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CHAPITRE I : EVALUATION DES MATERIAUX MASSIFS

CHAPITRE 3 : MODELISATION DE L’IMPACT D’UNE GOUTTE D’EAU SOUS HAUTE

1. Modélisation de l’érosion pluie - Approche bibliographique

1.2. Modélisation 3D

1.2.a. Généralités sur la modélisation par éléments finis et par éléments fluides (SPH).

Les éléments finis (EF)

La méthode des éléments finis (FEM) permet de résoudre tout ensemble d’équations différentielles, même si aujourd’hui, ces applications appartiennent surtout au domaine de la mécanique et de la thermique.

Les éléments finis sont nés au croisement des sciences de l’ingénieur et des mathématiques. L’objectif est de résoudre les problèmes qui mettent en jeu des systèmes continus en les discrétisant. Cette discrétisation passe par le biais d’une partition du domaine que l’on appelle maillage. Dans notre cas, le domaine et les éléments qui le partitionnent sont tridimensionnels. Ces éléments sont définis par leurs sommets, appelés « nœuds », et par les arrêtes qui les relient que l’on désigne sous le terme d’« arcs ». De la même manière qu’un espace bidimensionnel peut être maillé par des triangles ou par des parallélogrammes, un espace tridimensionnel peut être maillé par des tétraèdres, par des pentaèdres, ou par des hexaèdres.

La méthode des éléments finis consiste, après avoir réalisé le maillage, à construire un espace de fonctions polynomiales sur chacune des mailles.

En reprenant la définition donnée par Laurent Demaret, si les champs continus représentent l’ensemble des variables d’un problème physique, alors le principe des éléments finis consiste à mettre en équation et à calculer les solutions à partir des valeurs approchées des variables prises en un nombre finis de points [51]. La solution globale est ensuite obtenue par interpolation.

Des fonctions polynomiales sont utilisées pour interpoler les résultats (comme le déplacement, ou bien la température d’un élément) dans le respect des lois mécaniques, thermiques, fluides, etc. Les domaines d’application sont donc extrêmement variés et sont renforcés aujourd’hui par l’intégration de la CAO (Conception Assistée par Ordinateur) et de la PAO (Production assistée par Ordinateur) en entreprise.

L’étude de l’impact au cours du temps nécessite d’utiliser une méthode dite temporelle qui se base sur la reconstitution dans le temps pas à pas de la solution via l’utilisation d’un schéma d’intégration. L’avantage de cette méthode est l’absence d’hypothèse forte sur la forme de la réponse et la possibilité de traiter tout type de problème. La méthode d’intégration temporelle consiste alors à construire à partir d’un jeu de conditions initiales la réponse pas à pas du système. L’équation différentielle du comportement du système est résolue en plusieurs instants consécutifs tn, ce qui rend nécessaire de discrétiser dans le temps l’équation du mouvement et de formuler des hypothèses sur la variation des déplacements, des vitesses et des accélérations sur chaque intervalle de temps [tn ; tn+1]. Dans le cas d’un schéma d’intégration explicite, le vecteur x qui représente les n degrés de liberté du système est calculé uniquement en fonction des valeurs aux instants précédents et on a : 𝑥𝑛+1= ∑𝑚 𝛼𝑗𝑥𝑛+1−𝑗

𝑗=1 − ℎ ∑𝑚 𝛽𝑗𝑥̇𝑛+1−𝑗

𝑗=1 avec ℎ = 𝑡𝑛+1− 𝑡𝑛

Pour une revue plus complète des fondements théoriques de la FEM, on pourra se référer au cours de Jean Garrigues, professeur à l’Ecole Centrale de Marseille [52], ou encore à la thèse de Vincent Jaumouillé qui y a défini de nombreux concepts et méthodes [53].

Les éléments fluides (SPH – Smoothed Particles Hydrodynamics)

Contrairement à la modélisation par éléments finis, les modèles sans maillage ont l’avantage de gérer les fortes déformations. Le Smoothed Particle Hydrodynamics (SPH) est un modèle qui a l’avantage d’être particulièrement adapté aux comportements fluides.

Daly a en premier tenté de développer un modèle particulaire pour s’extraire des contraintes du maillage [54] mais la paternité de la méthode SPH est généralement attribuée à Gingold et Monaghan pour leur publication de 1977 [55]. La modélisation par SPH consiste à représenter un domaine sous la forme d’un ensemble de particules. La « fluidité » du modèle (Smoothed dans SPH) est assurée par une loi de répartition des propriétés physiques (fonction Kernel) qui implique pour chaque bille et pour chaque grandeur physique exprimée, une dépendance entre la valeur en une bille donnée et les valeurs des billes de son voisinage dans un rayon fixé h appelé distance de fluidité (« Smoothing lentgh »). L’importance relative de chaque bille dépend au final de sa distance et de la densité globale du maillage. La revue de Bertrand Maurel faite dans sa thèse soutenue à l’INSA de Lyon en 2008, donne davantage de détails et permet de mieux appréhender les choix techniques que nous avons faits [56]. Bertrand Maurel a d’ailleurs simulé l’impact d’une colonne d’eau sur une plaque. Ce travail a surtout l’intérêt de montrer que le SPH permet la modélisation d’un milieu aqueux et que le mariage SPH/FEM est tout à fait valide.

1.2.b. Modélisation de l’érosion pluie

On trouve aujourd’hui des modèles pour représenter l’érosion par impacts solides mais les mécanismes diffèrent énormément de l’érosion pluie [58,59]. La modélisation par éléments finis est aujourd’hui un espoir pour la prévision de la résistance à l’érosion pluie [60–63].

Dès 1995, Adler a publié une étude qui insiste sur l’importance des contraintes développées lors de l’impact au niveau de la zone de contact [59]. Les calculs développés sont qualifiés de grossiers par l’auteur mais le but était alors de dégauchir le problème de l’impact liquide. Cette étude a finalement le mérite d’asseoir un modèle d’impact liquide qui permet de donner une première représentation de l’évolution de la répartition des pressions et des contraintes au cours du temps (Figure 83). Les chiffres obtenus relatifs aux contraintes maximales semblent assez faibles. Par exemple, la contrainte radiale d’extension maximale générée par l’impact d’une goutte de 2 mm de diamètre à 305 m.s-1 serait évaluée à 170 MPa (24 000 Psi) à environ 0,6 µs après impact, ce qui semble insuffisant pour provoquer une rupture dans un matériau résistant (qu’il soit métallique ou céramique). Toutefois, l’intérêt de l’article réside dans la description du comportement de la goutte. Adler mets en évidence une distorsion du front d’onde dans le matériau lors de sa propagation.

Figure 83 : Répartition de la pression au sein d'une goutte impactée en fonction du temps. Adler étudie la répartition des pressions dans la goutte et celle des contraintes dans le matériau. [59]

Plus récemment, Zhou et al ont tenté de dessiner une carte d’estimation de la durée de vie d’une pale de turbine en fonction des sollicitations dues à l’érosion [61,62]. De tels modèles appliqués à l’érosion des pales d’hélicoptère apporteraient une avancée importante dans la compréhension du jeu de contraintes développées lors de leur érosion en service.

La Figure 84 présente les résultats de Zhou obtenus pour l’impact à 100 m.s-1 d’une goutte de 2 mm de diamètre. On y trouve la représentation des pressions et des contraintes associées à différents temps t après impact. La présentation des valeurs en fonction de la distance radiale montre clairement que le maximum des pressions se trouve aux extrémités d’une zone de pression. Les valeurs représentées sont adimensionnées, mais en multipliant par 1,48.108 (le produit de la masse volumique de l’eau, de la vitesse du son dans l’eau et de la vitesse d’impact), on trouve des valeurs quantifiées. La contrainte maximale atteindrait alors une valeur de l’ordre de 450 MPa pour l’impact à 100 m.s-1.

Figure 84 : Evolution des pressions en surface et des contraintes associées après impact d’une goutte de 2 mm de diamètre à 100 m.s-1. L’abscisse représente la distance radiale et les 5 graphes représentent respectivement les résultats à un temps de 1, 3, 5, 7 et 9 ns après contact [61].

Les auteurs ont affiné leurs modèles pour prévoir les sollicitations sur pales de turbines. Leur travaux ont permis de mettre en évidence que les zones de contraintes maximales se situent en périphérie de la zone de contact de la goutte. Un autre point de concentration de contrainte se situe sous la surface au centre du l’impact (Figure 84 et Figure 85).

a b

c d

e

Pression dans le liquide – impact rigide Pression dans le liquide – impact élastique Contraintes

Pression dans le liquide – impact rigide Pression dans le liquide – impact élastique Contraintes

Pression dans le liquide – impact rigide Pression dans le liquide – impact élastique Contraintes

Pression dans le liquide – impact rigide Pression dans le liquide – impact élastique Contraintes

Pression dans le liquide – impact rigide Pression dans le liquide – impact élastique Contraintes

t = 1 ns t = 3 ns

t = 5 ns t = 7 ns

Figure 85 : Indice de pression (sans dimension) et distribution des contraintes après impact d’une goutte de 2 mm de diamètre à 100 m.s-1. Les trois graphiques donnent respectivement les visualisations graphiques des résultats après 1, 5 et 9 ns après contact [62].

Selon ces résultats, les contraintes internes atteintes lors d’un impact à une vitesse supérieure à 150 m/s seraient nettement supérieures à la pression maximale exercée en surface. En se basant sur leurs travaux, on peut évaluer la pression maximale en surface à 1,9 GPa lors d’un impact à 300 m/s, tandis que les contraintes internes pourraient, elles, atteindre 3,15 GPa (Figure 86).

Figure 86 : Répartition et évolution des pressions de surface et des contraintes internes après l’impact d’une goutte de 2 mm de diamètre à 300 m/s sur une surface solide. Les valeurs représentées sont adimensionnées, mais en multipliant par 1,48.108 (le produit de la masse volumique de l’eau, de la vitesse du son dans l’eau et de la vitesse d’impact), on retrouve les valeurs quantifiées (pressions et contraintes). TSB représente ici le temps de rupture, c'est-à-dire l’instant auquel il y a décompression de la goutte et émission des jets latéraux. [62]

a b

Pression au point d’impact Pression maximale à l’interface Contrainte maximale dans le solide