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1.4 Prédiction du confort thermique

1.4.4 Modélisation du confort adaptatif

Bien que les mécanismes physiques et physiologiques soient relativement bien maîtri- sés, l’approche analytique omet une composante importante du confort thermique : l’adapta- tion de l’occupant à son environnement. La démarche analytique a été créée à partir d’expé- riences en chambre climatique. Les sujets étaient souvent dépourvus de moyens d’adapter leur environnement, des situations loin de refléter la réalité.

Face à ce problème, des chercheurs ont commencé à vouloir valider la méthode analytique dans des cas réels. Ils se sont alors aperçus que les résultats donnés par les différentes méthodes analytiques ne concordaient pas toujours aux réponses des questionnaires distri- bués durant des enquêtes de terrain. Ils remarquèrent notamment d’importantes différences pour les bâtiments naturellement ventilés (figure 1.8).

Humphreys et Nicol [119] avancent qu’un des problèmes inhérent aux indices du type PMV provient d’un manque de précision dans les variables physiques d’entrée du modèle, ce qui peut aboutir des résultats très différents. Par ailleurs, ils calculent la sensation thermique et omettent totalement la composante socio-culturelle. Ils appuient leur idée [120] en affirmant que lorsque les indices de confort sont utilisés pour prédire les votes de confort sur le ter- rain, ils ne présentent pas plus de fiabilité que l’utilisation seule de la température comme variable prédictive.

La disparité entre les résultats donnés par les indices et ceux donnés par les enquêtes de terrain a amené un champ de recherche appelé démarche adaptative. Il s’agit d’une méthode entièrement empirique basée sur des enquêtes de terrain dans lesquelles les ju- gements thermiques sont mesurés par le biais de questionnaires pendant que les occupants effectuent leurs activités habituelles. Les votes des occupants sont souvent relevés sur des échelles de vote type ASHRAE ou Bedford (tableau 1.1). Les variables des ambiances inté- rieures mais aussi extérieures telle que la température sont aussi mesurées lors de ce type d’enquête.

Le mot adaptatif provient de l’idée que l’occupant s’adapte aux conditions thermiques pour maintenir son confort thermique. Il peut s’adapter d’un point de vue physiologique (acclimatation), comportemental (opérations sur les fenêtre etc.) ou encore psychologique (adapter ses attentes par rapport aux conditions thermiques) [54].

Liu et al. [122] ont depuis proposé une méthode pour mesurer le poids de chacune de ces adaptations. Ils trouvent que l’adaptation la plus importante est l’adaptation physiologique suivie de l’adaptation comportementale et de l’adaptation psychologique.

Il existe deux grandes études internationales concernant le confort adaptatif. Nous avons brièvement abordé une partie de leurs résultats sur les moyens d’adaptation dans le para- graphe 1.3. Il s’agit du projet de recherche RP-884 de l’ASHRAE mené par de Dear et al. [54] et du projet européen SCAT’s (Smart Control And Thermal Comfort) [77] mené par Nicol et al. Ces projets ont été lancés pour mettre à jour ou créer un contexte normatif autour de la démarche adaptative.

1.4 Prédiction du confort thermique

FIG. 1.8 – Comparaison des résultats obtenus par l’indice PMV et des observations issues d’enquêtes de terrain. (a) bâtiments climatisés (b) bâtiments naturellement ventilés. [121]

RP-884. Une méthode optionnelle a été ajoutée concernant la détermination des conditions de confort thermique acceptable dans les locaux naturellement ventilés et dépourvus de systèmes de climatisation. Pour que la méthode soit valable, il faut que l’occupant ait le contrôle de l’ouverture et fermeture des fenêtres pour réguler les conditions thermiques de la pièce [123].

Le projet européen SCATs a porté sur l’étude du confort de 26 bâtiments de bureaux princi- palement situés en Europe et dont certains étaient naturellement ventilés. Les résultats du projet ont servi de base à la norme exclusivement européenne EN 15251 dont les critères re- commandés pour l’ambiance thermique s’inspire des travaux de McCartney et al. [77] pour définir les températures opératives nécessaires pour que des conditions de confort ther- mique soient respectées dans des bâtiments non climatisés. Les conditions en température sont exprimées en fonction de la température extérieure en moyenne glissante journalière (Trm80) et définies à travers 3 catégories (figure 1.9). Les catégories sont fixées suivant le

pourcentage de personnes insatisfaites. Ainsi, si la température opérative satisfait les condi- tions de la catégorie I alors le PPD sera inférieur à 6% (sachant qu’il ne peut être inférieur à 5%). Pour les catégories II et III, les seuils sont respectivement de 10 et 15%.

FIG. 1.9 – Température opérative intérieure de confort pour des bâtiments non climatisés en fonction d’une température extérieure moyenne glissante pondérée exponentiellement - source : EN 15251

Halawa et al. [124] stipulent que la plus grande invention de la démarche adaptative a été d’établir un lien entre température de confort et le climat extérieur. Les équations restent de forme identique suivant l’équation 1.1 où Textpeut prendre diverses formes telles qu’une

moyenne de la température du jour précédent, ou du mois ou encore une moyenne mobile telle que la Trm80.

Tconf = α× Text+ β (1.1) Le tableau 1.3 dresse un comparatif des différentes relations trouvées dans la littérature ayant la même forme que celle définie dans l’équation 1.1. La dernière colonne précise quelle variable du climat extérieure est utilisée.

1.4 Prédiction du confort thermique

TAB. 1.3 – Récapitulatif des différents coefficients du modèle adaptatif dans la littérature

pour les bâtiments naturellement ventilés. Tmm = température moyenne mensuelle, Tdm = température moyenne quotidienne, Trm = température moyenne mobile

Auteur(s) α β Ta,ext Humphreys, 1978 [125] 0,53 11,9 Tmm Auliciems, 1978 [126] 0,31 17,6 Tmm Nicol et Raja, 1996 [127] 0,30 19,4 Trm De Dear et Brager, 1998 [54] 0,55 13,5 Tmm Humphreys et Nicol, 2000 [128] 0,53 13,2 Trm ASHRAE standard 55-2004 0,31 17,8 Tmm EN15251-2007 0,33 18,8 Trm Hwang et al., 2010 [129] 0,38 16,8 Tmm Wang et al., 2010 [130] 0,49 11,8 Tmm Nguyen et al., 2012 [131] 0,34 18,8 Tmm Teli et al., 2012 [132] 0,44 15,7 Tmm Toe et Kubota, 2013 [133] - Hot dryclimate 0,58 13,7 Tdm Toe et Kubota, 2013 - moderate climate 0,22 18,6 Tdm Toe et Kubota, 2013 - Hot humid climate 0,57 13,8 Tdm Kameni et al.,2013 [134] 0,256 19.04 Tdm

a été critiquée par son manque de discernement entre les typologies de bâtiment [136] qui ne considèrent que, d’une part, les bâtiments naturellement ventilés, et d’autre part, les bâ- timents climatisés.

Ce problème a été notamment mis en évidence par une étude de Goto et al. [137] réali- sée dans 6 bâtiments de bureaux climatisés au Japon. Ils constatent que la relation qu’ils obtiennent est différente de celle attendue pour les bâtiments climatisés en la comparant à celle de de Dear [54]. Elle est même plus proche de celle de bâtiments naturellement ventilés pour des températures supérieures à 17◦C. Goto et al. expliquent ce résultat par le fait que les occupants possédaient plus d’opportunités adaptatives que des occupants de bâtiments climatisés classiques : (1) la climatisation de certains bâtiments pouvait être régulée par les occupants directement, (2) la plupart des fenêtres étaient opérables, et (3) plus de 15% des occupants possédaient des ventilateurs portatifs.

Résumé

Il existe plusieurs approches du confort thermique :

• les modèles empiriques type PMV (et ses dérivés) qui sont aujourd’hui largement critiqués,

• les modèles de thermophysiologie qui réalisent un bilan thermique du corps humain en prenant en compte les réactions physiologiques. Ils permettent de calculer la sensation thermique à partir de la tempéra- ture de peau,

• l’approche adaptative qui établit des critères physiques de confort en prenant en compte le fait que les occupants s’adaptent à leur environ- nement.