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Chapitre I : Bibliographie

4.3 Les synthèses de particules métalliques en solution

4.3.1 Microémulsion

Une microémulsion correspond à un mélange de deux composés non miscibles (un composé aqueux correspondant à une phase polaire et l’autre organique correspondant à une phase apolaire) qui sont stabilisés à l’aide d’un tensioactif pour former une solution thermodynamiquement stable, isotropique et limpide d’un point de vue optique [41], [42]. Un tensioactif est un composé amphiphile muni d’une « tête » polaire soluble en milieu aqueux et d’une « queue » apolaire. Ce type de molécules permet de créer un film mixte à l’interface huile/eau qui permet de diminuer la tension interfaciale. D’un point de vue microscopique, une microémulsion correspond à la formation de micelles au sein de la solution.

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Figure 10 : Diagramme de phase ternaire d’un système eau/huile/tensioactif (surfactant) [43]

Comme le montre la Figure 10, pour un système ternaire eau/huile/tensioactif, la structure de la solution dépend du ratio entre les 3 composés. Ainsi, plusieurs types de microémulsion peuvent se former de type Winsor I, II, III ou IV mais aussi, pour certaines concentrations, des systèmes bicontinus ou bien lamellaires peuvent être observés [44].

Pour cette étude, la microémulsion de type Winsor IV est intéressante puisqu’elle est constituée de micelles pouvant contenir les précurseurs métalliques et servir de gabarit aux particules métalliques réduites à l’intérieur (cf. Figure 10). La structure interne de cette microémulsion est dirigée par le rapport entre la concentration du composé aqueux et la concentration du composé organique. Pour de faibles concentrations en eau par rapport à la phase huile, les micelles formées seront de types inverses w/o (water in oil) où l’eau se situe dans les « nanogouttelettes » alors que pour de fortes concentrations en eau, les micelles seront du type o/w (oil in water).

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Figure 11 : schéma général de a) un tensioactif, b) une micelle oil in water et c) une micelle inverse water in oil Ces micelles fournissent un environnement clos où une certaine concentration en composé soluble dans l’eau peut être dissoute. Dans ce cas, la microémulsion va pouvoir être utilisée dans le but de former des nanoparticules métalliques. Les micelles inverses sont utilisées en tant que « nanoréacteurs », au sein desquelles les précurseurs métalliques seront réduits [42]. Elles présentent plusieurs avantages tels que l’homogénéité de composition et des particules grâce au « template », la taille contrôlée des particules, imposée par la micelle. Cette taille dépend du rapport molaire eau/tensioactif appelé ω.

Pour de faibles valeurs ω, les nanogouttelettes ont une petite taille. Plus la valeur de ω augmente et plus la taille des nanogouttelettes augmente.

Il existe quatre types de tensioactifs : les tensioactifs anioniques, cationiques, amphotères ou neutres. Les tensioactifs les plus couramment utilisés pour la préparation de catalyseurs monométalliques sont du type neutre où le groupement lipophile est une chaine carbonée et la tête hydrophile est composée de chaînes de type oxyéthylène.

Dans la littérature, les micelles inverses sont utilisées pour la préparation de différents catalyseurs tels que des catalyseurs métalliques supportés (Pt/Al2O3, Rh/Al2O3, Pd/Al2O3), des

nanoparticules métalliques sulfurées (CdS, PbS, CuS …), des sels métalliques (AgCl, AgBr) ou encore des oxydes métalliques (ZrO2, SiO2, TiO2 …) [41].

Barkhuizen et al [45] ont préparé un catalyseur Ru/γAl2O3 par émulsion inverse à partir d’un

mélange ternaire eau/n-hexane/PEDGE (polyethylene dodecyl glycol ether) à partir d’un précurseur ruthénium en milieu aqueux ; l’élimination de ce précurseur et la réduction du

a)

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ruthénium sont obtenues par traitement thermique. Le catalyseur issu de cette synthèse a été comparé à un catalyseur issu d’une imprégnation conventionnelle. Les auteurs ont montré que la distribution en taille des particules métalliques (cf. Figure 12) estimée par MET était étroite et de forme gaussienne dans le cas de la microémulsion alors que pour le catalyseur préparé par imprégnation classique, la distribution est plus hétérogène. Ils ont postulé que l’origine de cette distribution pour le catalyseur obtenu par microémulsion résultait de la collision des micelles avec le support entrainant une adsorption rapide des micelles sur le support. En faisant varier le rapport ω et le rapport n-hexane/PEDGE, ils ont obtenu un panel de catalyseurs ayant différentes tailles de particules de Ru.

Figure 12 : Distribution en taille des cristallites d'un Ru/γAl2O3 préparés par imprégnation classique et par imprégnation d'une solution de micelles inverses [45]

Karatzas et al [46] ont réalisé des catalyseurs Rh/Al2O3 et Pt-Rh/Al2O3 par microémulsion et

par imprégnation. Le mélange quaternaire utilisé lors de cette synthèse est le suivant : eau/cyclohexane/Triton X-100/1-hexanol, dans les proportions 1,5/7,2/1,0/1,2, le 1-hexanol étant un co-tensioactif. Dans ce cas, l’alumine a été synthétisée dans les micelles à partir du nitrate d’aluminium. En même temps, les précurseurs métalliques contenus dans ces mêmes micelles sont réduits par ajout d’ammoniaque. La plus grande différence obtenue dans ces synthèses concerne la surface spécifique du catalyseur. Que cela soit pour Rh/Al2O3 ou pour

Pt-Rh/Al2O3, ces catalyseurs préparés par microémulsion ont montré des surfaces spécifiques

plus importantes que celles préparés par imprégnation, alors que la taille des particules métalliques était semblable quelle que soit la préparation (entre 1,7 et 2,0 nm).

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Cheney et al [42] ont préparé plusieurs catalyseurs : un Pt/Al2O3 par imprégnation classique,

un Ni/Al2O3 préparé par microémulsion et deux Pt-Ni/Al2O3 par microémulsion, soit par

imprégnation du Pt sur un Ni/Al2O3 soit par dépôt des deux métaux sur l’alumine. Dans le cas

de la microémulsion, ils ont utilisé un mélange quaternaire eau/cyclohexane/triton X-100/2- propanol avec un rapport de 1,5/3,5/1,0/4,0. Pour la réduction des métaux, une autre microémulsion contenant de l’hydrazine a été ajoutée à la solution micellaire contenant les précurseurs métalliques dans le but d’entraîner la coalescence de ces micelles afin d’obtenir la réduction des métaux au sein de ces nanogouttelettes. Dans tous les cas, aucune agglomération des particules n’a été détectée en microscopie contrairement aux catalyseurs obtenus par imprégnation. De plus, la taille des particules de nickel non supportées était similaire à celle des particules supportées sur alumine, ce qui montre que le traitement thermique pour éliminer le tensioactif n’entraine pas de frittage des particules. Dans le cas de la synthèse par microémulsion pour le co-imprégné Ni-Pt, la réduction des précurseurs métalliques par l’hydrazine est préférentielle en milieu basique par rapport à un milieu acide, ce qui explique, en partie, la faible quantité de platine déposée à la surface du support. La seconde raison pouvant expliquer ce phénomène est que l’adsorption des cations et anions sur le support dépend du pH de la solution comme l’a montré Brunelle (cf. § 3.1).

D’autres équipes ont synthétisé des catalyseurs en utilisant des micelles inverses pour former des particules métalliques à partir d’autres systèmes ternaires ou quaternaires en modifiant les tensioactifs utilisés (tensioactifs neutres ou autres). Par exemple, Capek [47] a répertorié les résultats de différentes équipes, dans une revue, pour l’obtention de nanoparticules (NPs) de Fe, Cd, Pd, Ag, Cu, Ni et Au. Les systèmes utilisés sont soit des systèmes ternaires eau/n- hexane/tensioactif où plusieurs tensioactifs ont été testés tels que le Brij 30 (poly(éthylène glycol)monododecyl ethers), l’AOT (bis-(2-éthylhexylsulfosuccinate) de sodium) ou bien des mélanges d’alcools éthoxylates avec l’AOT. Des systèmes quaternaires ont aussi été répertoriés tels qu’un mélange eau/n-hexane/CTAB (bromure de triméthylcétyl ammonium) /1-hexanol. Dans le cas du fer, les paramètres tels que la concentration en tensioactif, en précurseurs métalliques et en réducteur ou encore le rapport ω ont été testés. La taille finale des NPs de fer dépend non seulement de la taille des nanogouttelettes (conditionnée par le rapport ω) mais aussi de la concentration des réactifs ou encore de la flexibilité du film constitué par le tensio-actif.

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Beaucoup d’équipes se sont penchées sur cette méthode de synthèse en faisant varier les compositions des micelles, des rapports entre les différents réactifs, etc. Les recherches de Cheney et al [42] seront utilisées comme référence pour nos travaux.