• Aucun résultat trouvé

3.4 Traversée d’une barrière de potentiel

3.4.2 Mesure de la largeur spectrale du laser à atomes

Des mesures de largeur spectrales ont déjà été effectuées avec des lasers à atomes gravitationnels dans le groupe de T. Esslinger en 2001 [209] à partir de la mesure de l’onde stationnaire généré à la réflexion d’un laser à atomes sur une pente de potentiel très raide. Une autre méthode, particulièrement adaptée à notre configuration guidée, consiste à mesurer l’expansion longitudinale en

Barrière fine Barrière épaisse O.N. 0, 14 0, 04 wz (µm) 1, 36 3, 8 wy (µm) 23 24 zR (µm) 18 330 V /P (kHz/mW) 11, 9 4, 2

Table 3.1: Récapitulatif des mesures de calibration des deux configurations de barrières bleues utilisées : à pleine ouverture et avec un diaphragme de diamètre 7 mm.

temps de vol du laser à atomes [210]. Nous décrivons ici une méthode originale basée sur la transmission classique du laser à atomes à travers une barrière de potentiel.

3.4.2.1 Principe

Pour cette étude, nous nous plaçons dans la configuration où la barrière est très large (wz  λdB). La méthode consiste alors à mesurer la proportion d’atomes qui traversent classiquement la barrière, qui agit à la manière d’un couteau de Foucault utilisé en optique pour la mesure des waists (Fig. 3.10). La fonction de transmission en fonction de l’amplitude U0 de la barrière, pour un laser à atomes d’énergie moyenne E est donnée par :

T (U0) = R∞ 0 Θ(E − U0)ρ(E)dE R∞ 0 ρ(E)dE (3.38)

Pour un laser caractérisé par un bruit gaussien de largeur spectrale σ, la transmission s’écrit : T (U0) = erfc U 0− E GAL  /erfc −E GAL √  (3.39)

avec erfc(x) = 1−erf(x) = (2/π)R∞ 0 e−t

2

dt, la fonction erreur complémentaire.

E laser U0 Barrière ∆E z U (Hz)0 Transmission 1 0 ∆Elaser laser

Figure 3.10: Principe de la mesure de la largeur spectrale du laser à atomes par "Fou- caultage" en énergie et transmission de la barrière en fonction de son amplitude dans le cas d’un laser à atomes idéalement monochromatique (bleu), et d’un laser à atomes réel de largeur spectrale ∆Elaser(pointillés rouges).

En réalité, même la barrière large peut donner lieu à de l’effet tunnel. Ce phénomène contribue à l’élargissement de la fonction de transmission. Les deux

effets (largeur spectrale et transmission tunnel) s’additionnent (en première ap- proximation) :

∆E ∼

q

∆Elaser2 + ∆Etunnel2 (3.40)

où ∆Etunnel ∼ √dB/πwz est l’élargissement spectral correspondant à l’effet

tunnel. Il est tracé Fig. 3.11 pour les deux largeurs de barrière utilisées.

Avec la barrière épaisse, l’élargissement est de ∆Etunnel/h ∼ 140 Hz, ce qui

signifie que l’on peut mesurer avec cette barrière des largeurs spectrales jusqu’à cette valeur.

Avec la barrière la plus fine, l’effet n’est que de ∆Etunnel/h ∼ 400 Hz. Par

conséquent, une observation claire de l’effet tunnel nécessite de travailler avec un laser à atomes extrêmement monochromatique (∆Elaser  ∆Etunnel). Dans la deuxième chambre de science, il serait envisageable de générer des barrières plus fines, dont le waist serait de l’ordre de 0, 5 µm. L’élargissement spectral vaut alors ∆Etunnel/h ∼ 1100 Hz.

U /h (Hz)0 Transmission (%) 20 40 60 80 100 500 1000 1500 2000 0

Figure 3.11: Courbes de transmission d’un laser à atomes d’énergie moyenne E0/h = 650 Hz et de largeur spectrale σ = 50 Hz à travers des barrières de waists : 3, 8 µm (tiret noir), 1, 36 µm (plein rouge) et 0, 5 µm (pointillé bleu).

3.4.2.2 Résultats obtenus

En pratique, on observe que les lasers obtenus ne se séparent pas beaucoup du condensat, même après des temps de propagation de plusieurs millisecondes. Ceci est une indication claire de la présence d’atomes très lents dans la distribution d’impulsion du laser i.e. d’une grande largeur spectrale. Afin qu’un maximum d’atomes contribuent à la mesure, la barrière épaisse est donc placée à quelques dizaines de microns d’une extrémité du condensat (typiquement 25 µm). Le laser à atomes extrait de l’autre côté du condensat nous sert de référence et nous permet de contrôler les fluctuations de l’énergie du laser, qui induisent des

variations du nombre d’atomes extraits, et ainsi de supprimer certaines mesures aberrantes.

Le condensat est réalisé pour cette expérience dans une configuration de piège hybride plus décomprimée que pour les expériences présentées précédemment afin de diminuer l’effet des interactions. Les fréquences du piège sont ω⊥ =

165 Hz et ω

= 16 Hz. Le nombre d’atomes du condensat est NBEC= 3.10 5. Son

potentiel chimique, qui peut-être mesuré par la largeur de la courbe de couplage, correspond à la valeur attendue avec ces paramètres : µBEC/h = 2, 0 ± 0, 2 kHz. Le couplage vers le laser à atomes est réalisé avec un décalage par rapport au centre du condensat δνrf= 1, 0 ± 0, 2 kHz. L’amplitude du couplage correspond à Ωrf/2π = 33, 5 Hz, soit bien dans la limite de couplage faible (Ωcrf/2π = 67 Hz, cf. § 3.3). barrière BEC laser à atomes libre atomes transmis

Figure 3.12: Transmission du laser à atomes généré à partir d’un condensat de potentiel chimique µBEC/h = 2, 0 ± 0, 2 kHz avec un décalage par rapport au centre δ = 1, 0 ± 0, 2 kHz et une amplitude de couplage Ωrf/2π = 33, 5 Hz. L’ajustement (courbe continue bleue) donne une largeur spectrale de σ = 525 ± 25 Hz et une énergie moyenne de 965 ± 20 Hz.

La largeur spectrale mesurée (Fig. 3.12) est σ = 525±25 Hz. Elle est du même ordre de grandeur que celle mesurée précédemment sur l’expérience d’Orsay [93], et ce malgré les efforts réalisés pour réduire les fluctuations magnétiques. En particulier, la mesure donne un résultat incompatible avec celui suggéré par la courbe de couplage, à savoir une largeur spectrale de l’ordre de σ ∼ 50 Hz.

3.4.2.3 Interprétation

Différentes hypothèses peuvent être considérées pour expliquer l’élargisse- ment :

1. Les interactions intra-laser peuvent être à l’origine d’un élargissement spec- tral. En particulier, la simulation numérique présentée dans l’annexe C

semble indiquer que l’effet est du même ordre de grandeur que celui ob- servé. Il s’agit toutefois d’un résultat préliminaire qui demande à être confirmé.

2. On a pu montrer que notre laser à atomes n’était pas dans l’état fonda- mental transverse du piège en mesurant son expansion transverse durant un temps de vol (cf. Fig. 3.13). À partir du théorème du Viriel, on peut obtenir le nombre d’excitations transverses moyen :

hEycini = 1 2m∆v 2 y = 1 2hE tot y i = ⊥ 2  hni +1 2  (3.41)

La mesure donne hni = 2, 3, de sorte que la fraction d’atomes condensés dans le laser est assez faible (la fraction d’atomes dans l’état fondamental transverse est n0 ∼ 0, 35) [210]. L’élargissement spectral pourrait alors

être de l’ordre de ∆E ∼ ~ωσn ∼ 300 Hz. Afin de mieux caractériser ce

défaut, une analyse entropique, telle que celle réalisée dans le groupe de D. Guéry-Odelin à Toulouse, pourrait être réalisée [88]. La diffusion sur la barrière de potentiel peut par ailleurs conduire à un couplage complexe entre les degrés de liberté transverse et longitudinaux [211].

σy

² (µm²)

t² (ms²)

Figure 3.13: Mesure de la dispersion en vitesse transverse ∆vy du laser à atomes à partir de son élargissement au cours du temps de vol : σ2

y= σy,02 +∆vy2t2. Celle-ci permet de remonter au nombre moyen de modes transverses hni ≈ 2, 3. Les résultats trouvés ici sont similaires à ceux obtenus à Orsay [86].

3. Enfin, les effets de température finie du condensat source pourraient expli- quer au moins une partie de l’élargissement observé. Une collaboration est en cours avec G. Lee de l’université de Brisbane pour effectuer une étude numérique détaillée du phénomène.

Ces trois hypothèses conduisent à des ordres de grandeur similaires de sorte qu’il est probable qu’elles contribuent chacune au phénomène observé. La pour- suite du travail sur le laser à atomes passe sans aucun doute par une étude plus approfondie de chacune de ces sources d’élargissement spectral.

Documents relatifs