• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 : RECENSION DES ÉCRITS

2.2 Facteurs liés à la croissance post-traumatique

2.2.1 Facteurs pré-traumatiques

Les paragraphes suivants présentent les facteurs pré-traumatiques qui sont susceptibles de faciliter la croissance post-traumatique chez les individus victimes de catastrophe naturelle ou technologique.

Le genre

Concernant le genre, les femmes ont, de manière générale, des scores plus élevés lors de l’administration de l’échelle du Posttraumatic Growth Inventory de Tedeschi et Calhoun, (PTGI, 1996), permettant de mesurer la présence ou non de croissance post-traumatique (Achterhof et al., 2017 ; Akbar et Witruk, 2016 ; Aslam et Kamal, 2013a ; Bianchini et al., 2017 ; Gibbs et al., 2016 ; Kendall-Tackett et al., 2015 ; McLeigh et al., 2015 ; Smith et al., 2016 ; Tedeschi et Calhoun, 1996 ; Xu et Liao, 2011). Par exemple, deux ans après les

inondations de 2010 au Pakistan, chez 101 survivants, le score moyen de croissance post- traumatique était de 29,7 chez les hommes et de 35,4 chez les femmes (Aslam et Kamal, 2013a). Dans le même sens, les résultats de méta-analyses rapportent que les femmes ont déclaré plus de bénéfices perçus que les hommes après des évènements stressants tels que des catastrophes naturelles (Helgeson, Reynolds, et Tomich, 2006 ; Park, 2004). Il faut aussi souligner que, dans une étude menée auprès de 495 personnes, 20 à 24 mois après leur exposition aux tremblements de terre de Canterbury (Nouvelle-Zélande, 2011), les femmes étaient plus nombreuses que les hommes à déclarer : 1) que leurs relations familiales et celles avec leurs voisins se sont améliorées, 2) apprécier plus la vie, 3) avoir augmenté leurs forces personnelles, et 4) avoir constaté une plus grande maturité chez leurs enfants (Fergusson, Boden, Horwood, et Mulder, 2015). Pour leur part, dans une étude menée auprès de 494 victimes d’une triple catastrophe (tremblement de terre, tsunami et accident nucléaire) en 2011 au Japon, Anderson et al. (2016) démontrent que les hommes ont une plus grande croissance post-traumatique que les femmes dans les domaines des forces personnelles et des nouvelles possibilités. Toutefois, dans d’autres études, le genre n’a pas été un facteur prédictif de croissance post-traumatique (Augustine, 2014 ; Jin et al., 2014 ; Bianchini et al., 2017 ; Mordeno, Nalipay, Alfonso et Cue, 2016 ; Siqveland et al., 2015 ; Taku, Cann, Tedeschi et Calhoun, 2015).

L’âge

Une récente recension des écrits a mis en lumière que dans plusieurs études, l’âge était positivement relié à la croissance post-traumatique (Park, 2004). Ainsi, bien que les adultes et les personnes âgées montrent généralement des niveaux élevés de croissance post- traumatique, le fait d’être plus jeune (généralement un âge inférieur à 51 ans ou 64 ans) serait associé à une croissance post-traumatique plus élevée par rapport aux personnes plus âgées

28

(Achterhof et al., 2017 ; Guo et al., 2017 ; He et al., 20136). Par exemple, Xu et Liao (2011) ont montré que, parmi 2 080 victimes du séisme de Sichuan de 2008, les survivants âgés entre 31 et 40 ans avaient le plus haut niveau de croissance post-traumatique, alors que les répondants âgés entre 51 et 68 ans présentaient le niveau le plus bas de croissance post- traumatique.

Les traits de personnalité

Certains traits de personnalité sont positivement associés à la croissance post- traumatique. Parmi ceux-ci, il y a l’optimisme (Nezu et al., 2013 ; Prati et Pietrantoni, 2009), l’extraversion (Boden et Wilson, 2008 ; Ikizer, Karanci et Doğulu, 2015), l’ouverture à de nouvelles expériences7 (Zoellner et Maercker, 2006), ainsi que le fait d’avoir une bonne estime de soi, d’avoir de l’espoir, de la flexibilité et de la confiance en soi (Boden et Wilson, 2008 ; Smith et al., 2000).

L’ethnie et la culture

L’ethnie semble influencer la présence de croissance post-traumatique. Par exemple, un an après un tremblement de terre en Chine, le groupe ethnique Qiang a été plus susceptible de montrer une croissance post-traumatique que le groupe ethnique Han (Jin et al., 2014). Ainsi, bien que la croissance post-traumatique ait été rapportée auprès de diverses populations avec des cultures différentes, il est important de noter que la culture peut influencer les résultats. En effet, McMillen (2004) suggère que la culture peut affecter notamment les principes fondamentaux des individus et le type de soutien social que les victimes de catastrophes reçoivent. Ce même auteur propose notamment que les expériences de croissance

6 D’autres auteurs l’ont également constaté : Helgeson, Reynolds et Tomich, 2006 ; Jin et al., 2014 ; Kendall-

Tackett et al., 2015; Linley et Joseph, 2004 ; McLeigh et al., 2015 ; Tang, 2007 ; Stanko et al., 2015 ; Taku et al., 2015 ; Wu, Xu, et Sui, 2016.

7 Cela caractérise des personnes imaginatives, émotionnellement sensibles et intellectuellement curieuses

rapportées dans la culture américaine puissent être différentes de celles de personnes provenant d’autres cultures.

Le niveau d’éducation

Un niveau plus élevé d’éducation serait lié à la présence d’une croissance post- traumatique (He et al., 2013 ; Jin et al., 2014 ; Kaijun et al., 2015 ; Xu et Liao, 2011). Dans le même sens, après une catastrophe naturelle, les personnes ayant un plus haut niveau d’éducation sont susceptibles de recevoir plus de soutien, de percevoir une plus grande cohésion communautaire et d’entretenir plus de contacts interpersonnels que les individus ayant un niveau d’éducation plus faible (Kaniasty, 2012).

Le revenu

En ce qui concerne le niveau de revenu pré-désastre, certains auteurs n’ont pas trouvé de liens avec la présence de croissance post-traumatique post-désastre (Jin et al., 2014 ; Xu et Liao, 2011). Cependant, d’autres chercheurs démontrent que les personnes avec un faible revenu présentent plus de croissance post-traumatique que les personnes plus aisées (Achterhof et al., 2017 ; He et al., 2013 ; Saccinto et al., 2012 ; Wu, Xu et Sui, 2016). Cela peut s’expliquer par le fait que les personnes ayant un revenu plus élevé peuvent faire face à plus d’obstacles pour rétablir ce qu’ils ont perdu lors de la catastrophe et accorder plus d’importance aux biens perdus que les personnes à faible revenu (Saccinto et al., 2012).

L’occupation d’un emploi

L’emploi est un autre facteur positivement associé à la croissance post-traumatique (Augustine, 2014 ; Tang, 2007). En effet, deux ans après le tsunami de l’océan Indien en 2004, les personnes occupant un emploi rémunéré ont montré une plus grande croissance post-traumatique que les individus qui n’étaient pas dans cette situation (Augustine, 2014).

30

La spiritualité et la religion

La spiritualité (Prati et Pietrantoni, 2009) et la religiosité (Boden et Wilson, 2008 ; Smith, Pargament, Brant et Oliver, 2000) sont des caractéristiques reliées positivement à la croissance post-traumatique. Dans le même sens, les personnes ayant des croyances religieuses (Augustine, 2014 ; Guo et al., 2017) ou participant à des rituels spirituels (Aslam et Kamal, 2013 b ; Wlodarczyk et al., 2016) ont une croissance post-traumatique plus élevée que les autres. Selon Karanci et Acarturk (2005), après un évènement traumatique, croire au destin et espérer l’aide de Dieu peut aider les personnes à accepter leur situation et à connaître une croissance post-traumatique.

Les caractéristiques familiales

Certaines caractéristiques de la famille peuvent également favoriser la présence d’une croissance post-traumatique. En effet, les personnes appartenant à une famille dotée d’une bonne communication, notamment au sujet de l’évènement, sont susceptibles de présenter plus souvent une croissance post-traumatique et de signaler une augmentation de la cohésion familiale (Augustine, 2014 ; Lindgaard et al., 2009). De plus, une famille flexible par son leadership démocratique permet aussi aux individus de mieux s’adapter aux changements et de présenter un niveau plus élevé de croissance post-traumatique par rapport aux familles rigides ou chaotiques (Augustine, 2014). Ainsi, la flexibilité, la cohésion, la communication, la satisfaction familiale et le fait d’appartenir à une famille intacte plutôt que recomposée sont des facteurs prédictifs de la croissance post-traumatique (Augustine, 2014). Cependant, dans une autre étude, les parents, appartenant à une famille recomposée ou monoparentale, présentaient une plus grande croissance post-traumatique que les parents provenant de familles biparentales intactes (McLeigh et al., 2015). Dans le même sens, Mordeno et al. (2015) soulignent qu’après une catastrophe, les individus qui entretenaient des relations

dysfonctionnelles avec les membres de leur famille et leurs amis présentaient plus de croissance post-traumatique que ceux qui entretenaient des relations fonctionnelles avec eux.

Par ailleurs, Helgeson, Reynolds et Tomich (2006) ont souligné dans leur méta- analyse que l’état matrimonial n’était pas lié à la perception de bénéfices après une catastrophe, tandis que Tang (2007) a montré que le fait d’être marié est un facteur positivement associé à la croissance post-traumatique. Pour leur part, Nezu, Lowe, Manove et Rhodes (2013) révèlent que le nombre d’enfants que peuvent avoir les individus n’a pas d’incidence sur la croissance post-traumatique. Cependant, une étude s’intéressant à des parents norvégiens et leurs enfants qui ont été exposés au tsunami d’Asie du Sud-Est en 2004 a démontré que le stress et la vulnérabilité liés à la parentalité pendant et après cette catastrophe contribuent à la croissance post-traumatique (Siqveland, Hafstad, et Tedeschi, 2012).

La santé pré-désastre et l’attachement à sa communauté

Les études sont mitigées quant à l’effet de la santé physique ou mentale pré-désastre sur la croissance post-traumatique après une catastrophe. En effet, un grand nombre de diagnostics de santé mentale pré-catastrophe serait positivement associé à la présence d’avantages perçus (Kendall, McMillen, Smith, et Fisher, 1997), de même qu’une mauvaise santé physique pré-désastre (Xu et Liao, 2011). Toutefois, dans une autre étude, les personnes ayant une moins bonne santé mentale ou un bien-être pré-catastrophe plus faible soulignent moins de retombées positives après un évènement traumatique (Uchida, Takahashi, et Kawahara, 2014). Finalement, le sentiment d’attachement à son environnement serait positivement associé à la croissance post-traumatique (Gibbs et al., 2016).

32

L’exposition antérieure à des catastrophes

Une récente recension des écrits révèle que l’exposition au stress lors de sinistres antérieurs aide à faire face aux catastrophes subséquentes, mais seulement lorsqu’elles sont de même nature (Bonanno et al., 2010). Cependant, la répétition de ces évènements peut rendre les personnes plus vulnérables. Par exemple, dans une étude examinant la relation entre la croissance post-traumatique et les symptômes de stress post-traumatique chez 173 survivants d’incendies, de tremblements de terre et d’inondations, les répondants qui avaient connu d’autres situations d’urgence dans leur vie ont signalé moins de croissance post-traumatique que ceux qui avaient déjà vécu ce type d’évènement auparavant (Saccinto et al., 2012).