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A.1 Synthèse de sons de roulement

A.1.1 Les modèles basés sur la physique

Bien que le phénomène physique sous-jacent à la production du son par des objets roulants ne soit pas clairement élucidé (Stoelinga, 2007), on trouve plusieurs approches fondées sur la physique dans la littérature.

Stoelinga et Chaigne (2007) ont proposé d’adapter le modèle décrit par Chaigne et Lambourg (2001) et Lambourg et al. (2001), qui permet la simulation d’un impact simple sur une plaque, afin de pouvoir considérer des excitations dont la position varie au cours du temps. Ce modèle considère les vibrations en flexion d’une plaque mince rectangulaire (modèle de Kirchhoff-Love (Morse et Ingard, 1968)) couplée à un impac- teur via la loi de contact de Hertz (voir par exemple (Falcon et al., 1998)). Le problème est résolu en utilisant une méthode numérique basée sur les différences finies. Pour le roulement, Stoelinga et Chaigne considèrent que la plaque présente des irrégularités de surface à une échelle microscopique et que l’impacteur (la bille) parcourt ces aspérités au cours de sa trajectoire. Les aspérités sont distribuées selon un profil de variation de hauteur qui suit un bruit blanc uniforme, agissant ainsi comme une perturbation dans le terme de compression de la loi de contact de Hertz. Ainsi, la force d’interaction Fc

entre la bille et la plaque, obéissant à la loi de contact de Hertz, devient :

Fc=              k   R− η(t)−Wp(x(t), y(t), t)−Ws(x(t), y(t))  | {z } Υ    3/2 pour Υ>0, 0 sinon, (II.1)

où(x(t), y(t))sont les coordonnées de la bille sur la plaque paramétrisées par le temps t, R le rayon de la bille, η le déplacement vertical de son centre de gravité, Wp le dé-

placement vertical de la plaque (i.e. ses vibrations en flexion), Wsle profil vertical de

surface (simulé par un bruit blanc uniforme) et k la constante élastique de Hertz. Rath et Rocchesso (2005) ont également proposé un modèle basé sur la physique pour synthétiser des sons de roulement. Cette méthode diffère de celle proposée par Stoelinga et Chaigne par l’utilisation d’une composante dissipative dans le modèle de contact (Hunt et Crossley, 1975). Ce modèle de contact fut pour la première fois utilisé dans un contexte de synthèse sonore par Avanzini et Rocchesso (2001b) pour générer des sons d’impacts. Il faut néanmoins noter que le modèle de Hunt et Cross- ley considère une surface de contact non-infinitésimale, et l’utilisation d’un tel modèle non-linéaire pour l’interaction du roulement peut être critiquée d’un point de vue phy- sique. En effet, comme l’interaction entre la bille et les aspérités sont modélisées comme des micro-contacts, il peut sembler raisonnable de considérer un contact ponctuel et ainsi d’utiliser une loi de Hooke linéaire pour modéliser la force de contact. Cepen- dant, la pertinence d’un point de vue perceptif du modèle décrit par Rath et Rochesso a été montrée à travers plusieurs tests perceptifs (Rath, 2004; Rath et Rocchesso, 2005). Une autre différence avec le modèle proposé par Stoelinga et Chaigne vient du fait que l’objet résonant (la plaque sur laquelle la bille roule par exemple) est modélisé

A - SYNTHÈSE ET PERCEPTION DES SONS DE ROULEMENT:ÉTAT DE L’ART 27

par un ensemble de N oscillateurs linéaires du second ordre (systèmes masse-ressort- amortisseur), tandis que Chaigne et Stoelinga discrétisent directement l’équation phy- sique de la plaque vibrante. Chaque oscillateur représente un mode propre de l’objet résonant, i.e. sa fréquence de résonance et son amortissement (on a affaire à un modèle de synthèse modale (Adrien, 1991)). Le modèle peut être formalisé comme ceci :

       x= xe−∑Ni=1x (i) r ¨xr(i)+gr(i)˙xr(i)+ h ω(ri) i2 xr(i) = 1 m(ri) f(x, ˙x), iJ1, NK ¨xe =g− m1e f(x, ˙x) (II.2) avec f(x, ˙x) =  kxα+ λxα˙x=kxα(1+µ ˙x) , x>0 0 , x0 (II.3)

Les paramètres de l’excitateur (par exemple une bille) et de l’objet résonant (par exem- ple une plaque ou une corde) sont marqués respectivement par les indices e et r. xeet me

sont le déplacement vertical et la masse de l’excitateur, respectivement. ωr(i)et gr(i)sont

respectivement la fréquence propre et l’amortissement du ième mode propre de l’objet

résonant, et m(ri) la “masse” du ième mode1, qui contrôle les propriétés inertielles de

l’oscillateur. xr(i)est le déplacement vertical du ièmeoscillateur. g est la constante gravi-

tationnelle (9.81 m/s2). La force d’interaction est représentée par f(x, ˙x). La constante de raideur du contact k est définie comme :

k= 4 3 √ R 1−ν 2 e Ee +1−ν 2 r Er −1 (II.4) où E et ν sont respectivement le module de Young et le coefficient de Poisson et R est le rayon de la bille. λ est la constante d’amortissement (on définit ici λ = µ/k), et l’exposant non-linéaire α rend compte de la géométrie locale à l’interface de contact (selon la théorie de Hertz, on prendra α=3/2 dans le reste de ce document).

Dans le but d’adapter ce modèle de contact non-linéaire à l’interaction de roule- ment, un profil de surface irrégulier est introduit. D’après des considérations phy- siques, la surface Srest supposée imparfaite, i.e. pas parfaitement lisse à une échelle

microscopique, comme c’est le cas pour des surfaces réelles (Sayles et Thomas, 1978). Ainsi, la bille suit le profil de surface et impacte certaines aspérités, en fonction de sa taille et de celle de l’aspérité. La vitesse de la bille parallèlement à la surface est for- cée et il est considéré dans ce modèle qu’elle n’est pas affectée par l’interaction. Le concept du modèle est schématisé sur la figure II.1. Ainsi, à mesure que la bille se dé- place le long de la surface, un déplacement vertical (marqué xoffset sur la figure II.1)

est ajouté à la variable de distance verticale x. Par conséquent, le modèle simule une bille qui rebondit localement et dont l’énergie est perturbée au cours du temps par le terme xoffset, évoquant ainsi une interaction de roulement. On peut également voir ce

modèle comme une bille rebondissant sur une surface dont on fait aléatoirement varier la hauteur, comme dans l’expérience décrite par Luck et Mehta (1993) où est étudié le comportement dynamique d’une bille sur une plateforme vibrante.

1. Dans le modèle original de synthèse de sons de roulement (Rath et Rocchesso, 2005), les auteurs ne prennent pas en compte la position de la bille sur l’objet résonant. Néanmoins, comme proposé par Avanzini et al. (2002), cet effet (i.e. l’accentuation et l’atténuation de certains modes résonants en fonction de la position de l’excitateur sur l’objet résonant) peut être pris en compte dans le terme m(i)r .

28 CHAPITREII - SYNTHÈSE ET CONTRÔLE HAUT-NIVEAU DE SONS DE ROULEMENT

FIGUREII.1 – Terme de perturbation xoffset, déterminé par le profil de surface Sr et la

taille de la bille. Adapté de Rath et Rocchesso (2005).