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Le modèle chimique 1D de Prinn ( 1971 )

vénusienne : Historique et Objectifs

3.1.1 Le modèle chimique 1D de Prinn ( 1971 )

Le modèle de Prinn(1971) est un modèle chimique à une dimension spatiale, en altitude, et décrit la chimie à l’équilibre de 9 espèces à l’aide de 20 réactions chimiques et 3 réactions de photolyse des espèces . Le modèle situe sa limite basse en altitude au sommet des nuages dans le visible. L’auteur s’intéresse surtout à la plage d’altitude couvrant les pressions 200 hPa et 50 hPa, c’est à dire approxi-mativement 70 − 90 km, car c’est dans cet intervalle de pression que HCl devient l’espèce qui, par photodissociation, HCl + hν −−→ H + Cl, produit le plus d’hydrogène atomique H. Prinn (1971) est le premier à montrer l’importance des espèces chlorées, Cl, ClO et ClOO (notées ClOx) produites par la photodissociation de HCl dans la recombinaison du CO2. En effet, celles-ci sont impliquées dans le cycle suivant proposé par Prinn(1971) :

Cl + O2+ M −−→ ClOO + M ClOO + CO −−→ CO2+ ClO

ClO + CO −−→ Cl + CO2

BILAN : 2 CO + O2−−→2 CO2

(3.2)

CO2décrit par (3.1), capable d’expliquer les faibles abondances de CO et O2 observées sur Vénus. Les deux réactions ClOO + CO −−→ CO2+ ClO et ClO + CO −−→ Cl + CO2 n’ont pas fait l’objet d’étude en laboratoire à l’époque de l’article. L’auteur suggère alors des constantes de vitesses de réactions plausibles compte tenu des connaissances disponibles sur des réactions et espèces similaires.

La présence d’hydrogène moléculaire et atomique, H et H2, s’explique par la photodissociation de H2O, H2O + hν −−→ HO + O, qui est suivie des recombinaisons H + H + M −−→ H2 + M ou H + HO2 −−→H2+ O2. Cette hypothèse a permis à la théorie de Reeves et al. (1966), basée sur les produits de la photodissociation de H2O que sont les radicaux hydrogénés, H, HO, HO2 notés HOx, d’être appuyée par les nouvelles observations de Barth(1968). Ce cycle chimique est détaillé comme suit : H + O2+ M −−→ HO2+ M HO2+ CO −−→ CO2+ OH HO + CO −−→ CO2+ H BILAN : 2 CO + O2 −−→2 CO2 (3.3)

Les cycles (3.2) et (3.3) ont pour effet de recycler CO2 grâce à des cycles catalytiques basés respecti-vement sur les radicaux ClOx, produits de la photodissociation de HCl, et les radicaux HOx, produits de la photodissociation de H2O.

On peut alors comparer les efficacités des schémas (3.2) et (3.3), pour la reformation catalytique du CO2 par les espèces ClOx ou HOx, grâce à la figure3.1. Elle montre que le cycle basé sur les radicaux hydrogénés HOx (3.3), est limité par la réaction HO2+ CO −−→ CO2+ OH qui est extrêmement lente comparée aux autres réactions du même cycle. Cela le rend négligeable car c’est la réaction la plus lente qui limite le cycle dans son ensemble, c’est-à-dire son bilan net. Le modèle proposé par Prinn (1971) montre alors l’importance potentiellement cruciale des espèces chlorées sur le recyclage de CO2 via son cycle (3.2). Cette importance est relative car les données de laboratoires concernant la ciné-tique de ClOO sont peu connues.Prinn(1971) fixe des valeurs estimées afin de reproduire les mesures spectroscopiques de HCl, c’est-à-dire HCl ≈ 0,6 ppmv (Connes et al., 1967). La consommation de ClOO par CO est une réaction qui n’est pas encore établie en 1971. Cette réaction n’a jamais été observée en laboratoire depuis et la constante de réaction fixée parPrinn (1971) est certainement très largement surestimée. Cette réaction n’est d’ailleurs plus utilisée dans les modèles photochimiques récents (Mills,1998;Krasnopolsky, 2012) et n’apparaît pas non pas dans les bases de données sur la cinétique chimique, comme la NIST Kinetics Databasea.

Figure 3.1 –Les taux des réactions du cycle catalytique décrit parReeves et al.(1966) basées sur les radicaux HOx

(voir (3.3)) sont affichés en traits pleins. Les lignes tiretées représentent les taux de réaction du cycle catalytique basé sur les radicaux ClOx (voir (3.2)) décrit par Prinn(1971). Les vitesses de réaction sont celles utilisées par les auteurs. Afin de tracer les taux de production, j’ai utilisé les concentrations caractéristiques des espèces chimiques présentes pour chaque réaction que nous fournit notre modèle, le GCM 3D de Vénus. L’espèce intermédiaire ClOO n’étant décrite que par la réaction de production Cl + O2+ M −−→ ClOO + M et de consommation ClOO + CO −−→ CO2+ ClO, les taux de production de ces deux réactions sont quasiment identiques à l’état d’équilibre. L’espèce ClOO est consommée par la réaction ClOO + CO −−→ CO2+ ClO quasiment aussitôt qu’elle est produite par Cl + O2+ M −−→ ClOO + M.

Le principal résultat avancé par Prinn (1971) est que le cycle catalytique basé sur les radicaux ClOx permet, dans la zone 70 km à 90 km, de maintenir une atmosphère quasi-pure en CO2. Cela signifie que le cycle chimique de recyclage de CO2 basé sur les radicaux chlorés ClOx et initié par la photodissociation de HCl suffit à contre-balancer la photodissociation de l’espèce majoritaire sur Vénus, CO2. Cependant, comme nous l’avons vu, ce système chimique se base sur la réaction ClOO + CO −−→ CO2 + ClO qui est considérée comme extrêmement lente aujourd’hui et n’est désormais plus utilisée. Les résultats de Prinn (1971) ne sont donc pas aujourd’hui quantitativement viables. Cependant,Prinn(1971) fut le premier à envisager l’importance des cycles basés sur les espèces chlorées pour expliquer la stabilité du CO2 et la faible valeur de CO et O2 dans l’atmosphère vénusienne. 3.1.2 Le modèle chimique 1D de McElroy et al. (1973)

L’article de McElroy et al. (1973) décrit une modélisation à une dimension, en altitude, et étudie la chimie à l’équilibre de sept espèces . Le modèle consiste en 15 réactions chimiques et 7 réactions de photodissociations . L’étendue en altitude est d’une cinquantaine de kilomètres. L’altitude 0 cor-respond au sommet des nuages, comme pour Prinn (1971), c’est-à-dire 200 hPa ou encore 70 km. Le

modèle suppose que les espèces dites à longue durée de vie, CO, O2, HCl, H2 et H2O sont mélangées de manière homogène avec CO2. Ceci suppose que les tendances chimiques de ces espèces sont longues devant celles d’origine dynamique. La seconde hypothèse du modèle est que l’intégrale en altitude du taux de production net de chacune de ces cinq espèces est nulle, ceci afin d’assurer la conservation de la masse. L’articleMcElroy et al. (1973) n’utilise pas la reformation du CO2 via les espèces chlorées. En effet les auteurs notent le manque d’expériences de laboratoire concernant ces réactions. Le cycle de McElroy et al. (1973) se base sur les nouveaux travaux effectués en modélisation de la chimie at-mosphérique martienne au début des années 1970.

En effet, Mars ayant également une atmosphère quasi-pure en CO2, la question de sa stabilité est identique à celle de Vénus. La nouveauté est de s’affranchir, comme proposé dans les modèles martiens (McElroy and Donahue,1972;Parkinson and Hunten,1972), de la réaction HO2+ CO −−→ CO2+ HO trop lente, comme le montre la figure 3.1. Pour cela,McElroy et al. (1973) considèrent la réaction HO2+ O −−→ O2+ HO bien plus rapide. Le recyclage du CO2 peut donc s’opérer par le cycle catalytique suivant : H + O2+ M −−→ HO2+ M HO2+ O −−→ HO + O2 HO + CO −−→ CO2+ H BILAN : CO + O −−→ CO2 (3.4)

Ici le recyclage de CO2 se fait en consommant CO et O, non plus CO et O2. Consommer O revient également à abaisser la recomposition de O2. Une autre possibilité est de passer par le peroxide d’hydrogène, H2O2, pour recycler CO2 :

H + O2+ M −−→ HO2+ M 1/2( HO2+ HO2 −−→H2O2+ O2 )

1/2( H2O2+ hν −−→ 2 HO ) HO + CO −−→ CO2+ H

BILAN : CO + 12O2 −−→CO2

(3.5)

Les cycle (3.4) et (3.5) utilisent tous deux les produits HOxde la photodissociation de H2O et de HCl, afin de reformer CO2. Ce processus s’effectue en consommant CO et O en (3.4) ou CO et O2 en (3.5). Les taux de production des cinq réactions impliquées dans ces deux cycles chimiques sont détaillés dans la figure3.2suivante :

Figure 3.2 – Les vitesses de réaction des cycles catalytiques décrits dansMcElroy et al.(1973) sont celles utilisées par les auteurs. Afin de tracer les taux de production, j’ai utilisé la moyenne globale des concentrations de chaque espèce chimique que nous fournit notre modèle, le GCM 3D de Vénus.

Contrairement au cycle chimique (3.3) deReeves et al.(1966) limité par la réaction HO2+CO −−→ CO2+ HO très lente, les cycles chimiques (3.4) et (3.5) de McElroy et al. (1973) s’en affranchissent. Cela les rend plus efficaces, comme le montre la figure 3.2. La réaction la plus lente sur la figure3.2, H2O2+ hν −−→ 2 HO, est par exemple 1010 fois plus productive que HO2+ CO −−→ CO2+ HO sur la figure 3.1. Le cycle (3.5) utilisant l’espèce H2O2 est négligeable vis-à-vis du cycle (3.4).

Le modèle de McElroy et al. (1973) établit que la stabilité du CO2 peut être expliqué par le sys-tème chimique faisant appel aux radicaux HOx. Cependant, ce résultat est obtenu au prix de source de HOx très largement surestimées. En effet, McElroy et al. (1973) considèrent des rapport de mélange de HCl et H2O égaux à 8 ppmv et 180 ppmv respectivement, supérieurs aux mesures actuels de un à deux ordres de grandeur.

La reformation catalytique du CO2 par les seuls radicaux HOx n’est donc pas suffisante pour expliquer l’abondance à 95% du CO2 et les faibles valeurs de CO.

3.2 Les modèles chimiques récents. L’importance du nuage global