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Mise en place du dispositif expérimental

Expériences préliminaires Plusieurs dispositifs expérimentaux ont été testés. Dans un pre-mier temps, on a placé le système disque/anneau entre deux plaques en verre ou bien entre une plaque en verre et une plaque en téflon, espacées grâce à des cales en caoutchouc. On im-merge ensuite l’ensemble dans un bain d’eau distillée. Dans ces conditions, seule la périphérie du système est en contact avec le solvant.

Figure 4.6 – Expérience préliminaire. Le système est placé entre une plaque en verre et une plaque en téflon. L’épaisseur du système est de 5 mm. La diffusion qui s’amorce à partir de la frontière libre entraîne la formation d’une instabilité dont la longueur d’onde croît dans le temps. Haut : vue générale. Bas : détail de l’instabilité. Les flèches indiquent la position des points cuspidaux. On note la présence de lignes plus foncées sous ces points cuspidaux.

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On perçoit visiblement au bout d’environ une minute la formation d’une instabilité de petite longueur d’onde (de l’ordre du millimètre). La longueur d’onde de cette instabilité augmente dans le temps. Cette augmentation possède une origine physique, due à l’aug-mentation de la longueur de diffusion, mais également géométrique, due à la dilatation de l’anneau. Cette instabilité d’origine diffusive a été mise en évidence pour la première fois par

Tanaka et al.(1987). Ce mode de croissance, bien qu’intéressant, est quelque peu éloigné de ce qui est observé durant la croissance des tumeurs. Dans cette dernière situation, la croissance s’étend sur l’ensemble de l’anneau de cellules prolifératrices qui devient éventuellement in-stable au-delà d’un certain seuil. Dans le cas de cette expérience préliminaire, on note que le gonflage s’amorce à la frontière libre puis s’étend progressivement vers l’intérieur. L’état d’équilibre est caractérisé par un gonflage très hétérogène, comme l’atteste le fort gradient de coloration observé sur la figure4.7.

Figure 4.7 – Haut : détail d’un point cuspidal pendant le processus de gonflage. Bas droite et gauche : état final, hors du bain de solvant, d’un système initialement similaire mais placé entre deux plaques en verre. La frontière de la structure ne paraît pas singulière à cause du solvant qui mouille la frontière libre du système et « adoucit » l’interface grâce à la tension de surface. Gauche : vue générale (la coloration bleue est un effet de l’appareil photo numérique). Droite : détail d’un point cuspidal ; la flèche indique une zone de repliement du gel.

De plus, cette instabilité ne se présente pas comme une oscillation sinusoïdale dont l’am-plitude se développe mais plutôt par la nucléation à la surface du gel d’une série de points singuliers régulièrement espacés. Ces structures évoluent en formant des points cuspidaux. On observe également dans le matériau, sous ces points, des lignes plus foncées, comme illus-tré sur les figures4.6et4.7. En ouvrant la cellule à l’issue de l’expérience, on confirme que ces lignes correspondent à un repliement du gel sur lui-même. La raison pour laquelle on observe une instabilité condensée plutôt qu’une instabilité de flambage classique s’explique par la di-minution de la rigidité du gel avec la croissance. Dans ce cas, le système peut s’approximer par une couche mince d’épaisseur égale à la longueur de diffusion au temps t, croissant à la surface d’une couche épaisse légèrement plus rigide. Les résultats du chapitre précédent nous apprennent que cette situation conduit à l’apparition d’une instabilité condensée de petite longueur d’onde. D’autre part,Ben Amar et Ciarletta(2010) ont récemment montré que cette instabilité entrait très rapidement dans un régime non linéaire, en remarquant qu’une analyse faiblement non linéaire de l’instabilité dans les limites H → 0 et µIII → ∞ conduisait à l’apparition de divergences dans le champ de déplacement.

Outre son inadéquation relative avec le processus biologique qui nous intéresse, ce mode de gonflage possède trois autres inconvénients de nature plus technique :

– Tout d’abord, le caractère fortement non linéaire du régime dans lequel entre le système est susceptible de le bloquer dans un état métastable. En effet, puisque l’on n’observe pas de translation des points cuspidaux (et donc pas de fusion entre des points adja-cents), on peut supposer qu’il existe une barrière énergétique importante qui entrave la réorganisation du système. Dans ce cas, il est difficile de savoir si l’état observé quand la longueur de diffusion atteint l’épaisseur de l’anneau est équivalent à ce que l’on ob-serverait si la croissance était homogène.

– D’autre part, l’importante focalisation des contraintes observée dans cette situation conduit souvent, avant même d’avoir atteint un état stationnaire, à une rupture du gel. – Enfin on peut également mentionner qu’avec ce dispositif expérimental le système met

un temps assez long à atteindre un état stationnaire. Pour les anneaux les plus épais (∼ 25 mm de rayon), le système met jusqu’à trois jours pour s’équilibrer.

Protocole expérimental définitif Pour toutes ces raisons, on a choisi à l’issue de ces expé-riences préliminaires de remplacer la plaque inférieure en téflon par un tamis dont les pores sont de 80 µm. Ce dispositif permet de se rapprocher de la situation biologique et élimine les quelques difficultés mentionnées précédemment. D’autre part, le temps d’équilibrage du système est ramené à environ quatre heures. Finalement, afin de permettre une meilleure observation de l’évolution du système, on a choisi de teinter l’anneau gonflant. Dans les ex-périences préliminaires, on a utilisé de l’éosine. Bien que cette molécule produise un bon contraste, elle diffuse rapidement, tend à brouiller le contour et ne favorise donc pas la détec-tion de l’instabilité (on observe la diffusion, à la fois dans le solvant et dans le disque interne, dans la partie haute de la figure 4.6). L’utilisation de colorant composé de plus grosses mo-lécules, telles que du dextran bleu ou du tournesol, permet de contourner ce problème sans modifier la rigidité du gel.

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