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La microscopie en champ proche

Études sur surface et applications

1/ La microscopie en champ proche

Les microscopies en champ proche sont des techniques d’analyse dont le développement a commencé dans les années 80. Dans leur globalité, elles utilisent des capteurs submicrométriques pour balayer une surface à des distances suffisamment proches de manière à générer des interactions de proximité.1 Si le principe général reste le même, plusieurs techniques existent et tirent profit de l’interaction avec la surface par la mesure de grandeurs physiques de nature différente. Le groupe de Binnig a développé la première de ces techniques, la microscopie à effet tunnel (STM).2,3 Elle est basée sur la mesure de courant entre une sonde (pointe) et une surface ce qui permet de cartographier l’échantillon étudié. D’autres techniques à sonde locale ont ensuite vu le jour comme la microscopie à champ de force,4 la microscopie optique en champ proche,5 ou la microscopie thermique.6 Le développement de ces méthodes d’observation est allé de pair avec l’évolution des nanotechnologies et rend possible à l’heure actuelle non seulement la visualisation directe des nanoobjets, mais aussi la rationalisation, voire la modification de leurs propriétés.

1 Aigouy, L.; De Wilde, Y.; Frétigny, C., Les nouvelles microscopies : A la découverte du nanomonde, Editions Belin, Paris, 2006.

2 Binnig, G.; Roher, H.; Gerber, C.; Weibel, E., Helv. Phys. Acta. 1982, 55, 726.

3 Binnig, G.; Roher, H.; Gerber, C.; Weibel, E., Appl. Phys. Lett. 1982, 40, 178.

4 Binnig, G.; Quate, C. F.; Gerber, C., Phys. Rev. Lett. 1986, 46, 930.

5 Pohl, D. W.; Denk, W.; Lanz, M., Appl. Phys. Lett. 1984, 44, 651.

La microscopie à champ de force (AFM) mesure l’interaction mécanique entre l’extrémité de la pointe et la surface de l’échantillon. La répulsion de la sonde par la surface durant le balayage de la surface permet ainsi de connaître la topographie de l’échantillon. Cette méthode permet aussi de mesurer des données physiques locales sur un échantillon donné, par exemple des grandeurs mécaniques, électriques ou magnétiques, en adaptant des pointes spécialisées sur le microscope. L’outil permet donc de caractériser une surface par observation, mais également d’étudier certaines propriétés physiques des échantillons à un niveau nanométrique ce qui a motivé son utilisation pour la caractérisation des auto-assemblages étudiés dans ce manuscrit.

1.1/ Principe de l'AFM

La sonde d’un microscope AFM se constitue de plusieurs éléments : une pointe très fine fixée sur un levier flexible (le cantilever), un tube piézoélectrique (qui peut être sous l’échantillon ou alors soutenir le cantilever), une diode laser et un détecteur (fig. 4.1). Le tube piézoélectrique contrôle la position du cantilever (dans le cas où ce dernier est fixé dessus) ou de la surface (dans le cas où la surface est déposée dessus). Les forces de répulsion générées lors du balayage entraînent une déformation du cantilever. C’est la déflexion du rayon laser focalisé sur ce dernier, mesurée par des diodes photoélectriques, qui permet de retranscrire la topographie de l’échantillon étudié, ou plus précisément de la surface « accessible » à la pointe avec une précision atomique.

Figure 4.1 : Représentation schématique d’un microscope AFM (cas où le tube piézoélectrique supporte le

1.2/ Modes d’imagerie

Plusieurs modes de fonctionnement de l’appareillage décrit ci-dessus sont possibles. Ils correspondent à des modes d’imagerie et permettent de recueillir des informations distinctes selon le mode utilisé, avec contact ou non de la pointe, à la résonance du cantilever ou à une fréquence nulle, ou encore en faisant vibrer l’échantillon. Les paragraphes qui suivent présentent brièvement les principaux modes utilisés ainsi que leurs intérêts respectifs.

Le mode contact

Le mode contact a été le premier mode développé et correspond à un fonctionnement de la pointe à la limite du mur de répulsion de la surface. Autrement dit, la pointe est au contact de la surface et décrit sa topographie en la touchant. L’utilisation de ce mode peut engendrer des déformations de l’échantillon par la pointe ce qui altère la qualité des images. Ce mode reste toutefois le plus simple et le plus rapide à mettre en pratique. Il est souvent couplé à des mesures de frottement, d’adhérence ou de raideur.

Le mode résonnant

Dans le mode résonnant on fait osciller le cantilever à sa fréquence de résonance loin de la surface et avec une amplitude faible. Le gradient des forces subies par le cantilever modifie sa fréquence de résonance ce qui permet de renseigner sur la répulsion locale. Dans ce mode, le cantilever est plus loin de la surface que dans le mode contact. Il est par conséquent moins adapté pour des études topographiques, mais permet plutôt d’analyser des forces à longue portée électriques ou magnétiques en utilisant des pointes chargées ou magnétiques.

Le mode tapping

Le mode tapping est également un mode où l’on fait osciller le cantilever, par contre, l’amplitude de l’oscillation est plus grande, et sa position moyenne est plus proche de la surface. À chaque cycle, la pointe entre en contact avec la surface. C’est un mode très utilisé pour les études topographiques car les forces appliquées à l’échantillon peuvent être très faibles, et la durée de contact très courte. On évite ainsi les problèmes de déformation et

d’usure de l’échantillon. De plus, puisque le contact n’est pas permanent, la définition latérale est nettement améliorée par rapport au mode contact car la pointe ne suit plus la surface, réduisant ainsi les effets d’élargissement de la pointe AFM. Ce mode permet également de mesurer le déphasage entre l’excitation mécanique de la pointe et sa réponse en vibration. Les images recueillies ainsi sont appelées images de phase et peuvent révéler de légères hétérogénéités sur une zone donnée.

1.3/ Choix de la méthode

La microscopie AFM est un outil relativement simple d’utilisation qui permet de recueillir de nombreuses informations locales par l’étude d’échantillons variés. De plus, cette technique propose une très bonne résolution verticale (~0,1 nm) et en fonction du mode d’imagerie utilisé, permet une résolution latérale très fine, notamment grâce au mode tapping. Dans le cadre de l’observation des fils moléculaires uniques, ce sont typiquement les informations topographiques qui nous intéressent puisque leur observation doit nous renseigner sur la morphologie et la taille des fils. Dans notre cas, la précision de la microscopie AFM est certes inférieure à la définition que pourrait proposer la microscopie STM, cependant, la tolérance permise en termes de conditions utilisables ainsi que la rapidité de mise en œuvre des études AFM sont des avantages dans le cadre de ces recherches. De plus, l’observation d’édifices en STM impliquerait une orientation définie des porphyrines appropriée en surface. Pour le moment aucune information quant au positionnement final des plans des porphyrines sur HOPG n’a été obtenue et les études en STM semblaient prématurées. La préférence a été donnée à une étude quasi systématique de l’influence des conditions de dépôt. Une vaste gamme de conditions doit être essayée (solvant, concentration, surface) afin de déterminer les conditions idéales pour la croissance de nos espèces linéaires. Une fois les conditions de formation de fils mises au point, l’utilisation de la microscopie STM deviendra envisageable.

La microscopie AFM a déjà été utilisée pour l’observation des nanoobjets formés à partir de 1Zn et 2Zn.69,98 L’utilisation de cette même technique pour les études des composés

22Zn, 23Zn, 24Zn, 25Zn et 27Zn permettra de comparer directement les nouvelles études

1.4/ Préparation des échantillons

Les interactions qui se développent entre les molécules et les surfaces de dépôt dépendent fortement de facteurs extérieurs comme le solvant, la température, la concentration ou la durée d’évaporation du solvant. Ces équilibres sont très subtils, et de légères modifications d’un paramètre peuvent conduire à des résultats très différents. Pour mieux cerner le processus d’assemblage d’un composé donné, il est donc nécessaire de réaliser des expériences en utilisant de manière systématique plusieurs conditions de dépôt. La méthode de préparation des échantillons est donc déterminante pour contrôler l’assemblage, et par conséquent les variables comme la nature de la surface, le solvant de dépôt, et la concentration des solutions de dépôt sont à maîtriser.

Dans notre cas, les études sur les composés 1Zn et 2Zn ont montré que la stabilisation du monomère par la surface est également indispensable pour la formation des fils moléculaires. L’affinité des chaînes alkyles de 1Zn et 2Zn pour HOPG permet la croissance de fils moléculaires sur HOPG, mais sur du mica, aucune affinité pour la surface ne stabilise l’existence de monomère et aucun fil ne se forme.69 La durée d’interaction des composés avec la surface est donc une autre variable déterminante à maîtriser car l’adsorption du monomère sur la surface est nécessaire. Cette dernière peut être contrôlée par l’utilisation de différentes méthodes de dépôt qui agissent principalement sur la durée pendant laquelle les interactions molécule-surface se développent. Afin de rappeler les différentes techniques de dépôt et leurs avantages, voici une rapide description de celles qui ont été utilisées.

- Dépôt direct (Dropcasting)

Cette technique consiste à déposer une goutte de solution de l’échantillon sur une surface puis de laisser le solvant s’évaporer. Il s’agit d’une technique simple et rapide, mais qui est très dépendante du point d’ébullition du solvant utilisé et des qualités de mouillage de la surface par ce même solvant. L’évaporation du solvant à l’air ne permet pas réellement que des interactions molécule-surface se développent car le temps de séchage est en général assez court. L’évaporation peut aussi se faire en atmosphère saturée en vapeurs de solvant, ce qui permet une évaporation très lente de ce dernier. Les interactions molécule-surface ont alors le temps de se développer et cette méthode est la plus adaptée lorsqu’on veut en tirer un bénéfice.

- Dépôt direct sur tournette (Spincasting)

Il s’agit encore d’un dépôt direct mais cette fois il est réalisé sur une surface en rotation. De cette manière, la goutte de solvant est très rapidement évacuée ce qui limite considérablement le temps d’évaporation du solvant. Cette technique permet de piéger les espèces en solution à la surface de l’échantillon, sans que la surface n’intervienne dans l’équilibre d’assemblage.