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Mise en scène de soi dans l’ambiente havanais : la guapería

B. L’initié et ses ecobios

4. Mise en scène de soi dans l’ambiente havanais : la guapería

Comme je l'ai déjà mentionné auparavant, l'Abakuá est né au début du 19ème siècle dans le milieu portuaire, dans les quartiers périphériques au port de La Havane (Regla, Belén, Jesús María). Certes, les premiers initiés étaient issus du cabildo de nation carabali Appapa Efó mais aussi de l'univers qui gravitait autour du port : prostitution, bars et violence. Les valeurs morales qui sont véhiculées par cette société secrète s'inspirent donc directement de ce cadre social qui est actuellement désigné sous le terme d'ambiente ou milieu.

L'ambiente130 est un sens de vie où s'épanouissent des marginaux, des discriminés, souvent ils pratiquent la violence et la délinquance, dans des relents de tabac, d'alcool et de solar. (Monguï, 42 ans, Ekueñon d'Efí Mañon Metara et obonekue d'Efí Embemoro131)

L'ambiente désigne actuellement un mode de vie caractérisé par les excès tant de comportement (violence, bagarre, fêtes) que de substances illicites (alcool et drogues) 132. Vivir ambiente (vivre l'ambiente) implique de pratiquer les codes de conduite en vigueur dans ce cadre de référence, à savoir une attitude de tête brûlée qui n'en démord pas. Il s'agit avant tout de dominer les rapports de pouvoir et les intrigues qui s'y déroulent et surtout de ne pas se laisser « meter el pie » soit « marcher dessus ». La loi de l'ambiente qui s'affirme toujours par des principes intangibles, volontiers claironnés, est guidée de manière souterraine par le respect et son corollaire la honte (Latour, 1999: 79). Lors de la préparation du plante d'Oru Abakuá à Guanabacoa, un indíseme fanfaronnait : « Bah, je suis peut-être la mascotte du jeu, même si je suis trop jeune, je « mets le pied à ces gens » et l'affaire est réglée, je me jure même si je dois être l'avant-dernier dans la file ». Né dans le quartier populaire de Cayo Hueso, Centre Havane, Alfredo, 39 ans, ex-postulant ne s'étant jamais initié, fils d'abakuá et musicien reconnu, décrit l'ambiente comme suit :

L'ambiente est un système de valeurs et formes de comportements spécifiques d'un cadre urbain. À Cuba, la campagne n'a pas d'ambiente, c'est une expression culturelle très citadine, amenée par les marins maures et les pirates au 16ème

130 J'ai choisi de conserver le terme d'ambiente en raison de l'usage qui en est fait dans le langage courant et de la richesse de son application. Ce terme peut être traduit par milieu. « Il faut mentionner le milieu qui, dans chaque ville renferme un noyau d'établissements de service, bases et territoires des prostituées, des drogués, des homosexuels, des alcooliques et autres groupes frappés d'infamie » (Goffman, 1973b: 35). 131 Il est tout à fait possible d’appartenir à deux jeux si l’on se fait initier dans l’un et que l’on devient plaza

au moment de la création de l’autre (né du premier jeu).

siècle133. Ils ont amené l'usage du couteau et un machisme féroce que nous conservons encore, l'usage d'un métalangage qui se maintient malgré quelques modifications, un culte à la mère, un culte au macho, un être téméraire pour tirer son épingle du jeu, parfois peu intelligent mais de manière urbaine. L'ambiente est différent selon l'époque. Mon grand-père et mon père, nés tous deux dans le quartier de San Leopoldo parlent de l'ambiente des années 20 et constatent qu'aujourd'hui on ne respecte rien ni personne, c'est la honte. Ma génération parle de l'ambiente avant et après la scorie. L'ambiente est un pur produit de la société, d'ailleurs je suis certain qu'avant la scorie134, aucun homosexuel ne pouvait se jurer car aucun Mokongo ne se laissait acheter. Aujourd'hui si tu débarques avec 5000 dollars, même si tu as le doigt dans le cul, tu peux devenir plaza. J'ai vu de mes propres yeux des gens à quatre pattes dans la prison, sortir et devenir plaza. Les années ‘60 sont réputées pour être l'époque de la barbarie. Le processus révolutionnaire a changé beaucoup de choses, il y a eu de nombreuses erreurs. Par exemple, on a cru que si on évacuait les gens des solars, on éliminait cette forme de vie et de délinquance. Ainsi, le quartier des Yaguas a été détruit et ses habitants relogés à Alta Habana. En réalité, c'est une catastrophe, comme ça se dit, c'est vouloir cacher le soleil avec un doigt135, c'est là qu'est né l'ambiente actuel, le métrosexualisme sans scrupule.

L'ambiente est toujours décrit comme « en perte de vitesse » par ses principaux protagonistes qui déplorent le temps passé. « L'ambiente a dégénéré : coincer un type entre 4 ou 5, cela ne se faisait pas avant » constate Tato.

L'archétype de l'ambiental est un individu qui n'a pas froid aux yeux, qui multiplie les conquêtes féminines, qui règle ses intrigues à coups de poings ou de couteaux, qui impose le respect par la crainte, parle fort et possède une gestuelle très codifiée. Cette attitude de caïd

133 Ortiz (1986: 14) revient sur l'atmosphère du port de La Havane et le milieu social qu'il a engendré : Il n'y a jamais eu de curros ni de ñañigos à l'intérieur des terres. Cette curieuse circonstance obéit au fait sans doute que ces villes [La Havane, Matanzas, Cardenas] sont de grands ports de mer, d'intense trafic et mouvements de bateaux et de marchandises avec un grand nombre d'esclaves à proximité. La présence du curro est encore accentuée par les longs séjours des flottes et armées espagnoles sur la rade, transformant ainsi La Havane en port le plus fréquenté et le plus connu du Nouveau Monde, caractérisé par un milieu corrompu et criminel commun à tous les grands ports du monde où transitent des hommes d'aventure. Sur la place de La Havane, non seulement les habitants du pays, entraînés à l'exploitation de l'esclavage et au commerce avec les pirates et flibustiers mais encore la plèbe des galères et prisonniers de l'arsenal, la marine des flottes, les escrocs et autres indiens enrichis, les autorités civiles, militaires et ecclésiastiques rompues aux rivalités, pots-de-vin, arnaques et contrebande en tous genre contribuaient à créer et perpétuer cette atmosphère d'exaltation, d'excès, de triche et de prostitution.

134 La scorie (escoria) fait référence à l'exil massif des Cubains à partir des années ‘80, soit par le port de Mariel ouvert par Fidel entre le 15 avril et le 31 octobre 1980, soit par les balsas, ces radeaux jetés à la mer qui servent à rejoindre les États-Unis.

135 Tapar el sol con un dedo est une expression populaire hispanique qui signifie vouloir ignorer la réalité et

est désignée par le terme de guapería136et caractérise une hypermasculinité théâtrale et surjouée.

Quand j'étais jeune, vers 14 ans, je suis devenu guapo, j'avais une dégaine d'enfer, je marchais en balançant les bras de manière exagérée, je provoquais les gens du regard, je me promenais toujours avec un couteau sur moi, c'est la jeunesse quoi ! (Umberto, 40 ans, habitant du Vedado).

Cette gestuelle cherche à traduire le fait que le guapo n'est ni un lâche, ni un homosexuel et qu'il a abandonné les rivages de l'adolescence pour entrer de plein fouet dans un statut d'homme viril. Il provoque avant qu'on ne le provoque et son corps tout entier tend à incarner l'idéal de la guapería. Le style vestimentaire et gestuel adopté par le guapo peut être analysé en tant que forme de refus d'une esthétique dominante blanche et interprété comme la revendication d'une sous-culture urbaine137. Selon Bourgois (2001: 37), la « culture de la résistance » est un ensemble spontané de diverses pratiques de révolte, qui s'est transformé au fil du temps en style oppositionnel, plutôt qu'un univers d'opposition politique cohérent. Le style subversif savamment cultivé par les cultures des rues afro-américaines est associé à des codes performatifs complexes et ostentatoires (voir Palmié, 2002). Inspiré tant par des figures légendaires telles que Yarini138, un fameux souteneur du quartier de Belén, que par des personnages hauts en couleur de l'ambiente havanais, le guapo incarne un idéal de masculinité urbaine à la défensive et capable de se mouvoir avec aisance dans les quartiers populaires de La Havane car parfaitement au courant de ce qui s'y trame. Les nombreux faits d'arme du guapo servent d'ailleurs à élaborer un palmarès qui fonde sa réputation et se transmettent oralement de pâtés de maison en pâtés de maison. Vivre selon les lois de l'ambiente semble d'ailleurs pesant pour de nombreux acteurs sociaux qui sont alors obligés d'agir selon ses critères sous peine d'être ridiculisés à tout jamais. Ce sentiment de contrainte est même fortement ressenti par des caïds réputés et confirmés. En 2003, lors d'un entretien à la prison avec un détenu condamné à 30 ans de prison « el Jabao Porcentaje » (le Mulâtre Pourcentage), Tato Quiñones recueille la définition suivante de l'ambiente :

136 Vient de guapo, littéralement « beau » qui désigne à Cuba quelqu'un de courageux et par extension une tête brûlée qui n'a pas froid aux yeux.

137 Selon Hebdige (2008: 7) la signification d'une sous-culture donnée est toujours en dispute et le style est le terrain où les définitions antagoniques s'affrontent avec le plus de force dramatique. Par conséquent, le

guapo peut être analysé en tant que sous-culture.

138 Alberto Yarini (1882-1910) était un proxénète qui, malgré son origine bourgeoise, avait fait des bas-fonds havanais son lieu de travail. Plus de 25 prostituées avaient tatoué son nom sur une partie de leur corps. Il décéda à l'âge de 28 ans, criblé de balles par un autre proxénète français et ses funérailles furent suivies massivement dans les rues.

L'ambiente c'est comme l'ouest américain : une fois que tu as acquis une réputation, tu ne peux plus te retirer et donner des signes de faiblesse car aussitôt quelqu'un veut se bâtir une réputation à tes dépens. Pour cette raison, celui qui me file une baffe, je dois l'ouvrir en deux comme un morceau de canne à sucre car je suis le Jabao Porcentaje, connu comme le loup blanc dans l'ambiente et si je flanche, on m'assassine le lendemain.

Le sommet d'une carrière de guapo passe bien souvent par la case « prison » et constitue une preuve de plus de sa vaillance et de sa force. Dans l'univers carcéral, le guapo va renforcer cette attitude de défi et se faire respecter des autres guapos qui l'entourent, public privilégié d'une mise en scène de cette hypermasculinité codifiée. « La plus grande expression de l'ambiente c'est la prison, c'est une sorte de MP3 qui concentre tout de manière compacte, c'est l'ambiente 24 heures sur 24 ! » commente Alfredo. Pour l'Abakuá, le passage par l'institution carcérale permet de vérifier le comportement sexuel et l'adhésion au concept de solidarité.

Être abakuá en prison c'est à double tranchant. D'une part, tu es protégé mais tu dois montrer que tu as des préceptes de masculinité. Si tu as une peine de 6 mois et qu'à cause du compromis moral abakuá tu dois tuer, tu te retrouves avec des peines de 20 ans et tu n'en sors jamais, en plus tu es surveillé tout le temps. (Alfredo)

De surcroît, cette mainmise abakuá sur l'univers pénitentiaire a contribué à alimenter la légende noire.

Moi je te dis qu'ils font du négoce, qu'ils établissent la hiérarchie et puis un de leur négoce c'est le sexe. C'est à celui qui aura le plus de femmes masculines [homosexuels]. J'en ai vu des choses en 2000, au Combinado del Este, bâtiment 1, aile nord, troisième étage, un prisonnier traînait un homme à quatre pattes, attaché au cou avec une ceinture : « Mes amis, regardez, j'ai un chien abakuá qui aboie et mange des pastilles » et le type aboyait devant une centaine d'hommes. (Iván, ex- prisonnier)

Mais la prison ne saurait être un lieu de passage inflexible et imparable. Ce n'est que l'exacerbation des rapports sociaux au sein de l'ambiente, des jeux de pouvoir entre abakuás, des alliances et des combines.

Dans les années ‘70, il y avait une mode d'assassinat. Manuel Becquer Villegas avait pour sport favori d'attendre la sortie de la Tropical et de tirer avec un pistolet. À la prison, ils lui ont coupé le cul – atteinte par excellence à l’intégrité physique du mâle – et rien ne s'est passé, il a été juré ensuite ! (Evelio, obonekue d'Usagaré Mutanga).

En effet, il existe une forte rivalité dans l'univers carcéral et les jeux de pouvoir s'y trouvent décuplés. L'homme abakuá sait qu'il est une proie de choix pour ceux qui règnent en maîtres

et seigneurs dans les prisons havanaises et qui, pour asseoir leur suprématie, n'hésiteront pas à l'humilier. Au Combinado del Este, dans les années ‘90, un prisonnier du nom de Papón el Bizco soit « Papón le loucheur » tenait un carnet de bord de tous les hommes qu'il avait violés, avec la date précise et la mention de leur appartenance à la société secrète abakuá. Ce carnet lui aurait valu 6 mois de plus d'incarcération lorsqu'il était passé aux mains des autorités pénitentiaires. De même, à l'arrivée des nouveaux prisonniers, le Gros Santa Cruz, déjà cité auparavant – protagoniste de nombreux récits dans l'ambiente – leur demandait : « Qui est abakuá parmi vous ? ». Ceux qui répondaient par l'affirmative devenaient des victimes toutes désignées. « Ce cul abakuá sera à moi avant la fin de la semaine » claironnait Santa Cruz139.

Certains individus poursuivent même leur carrière carcérale au-delà du temps de la jeunesse. En raison de leur passé en prison et du fait qu'ils récidivent de plus belle, ils sont désignés par le terme de « presidiario » (qui pourrait être traduit par « bagnard ») ou « carne de presidio » (viande de prison). Ainsi, le jeune guapo devient par la force des choses un vieux presidiario. Si le premier suscite une admiration secrète et que ses agissements sont mis sur le compte de la fougue de la jeunesse, le second est perçu négativement autant par la société en général que par les membres de l'ambiente, il est clairement irrécupérable et ponctue ses séjours en prison de courts instants de mise en liberté.

Mon frère, c'est de la viande de prison, lorsqu'il me parle au téléphone je lui dis : eh, doucement, tu ne parles pas à tes collègues de cellule, pas de double langage avec moi ou je raccroche. La dernière fois qu'il a été remis en liberté, après 8 ans d'enfermement, ça a duré 2 mois. Il a voulu provoquer mon voisin avec un couteau pour une histoire de vente de portable. De rage, il lui a volé de l'argent et est retourné en prison pour six ans (Umberto, 40 ans, habitant du Vedado).

L'aspect physique du guapo doit être en accord avec sa morale, il faut qu'il impressionne ses pairs par certains attributs qu'il revendique de manière ostentatoire.

J'ai dans ma famille un proxénète connu : Fausto le Maure Pasteles. Il était chef des putes de Belascoain jusqu'à Galliano et de Neptune ensuite. Mon papa disait que c'était un vrai fils de pute mais qu'il avait une sacrée éthique et une personnalité incroyable, il était habillé en blanc 24 heures sur 24. (Alfredo)

139 Ces anecdotes m'ont été racontées par un ex-prisonnier qui les détenait lui-même d'un compagnon de cellule. Je n'en ai pas vérifié l'authenticité mais les cite comme exemples des récits de prison qui circulent et servent à bâtir une réputation au sein de l'ambiente.

À défaut d'avoir une stature imposante, le guapo porte sur son corps certains signes distinctifs qui l'identifient : dents en or, tatouages ou encore chaîne en or volumineuse. Il s'agit d'impressionner à première vue, « d'en jeter » (especular) à la face d'un potentiel adversaire et aussi d'afficher une masculinité agressive140. Comme le relève Lepoutre (1997: 354), la culture de la frime ne se résout pas toute entière dans les vêtements mais aussi à travers les attitudes corporelles et une gestuelle emphatique qui puisent leurs racines dans le rapport au corps traditionnel méditerranéen et noir.

Selon Monguï : « Nous autres abakuás nous reconnaissons à notre manière de siffler, de marcher, de s'habiller, toujours impeccables avec une casquette bolchevik ». Sa femme Oyone, surenchérit : « Vous autres abakuás, les blancs, les noirs, les mulâtres, vous adoptez un type bien précis, vous devenez une sorte de race et j'arrive à vous reconnaître n'importe où141 ». Ainsi, la guapería reste un système de valeurs propre au monde de l'ambiente urbain inspiré du modèle des curros de Manglar. Ce groupe urbain masculin qui régnait au début du 19ème sur l'ambiente havanais était réputé pour abriter en son sein des individus qui, non seulement étaient engagés activement dans l'économie urbaine du crime mais se mettaient en scène selon des canons esthétiques très codifiés. Les curros, symboles d'une « sous-culture spectaculaire » (Hebdige, 2008) ont non seulement repris à leur compte des symboles de prestige tant africains qu'européens mais ils les ont recontextualisés de manière outrancière et exagérée (Palmié, 2002: 156). À l'instar du guapo, les corps des curros n'étaient pas de simples surfaces reflets des signes grotesques de la perversion. Ces surfaces étaient modelées sciemment par des pratiques qui « not just communicate contempt for the existing order in the sense of disrespect for the legal inviolability of personal property, but to signal a form of defiant self-possession » (Palmié, 2002: 152). Par la force des choses, le modèle du guapo va être réinterprété par l'Abakuá en y rajoutant l'aspect collectif et religieux. En ce sens, l'Abakuá peut être perçu comme une sorte de guapería institutionnalisée qui s'appuie sur un mythe politique. Le pouvoir d'Ekue et la force du secret renforcent encore une construction de la masculinité de type machiste. Auréolé d'un halo de mystère, l'initié a réussi l'épreuve de l'initiation et ainsi a, en quelque sorte, obtenu un diplôme officiel de guapo confirmé. Il se doit dès lors de correspondre aux attentes que suscite son engagement au sein de l'Abakuá. Dans un premier temps, son affiliation religieuse passe essentiellement par une attitude

140 Le guapo peut être analysé en terme de « déviant social », toléré au sein de sa communauté, « sorte de ghetto qui lui permet de se penser comme égal voir supérieur aux normaux » (Goffman, 1975: 168). 141 Pour une réflexion sur l'importance du corps dans l'identité abakuá, voir chapitre VIII.

corporelle codifiée. Le corps de l'adepte et sa projection dans le quotidien urbain incarnent la religiosité abakuá et tissent un lien complexe entre croyance et appartenance à un groupe social donné. En quelque sorte, la gestuelle propre à la guapería précède une initiation abakuá, voire en est même l’une des conditions alors que la consécration apportée par le statut d’obonekue engage l’adepte à peaufiner sa posture corporelle et à performer au quotidien une masculinité exacerbée et sacralisée par le rite.

Au final, qu'est-ce qui différencie l'abakuá du guapo ? Il convient de reprendre l'adage abakuá qui précise que « pour être abakuá il faut être un homme mais pour être un homme, il ne faut pas forcément être abakuá » (para ser abakuá hay que ser hombre pero para ser hombre no hay que ser abakuá). Par conséquent, alors que la masculinité de l'abakuá a été reconnue par le rite d'initiation, le guapo n'engage que lui-même dans la reconnaissance de son hypermasculinité. Sa réputation ne fait l'office d'aucun contrôle par le haut et ses écarts de conduite sont sanctionnés par la honte qu'il éprouve. L'abakuá pour sa part intègre un