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CHAPITRE 2 : RECENSION DES ÉCRITS

2.2 Facteurs liés à la croissance post-traumatique

2.2.3 Facteurs post-traumatiques

En ce qui concerne les facteurs post-traumatiques, des informations sont apportées sur les éléments suivants : 1) l’état de santé psychologique post-désastre, 2) le soutien social post- désastre et l’utilisation de services en santé mentale, 3) la résilience et 4) la recherche de sens.

L’état de santé psychologique post-désastre

Certains impacts négatifs de l’exposition à une catastrophe sur la santé psychologique peuvent prédire la croissance post-traumatique à moyen ou à long terme. En effet, la rumination en lien avec la perturbation des croyances fondamentales de la vie peut faciliter le processus de croissance post-traumatique (García, Cova, Rincón, Vázquez et Páez, 2016 ; García, Cova, Rincón et Vázquez, 2015 ; Kaijun et al., 2015 ; Leal-Soto, Carmona-Halty, et Ferrer-Urbina, 2016 ; Tedeschi et Calhoun, 2004). De plus, un niveau élevé de détresse générale est aussi un facteur pouvant favoriser la croissance post-traumatique (Aslam et Kamal, 2013 a ; Helgeson et al., 2006 ; Leiva-Bianchi et Araneda, 2013 ; Mordeno, Nalipay, et Cue, 2015 ; Ramos et Leal, 2013 ; Smith et al., 2016 ; Zoellner et Maercker, 2006).

Plusieurs études ont également montré que les personnes qui sont aux prises avec des manifestations de stress post-traumatique présentent des niveaux plus élevés de croissance post-traumatique (Achterhof et al., 2017 ; Chan et Rhodes, 2013 ; Chen et al, 2015 ; Dursun et al., 20169). Par exemple, six mois après le séisme-tsunami de 2004 en Asie du Sud-Est, 88 % des 138 survivants adultes interrogés ont éprouvé un degré variable de changements positifs dans les diverses dimensions de la version chinoise du Posttraumatic Growth Inventory (PTGI, Tedeschi et Calhoun, 1996) et 51 % répondaient à tous les critères de trouble de stress post-traumatique du DSM-IV (Tang, 2007). D’après Shakespear-Finch et Lurie-Beck (2014),

9 D’autres auteurs ont fait le même constat dans leurs études : Gibbs et al., 2016; Gold et al., 2011; Guo et al.,

2017 ; Jin et al., 2014 ; Kaijun et al., 2015 ; Linley et Joseph, 2004 ; Nezu et al., 2013 ; Park, 2004; Pooley et al., 2013 ; Saccinto et al., 2012 ; Siqveland et al., 2015 ; Tang, 2007 ; Wu, Xu, et Sui, 2016 ; Xu et Liao, 2011.

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une quantité modérée de manifestations de stress post-traumatique serait liée au plus haut niveau de croissance post-traumatique (Shakespeare-Finch et Lurie-Beck, 2014). Pour leur part, Nezu et al. (2013) démontrent que la croissance post-traumatique augmente à chaque temps de mesure chez les personnes ayant un trouble de stress post-traumatique comparativement à celles qui n’en ont pas. De plus, Chen et al. (2015) ont mis en avant le fait que la croissance post-traumatique peut jouer un rôle dans la réduction des symptômes de stress post-traumatique à long terme, excepté pour les symptômes d’évitement. Enfin, Park (2004), dans une recension des écrits, explique le lien positif entre la croissance post- traumatique et la présence de manifestations de stress post-traumatique (mesurée par l’Impact

of Event Scale d’Horowitz, Wilner et Alvarez, 1979) par le fait que les processus cognitifs

automatiques d’intrusion et d’évitement mènent à la croissance.

Bien que le lien positif entre stress post-traumatique et croissance post-traumatique ait été démontré à maintes reprises, diverses études ne montrent pas d’association similaire avec la dépression ou encore l’anxiété (Chan et Rhodes, 2013 ; Linley et Joseph, 2004 ; Zoellner et Maercker, 2006). La dépression serait plutôt une barrière au développement de la croissance post-traumatique. En effet, dans certaines études recensées, les personnes dépressives étaient moins susceptibles de présenter une croissance post-traumatique (Guo et al., 2017 ; Linley et Joseph, 2004 ; Helgeson, Reynolds, et Tomich, 2006). Inversement, les individus présentant moins de dépression montraient plus de croissance post-traumatique, de découverte de bénéfices ou encore de bien-être général (Helgeson, Reynolds, et Tomich, 2006). Cela peut s’expliquer par le fait qu’une humeur dépressive est généralement accompagnée d’une pensée négative, rendant difficile la perception d’aspects positifs d’une situation (Zoellner et Maercker, 2006). Toutefois une récente étude a montré qu’une dépression modérée est prédictive de croissance post-traumatique chez des étudiants victimes d’un tremblement de terre (Bianchini et al., 2017).

Le soutien social post-désastre et l’utilisation de services en santé mentale

Différentes variables servant à quantifier le soutien social reçu par les individus influenceraient le processus d’adaptation et l’émergence de croissance post-traumatique (Zoellner et Maercker, 2006). Ainsi, l’environnement social, le soutien social, le soutien familial et la prestation de services de soutien aux victimes, après une catastrophe, seraient tous liés à la croissance post-traumatique. En effet, un niveau élevé de soutien émotionnel et social est associé à un niveau élevé de croissance post-traumatique (Gibbs et al., 2016 ; He et al., 2013 ; Karanci et Acarturk, 2005 ; Linley et Joseph, 2004 ; Prati et Pietrantoni, 2009 ; Tang, 2007 ; Wu et al., 2016). De plus, le soutien familial est corrélé au bon fonctionnement personnel après une catastrophe technologique (Barling, Bluen, et Fain, 1987). À ce propos, Rebecca et Britt-Inger (2011), dans leur étude qualitative menée quatre ans après le déraillement d’un train, expliquent que la proximité devrait être encouragée et facilitée, car la famille, les amis et les autres passagers se sont révélés extrêmement importants pendant le processus de rétablissement des survivants.

De plus, les participants ayant reçu un traitement de santé mentale après un tsunami ont signalé des scores significativement plus élevés de croissance post-traumatique que les répondants non traités (Kraemer et al., 2009). Ainsi, la prestation de services aiderait les victimes d’une catastrophe à se rétablir (Lowe, Rhodes, et Waters, 2015). Cependant, dans leur étude, Kendall, McMillen, Smith et Fisher (1997) soulignent que l’utilisation de services de santé n’est pas liée à la perception de retombées positives, mais est seulement liée à une moins grande fréquence de symptômes de stress post-traumatique. Par ailleurs, les survivants sont également plus susceptibles d’utiliser des stratégies d’adaptation appropriées une fois qu’ils obtiennent plus de soutien social (He et al., 2013). Deux récentes recensions des écrits (Bonanno et al., 2010 ; Linley et Joseph, 2004) expliquent que le niveau de satisfaction face au soutien social reçu ou le soutien social perçu prime sur le niveau de soutien social reçu en

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ce qui concerne le degré d’influence sur la croissance post-traumatique. Toutefois, il existe une interaction dynamique entre les perceptions perçues et reçues du soutien au fil du temps (Bonanno et al., 2010). En effet, dans l’étude de Kaniasty (2012), les répondants qui ont reçu plus d’aide de diverses sources, vingt mois après une inondation, ont affiché un plus grand niveau de soutien social perçu que les personnes qui ont déclaré recevoir moins d’aide.

La résilience

Selon Kaijun et al. (2015), la résilience, définie par ces auteurs comme « un ensemble de capacités et de stratégies d’adaptation » (p.2), est positivement associée à la croissance post-traumatique. Par ailleurs, Stanko et al. (2015) définissent la résilience comme « une réponse comportementale commune à différents évènements défavorables de la vie, où les survivants “rebondissent” après un stress grave et des circonstances défavorables » (p.565). Ils expliquent que l’identification des leçons apprises et des résultats potentiellement positifs sont des réactions psychologiques qui peuvent faciliter l’adaptation post-catastrophe et favoriser la résilience chez les adultes indirectement affectés dans les années suivant leur exposition à une catastrophe. Pour leur part, Smith et al. (2016) considèrent qu’après avoir été exposées à une catastrophe, les personnes qui font preuve de résilience font l’expérience subjective d’adaptation sans avoir eu recours à des traitements pour une détresse psychologique et sans avoir été diagnostiquées pour un trouble de santé mentale. Ces auteurs estiment que la croissance post-traumatique n’est pas un aspect de la résilience, mais que ces deux variables peuvent cohabiter, car la résilience n’empêche pas le processus de croissance de se mettre en place (Smith et al., 2016).

La recherche de sens

Rechercher un sens à un évènement traumatique et à la vie en générale, à la suite d’une catastrophe, contribue à la croissance post-traumatique et à la résilience (Dursun et al.,

2016 ; Weathers et al., 2016). La découverte d’un sens à ses expériences peut être un processus continu qui prend des jours, des semaines, des mois, voire des années pour évoluer (Achterhof et al., 2017).

Le tableau 3 présente les divers facteurs associés à la croissance post-traumatique en fonction de ceux qui font l’unanimité et ceux qui ne font pas consensus au sein des divers écrits recensés.

Tableau 3

Facteurs associés positivement à la présence de croissance post-traumatique dans les écrits scientifiques recensés

Facteurs pré- traumatiques Facteurs péri- traumatiques Facteurs post- traumatiques Ce qui a été confirmé dans la plupart des études • Être âgé de moins de 51 ans

• Être une femme • Avoir un niveau de revenu faible • Avoir un niveau de scolarité élevé • Occuper un emploi rémunéré • Rechercher un sens à l’évènement et à la vie en général

• Avoir des croyances et pratiques religieuses ou des valeurs spirituelles • Être engagé dans des

activités significatives ou gratifiantes

• Être doté de certains traits de personnalité : optimisme,

extraversion, ouverture d’esprit, bonne estime de soi

• Flexibilité, cohésion familiale et leadership démocratique

• Avoir un grand réseau de soutien

• Avoir un niveau élevé d’attachement à son environnement

• Exposition au sinistre (peu importe le niveau d’exposition)

• Avoir été relocalisé • Avoir perçu une

menace pour sa vie • Avoir subi une

perturbation des croyances fondamentales • Avoir été exposé à

une catastrophe naturelle plutôt que des accidents anthropiques (causés par la négligence ou l’intervention d’individus) • Avoir des manifestations de stress post- traumatique • Vivre une détresse

générale • Avoir un soutien social et émotionnel élevé • Avoir un soutien familial

• Avoir des ruminations • Avoir une bonne

communication familiale au sujet de l’évènement

traumatique

• Être satisfait face au soutien social reçu (et soutien social perçu) • Recevoir des services

ou du soutien d’organismes

• Rechercher un sens à l’évènement ; • Faire preuve de

résilience (au sens d’adaptation et de récupération)

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Tableau 3 (suite)

Facteurs associés positivement à la présence de croissance post-traumatique dans les écrits scientifiques recensés

Facteurs pré- traumatiques Facteurs péri- traumatiques Facteurs post- traumatiques Ce qui ne fait pas l’unanimité dans la littérature • Genre • Exposition à de multiples catastrophes • Santé mentale pré- désastre • Type de famille : élargie ou nucléaire • Relations familiales : fonctionnelles ou dysfonctionnelles • État matrimonial • Avoir ou non des

enfants

• Manifestations dépressives et d’anxiété