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Modèles d’action des mutants CALR dans les NMP

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Chapitre I. Introduction à l'Hématopoïèse

Chapitre 3: Des protéines mutantes impliquées dans la voie JAK2/STAT

3.2. Propriétés générales de CALR

3.2.5 Modèles d’action des mutants CALR dans les NMP

Si les mécanismes précis d’activation de la signalisation initiée par MPL en présence

de CALRmut restent à élucider, quelques pistes ont toutefois déjà été investiguées.

La première observation importante est l’interaction physique spécifique qu’il existe

entre CALRmut et MPL. En effet, seule CALRmut interagit avec MPL93,94,228, bien que

sa spécificité d’interaction reste discutable : une interaction existerait aussi entre

CALRmut et l’EPO-R ou le G-CSF-R228, mais celle-ci n’est pas unanime94.

Néanmoins, l’interaction avec ce dernier est probable dans la mesure où la voie

JAK2/STAT est activée en cas d’expression conjointe de CALRmut et de G-CSF-R233.

Seule la partie extracellulaire de MPL, et plus précisément ses résidus de

glycosylation, est nécessaire à la liaison de CALRmut, qui assure l’interaction au

niveau des sites d’interaction avec les sites lectines du domaine N, notamment F106 et D135. Cette liaison se fait indépendamment du site de liaison de la TPO à MPL, et stabiliserait une conformation particulière du récepteur qui induirait l’activation d’une

signalisation (Figure 18). De plus, cette liaison de CALRmut à MPL engendrerait une

altération du trafic de MPL vers la membrane. En effet, on retrouve une augmentation de la proportion de MPL aux motifs polysaccharidiques immatures et

non édités dans le Golgi233. MPL est partiellement glycosylé et associé à CALRmut à

la surface cellulaire, suggérant une anomalie de maturation et éventuellement

d’adressage à la surface. Les effets de l’expression de CALRmut sur l’expression de

MPL à la surface des cellules restent discutables228,229. Cependant, on peut penser

que le récepteur est moins présent à la surface cellulaire du fait d’une atténuation de

la réponse à la TPO en présence de CALRmut 93,95,229.

Dans un contexte sauvage, l’interaction entre le domaine N de la CALR et le récepteur MPL est inhibée par son domaine P. Néanmoins, cette inhibition est levée

en présence de la nouvelle queue C-terminale générée par les mutations228.

Toutefois, le remplacement au niveau du domaine C de tous les résidus non chargés

en glycine ne modifie pas le pouvoir oncogénique de CALRmut 94. Aussi, les mutations

del52, ins5 et del61 murines induisent une activation de MPL humain, malgré une

séquence différente de leurs homologues humains229. Ainsi, cette nouvelle

caractéristique du domaine C muté n’est pas due à une séquence spécifique d’acides aminés, mais aux multiples charges positives engendrées.

3.2.5.2 Perturbation de la signalisation calcique

La question de l’impact de CALRmut sur la signalisation calcique est légitime, dans la

mesure où la régulation calcique est l’une des deux grandes fonctions de la CALR et que ces mutations perturbent directement les résidus impliqués dans cette fonction. Les mutations de type 1 –associées à la conservation d’un minimum de résidus chargés négativement- empêchent la fixation optimale du calcium, augmentent son amplitude de libération depuis le RE et son influx dans les cellules à partir du milieu extracellulaire. Les mutations de type 2, quant à elles, conservent plus de résidus chargés négativement et ne semblent pas perturber la signalisation calcique de

manière significative235. Néanmoins, on a précédemment montré que l’intensité de

signalisation en aval de MPL ne variait pas entre les mutations de type 1 et de type 2

in vitro. Les différences phénotypiques observées entre ces deux types de mutation,

à la fois chez les patients et dans les modèles murins, peuvent donc provenir d’un différentiel de signalisation calcique.

MPL AKT SOCS, p21 … Proliféra7on, Différencia7on, Survie cellulaire ERK TPO MPL MPL CYTOPLASME NOYAU RE CALRmut JAK2 JAK2 STAT 1/ 3/ 5 STAT 1/ 3/ 5 CALRmut CALRmut p p p p p p p p

Figure 18. Hypothèse d’activation constitutive de la voie JAK/STAT par CALRmut. L’interaction qui s’opère dans le RE entre CALRmut et la future partie extracellulaire de MPL serait maintenue dans l’appareil de Golgi, du fait de la nouvelle

queue C-terminale de CALRmut qui empêche l’inhibition de cette interaction médiée par le

domaine P de CALR. Le complexe MPL-CALRmut est alors adressé de manière anormale à la membrane, et cette liaison, indépendamment du site de liaison de la TPO à MPL, stabiliserait une conformation particulière du récepteur qui induirait l’activation de protéines en aval telles que les STATs et des signaux de survie et prolifération cellulaire.

3.2.5.3 Action sécrétrice de la protéine

Compte tenu de l’implication cruciale de CALRdans le bon repliement et dans le bon

adressage des glycoprotéines vers les voies de sécrétion, mais aussi de l’impact des cytokines dans l’hématopoïèse, il est tout à fait probable qu’un effet paracrine de

CALRmut puisse lui conférer son pouvoir oncogénique, en étant elle-même sécrétée

dans le but d’activer le récepteur MPL de manière constitutive, en activant des cellules de l’immunité ou d’autres cellules hématopoïétiques ou en induisant un adressage membranaire et une sécrétion altérés de glycoprotéines. A ce propos, une étude du profil sécrétoire des différentes mutations a été menée, et il a été observé que les mutations de type 1 favorisaient la sécrétion de multiples cytokines –GM- CSF, IL-10, IL-12, MIP-1α, MIP-1β- tandis que les mutations de type 2 ne stimulaient

principalement que la sécrétion d’IL-7 et de MIG236. Toutefois, ce sécrétome a été

réalisé sur des monocytes purifiés provenant de patients CALRmut ou conditionnés

par le surnageant de cellules HeLa transfectées avec CALR, et aurait été plus informatif s’il avait été effectué sur des cellules aux caractéristiques mégacaryocytaires.

Pour autant, la co-culture de lignées UT-7 non transduites ou exprimant la mutation de type 2 ne favorise pas la croissance des premières en présence ou en absence

de TPO exogène228 et l’ajout de concentrés de surnageant de cellules 32D exprimant

la mutation de type 1 n’induit pas d’indépendance aux cytokines des cellules CALR

sauvages237.

Bien qu’existant, le mode d’action paracrine de CALR ne semble donc pas influer la pathophysiologie des NMP mutés CALR.

3.2.5.4 Un marqueur clé de la phagocytose

L’expression de CALR à la surface cellulaire joue un rôle crucial dans la phagocytose. En effet, elle serait un marqueur cellulaire membranaire indispensable pour la phagocytose, transloquée à la surface des cellules apoptotiques et reconnue par les macrophages et les cellules dendritiques, aussi bien dans un contexte physiologique que dans le cadre de cancers. Etant donné que l’absence du motif KDEL -motif de rétention dans le RE- dans la queue C-terminale du mutant CALR affecte sa localisation, il est probable qu’il y ait une sensibilité différente des cellules

CALRmut à la phagocytose. Bien que l’expression de CALRmut semble augmentée à

hématopoïétique et les cellules ne semblent pas plus sujettes à la phagocytose, du

moins en terme de phagocytose liée aux macrophages238.

Au final, l’activation des voies de signalisation JAK/STAT, mais aussi MAPK et PI3K/AKT responsable des phénotypes myéloprolifératifs observés s’explique plus probablement par l’interaction possible entre une région particulière de MPL et les charges positives de la queue C-terminale nouvellement formée de CALRmut.

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