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Chapitre 1. Introduction

1.2 Membranes biologiques

1.2.1 Membranes cellulaires naturelles

Pour caractériser ces interactions, un problème de taille s’impose avec la plupart des techniques d’analyse classiques, soit la complexité des membranes cellulaires naturelles. Celles-ci sont composées d’une multitude de biomolécules, principalement des phospholipides, mais aussi des stérols, des protéines transmembranaires ou périphériques, des glycolipides et des glycoprotéines.7 Les phosphoglycérolipides sont les composantes lipidiques majoritaires des cellules eucaryotes.8 Ceux-ci sont des molécules amphiphiles, constitués d’une tête polaire ainsi que de deux chaînes acyle hydrophobes rattachées par un groupement glycérol, tel qu’illustré à la Figure 1.1 dans le cas de la dimyristoylphosphatidylcholine (DMPC).

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Koczulla, A. R.; Bals, R. Drugs 2003, 63, 389-406.

7 Seddon, A. M.; Casey, D.; Law, R. V.; Gee, A.; Templer, R. H.; Ces, O. Chem. Soc. Rev. 2009, 38, 2509- 2519.

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Figure 1.1. Structure générale d’un phosphoglycérolipide, illustration de la dimyristoyl-

phosphatidylcholine (DMPC).

Ils se divisent en plusieurs catégories selon leur tête polaire : phosphatidylcholines (PC), phosphatidyléthanolamines (PE), phosphatidylsérines (PS), phosphatidylinositols (PI) et la structure la plus simple, les acides phosphatidiques (Figure 1.2). Alors que les PC et les PE sont zwitterioniques, les trois derniers sont chargés négativement à pH physiologique.8 Concernant leur portion hydrophobe, les chaînes acyle peuvent être de différentes longueurs, typiquement de 16, 18 ou 20 carbones, et sont saturées ou contiennent une ou plusieurs insaturations cis.9 Toutefois, la majorité des phosphatidylcholines, qui constituent plus de 50% des phosphoglycérolipides de la plupart des membranes cellulaires eucaryotes, contiennent une chaîne acyle insaturée.8 Les sphingolipides constituent une autre classe de lipides membranaires, le plus commun dans les membranes eucaryotes étant la sphingomyéline (SM), composée d’une tête polaire choline ou éthanolamine reliée à une unité céramide par un groupement phosphodiester (Figure 1.2). Enfin, les stérols font partie de la classe des lipides non polaires et le cholestérol en est le plus abondant dans les membranes cellulaires des mammifères (Figure 1.2).7 En moyenne, les sphingolipides et les stérols comptent respectivement pour 10-20 mol% et 30-40 mol% des lipides présents dans les membranes plasmiques des cellules eucaryotes.9

9McMullen, T. P. W.; Lewis, R. N. A. H.; McElhaney, R. N. Curr. Opin. Colloid In. 2004, 8, 459-468.

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Figure 1.2. Structure des composantes lipidiques majoritaires des membranes cellulaires

eucaryotes.

Les membranes cellulaires bactériennes sont, quant à elles, de composition très différente des membranes plasmiques eucaryotes et cette composition est variable selon s’il s’agit d’une bactérie à Gram positif ou à Gram négatif. Dans les deux cas, la membrane plasmique est constituée d’une majorité de deux types de phosphoglycérolipides, les phosphatidyléthanolamines, zwitterioniques, et les phosphatidylglycérols (PG), chargés négativement, ainsi que de cardiolipine, aussi anionique (Figure 1.3). Toutefois, les bactéries à Gram négatif contiennent généralement une plus grande proportion de PE. Un comparatif entre les compositions lipidiques de cellules érythrocytes humaines et de cellules d’Escherichia coli (E. coli), une bactérie à Gram négatif, est présenté au Tableau 1.1.10

10 Karp, G., Cell and Molecular Biology: Concepts and Experiments. 6th ed.; John Wiley & Sons: 2009; p 832.

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Figure 1.3. Structure des composantes lipidiques anioniques majoritaires des membranes

cellulaires procaryotes.

Tableau 1.1. Composition lipidique de cellules érythrocytes humaines et de cellules de la

bactérie E. coli.10 Lipide Pourcentage massique Érythrocytes humains E. coli Acide phosphatidique 1,5 0 Phosphatidylcholine 19 0 Phosphatidyléthanolamine 18 65 Phosphatidylglycérol 0 18 Phosphatidylsérine 8,5 0 Cardiolipine 0 12 Sphingomyéline 17,5 0 Glycolipides 10 0 Cholestérol 25 0 Autres 0 5

Une autre distinction majeure entre les membranes cellulaires eucaryotes et procaryotes est la présence, chez ces dernières, de couches supplémentaires à la membrane plasmique. L’ensemble de ces couches forme l’enveloppe bactérienne, différente pour les bactéries à Gram négatif et positif, tel qu’illustré à la Figure 1.4.

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Figure 1.4. Illustration schématique des parois des cellules des bactéries à Gram positif (A)

et à Gram négatif (B). Figure adaptée de la référence 11.

L’enveloppe cellulaire des bactéries à Gram négatif est un système à deux membranes (Figure 1.4A). La membrane plasmique se retrouve à l’intérieur et une membrane externe forme une barrière supplémentaire. Tandis que la partie interne de cette paroi est constituée de phospholipides, le segment externe de la bicouche est formé de glycolipides, principalement de lipopolysaccharides (LPS), un composé responsable de la toxicité associée aux bactéries à Gram négatif. Trois sections composent les LPS : un lipide, un noyau et l’antigène O. Le premier, le lipide A, sert à ancrer le LPS dans le feuillet

11 iKNOWLEDGE. Cell Structure and Function. https://clinicalgate.com/cell-structure-and-function/ (page consultée le 15 juin 2017).

A) Bactérie à Gram négatif

Membrane externe Peptidoglycane Périplasme Membrane plasmique Protéines Lipopolysaccharides

B) Bactérie à Gram positif

Membrane plasmique

Acides teichoïques

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externe de la membrane cellulaire, le noyau constitue la partie centrale du LPS et est formée de deux sucres, l’acide céto-désoxyoctonoïque et un heptose et enfin, l’antigène O est une longue chaîne de glucides, allant jusqu’à 40 unités de sucre, et recouvre la surface bactérienne. Cette couche étant hydrophile, elle sert notamment à repousser les molécules hydrophobes.12 Dans cette membrane se retrouve aussi des protéines, généralement des lipoprotéines, aux fonctions peu connues, et des tonneaux β, une structure protéique de forme cylindrique et composée de feuillets β qui permet la diffusion passive de petites molécules à travers la membrane externe.13 Entre les deux bicouches des bactéries à Gram négatif se situe une zone nommée périplasme. Celle-ci contient une couche solide de peptidoglycane (ou muréine), ainsi qu’une solution de protéines. Le peptidoglycane est formé de chaînes linéaires de deux unités sucres alternées, la N-acétyl-glucosamine (NAG) et l'acide N-acétyl-muramique (NAM). Ces unités sont jointes par des liaisons glycosidiques β-1,4 alors que les chaînes linéaires sont reliées par des ponts peptidiques de trois à cinq acides aminés, le tout dans une structure en maillage. Cette couche sert, entre autres, à conserver l’intégrité structurale de la cellule et à la protéger de la pression osmotique du cytoplasme.12

La composition et la structure de la paroi cellulaire des bactéries à Gram positif comportent certaines grandes différences avec celle des bactéries à Gram négatif (Figure 1.4B). D’abord, les bactéries à Gram positif ne contiennent pas de membranes externes; c’est la couche de peptidoglycane qui est directement exposée à l’extérieur de la cellule. De plus, cette zone forme une paroi très épaisse, de 15 à 80 nm, en comparaison à la couche d’environ 2 nm dans le cas des membranes des bactéries à Gram négatif. Cette paroi agit ainsi comme barrière protectrice de la cellule bactérienne et dicte sa forme. D’autres composés sont aussi présents dans cette région, tels que les acides teichoïques et lipotéichoïques qui permettent, entre autres, aux peptidoglycanes de s’attacher à la membrane cellulaire.12,13

12 Neidhardt, F. C.; Ingraham, J. L.; Schaechter, M., Physiologie de la cellule bactérienne: une approche moléculaire. Masson: 1994; p 487.

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