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Modèle du fonctionnement descriptif de la croissance post-traumatique

CHAPITRE 3 : CADRE DE RÉFÉRENCE

3.1 Modèle du fonctionnement descriptif de la croissance post-traumatique

Ce mémoire est pensé dans le cadre de la psychologie positive et plus précisément à travers le modèle du fonctionnement descriptif de la croissance post-traumatique proposé par Tedeschi et Calhoun en 2004 (voir figure 1). Ce modèle est central dans ce mémoire puisqu’il permet, dans le volet qualitatif de l’étude, de catégoriser les changements positifs perçus par les répondants en cinq grands thèmes et de cerner les éléments qui sont à l’origine de ces perceptions. En ce qui concerne le volet quantitatif de cette étude, ce modèle permet de vérifier et d’expliquer la présence d’éventuels liens entre la détresse psychologique, le soutien social perçu et la croissance post-traumatique. La figure 1 présente sous forme de schéma le modèle de fonctionnement de la croissance post-traumatique tel qu’élaboré par Tedeschi et Calhoun (2004).

Tedeschi et Calhoun (2004) ont conceptualisé le processus de croissance comme un phénomène qui peut survenir à la suite d’un évènement traumatique ayant détruit des schémas clés dans les objectifs d’ordre supérieur, les croyances, les capacités à gérer les émotions et la vision du monde des victimes. Les individus confrontés à un évènement traumatique sont amenés à vivre un processus de rumination afin de réduire la détresse émotionnelle qui résulte de ce type d’évènement. Ensuite, la rumination se transforme en une réflexion sur le traumatisme et ses impacts, ce qui jouerait un rôle clé dans le développement de la croissance

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post-traumatique. Cette dernière est conceptualisée comme une construction multidimensionnelle incluant des changements dans les croyances, les objectifs, les comportements et l’identité, ainsi que le développement d’un récit de vie et de la sagesse (Tedeschi et Calhoun, 2004).

Figure 1 : Modèle du fonctionnement descriptif de la croissance post-traumatique1 1. Figure tirée de Kretsch, Tarquinio, Stephen, Martin-Krumm, (2011, p.411).

Ce modèle stipule qu’une croissance post-traumatique peut émerger uniquement à la suite d’un vécu potentiellement traumatique, nommé « séisme psychologique », ayant conduit les individus à lutter pour faire face à l’évènement. Cette lutte leur permettra de reconstruire leurs schémas fondamentaux, c’est-à-dire leurs croyances, leurs valeurs, leurs buts et leurs conceptions de la vie et d’eux-mêmes, qui ont été profondément bouleversés par ce « séisme psychologique ». Toutefois, étant donné que les victimes d’un traumatisme font face à une détresse émotionnelle tant sur le plan affectif que cognitif, cette reconstruction et modification des schémas cognitifs demande, au préalable, de passer au travers d’un long processus graduel. En effet :

Il [ce processus] se situe dans une évolution dynamique entre détresse émotionnelle, rumination, pensées intrusives, pensées contrôlées (réorganisatrices d’un nouveau mode de fonctionnement), remaniement des buts et croyances et apaisement émotionnel et psychologique (Kretsch, Tarquinio, Stephen, Martin- Krumm, 2011, p.412).

Il est donc considéré dans ce modèle qu’un vécu potentiellement traumatique et générateur de détresse vient engager des ressources internes pouvant mener certaines personnes à effectuer des changements positifs et à développer des capacités d’adaptation pour faire face à l’adversité. La manière dont les individus traitent la crise joue alors un rôle crucial dans leur processus de croissance post-traumatique. En effet, dans un premier temps, les individus font face à des ruminations mentales initiées par la détresse, c’est-à-dire des pensées intrusives et automatiques liées au vécu potentiellement traumatique, et tentent d’adopter des comportements leur permettant de donner un sens ou de réinterpréter positivement l’évènement et réduire la détresse. À ce niveau du modèle, cela représente un processus adaptatif. L’individu est alors « pris dans un fonctionnement cyclique entre pensées intrusives, rumination et sentiment de détresse » (Kretsch et al., 2011, p.411). Dans un deuxième temps, pour se sortir de cet état mental, les individus expérimentent de nouvelles ruminations, cette fois-ci plus délibérées, car ils sont motivés à mobiliser leurs ressources

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internes pour reconstruire leurs schémas fondamentaux et donner un nouveau sens et une cohérence à leur vie. Ainsi, ce processus interne démontre la capacité des individus à surmonter et dépasser une crise. Par ailleurs, les personnes qui réaliseront entièrement ce processus pourront connaître des changements dans leur vie faisant en sorte qu’elles se sentiront grandies, plus fortes et plus outillées pour faire face à l’adversité.

De plus, Tedeschi et Calhoun (2004) estiment que le soutien social est primordial pour réaliser ce processus facilitant la croissance post-traumatique. Ce soutien social doit pouvoir initier, chez les individus soutenus par les membres de leur entourage, un processus de narration incluant la divulgation ainsi que le partage de leur vécu et de leur récit de vie afin qu’ils puissent rechercher un sens et intégrer de nouvelles perspectives et de nouveaux schémas leur permettant de mieux gérer la détresse et atteindre la croissance post-traumatique, voire une forme de « sagesse ».

Les changements positifs auxquels fait référence la croissance post-traumatique ont été regroupés par les auteurs dans les cinq domaines suivants : nouvelles possibilités, relations avec les autres, appréciation de la vie, forces personnelles et changements spirituels, comme étant le résultat d’une restructuration conceptuelle. Ceux-ci font l’objet d’un outil de mesure appelé le Posttraumatic Growth Inventory (PTGI, Tedeschi et Calhoun, 1996). Plus spécifiquement, la perception de nouvelles possibilités se manifeste notamment par la capacité à faire des changements là où ils sont nécessaires, l’accomplissement de meilleures choses dans sa vie, le développement de nouveaux intérêts et l’apparition de nouvelles opportunités qui n’auraient pu se révéler auparavant. Les changements positifs dans les relations avec les autres renvoient au sentiment d’être plus proche des autres, à investir davantage dans ses relations interpersonnelles, à mieux accepter d’avoir besoin des autres et à une plus grande capacité à manifester une attitude empreinte de compassion envers les autres. Les changements positifs dans les forces personnelles reflètent, quant à eux, le fait de

découvrir des ressources insoupçonnées et au développement d’un plus grand sentiment d’autonomie. L’appréciation de la vie est caractérisée par des changements dans ses priorités concernant ce qui est le plus important dans sa vie et par l’augmentation de l’appréciation de sa propre vie et de la valeur de chaque journée. Enfin, les changements spirituels peuvent indiquer l’existence d’une spiritualité ou de croyances religieuses plus profondes et une meilleure compréhension de sa spiritualité.