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Chapitre 2 : Le cadre théorique et la recension des écrits

2.3 Le modèle théorique et sa définition de la gestion de classe

Comme il existe une variété de définitions et de conceptions attribuées au vocable de gestion de classe, il est primordial de définir le concept en le référant à un cadre théorique qui décrit les tâches ou les comportements de l’enseignant (Fijalkow et Nault, 2002). Ainsi, un modèle de gestion de classe bien défini sert d’assise à l’élaboration du dispositif de soutien qui a été mis à l’épreuve dans la présente étude. Il s’agit du modèle théorique de gestion de classe d’Archambault et Chouinard (2003). Nous présentons ici une vision globale de ce modèle et de sa conception de la gestion de classe. Nous ferons ressortir les motifs qui justifient ce choix.

La première particularité de ce modèle théorique en gestion de classe qui a inspiré le dispositif de soutien est d’être étayé par les résultats de recherches scientifiques dans les domaines de la cognition, de la motivation, de l’affectivité ainsi que la psychologie, notamment l’école du béhaviorisme cognitif. Cette école est un béhaviorisme renouvelé, c’est-à-dire que l’objet d’étude ne se limite pas aux comportements observables, mais comprend les comportements cognitifs, internes à l’élève, comme l’autocontrôle. Le cognitivisme présente une théorie de la connaissance et du traitement de l’information qui s’explique par l’intervention des processus internes. Dans le domaine de la métacognition, la thèse repose sur la compréhension et

le contrôle des activités cognitives pour permettre le développement des compétences intellectuelles et favoriser la performance (Legendre, 1993). L’acte éducatif s’avère un élément central du modèle puisqu’il préconise le recours à des méthodes pédagogiques pour agir sur le système métacognitif des élèves. Selon les auteurs du modèle, il faut montrer aux élèves à apprendre et tenir compte de leurs émotions et de leur motivation. Ces actions doivent être combinées et sont nécessairement complémentaires. Il ne suffit pas de dire quoi faire aux élèves, mais leur montrer comment faire, leur montrer à apprendre. À cet égard, de nombreuses recherches ont démontré que les approches pédagogiques dans lesquelles les élèves doivent découvrir par eux-mêmes sont moins efficaces que celles plus explicites, où il y a un enseignement direct, un entraînement systématique (Archambault et Chouinard, 2003).

Les auteurs définissent le concept de gestion de classe comme étant : « l’ensemble des pratiques éducatives auxquelles l’enseignant a recours afin d’établir, de maintenir et, au besoin, de restaurer dans la classe des conditions propices au développement des compétences des élèves » (Archambault et Chouinard, 2003, p. 14). Leur vision contemporaine de la gestion de classe vise l’autorégulation de l’élève, le développement de l’autonomie par la prise en charge graduelle de son comportement, en éliminant progressivement les restrictions et le contrôle externe. Cette conception de la gestion de classe représente bien toute l’ampleur et la complexité de cette compétence. Quatre orientations sont à la base du modèle : l’importance de la prévention, la prise en charge par l’élève de son comportement et de ses apprentissages, l’aspect éducatif de toute intervention et finalement l’utilisation de la pratique réflexive. La première orientation, la prévention, réfère aux actions posées par l’enseignant avant que les difficultés se présentent. C’est ce qui distingue les enseignants efficaces en gestion de classe des autres : leur capacité à anticiper les risques de difficulté. La deuxième orientation, la prise en charge par l’élève de son comportement et de ses apprentissages, correspond à une gestion de classe dont le but

va au-delà de l’obéissance de l’élève. Au contraire, elle vise à enlever le contrôle et les restrictions au fur et à mesure que l’élève développe sa capacité à s’autoréguler. La troisième orientation, l’aspect éducatif de toute intervention, se rapporte au recours à des pratiques éducatives pour faire apprendre aux élèves les comportements adaptés, plutôt que de réagir en utilisant la punition qui n’apprend rien aux élèves. La quatrième orientation, utilisation de la pratique réflexive, signifie que ce modèle ne ressemble pas à un livre de recettes rempli de «trucs». Plutôt, il fait appel à «l’intelligence professionnelle» de l’enseignant en favorisant la réflexion sur sa pratique et l’engagement dans un processus de résolution de problème.

Finalement, ce modèle propose à l’enseignant, dans une démarche en trois temps, diverses interventions éducatives pour favoriser l’apprentissage, la motivation et l’autonomie de l’élève. Dans un premier temps, il s’agit d’établir et de maintenir le fonctionnement de la classe. Dans un deuxième temps, on explique comment soutenir l’apprentissage autonome et la motivation. Dans un troisième temps, on précise comment intervenir afin de résoudre les problèmes de comportement. On retrouve un mouvement semblable en trois temps chez d’autres modèles en gestion de classe notamment, l’approche préventive du modèle POC : planification, organisation et contrôle (Nault et Lacourse, 2008).

D’entrée de jeu, le modèle Archambault et Chouinard (2003) cadrait parfaitement avec l’intention de soutenir le personnel enseignant en milieu défavorisé puisqu’il agit, entre autres, sur la motivation scolaire en proposant des interventions qui la favorisent. Le manque de motivation caractérise les élèves issus de ces milieux et, à la fois, représente l’une des difficultés auxquelles sont confrontés les enseignants débutants. Il est vrai que les élèves des milieux défavorisés sont plus susceptibles d’éprouver des problèmes liés soit à la motivation scolaire, à un retard d’apprentissage,

ou de développement, soit à un trouble émotif ou du comportement. Ils réussissent moins bien, obtiennent moins de diplômes et quittent davantage l’école sans qualification. Ils sont plus à risque d’éprouver des difficultés dans leur parcours scolaire, et ce, dès leur entrée à l’école. Par ailleurs, selon la recherche, malgré leur fragilité, ces élèves ont les mêmes capacités d’apprentissage que les autres. Ils ont des besoins différents à cause de leur origine sociale et culturelle. Par exemple, leur bagage de connaissances est insuffisant, particulièrement en lecture et en écriture (MEQ, 2002).

De plus, ce modèle tient compte que l’influence des enseignants et de l’école sur le comportement et l’apprentissage des élèves a été démontrée. Ainsi, les problèmes de comportements ne se définissent pas uniquement en terme de variables reliées à l’élève, ni comme des caractéristiques durables. De cette façon, les élèves qui évoluent dans un environnement qui sait répondre à leurs besoins ont tendance à vouloir réussir et à se conduire adéquatement. Une autre conviction soutenue par ce modèle est que la plupart des problèmes vécus en classe peuvent se régler en classe. Ce constat offre beaucoup d’espoir à l’enseignant et lui donne du pouvoir, à condition d’y croire bien entendu. Pour faire progresser les élèves, l’enseignant doit croire aux capacités d’apprentissage des élèves et être convaincu qu’il est capable de les faire apprendre. À cet égard, le modèle prend en compte des éléments pour favoriser l’adaptation de l’enseignement aux besoins des élèves. Par exemple, en misant sur l’importance de connaître les élèves et de tenir compte de leurs connaissances antérieures. De plus, selon ce modèle, la gestion de classe sert à favoriser le développement de l’ensemble des compétences de l’élève dans le contexte particulier qu’est la classe.

En plus de tenir compte des besoins des élèves, le contexte d’enseignement est très important à prendre en considération dans la gestion d’une classe. Chaque contexte d’enseignement oblige l’enseignant à activer son processus d’adaptation (Desbiens, 2006; Martineau et collab., 1999). Or, l’enseignant œuvrant en milieu défavorisé, avec des élèves ayant des besoins particuliers, doit développer des talents en différenciation pédagogique. Nous apprécions la vision de Perrenoud (1999) selon laquelle différencier représente le défi de la rencontre entre un apprenant, un enseignant et un savoir ou une tâche. Autrement dit, que l’incarnation du triangle didactique, soit à chaque instant optimale. Cela rejoint l’adéquation SOMA (Sujet, Objet, Milieu et Agent) d’une situation pédagogique de Legendre (1993) pour mieux répondre aux besoins des élèves. Ce qui sous-entend qu’il n’y a pas de recette magique. Finalement, ce modèle met l’accent sur l’enseignement des comportements adaptés et il propose des stratégies d’intervention pour composer avec des difficultés d’ordre comportemental qui se veut la grande préoccupation des jeunes enseignants.

2.4 Les caractéristiques des enseignants débutants en relation avec la gestion de