entre l’approche round-trip et la théorie des modes couplés y sont également explicités.