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Chapitre 1. Introduction

1.2 Détermination de la spécificité de la voie de signalisation ERK/MAPK

1.2.1 La présence de plusieurs membres à chaque niveau de la cascade d’activation

1.2.1.1 MEK1 et MEK2

Au niveau des MAP2K, les kinases hautement homologues MEK1 et MEK2 sont responsables de l’activation de ERK1 et ERK2. MEK1 et MEK2 sont similaires à 80% dans la totalité de leur séquence et 90% similaire dans leur domaine kinase (Figure 1-3) (Roskoski, 2012). Ainsi, il a été démontré que ces deux kinases possèdent des fonctions redondantes dans l’épiderme (Scholl et al., 2007). Par contre, il existe deux régions de MEK1 où l’homologie avec MEK2 est réduite, soit dans la portion N- terminale et dans sa région riche en prolines située dans le domaine catalytique (Figure 1-3) (Rubinfeld and Seger, 2005). Ces deux domaines sont essentiels aux fonctions de MEK1/2 puisqu’’ils affectent leur localisation intracellulaire ainsi que leur efficacité à phosphoryler ERK1/2 (Rubinfeld and Seger, 2005).

La portion riche en prolines de MEK1 contient un site de phosphorylation S298 catalysé par PAK1 qui est important dans certains contextes cellulaires (Figure 1-3) (Coles and Shaw, 2002). Bien que ce résidu soit également présent sur MEK2, il ne semble pas être reconnu et phosphorylé par PAK1 (Catalanotti et al., 2009; Park et al., 2007). La phosphorylation de la S298 de MEK1 n’est pas régulée par les facteurs de croissance (Catling et al., 1995; Slack-Davis et al., 2003). Par contre, elle est fortement stimulée durant l’adhésion aux protéines de la matrice extracellulaire et requise pour l’activation de MEK1 en réponse à la fibronectine (Eblen et al., 2002; Slack-Davis et al., 2003). Cette phosphorylation du résidu Ser298 de MEK1 par PAK1 pourrait sensibiliser MEK1 à son activation par RAF et ainsi permettre d’augmenter l’efficacité de la signalisation ERK1/2 (Coles and Shaw, 2002; Frost et al., 1997). De plus, PAK1 peut activer directement MEK1 par un mécanisme indépendant de

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l’activation conventionnelle par RAS/RAF. Plus précisément, la phosphorylation in vitro de la Ser298 de MEK1 par PAK1 stimule l’autophosphorylation de MEK1 dans sa boucle d’activation ce qui favorise la phosphorylation et l’activation de ERK1/2 .

Figure 1-3. Représentation schématique de la séquence protéique de MEK1 et MEK2. La séquence protéique de MEK2 est similaire à 90% à celle de MEK1. Deux régions de MEK1 démontrent une homologie réduite avec MEK2, soit la partie N-terminale et le domaine riche en prolines. La partie N-terminale de MEK1/2 contient un site d’ancrage pour ERK1/2 (EDS) et une séquence d’export nucléaire (NES). Le domaine riche en prolines est impliqué dans les interactions avec les membres de la famille RAF. Le domaine riche en proline de MEK1 contient un site de phosphorylation par PAK1 (Ser298) qui stimule son activité enzymatique. Par ailleurs, les résidus Thr situés en positions 286 et 292 sont impliqués dans une boucle de rétroaction négative lorsque ERK1/2 est activée. De plus, les résidus Ser 298, Thr 286 et Thr292 situés dans le domaine riche en proline de MEK1 ne sont pas conservés dans la séquence protéique de MEK2. N-t, N-terminal; EDS, ERK docking sites = site de liaison à ERK; NES, nuclear export signal = séquence d’export nucléaire; BA, boucle d’activation; Pr, région riche en proline; C-t, C-terminal.

Ce domaine riche en prolines est également impliqué dans l’interaction avec les membres de la famille RAF (Catling et al., 1995; Dang et al., 1998; Eblen et al., 2002; Nantel et al., 1998; Papin et al., 1996). Plus précisément, la phosphorylation de la Th292 de MEK1 est impliquée dans l’interaction entre MEK1 et RAF-1 (Catling et al., 1995). Cette formation de complexes entre les membres de la voie ERK augmente l’efficacité de signalisation. PAK1 peut favoriser la phosphorylation des résidus Th292 et S298 de MEK1 in vivo impliqués dans la formation du complexe entre MEK1 et RAF-1 (Frost et al., 1997). MEK2 n’est pas apte à former ces complexes tertiaires puisqu’il n’a pas ces résidus phosphorylables dans sa région riche en prolines (Figure 1-3) (Jelinek et al., 1994).

15 Les résidus Thr 286 et 292 présents dans le domaine riche en prolines de MEK1 sont impliqués dans l’arrêt de la signalisation ERK (Figure 1-3) (Catalanotti et al., 2009). Ces deux résidus thréonine sont absents chez MEK2 suggérant que cette divergence de séquences entre ces deux kinases leur permettent d’accomplir des fonctions différentes (Rubinfeld and Seger, 2005). Récemment, il a été démontré que suivant l’activation de la voie ERK/MAPK en réponse aux facteurs de croissance, le résidu Thr 292 de MEK1 est phosphorylé par ERK ce qui engendre un arrêt de la signalisation en créant un site potentiel de liaison aux phosphatases (Catalanotti et al., 2009). Cette régulation négative de la voie ERK/MAPK dépendante de la phosphorylation de la Thr 292 de MEK1 peut être conférée à MEK2 via son hétérodimérisation avec MEK1 (Catalanotti et al., 2009; Kocieniewski and Lipniacki, 2013).

La portion N-terminale de MEK1 et MEK2 contient un site d’ancrage pour ERK1/2 (EDS) et une séquence d’export nucléaire (NES) (Figure 1-3) (Fukuda et al., 1996; Fukuda et al., 1997). Dans une cellule quiescente, ces deux motifs permettent de séquestrer ERK1/2 dans le cytoplasme. Par contre, l’association entre MEK1 et ERK est augmentée suivant la phosphorylation de la S298 dans la région riche en proline de MEK1, alors que la phosphorylation de la T292 de MEK1 permet la dissociation du complexe (Eblen et al., 2004). Ainsi, cette portion riche en proline unique à MEK1 permet de moduler l’accessibilité de la région N-terminal et donc de réguler l’association avec ERK. Le relâchement du complexe MEK1-ERK permet à ERK de migrer au noyau (Skarpen et al., 2008). L’accesibilité de la région N-terminal de MEK2 n’est pas régulée et donc son association avec ERK est favorisée ce qui retient la signalisation au cytoplasme (Frost et al., 1997; Skarpen et al., 2008). Ainsi, les différences protéiques entre MEK1 et MEK2 affectent leur capacité à former un complexe avec ERK ce qui engendre des réponses biologiques différente.

Il a été suggéré que dans certains types cellulaires, les kinases MEK1 et MEK2 interviendraient dans des étapes distinctes du cycle cellulaire; MEK1 permettrait des réponses prolifératives alors que MEK2 induirait un arrêt de croissance en phase G1/S (Ussar and Voss, 2004). Plus précisément, l’implication de MEK1 dans la prolifération serait dépendante de sa capacité à transférer ERK au noyau suivant sa phosphorylation sur les résidus Thr 292 et Ser 298 (Skarpen et al., 2008). Il a également été démontré que seulement MEK1 est activée dans les macrophages et les cellules Swiss 3T3 en réponse à la bombésine et au TNFα (Seufferlein et al., 1996; Winston et al., 1995). En

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accord avec cette observation, il a été observé au laboratoire que la voie ERK n’est pas activée en réponse à la bombésine dans les fibroblastes Mek1-/- (M. Tremblay, S.Roy et J.Charron non publié).

Par ailleurs, il a été rapporté que MEK2 est activé spécifiquement par le lactosylcéramide dans les cellules humaines musculaires lisses de l’aorte ou par l’oestradiol dans le cortex cérébral de la souris (Bhunia et al., 1996; Setalo et al., 2002). Finalement, Mek1b, qui provient d’un épissage alternatif du gène Mek1, serait activé lors de certaines stimulations cellulaires et interviendrait plus spécifiquement dans la fragmentation de l’appareil de Golgi (Shaul et al., 2009; Shaul and Seger, 2006; Wortzel and Seger, 2011).

La non-redondance entre les kinases MEK1 et MEK2 lors du développement embryonnaire murin a été démontrée au laboratoire par la génération et la caractérisation de lignées de souris mutantes pour ces deux gènes. En effet, l’inactivation de Mek1 chez la souris cause une mortalité embryonnaire, alors que les mutants Mek2-/- survivent sans aucun phénotype apparent (Belanger et

al., 2003; Catalanotti et al., 2009; Giroux et al., 1999b). Ainsi, Mek2 ne peut compenser la perte de

Mek1 lors du développement embryonnaire ce qui fournit une évidence génétique de la non-

redondance complète entre ces deux kinases.