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Mise en place des outils de biologie moléculaire

B. Démarches expérimentales

2. Mise en place des outils de biologie moléculaire

a) Techniques associées à l’ADN polymérase Phi29

L’ADN polymérase Phi29 ( 29) est une polymérase mésophile responsable de la réplication de l’ADN du phage phi29 Bacillus subtilis. Cette polymérase a été identifiée il y a plus de 25 ans (Blanco and Salas, 1984; Watabe et al., 1984) et présente des caractéristiques exceptionnelles. La 29 fonctionne de manière optimale à 30°C, est capable de déplacement de brin et de générer des fragments de plus de 100kb à partir d’une matrice d’ADN circulaire. De plus, sa très haute fidélité permet de rechercher des mutations ponctuelles sur son produit d’amplification. Brevetée en 2002, elle a été entre autres à la base des kits d’amplification d’ADN TempliPhi® et GenomiPhi® (Amersham GE). Ses propriétés remarquables nous ont servi de base pour mettre en place différentes stratégies utiles à notre projet.

(1) Production de sondes BAC

Afin de tester l’implication de différents loci par FISH sur chromosomes métaphasiques, nous avons eu besoin de produire de nombreuses sondes fluorescentes spécifiques des régions d’intérêt. Les sondes fluorescentes sont produites à partir des matrices BAC (Bacterial Artificial Chromosome ; des fosmides seront aussi utilisés dans cette étude, le principe est le même mais l’insert ne fait que de l’ordre de 20-30kb). Les BAC sont des bactéries contenant des plasmides (pBAC) de 70 à 250 kb contenant des séquences d’ADN génomique humain cartographiées sur le génome. Il existe plusieurs librairies de plasmides BAC dont les plus couramment utilisées dans nos travaux sont les RP11 et les CTD (Roswell Park 11 et Caltech-D respectivement). Ces librairies sont stockées en plaques 384 puits ; derrière le préfixe RP11 ou CTD, sont indiquées les références de stockage des BACs (ex : RP11-numéro de plaque/colonne/ligne). La définition des BACs d’intérêt se fait comme indiqué dans la figure 21. Les BACs dont nous avions besoin pour cette étude nous ont été fournis par Roland Heilig (Genoscope, Evry). Nous avons utilisé une technique de production de sondes basée sur l’utilisation de la 29. Schématiquement, la production de sondes pour FISH se fait en 4 étapes : amplification de la bactérie contenant le pBAC, purification de l’ADN, marquage par nick-translation et validation de la sonde sur chromosome

métaphasique. Cette technologie, détaillée dans l’article (protocole en Annexe#1), nous a permis de gagner en temps et en simplicité par rapport à l’amplification classique d’ADN pBAC par maxiprep.

Figure 21 : Méthode de sélection de BACs spécifiques d’un gène d’intérêt : Exemple de PAX5. 1 : Quel est le

statut du locus PAX5 ? ; 2 : Sélection des BACs informatifs (http://genome.ucsc.edu/). 3 : Production des sondes fluorescentes spécifiques de PAX5. RP11-243F8 = sonde centromérique marquée avec des dUTP-

tétraméthylrhodamine (rouge), RP11-344B23 = sonde télomérique au dUTP-fluorescéine (verte). 4 :

Hybridation des sondes sur chromosomes métaphasiques de patients ; Cas 1 : Perte des signaux des deux sondes sur un chromosome = délétion d’un allèle ; Cas 2 : conservation des deux signaux de fluorescence sur les 2 allèles = locus de PAX5 non impliqué dans le remaniement ; Cas 3 : Perte du signal vert sur un des deux chromosomes 9 = point de cassure dans le locus de PAX5, possibilité d’un gène de fusion.

En partant directement d’une faible quantité du stock bactérien ou de quelques nanogrammes d’ADN plasmidique purifié en miniprep, l’utilisation d’amorces aléatoires exo- résistantes pour la réaction de RCA (activité de l’enzyme 29) permet de produire des quantités importantes d’ADN plasmidique. La purification de l’ADN produit par ce système n’est pas indispensable dans la mesure où elle n’améliore pas considérablement la qualité de la sonde. Cette technique permet donc de réduire le temps de production d’ADN pBAC et la logistique en ramenant le volume réactionnel à 50µl (contre 0,5-1L pour les maxipreps), ce qui autorise la production simultanée de nombreuses sondes.

(2) Réhabilitation de matériel de patient pour la recherche de mutations ponctuelles

La 29 est capable d’amplifier de l’ADN circulaire ou de l’ADN linéaire. Au cours de cette étude, nous nous sommes intéressés aux éventuelles mutations de l’allèle non remanié de

PAX5, en particulier pour les patients présentant un point de cassure interne (donc une

possible fusion) sur l’autre allèle. Nous avons été confrontés au défaut de matériel génomique pour effectuer ces investigations pour de nombreux patients. Nous avons donc développé un protocole de récupération de matériel cytogénétique, c'est-à-dire de chromosomes métaphasiques fixés sur lame ou de culots cytogénétiques (culots produits par choc hypotonique des cellules avec du KCl, puis repris dans un mélange de ¼ méthanol ¾ acide acétique). Brièvement, ces chromosomes sont resolubilisés par un tampon de lyse directement déposée sur lame de verre où ils sont étalés. L’ADN est resuspendu sur la nuit en milieu humide (à 37°C en conditions optimales). Puis, les chromosomes sont récupérés par grattage de la lame et précipités à l’isopropanol en présence de NaOAc de manière classique. L’ADNg ainsi récupéré sert ensuite de matrice à une réaction de RCA en suivant le même protocole que celui utilisé pour l’amplification des BACs (Annexe#1). Nous avons pu générer ainsi suffisamment de matériel de bonne qualité pour effectuer ces expériences de HRM (puis de PCR suivies de séquençages) nécessaires pour caractériser le statut mutationnel du locus non remanié (protocole détaillé dans l’article en Annexe#3, données non incluses à notre article). Nous avons également testé la possibilité d’utiliser ce mode d’amplification pour analyser ces échantillons sur puce SNP-CGH. L’amplification du génome par la 29 ou les traitements subis par les chromosomes pour l’analyse cytogénétique introduit un biais d’amplification de certaines régions, rendant impossible l’interprétation des données. La 29 permet donc de générer des quantités suffisantes d’ADNg pour mener des recherches de mutations ponctuelles à partir de chromosomes métaphasiques déshydratés hybridés sur lames de verre.

Cette technique rend donc envisageable des études rétrospectives sur de larges cohortes de patients dont on considérait que le matériel était inexploitable.

(3) Recherche de d’ARNm de fusion contenant PAX5 : RCA-RACE

L’identification de gènes de fusion nécessite la détection d’ARNm de fusion contenant une partie connue, ici PAX5, et un partenaire de nature inconnue. Il n’est donc pas possible d’amplifier de tels produits par technique classique de transcription inverse suivie de PCR. La technique de biologie moléculaire la plus courante pour répondre à cette problématique est la RACE (Rapid Amplification of cDNA Ends) (3’RACE ; figure 22.a). Cette approche théoriquement efficace peut produire un large éventail de produits non spécifiques, rendant très ardue en pratique l’identification du produit de fusion d’intérêt. L’amplification non spécifique associée à l’utilisation de la RACE est inhérente à l’utilisation d’une amorce adaptatrice complémentaire d’une séquence ajoutée à une extrémité de tous les ARNm présents dans les cellules. Cette amplification sera donc semi-spécifique dans la mesure où seule une amorce sera complémentaire de la séquence connue du produit de fusion. Afin de contourner ce problème, nous avons développé la technique de RCA-RACE (Polidoros et al., 2006). La RCA-RACE consiste à amplifier des produits contenant une séquence inconnue et une séquence connue avec des amorces spécifiques en sens et en anti-sens (figure 22.b). La RCA-RACE consiste à rétro transcrire l’ARNm à l’aide d’une amorce oligo-dT porteuse d’un groupement phosphate en 5’. Après la synthèse de l’ADNc, les ARNm seront digérés par un traitement à la RNaseH. L’ensemble des ADNc générés sera circularisé grâce à CircLigase (Epicentre). Cet enzyme a la propriété de circulariser sur elle-même des molécules d’ADN simple brin, sans nécessiter de dilution limite. Les matrices circulaires ainsi créées (autant de séquences différentes que d’ARNm présents dans les cellules) seront amplifiées grâce à la 29. Cette amplification s’effectue par l’intermédiaire d’une amorce exo-résistante (c'est-à- dire porteuse de 2 liaisons phosphorothioates entre ses 3 bases 3’) de séquence complémentaire à celle du gène cible connu. La très forte processivité de la 29, associée à sa capacité de déplacement de brin, lui permet de tourner autour de cette matrice en polymérisant un brin d’ADN linéaire correspondant à la répétition de la séquence de l’ADNc circulaire ciblée par l’amorce. Le brin d’ADNc « concaténé » issu de cette amplification servira de matrice pour des réactions de PCR avec deux amorces orientées en sens opposé, spécifiques du gène connu. Cette approche nous a permis de systématiser l’identification de nouveaux partenaires de fusion de PAX5 avec une efficacité accrue par rapport à la RACE (protocole détaillé en Annexe#2).

Figure 22 : Principales étapes techniques de RACE classique et de la RCA-RACE. En jaune est figurée la

séquence de PAX5. En bleu, la séquence du partenaire inconnu. a : 3’RACE ; Sp1 et Sp2 symbolisent des amorces spécifiques de PAX5. Le rectangle blanc symbolise la séquence adaptatrice ajoutée à tous les ADNc. Les pointillés montrent les PCR réalisées, la première Sp1/amorce adaptative, et une seconde semi-nichée Sp2/amorce adaptatrice sur les produits de la première. b : RCA-RACE . La spirale bleue symbolise le produit de l’amplification en cercle roulant. Ce même produit est schématisé en dessous sous l’appellation d’ADNc concaténé.

3. Travaux publiés – le statut du locus PAX5 dans les