• Aucun résultat trouvé

3.1 Filières à ressources régionales

3.1.2 Filières hydrologiques

3.1.2.4 Ressource Rhône

3.1.2.4.3 Modèle Robinet

Afin de mieux comprendre l’évolution des températures du Rhône genevois, le modèle « robinet », développé en détail dans VIRAGE, est explicité ci-après (FAESSLER J. et al., 2009b). La modélisation thermique d’un cours d’eau soumis à divers échanges et rejets thermiques le long de son parcours peut être réalisée avec différents degrés de complexité. Dans le premier rapport VIRAGE (FAESSLER J. et LACHAL B., 2008a), le modèle développé était un modèle de type

« piscine » dans lequel la notion spatiale est limitée car on regarde les échanges thermiques que subit une masse d’eau immobile en fonction du temps. Dans le modèle robinet, la notion spatiale due au déplacement des masses d’eau est introduite en utilisant la notion de temps de transit des masses d’eau entre le début et la fin du parcours étudié, en l’occurrence entre la Jonction et Verbois. Ce temps de transit représente le temps mis par chaque masse d’eau au départ de la Jonction pour atteindre Verbois.

Hypothèses principales du modèle

Le modèle robinet repose sur les hypothèses principales suivantes :

• Le mélange de l’eau de l’Arve et du Rhône est homogène sur la section de passage de l’eau en tout point du modèle (partiellement vérifié par des mesures ponctuelles – FAESSLER J.

et al., 2009b) ;

• Le calcul du temps de transit se base sur un niveau d’eau constant (volume constant) et une vitesse constante sur la section de passage (découle de l’hypothèse d’homogénéité). Cela suppose que toute la section de passage participe au temps de transit (zones mortes, chenal principal, recirculations négligées) ;

• Le coefficient d’ombrage a été calculé avec le logiciel ArcGIS (outil solar radiation) et divisé en cinq tronçons (valeur annuelle de transmission de 73%) ;

• Le débit varie simultanément sur tout le parcours (vérifié par les mesures issues de l’OFEV, voir la Figure 38 et la Figure 39 (zoom) ci-dessous) ;

Figure 38 : débits mesurés du Rhône (Ile et Chancy), de l’Arve (Bout-du-Monde) et somme des débits Arve et Rhône-île (FAESSLER J. et al., 2009b)

Figure 39 : zoom sur débits mesurés du Rhône (Ile et Chancy), de l’Arve (Bout-du-Monde) et somme des débits Arve et Rhône-île (FAESSLER J. et al., 2009b)

En général, la somme des débits du Rhône à l’île et de l’Arve évolue en parallèle et dans le même temps que le débit mesuré à Chancy, confortant l’hypothèse d’instantanéité des débits sur tout le parcours.

Les hypothèses suivantes, déjà décrites dans le rapport VIRAGE R1, sont toujours valables (FAESSLER J. et LACHAL B., 2008a) :

• La surface du Rhône est considérée comme horizontale ;

• Les échanges de chaleur entre le lit de la rivière et l’eau sont négligeables ;

• Le transfert de chaleur dû aux frottements est négligeable. On peut estimer que pour un dénivelé de 1 mètre, la masse d’eau s’échauffe de 0.00235 K (selon ∆T = m·g·h / CH2O

• La densité de l’eau et la chaleur latente d’évaporation de l’eau sont constantes dans le domaine de température considéré ;

) ;

• Le coefficient d’échange convectif est estimé en utilisant une formule empirique selon (MOLINEAUX B. et al., 1994) (hc

• Toutes les structures en contact avec l’eau (ponts, berges) ont une température égale à celle de l’air ;

= 3 + 2v ; avec v = vitesse du vent météo) ;

• L’absorption du rayonnement solaire par l’eau est estimé à 0.95 ;

• Les formules pour l’approximation effectuée pour le calcul de l’infrarouge (IR) du ciel sont tirées de la thèse de M. Ineichen (INEICHEN P., 1983), estimées comme sans couverture nuageuse (« clear days »), avec un facteur équivalent de l’émissivité IR « échange éléments environnants-Rhône » de 0.95.

Modélisation

La modélisation se construit en trois étapes : à partir d’un modèle de base, les données météorologiques puis les rejets thermiques sont pris en compte. Les modèles reposent sur les données à disposition et sont modifiables. Le modèle utilise les données météo et les valeurs de débits et de températures mesurées pour l’année 2007. Ce choix est motivé par le fait qu’il s’agit de l’année pour laquelle on disposait du plus grand nombre de données.

Le modèle de base s’appuie simplement sur le mélange homogène de l’eau de l’Arve et du Rhône à la Jonction. Les masses d’eau qui se mélangent à la Jonction sont la rencontre d’une masse d’eau du Rhône dont la température est mesurée à l’Ile au temps

t

-

t

TR_Ile-Jonc et d’une masse d’eau de l’Arve dont la température est mesurée au Bout-Du-Monde au temps

t

-

t

TR_BDM-Jonc. Les mesures de débit montrent que le débit varie quasi-simultanément sur tout le parcours, lorsque la consigne est modifiée au Seujet. Ces masses d’eau ainsi mélangées sont décalées temporellement à Verbois de la valeur du temps de transit entre la Jonction et Verbois (

t

TR_JoncVerbois

Le modèle avec météo consiste à calculer la température de mélange simple à la Jonction (comme dans le modèle de base) et de lui additionner les effets de la météo pour chaque élément et à chaque pas de temps. Les échanges de chaleur atmosphérique sont calculés pour chaque élément j au temps i et le bilan sur l’élément détermine la variation de température associée. La pluie n’est prise en compte que sur la surface du Rhône, les apports par écoulements n’étant pas modélisés.

) calculée pour chaque masse d’eau. Les temps de transit du Rhône ou de l’Arve jusqu’à la Jonction étant d’un ordre de grandeur en dessous du temps de transit Jonction-Verbois, ils sont négligés. Globalement, en tenant compte du temps de transit entre la Jonction et Verbois, une bonne corrélation entre la température modélisée et la température mesurée est démontrée (FAESSLER J. et al., 2009b).

Le modèle complet inclut les trois principaux rejets thermiques déversés dans le Rhône entre la Jonction et Verbois :

• La STEP d’Aïre : le rejet est calculé à partir des données journalières de débit et de température à l’entrée de la STEP, ce qui les sous-estime légèrement. N’ayant pas les valeurs de la température du Rhône à la hauteur de la STEP, les moyennes journalières de pompage des Cheneviers sont utilisées pour la température d’entrée ;

• L’entreprise Givaudan : à partir des données journalières 2007, les rejets sont calculés chaque semaine selon une moyenne pour les 5 jours de la semaine et une autre moyenne pour le weekend. Les températures d’entrée du Rhône sont prises comme équivalentes à celles de Verbois ;

• L’UVTD des Cheneviers : les rejets sont calculés selon les données moyennes journalières à partir des températures d’entrée et de sortie de l’usine et des débits pompés.

De plus, le Nant d’Avril, cours d’eau situé dans la retenue de Verbois et principal affluent du Rhône pour le tronçon considéré, est traité comme un rejet dans le modèle (apport d’eau plus froide ou plus chaude que le Rhône selon les cas).

Afin de tester la robustesse du modèle et afin de voir les différences entre la version de base et les versions avec la météo puis les rejets, on a comparé les résultats issus des trois modèles aux valeurs mesurées de température de l’eau à Verbois sur l’année 2007, puis 2003. La Figure 40 présente la température mesurée à Verbois par les SIG en fonction de la température prédite par le modèle :

Figure 40 : températures modélisées à Verbois en fonction des températures mesurées à Verbois (FAESSLER J. et al., 2009b)

La dispersion des points par rapport à la droite à 45° est plus importante en 2003 pour le modèle complet, en comparaison à l’année 2007 pour tous les modèles. L’année 2003 étant une année avec une météo spéciale, on observe que les ordres de grandeur restent bons. Le modèle avec météo améliore beaucoup le modèle de base, alors que l’addition des rejets ne modifie que faiblement les résultats de la modélisation.

Pour la validation du modèle, il est essentiel de montrer les différences de températures entre les valeurs mesurées et le résultat des différents modèles pour chaque heure. La Figure 41 et la Figure 42 présentent les mêmes points, mais tracés d’abord en fonction du temps puis en fonction du débit. Pour le graphique en fonction du débit, les points sont colorés selon le jour et la nuit (le jour étant défini toute l’année de 6h à 22h, d’après la courbe typique journalière de variation du débit – voir Figure 32).

Figure 41 : différence de température entre les mesures et les modèles : comparaison en fonction du temps (FAESSLER J. et al., 2009b)

Figure 42 : différence de température entre les mesures et les modèles : comparaison en fonction du débit (FAESSLER J. et al., 2009b)

La Figure 41 et la Figure 42 montrent que plus le modèle est complet (météo et rejets), plus le biais et l’écart-type horaire diminue. La différence majeure se trouve entre le modèle de base et le modèle avec météo. L’ajout des rejets a un faible impact sur l’écart-type mais améliore le biais.

De manière générale, le modèle sous-estime légèrement les mesures en présentant un biais négatif de l’ordre de -0.2°C. Les ordres de grandeur sont très bons, si l’on se souvient que les variations de températures instantanées peuvent être parfois de plusieurs degrés, notamment lors d’épisodes de fortes pluies ou de basculement du Lac Léman, qui provoque le phénomène de la « goutte d’eau froide » (POIREL A. et al., 2009).

Le modèle complet avec la météo 2003 fonctionne correctement même si le biais est un peu moins bon. Ces petites différences doivent être mises en relation avec la météo très spéciale de cette année 2003.

Limites du modèle robinet

Les limites du modèle sont liées aux hypothèses simplificatrices choisies, essentiellement celle de l’homogénéité du mélange. Les autres incertitudes liées au modèle sont les suivantes :

• Les apports de la nappe phréatique (échanges thermiques et de stocks d’eau), liés entre autres à la pluviométrie, sont ici négligés ;

• Les apports d’eau froide lors de pluies (via des surfaces étanches) ne sont pas pris en compte. Seule la pluie arrivant sur la surface du Rhône est intégrée dans le modèle ;

• Les valeurs météo et les mesures sont sous forme horaires, ce qui donne le « pas » de résolution temporelle minimale ;

• La bathymétrie utilisée dans le modèle est celle de l’année 2003 (AQUAVISION ENGINEERING, 2007). Le comblement progressif de la retenue fait que celle-ci évolue constamment et modifie le temps de transit ;

On voit donc que l’impact de ces rejets thermiques est imperceptible sur le système pris dans sa globalité, même si des impacts locaux de rejets importants comme celui de l’usine des Cheneviers peuvent être non négligeables très localement, avec la formation de plumes ou de zones d’eau chaudes. Mais ceci doit être remis dans le contexte global de l’évolution de la température du fleuve, plus influencée par la gestion des débits des barrages et par les fluctuations spontanées du système (répartition des apports entre l’eau de l’Arve et celle du Rhône).