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4 - Les migrants : des hommes jeunes et célibataires ?

53 Atlas des migrations, p. 154, Une pirogue pour l’Europe, hors-série Le Monde, 2009

54 voir filmographie

55 Atlas des migrations, p. 124,

Pas seulement. 48 % des migrants sont des migrantes qui ne s’intègrent pas – autre représentation – forcément dans les réseaux - ou trafics - de criminalité, de prostitution, ceux-ci sont très minoritaires.

Ces femmes s’emploient dans des métiers dits “ féminins ” : santé, emplois domestiques, action sociale.

Cette migration fut un temps favorisée par les politiques du regroupement familial (cause encore essentielle de départ des femmes), relayées par des départs volontaires de femmes seules, en général plus diplômées que la moyenne, célibataires ou divorcées, et aussi de femmes mariées.

Ces évolutions disent les changements de mentalités dans le pays de départ et un mouvement d’autonomisation dans la migration féminine.Elles sont par ailleurs des agents de changements culturels importants.

Ce phénomène est particulièrement visible en Asie : en 2005, les 2/3 des migrants des Philippines et du Sri Lanka sont des femmes.

Les migrants peuvent être jeunes, mineurs : « mineurs isolés », « mineurs isolés étrangers » (MIE),

« mineurs non accompagnés ».

Selon les chiffres de l’UNHCR : il y aurait plus de 100 000 enfants non accompagnés en Europe.

Plusieurs raisons au départ qui génèrent plusieurs catégories, non exclusives56 :

- les mandatés qui doivent contourner les dispositifs réglementaires du Nord et préparer la venue de la famille

- les rejoignants qui cherchent à rejoindre un proche

- les fugueurs hors frontières victimes de la maltraitance ou de la rupture avec la famille - les exilés séparés de leurs parents à la suite d’un conflit

- les exploités victimes de la prostitution ou du travail forcé

- les errants dont l’errance se régionalise et se mondialise (voir les enfants du Maroc)

Ces jeunes migrants posent un gros problème pour les pays d’accueil, car ils ne sont pas des étrangers comme les autres : ils relèvent normalement du régime juridique des mineurs et doivent bénéficier de la protection des pouvoirs publics, mais il est souvent difficile de déterminer avec exactitude l’âge de ces jeunes.

5 - C’est la “misère du monde” qui migre et les migrants n’ont aucune qualification

« Les migrations aujourd’hui ont changé par rapport à celles des Trente Glorieuses. Diversifiées, structurées, diasporiques, transnationales, elles impliquent des individus informés qui ont beaucoup investi dans l’entreprise migratoire. Avec ou sans papier, le migrant n’est pas le rejeton de la « misère du monde » mais un acteur qualifié et connecté. »57

56 Gildas Simon, La planète migratoire dans la mondialisation, 2008

57 Serge Weber, Nouvelle Europe, nouvelles migrations, 2007

Les migrants ne sont pas les plus pauvres de la planète. Pour migrer, il faut un capital financier qui peut être très conséquent. Les migrants en Europe viennent donc souvent de pays moyennement développés, mais il existe aussi depuis plus de 10 ans des migrants très pauvres de l’Afrique

subsaharienne qui se massent aux frontières de leur continent et tentent le passage. La géographie des pays d’origine montre une variété de situations qui traduit la variété des situations de

développement

Et il faut aussi un capital social, culturel : « Les trajectoires sociales prennent en compte à la fois l’objectif de mobilité sociale et la dimension personnelle de la migration. Les départs ont toujours lieu dans des milieux sociaux en transition, c’est à dire en voie de modernisation et d’enrichissement, où les inégalités sociales s’accentuent et dans des espaces où la pauvreté domine. »58

On peut de ce fait reconsidérer l’idée que le développement freine les migrations et serait une alternative : « En fait, il l’accélère, car il crée de nouveaux besoins, les gens accédant à la société de consommation, à plus de scolarisation. Le modèle de l’Espagne, du Portugal, de l’Italie, dont le développement a stoppé l’émigration n’est pas un modèle mondial. Aujourd’hui, dans beaucoup de pays de départ, en Chine, en Afrique, en Amérique latine, développement et migration fonctionnent en parallèle ».59

Un argument souvent mis en avant pour dénoncer les migrations “Sud-Nord” : la fuite des cerveaux.

Le brain drain ne touche pas seulement les pays développés, mais aussi les pays en développement.

Les étrangers arrivent de plus en plus qualifiés : ils sont étudiants ou déjà diplômés dans leur pays d’origine. Le migrant d’Afrique subsaharienne, présenté comme un pauvre migrant sans ressource et sans qualification, est un exemple : les travailleurs qualifiés représentent 4 % de la population active de la région, et ils constituent 40 % des migrants.

6 - Ils partent parce qu’ils n’ont pas de travail : question migratoire ou réponse migratoire ?

Cette affirmation est toujours valide : on part pour rechercher de meilleures conditions de vie ou même pour vivre : « La migration internationale représente en effet pour la grande majorité des migrants, la réponse aux besoins les plus légitimes de la personne humaine : ne pas avoir faim, avoir de quoi se loger, mais aussi pouvoir se soigner, avoir les moyens d’offrir à ses enfants une éducation suffisante, pouvoir faire face à l’imprévu. C’est fondamentalement la recherche de l’accès au

développement humain, à la dignité et au respect, cette marche vers l’espoir, qui met en mouvement annuellement des millions de migrants à travers le monde. »60

58 Serge Weber

59 Catherine Wihtol de Wenden, Le développement accélère les migrations, Le Monde, 19/01/2009

60 G. Simon, La planète migratoire dans la mondialisation, p. 114

Ce n’est pas la seule raison : les causes de départ sont beaucoup plus complexes. Les migrations sont plus des parcours individuels, qui « répondent en réalité à des logiques complexes faites de

déterminations économiques et politiques, de réseaux familiaux, ethniques ou religieux, d’aspirations individuelles ou collectives « branchées » sur des imaginaires migratoires qui structurent

puissamment la géographie des flux. »61

Dans la migration comme « stratégie de survie », le réseau familial au départ joue un rôle essentiel dans la décision de migrer ou la préparation du voyage, s’impliquant à des degrés variables, de la bénédiction à la participation financière au voyage : certains vendent leurs biens pour envoyer un enfant, espoir de toute la famille.

Les réseaux à l’arrivée jouent aussi un rôle déterminant : « Plus une population est présente dans diverses zones d’accueil et plus les débouchés migratoires sont larges pour les

candidats au départ. Les migrations qui semblent les plus prospères et dynamiques sont celles qui disposent de communautés importantes sur toute la planète. C’est en particulier le cas des Indiens et des Chinois. »62

Ce n’est pas qu’une histoire d’individus, mais aussi de communautés, « d’acteurs collectifs » familiaux, villageois, culturels, religieux, linguistique…

« Le lien communautaire doit être étroit de type plus familial que national, afin de légitimer des rapports d’extrême confiance. Les réseaux obéissent plus à des solidarités régionales ou ethniques qu’à des solidarités plus larges. »63

En plus des motivations de base, vivre correctement et satisfaire ses besoins élémentaires, la

demande migratoire va bien au-delà, dans une recherche de la dignité humaine, relayée et amplifiée par l’imaginaire migratoire : se réaliser en tant qu’individu est devenu essentiel.

« Les individus sont de plus en plus acteurs de leur mobilité (…) Ils se prennent davantage en main, décident de ne pas rester toute leur vie à attendre une hypothétique embellie. Fait nouveau, on assiste à une prise de distance de plus en plus forte des migrants par rapport à leur État d’origine dont ils savent aujourd’hui qu’ils ne peuvent pour ainsi dire rien attendre (…) ».64

Les migrations féminines sont intéressantes tant dans les motivations que les formes. Si on sort de la vision traditionnelle (et encore valide) de la migration féminine dans le cadre du regroupement familial, on peut observer des motivations très personnelles pour le départ : s’émanciper de la tutelle masculine, gagner en autonomie dans le cadre de la cellule familiale, « envie d’être femme

autrement, épouse autrement ».65 Une famille peut ainsi être éclatée sur plusieurs lieux de migration, en fonction des besoins, des réseaux transnationaux et des opportunités de la mondialisation.

61 Atlas des migrations, p. 154

62 J. Barou, La planète des migrants, p. 83

63 J. Barou, Planète des migrants, p. 30

64 Catherine Wihtol de Wenden, Le développement accélère les migrations, Le Monde 07/01/2009

65 Atlas de Migrations, p. 68, Les femmes s’émancipent, extrait d’un rapport de l’ONU

Par ailleurs, il n’y a « pas de migration volontaire sans imaginaire migratoire » (G. Simon). « Le candidat à l’émigration se construit un objet de désir qui doit être assez attrayant pour mobiliser son énergie, et, sans ignorer les difficultés qui se dresseront devant lui, choisit de les minimiser. »66 La télévision est le premier agent de la mondialisation des modes de vie et des cultures :

« elle contribue à perpétuer sous une forme actualisée le mythe de l’eldorado qu’elle diffuse dans les lieux les plus reculés et les plus isolés du monde. » Ainsi, les futurs migrants sont déjà mondialisés avant de partir, victimes de frustrations, prenant conscience des écarts de richesse. Se crée un « sentiment de proximité et d’accessibilité qui transforme chaque pays riche en pays potentiel d’immigration » ; dans cet effet de projection dans un espace

différent, désiré, la confusion entre réel et imaginaire est inévitable. Contribuant à enrichir les représentations, les envois de fonds (225 milliards de dollars en 2005) sont une image et une réalité de la “réussite” des migrants. La maison construite en dur dans un village pauvre du Sénégal, grâce à l’argent du fils parti en Europe, est une source féconde pour nourrir les imaginaires migratoires.

Les images se télescopent : celles qui montrent la possibilité de travailler, et de se réaliser, dans un pays attractif, riche, “moderne”, celles qui rendent le pays de départ répulsif pauvre, archaïque, porteur d’une culture dévalorisée (théorie du push-pull, couple attrait-répulsion67).

C’est ainsi que se développe le « virus d’Europe » comme disent les jeunes de Tanger…68

Dans les facteurs de départ, il convient d’accorder une place déterminante au rôle des TICE.

« Ouverture sur les lieux, possibilités d’informations concrètes sur les itinéraires possibles, les moyens de passage, les conditions de vie, les possibilités d’emploi, les législations et les réglementations en cours, mise en contact avec les habitants du lieu ou du pays choisi, Internet est sans nul doute l’outil migratoire le plus efficace. »69

Les travaux de la sociologue Dana Diminescu sur le « migrant connecté » ou les « e-migrants » et la « culture de lien » qui s’est établie aujourd’hui dans le monde sont très intéressants. 70

Les moyens de communication se sont renforcés et élargis : par exemple, le téléphone mobile s’est banalisé chez les migrants avec un numéro à usage collectif au départ puis de plus en plus individuel.

Les TIC assurent dans le scénario migratoire :

- La facilité dans le départ en fournissant un appui concret au passage à l’acte migratoire et au développement de nouvelles pratiques spatiales ; ils aident la prise de décision : la migration est plus

“possible” qu’auparavant.

- La facilité de l’installation et de l’insertion dans le pays d’accueil : on contacte une personne, pas l’institution ; c’est une forme d’intégration par le bas comme l’ont montré les travaux de Tarrius.

66 Jacques Barou, La planète des migrants, p. 80,

67 La planète des Migrants (Barou, p. 27)

68 Lire à ce propos le roman de Tahar Ben Jeloun, Partir

69 G. Simon, La planète migratoire, p. 117

70 Migrant.com, in Hommes et Migrations 2002

- La proximité avec le pays d’origine : il établit une sorte de présence continue malgré la distance (présence non physique, mais affective) ; c’est le moyen de garder le contact, de maintenir le lien social, le lien affectif et matériel.

Le mobile ou Internet ont changé les rapports à l’espace, fournissant une connexion au monde facile qui dépasse les frontières, les barrières, politiques, culturelles, religieuses, gommant les fractures, facilitant une forme de continuité. Le migrant n’est plus vraiment un déraciné comme par le passé : il circule et garde le contact. Si les lignes de fractures géographiques se sont multipliées et expliquent entre autres les migrations, les liens se sont aussi multipliés (et ils expliquent aussi les mobilités).

Le migrant doit être considéré dans sa globalité physique, imaginaire, virtuelle.

Il est “entre deux”, ou dans des réseaux d’appartenances multiples, entre deux espaces géographiques, deux systèmes et parfois plus.

On peut placer dans ce cadre les « fourmis de la mondialisation »71, ces entrepreneurs et entrepreneuses transnationaux qui créent des réseaux de liens dans le cadre de la D.I.T et contribuent à densifier les espaces migratoires. Les travaux d’Alain Tarrius et d’Alejandro Portales montrent comment ces migrants se sont appropriés les nouvelles technologies pour gérer les flux d’informations, de marchandises, de personnes, inscrits dans des réseaux transnationaux solides et appuyés sur des bases traditionnelles familiales : une forme de mondialisation par le bas.

S’est formé un entreprenariat transnational souvent facilité par la présence d’une diaspora : « Le transnationalisme tient compte des ancrages multiples d’acteurs différenciés, dépassant la dimension

« internationale » (d’un État à l’autre) ainsi que l’infériorisation de l’immigré dans un État-nation d’accueil ».72Il peut se situer à plusieurs échelles, à différents stades de complexité, depuis les systèmes très élaborés (cas des réseaux entre France et le Maghreb, passant par l’Espagne) aux formes les plus simples, mais essentielles dans les économies des migrants comme ce commerce

« trabendo » ou commerce à la valise, souvent pratiqué par des femmes, toujours un commerce informel entre un ou plusieurs espaces.

7 – Quelles sont les réponses de l’Europe à la « question migratoire » ?

La disparition des frontières intérieures à l’intérieur de l’espace Schengen, facilite la circulation et les déplacements alors que la frontière extérieure est fortement contrôlée. Ainsi, l’opposition entre un

“espace du dedans” et un “espace du dehors” a joué sur le plan des représentations migrantes : l’Europe apparaît plus que jamais comme un espace de circulation et de libertés, d’opportunités, d’enrichissement. Des communautés de populations de migrants se constituent aux portes de l’UE dans les pays limitrophes de l’espace Schengen. « La clandestinité croissante des flux, liée à la fermeture des frontières au nord, et à l’informalité de la mobilité au sud, génère des incertitudes

71 AlainTarrius a beaucoup travaillé sur ces “fourmis de la mondialisation”, des migrants transnationaux qui, dans un système de réseau souterrain, contribuent à la mondialisation. Voir bibliographie.

72 Serge Weber, Nouvelle Europe, nouvelles migrations, p. 15

statistiques sur l’importance du phénomène migratoire, une insécurité juridique et économique pour les migrants et des inquiétudes politiques et sociales pour les pays d’accueil. »73

Face à la pression migratoire, le système de contrôle mis en place par l’UE génère des drames. Des espaces, des points de passage sont particulièrement exposés comme Ceuta et Melilla ou

Lampedusa. La médiatisation des drames contribue très certainement à alimenter l’idée de

« l’Europe forteresse » : représentation ou la réalité ?

Quelques chiffres : on compte 56 millions de migrants dans l’UE en 2004 (soit environ 7,7 % de la population), et seulement 10 % seraient des migrants irréguliers.

Et quelques éléments de vocabulaire :

- Les clandestins sont des migrants qui ne se sont jamais fait connaître des autorités, ni visa, ni titre de transport… Les évaluer est difficile, mais 500 000 sans-papiers sont comptabilisés chaque année.

- Les migrants irréguliers : ceux qui ont eu un document, mais sont restés au-delà de leur validité.

Est souvent évoqué le terme de migrant illégal, mais l’émigration illégale est un non-sens ; il n’y a aucune justification à l’illégalité de l’émigration : le droit à quitter son pays est reconnu par la DUDH de 1948. Et pourtant, on assiste à une forme de pénalisation, de criminalisation de l’émigration avec des systèmes de contrôle qui freinent ou stoppent la mobilité.74

Dana Diminescu distingue deux variantes dans cette « culture de contrôle » qui accompagne la

« culture des liens » : la variante sof et la variante hard.75

La variante soft repose sur les fichiers de surveillance informatique. Le SIS (système d’information Schengen) récupère des données concernant des objets et des personnes qui sont “hors-la-loi” : 11 millions d’entrées en 2002, dont 1,2 million de personnes. Ce fichier informatique est relié à des fichiers nationaux et internationaux (Interpol, Échelon). Le problème réside dans le fait qu’on mélange criminels (2 % de grands criminels) et migrants irréguliers (89 %) et que l’on contribue ainsi, à l’échelle européenne et nationale à criminaliser les migrants.

Avec ces systèmes de contrôle, la frontière change de nature (il vaudrait mieux dire qu’elle se double d’une autre forme virtuelle qui double la frontière matérielle, physique) : elle entre dans l’ordinateur, elle devient une frontière informatique. Dana Diminescu rapporte un témoignage de migrant : « Ils m’ont cherché sur l’écran, ils ne m’ont pas trouvé et je suis passé ».

73 Atlas des migrations

74On trouvera de nombreuses informations dans des dossiers très synthétiques sur la politique européenne de contrôle des migrations sur le site de Géoconfluences.

http://geoconfluences.ens-lsh.fr/doc/typespace/frontier/FrontDoc4.htm

75 Dana Diminescu,

La variante hard est celle des systèmes de contrôle et rétention.

C’est d’abord le dispositif Frontex, agence européenne pour la coopération des États membres (créée en 2004) chargée de la mise en application de l’espace Schengen. Son activité est de coordonner les opérations de surveillance des frontières mises en place par les États (qui fournissent leurs propres matériels contre une participation financière), et de former les agents de contrôle aux frontières. Elle est chargée d’identifier les espaces critiques pour le “risque migratoire” : en fonction de son analyse du risque, elle décide les interventions.

Ce sont les activités de cette agence qui sont fortement médiatisées, car elles sont spectaculaires, elles se déroulent le plus souvent en mer (alors que les situations terrestres sont plus nombreuses et moins risquées).

Le SIVE (système intégral de vigilance externe) est intégré au dispositif Frontex : c’est un système de stations de radars fixes et mobiles, très perfectionné qui surveille le détroit de Gibraltar depuis 2002 et s’est étendu à d’autres zones (les Canaries par exemple). Il existe 25 stations SIVE fin 2007.

http://geoconfluences.ens-lsh.fr/doc/etpays/Medit/MeditDoc.htm

Face à ces systèmes assez efficaces, les migrants trouvent d’autres alternatives et des stratégies de contournement : si Gibraltar est surveillé, il peut y avoir d’autres portes d’entrée, Lampedusa ou Chypre.

D’autres éléments de contrôle trouvent une traduction spatiale : ce sont les camps de transit.

Il en existe 224 en UE en 2008 au niveau des frontières (camps-frontières), mais aussi dans les espaces portuaires et aéroportuaires (zones d’attente) ; on dénombre plus de 40 camps dans les pays proches hors UE.

http://www.monde-diplomatique.fr/cartes/europeetrangers

Ces camps sont très disparates : il n’y a aucune harmonisation entre États sur le régime de détention, la durée, le statut des étrangers qui y sont placés. Il existe des camps ouverts, fermés, publics, privés, légaux ou informels. Et on ne compte pas les camps hors UE (Ukraine, Libye, Algérie… )

La durée d’enfermement tend à s’allonger (de 3 semaines en France à 5 ans à Malte) et les conditions de rétention ne respectent pas le droit international, vont à l’encontre de la liberté de circulation des personnes.

« Le phénomène des zones d’attente peut être considéré comme l’infiltration de la frontière extérieure à l’intérieur de l’espace politique occidental : (…) on assiste à la fermeture des frontières

extra-européennes et à la production d’espaces d’exclusion et de non-droit inclus à l’intérieur de l’espace diaphane européen ».76

Les camps font l’objet d’une sémantique riche : camps de rétention ou détention, ou camp d’attente ou de transit (mots des médias) ou points d’accueil, zones tampons, points de contact, centres d’assistance, portails d’immigration… (mots de l’humanitaire et des politiques), ou « short stay detention centres » ou « long stay detention centers », ou « repatriation centers » pour la commission européenne

Une sémantique variée qui tend à cacher le fait que ce sont des zones de tri et refoulement d’abord.

Car le terme de « camp » est un terme chargé de sens supposant le regroupement « forcé » de populations mises à l’écart, c’est une « une institution répressive d’enfermement, […] une potentielle suspension préventive des libertés pour des raisons d’ordre public. »77

Sangatte en fut un exemple : centre d’hébergement et d’accueil d’urgence humanitaire, le centre a été ouvert en 1997, utilisant un hangar d’Eurotunnel pendant trois ans. Il fut l’objet d’une forte

Sangatte en fut un exemple : centre d’hébergement et d’accueil d’urgence humanitaire, le centre a été ouvert en 1997, utilisant un hangar d’Eurotunnel pendant trois ans. Il fut l’objet d’une forte