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Dans l’ensemble, la chronostratigraphie précise des dépôts du Tortonien-Messinien dans les bassins de Boudinar et d'Arbaa Taourirt reste mal définie. L’un des buts de cette étude est d'établir un cadre biostratigraphique précis des dépôts miocènes dans ces bassins en se basant sur les analyses des foraminifères planctoniques et des nannoplanctons calcaires, combinés avec les datations 40Ar/39Ar des niveaux volcaniques interstratifiés dans les dépôts des unités I et II. Par ailleurs, les changements paléobathymétriques et paléoenvironnementaux dans ces bassins sont évalués sur la base des analyses de foraminifères benthiques et de pollens. Ces analyses, regroupées, nous permettent d’affiner l'histoire des communications entre l’Atlantique et la Méditerranée par le Couloir Nord Rifain au Miocène supérieur.

Cinq coupes ont été étudiées dans le bassin de Boudinar, situées dans la partie occidentale du bassin. Ces coupes sont du Sud vers le Nord : Beni Bou Ya’Koub, Irhachâmene, Moulay

el’Arbi, Aït Abdallah et Sidi Haj Youssef (Fig. II-2, II-3). La révision biostratigraphique des dépôts marins néogènes du bassin de Boudinar est basée sur l’étude des trois coupes d’Irhachâmene, de Moulay el’Arbi et d’Aït Abdallah. Ces coupes ont été échantillonnées pour l’analyse des flores de nannoplanctons calcaires et des foraminifères planctoniques (43

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échantillons). Sur les coupes d'Irhachâmene et de Moulay el’Arbi, quatre échantillons additionnels ont été collectés dans les tufs volcaniques pour datations numériques (40Ar/39 Ar). Les coupes de Moulay el’Arbi et de Sidi Haj Youssef ont été également prélevées pour l'analyse des foraminifères benthiques (26 échantillons), afin de tracer l'évolution paléobathymétrique du bassin de Boudinar. Les coupes d’Irhachâmene, Moulay el’Arbi et

Sidi Haj Youssef ont été échantillonnées pour des analyses palynologiques, afin de préciser les

paléoenvironnements continentaux autour du bassin de Boudinar au Miocène. Finalement, La coupe de Beni Bou Ya’Koub a été également étudiée pour la description des dépôts de base. Dans le bassin de l'Arbaa Taourirt, deux coupes ont été étudiées, une dans une petite vallée le long de l'Oued Nékor au Nord du village de l'Arbaa Taourirt (coupe Nord Arbaa), et une autre au Sud (coupe d'Azroû Zazîrhîne). Ces deux coupes ont été échantillonnées pour les analyses biostratigraphiques (nannoplanctons calcaires et foraminifères planctoniques ; 9 échantillons).

1. Biostratigraphie

Les nannoplanctons calcaires ont été étudiés dans la fraction entre 2 à 30 μm et séparés par la méthode de décantation en utilisant une solution de 7% d’H2O2. Des « Smear-slides » ont été préparées avec le baume de Canada (« Canada balsam ») et analysés au microscope Olympus à grossissement 1200x (« Olympus transmitting light at 1200x magnification »). Les déterminations spécifiques sont faites par Mme Mihaela Melinte-Dobrinescu de l’institut

national de géologie marine et géoécologie (GeoEcoMar) à Bucarest (Romania). La plupart des échantillons présentent des préservations faibles à modérées, avec beaucoup de remaniements de faunes du Crétacé supérieurs et de l’Eocène. L'identification des taxons suit Perche-Nielsen (1985) et Young et al. (2003). La subdivision zonale utilisée correspond à la zonation de Martini (1971) (« NN : Neogene Nannoplankton »). Les âges des occurrences (« LOs : lowest occurrence ; HOs : highest occurrence ») des principales espèces suivent Hilgen et al. (2012). Des calibrations d’âges additionnelles (Lourens et al., 2004 ; Raffi et al., 2006) ont été également utilisées pour les espèces Amaurolithus delicatus et Discoaster pentaradiatus respectivement.

Concernant les foraminifères planctoniques, des échantillons de sédiment ont été tamisés (mailles entre 2 mm et 63 μm). La préservation était pauvre à modérée dans la plupart des échantillons. Les spécimens ont été identifiés par Mr. Frédéric Quillévéré de l’Université de Lyon 1 (France), suivant les concepts et nomenclatures taxonomiques de Kennett et Srinivasan

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(1983). Les calibrations des Bio-événements suivent Hilgen et al. (2012) et la subdivision zonale utilisée dans ce travail correspond à celle de Berggren et al. (1995).

2. Paléobathymétrie

Les foraminifères benthiques ont été séparés dans la fraction >125 μm. Au moins 250 à 300 spécimens ont été sélectionnés, identifiés, et comptés pour déterminer les abondances relatives d'espèces. Les déterminations spécifiques sont faites par Mme Hara Drinia de la faculté de Géologie et Géoenvironnement d’Athens (Grèce). Les échantillons à foraminifères abondants ont été divisés en utilisant un micro-diviseur obtenant des totaux de près de 250 spécimens. Les paléobathymétries sont déterminées en utilisant les fossiles et les modèles de distribution modernes de certaines faunes et taxons benthiques indicateurs. La terminologie bathymétrique suit Van Morkhoven et al. (1986) : inner shelf = 0-50 m, middle shelf = 50-100 m, outer shelf = 100-200 m, upper bathyal = 200-600 m, middle bathyal= 600-1000 m, lower bathyal = 1000-2000 m, abyssal = 1000-2000-6000 m. Les concepts taxonomiques et les estimations des paléobathymétries sont basés sur des références multiples pour les sections du Miocène

(Cushman et Cahill, 1933 ; Schnitker, 1970 ; Gibson, 1983 ; van Morkhoven et al., 1986 ; Olsson et al., 1987 ; Snyder et al., 1988 ; Miller et al., 1996).

3. Pollens

Pour l'analyse de pollen, des échantillons d'argile ont été traités suivant une méthode standard, laissant séparer les grains de pollens des particules minérales. Ce traitement utilise l’HCL et l'HF froids pour éliminer les carbonates et la silice, suivis d’une procédure d'enrichissement du résidu en utilisant ZnCl2 (densité > 2). Finalement, Le résidu a été mélangé avec de la glycérine et monté sur des lames minces. Seulement 8 échantillons provenant de la coupe d'Irhachâmene ont fourni assez de grains de pollen pour l'analyse quantitative (IRA4, 5, 6, 8, 9, 11, 14 et 18 ;

Fig. II-2). Les déterminations spécifiques sont faites par Mme Séverine Fauquette de l’Institut des Sciences de l'Évolution à l’Université de Montpellier (France).

Environ 150 grains de pollen ont été dénombrés pour chaque échantillon analysé à l'exception de Pinaceae et de Pinus indéterminables. Ce dernier est généralement surreprésenté en raison de sa production prolifique et sa surabondance lors de son transport par air et eau. Dans les sédiments marins côtiers, les pollens fournissent un enregistrement fiable des ceintures de végétation régionales, comme il est établi sur des sédiments récents (Heusser et Balsam, 1977 ; Heusser, 1988 ; Beaudouin et al., 2005, 2007). Cependant, la proportion de grains de pollen

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du Pinus est souvent contrôlée par la distance par rapport au littoral en raison de leur flottabilité élevée (Heusser, 1988 ; Beaudouin et al., 2005). En conséquence, la proportion de grains de pollen du Pinus peut fournir des indications sur la position et l’éloignement du site par rapport au littoral.

4. Datation 40Ar/39Ar

Des cristaux de biotites ont été séparées à partir des échantillons volcanoclastiques prélevés sur les coupes d'Irhachâmene et de Moulay el’Arbi (échantillons MA-11, MA-20, IRA-3 et KET14-3). Après broyage et tamisage des échantillons, les cristaux ont été choisis dans la fraction entre 100 et 200 μm. Ces derniers ont été concentrés en utilisant le séparateur magnétique de Frantz. Les cristaux séparés ont été nettoyés par l’acide nitrique 1N pour dissoudre les impuretés de carbonates, puis rincés dans des bains ultrasoniques successifs avec de l'eau distillée et de l'alcool pur. Finalement, les grains ont été choisis sous un microscope binoculaire.

Les échantillons ont été irradiés dans le noyau du réacteur nucléaire Triga Mark II de Pavia (Italie) avec plusieurs aliquots standards de sanidine de Taylor Creek (28.34 ± 0.08 Ma ; Renne

et al., 1998) comme moniteur de flux. Les interférences isotopiques d'argon sur K et Ca ont été déterminées par irradiation des sels purs KF et CaF2, à partir desquels les facteurs de correction suivants ont été obtenus : (40Ar/39Ar) K = 0.00969 ± 0.00038, (38Ar/39Ar) K = 0.01297 ± 0.00045, (39Ar/37AR) Ca = 0.0007474 ± 0.000021 et (36Ar/37AR) Ca = 0.000288 ± 0.000016. Les analyses d'Argon ont été exécutées à Géosciences Montpellier (France) par Mr. Philippe

Münch, avec un dispositif analytique qui se compose d’un laser IR-CO2 de 100 kHz utilisés à

une puissance de 3 à 15% pour chauffer les échantillons pendant 60 secondes ; un système d'objectifs pour la focalisation du faisceau ; une chambre en acier maintenue à 10-8-10-9 bar, avec un détenteur de cuivre dans lequel des trous aveugles de 2 mm de diamètre ont été fraisés ; une ligne d'entrée pour la purification des gaz comprenant deux acquéreurs de Zr-Al ; un spectromètre de masse multi-collecteur (Argus VI de Thermo-Fisher). La discrimination de masse pour le spectromètre a été suivie en analysant un volume de pipette d'air ; les valeurs mesurées varient de 0.999037 ± 0.13% à 0.99998 ± 0.14%.

Des aliquots de cinq à dix grains de biotite ont été placés dans les trous du support en cuivre et ont été chauffés par étapes. Une calibration de l’appareil est exécutée tous les trois échantillons analysés. Les données brutes de chaque étape et du calibrage ont été traitées et les âges ont été

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calculés en utilisant le logiciel ArArCALC (Koppers, 2002). Les critères pour définir les âges de plateau sont : (1) les étapes de plateau devraient contenir au moins 70% d’39Ar libéré, (2) il devrait y avoir au moins trois étapes successives dans le plateau et (3) l'âge intégrée du plateau doit concorder avec chaque âge apparent du plateau dans un intervalle de confiance de 2σ. Toutes les incertitudes subséquentes sont au niveau de 2σ y compris l'erreur sur le facteur d'irradiation J.