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1.3 Objectifs et périmètre de la thèse

2.1.1 Modélisation du cœur du réacteur

Le calcul de l’évolution du cœur du réacteur repose sur un couplage des effets neutroniques, thermohydrau- liques et thermomécaniques. La neutronique permet de calculer l’évolution de la population de neutrons dans le cœur, sa distribution spatiale, et les grandeurs associées, comme le flux de neutrons, la puissance produite par fission et la réactivité. Mais les sections efficaces régissant la fission dépendent à l’échelle des assemblages combustibles des propriétés thermohydrauliques du fluide primaire, et des propriétés thermomécaniques du combustible, ces propriétés étant elles-mêmes impactées par le dégagement de puissance par fission. On se pro- pose ici de donner les grands principes des différentes disciplines impliquées. Puisque ces travaux reprennent le modèle de cœur de Muniglia, on se contente de donner les points essentiels, le lecteur étant invité à lire [54] pour plus de détails.

2.1.1.1

Neutronique

Principes du calcul neutronique La modélisation de référence en neutronique est la méthode Monte- Carlo [65], qui repose sur une approche probabiliste du comportement des neutrons, avec une description très fine de la géométrie du cœur. Cependant, cette méthode coûteuse en temps de calcul est inaccessible pour des calculs de cœur complet dynamiques. L’autre approche consiste à résoudre numériquement l’équation de Boltzmann régissant le transport des neutrons. Classiquement, à cause de la géométrie complexe du réacteur et de l’étendue du domaine d’énergies à considérer (environ 9 décades), ce calcul est fait en deux étapes pour limiter le nombre de mailles nécessaires :

— Une étape dite réseau permet le calcul à l’échelle de l’assemblage combustible de l’équation du transport. Cette étape permet de prendre en compte la structure fine des assemblages dans différentes configurations. Ces calculs permettent la génération de bibliothèques contenant des sections efficaces microscopiques ou macroscopiques paramétrées ainsi que des coefficients d’équivalence pour le calcul à l’échelle du cœur. Les paramètres incluent la densité du fluide modérateur, la température du combustible, le burnup ainsi que les paramètres de barres et de bore.

— L’étape de cœur consiste à résoudre l’équation du transport cinétique, avec une éventuelle simplification, à l’échelle du cœur en remplaçant les assemblages par des pavés homogènes à l’aide des sections efficaces microscopiques ou macroscopiques calculées à l’étape réseau.

L’étape de réseau étant faite préalablement au calcul, c’est la précision de l’étape de cœur qui est déter- minante pour le temps de calcul. Différentes techniques de résolution existent pour l’étape cœur, reposant sur des discrétisations et/ou des simplifications de l’équation du transport, en fonction de la précision requise. Le code de référence pour le calcul déterministe, pour l’étape réseau et l’étape cœur est APOLLO3 , développéR

au CEA.

Évolution isotopique des poisons neutroniques Les réactions de fission des noyaux d’uranium et de plutonium produisent dans le combustible des produits de fission. La plupart de ces noyaux produits par fission sont radioactifs et décroissent, principalement par la voieβ−. La modélisation de la décroissance de ces

noyaux est essentielle pour le calcul neutronique car certains des noyaux produits ont des propriétés physiques d’absorption des neutrons conséquentes sur le flux, en particulier le xénon 135 et le samarium 149. On parle alors d’empoisonnement, car la réactivité du cœur diminue. On se concentre ici sur la chaîne de décroissance du xénon 135 (Fig. 2.1), particulièrement importante dans le pilotage des REP en suivi de charge.

La fission produit dans le combustible des noyaux de tellure 135, qui se transforment en iode 135 par décrois- sanceβ− avec une demi-vie de quelques secondes. L’iode décroit à son tour en xénon 135, noyau extrêmement

absorbant pour les neutrons. La demi-vie de cette décroissance est de 6.5 heures. Le xénon 135 a une section efficace de capture des neutrons d’environ trois millions de barns, contre 4000 barns environ pour le bore pour les neutrons lents. Le xénon 135, par absorption d’un neutron, se transforme en xénon 136, peu absorbant, ou bien décroit en césium 135 avec une demi-vie de 9.2 heures.

La modélisation de la chaîne d’évolution du xénon 135 conduit aux équations couplées suivantes, oùI est la concentration en iode 135, etX la concentration en xénon 1351 [65] :

 dI

dt = γIΣfφ− λII dX

dt = γXΣfφ + λII− (λX+ σXφ)X

(2.1)

Fission

135

Te

135

I

135

Xe

135

Cs

135

Ba

136

Xe

γ = 0,1% γ = 6,4% 19,2 s 6,5 h 9,2 h 2,6 Ma stable capture

Fission

149

Nd

149

Pm

149

Sm

150

Sm

γ = 1,1% 1.7 h 53 h capture

Figure 2.1 – Chaîne d’évolution du xénon 135

oùγI etγX désignent les rendements de fission de l’iode et du xénon,λI etλX leurs constantes de décroissance

radioactive respectives,σX désigne la la section efficace microscopique de capture d’un neutron par le xénon,

Σf désigne la section efficace macroscopique de fission, etφ désigne le flux neutronique.

La prise en compte du xénon 135 est primordiale dans le pilotage des réacteurs à cause de sa section efficace de capture des neutrons lents très importante, et de sa forte production par décroissance de l’iode. À flux de neutrons constant, sa concentration se stabilise à une valeur proportionnelle au flux. Lorsque le flux diminue, la concentration augmente d’abord avant de se stabiliser vers sa valeur finale proportionnelle au flux, avec une constante de temps de quelques heures.

Ces variations de concentration dans le cœur dépendant des variations du flux entraînent des oscillations axiales de la concentration du xénon 135, différente dans le haut et le bas du cœur, et donc des variations importantes de l’axial offset.

Modélisation des barres de contrôle La modélisation des barres de contrôle est prise en compte à l’étape réseau, par un calcul de l’assemblage avec barres insérées et un calcul sans barres. Les sections efficaces sont ainsi paramétrées avec un paramètre de barre. La valeur de ce paramètre dépend du type de barre présente dans la maille (0 pour une barre grise, 1 pour une maille sans barre, 2 ou 3 pour les barres noires).

Figure 2.2 – Schéma du principe du calcul de paramètre de barre par dilution (Figure issue de [54]) A l’étape de calcul coeur, la question se pose du traitement d’une maille dans laquelle une barre est partiel- lement insérée. La méthode la plus évidente consiste à moyenner ce paramètre sur la maille de calcul, on parle alors de dilution du paramètre. La figure 2.2 donne le principe de cette méthode pour une barre grise et une barre noire.

Cependant, le calcul réseau n’ayant pas été fait pour cette configuration, cette moyenne produit un écart de modélisation appelé rod cusping. C’est un artifice de calcul lié au traitement de l’extrémité de la barre, qui a tendance à surestimer l’effet local de la barre[56]. Une solution consiste à adapter le maillage au cours du calcul pour correspondre à l’insertion de la barre, si le code de calcul le permet. D’autres solutions permettent de corriger par le calcul l’effet rod cusping en calculant au vol de nouvelles sections efficaces macroscopiques pour la maille concernée [16], [30], [86].

2.1.1.2

Thermohydraulique

La modélisation thermohydraulique du cœur du réacteur nécessite la résolution de trois équations de conser- vation du mélange diphasique2 (masse, quantité de mouvement, énergie), d’une équation de bilan de masse vapeur, et d’une équation de fermeture portant sur la vitesse et l’énergie de la phase vapeur [78]. Le fluide primaire circulant entre les crayons combustibles, le maillage est nécessairement très fin. Le code de référence pour ce calcul est le code FLICA [78], développé au CEA. FLICAR est un code à modèle poreux basé surR

la résolution de cet ensemble d’équations. Il est utilisé pour l’analyse thermohydraulique diphasique des cœurs de réacteur en régime permanent et transitoire. La discrétisation de ces équations à l’aide d’une méthode de volumes finis conduit à une équation de bilan, sur chaque cellule de contrôle du domaine de calcul.

2.1.1.3

Thermomécanique

Le calcul de l’évolution thermomécanique du combustible consiste à résoudre de manière couplée l’équation de la chaleur transitoire, avec un terme source correspondant à la puissance neutronique, et l’équation mécanique de déformation du combustible. Chacune de ces équations modifie les conditions aux limites de l’autre équation. L’évolution chimique du combustible est également prise en compte, et notamment l’apparition des produits de fission gazeux. Le code de référence pour ce calcul est ALCYONE [52], développé au CEA. Il simule le comportement du combustible sous flux neutronique avec plusieurs degrés de précision en 1D 2D ou 3D, de façon statique ou transitoire.