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Niveaux d’irradiation en imagerie thoracique double énergie

2. Matériels et Méthodes

réduire la dose délivrée tout en gardant une qualité d’image diagnostique [23]. Cependant, aucune étude n’a, à notre connaissance, encore décrit l’utilité et l’applicabilité de l’IR en scanographie double énergie simple source.

Notre hypothèse est que grâce à l’IR, les angioscanners pulmonaires acquis en double énergie et simple source avec une dose d’irradiation abaissée à celle d’un examen simple énergie maintiendraient un niveau qualitatif et quantitatif équivalent, ce qui lèverait une des limites principales de la TDE et autoriserait une plus large utilisation de la technique.

L’objectif de ce chapitre est donc de valider la qualité d’image objective et subjective des CTPA acquis en double énergie avec IR à une dose d’irradiation identique à celle d’un examen simple énergie.

2. Matériels et Méthodes

Cette étude a reçu l’accord de notre comité d’éthique local, et un consentement écrit a été obtenu pour chaque participant.

2.1 Population

Cinquante adultes (ci-après le groupe DE-IR) adressés à notre service pour un CTPA dans le cadre d’une suspicion clinique d’embolie pulmonaire ont été inclus de manière prospective et consécutive entre mars et mai 2013. Les seuls critères d’inclusion étaient un âge supérieur à 18 ans et une suspicion clinique d’embolie pulmonaire. Les critères d’exclusion étaient les contre-indications classiques à l’injection de produit de contraste iodé (insuffisance rénale sévère avec clairance MDRD de la créatinine inférieure à 30ml/min, allergie prouvée aux produits de contraste iodés), la grossesse, l’impossibilité de donner un consentement, une agitation incontrôlable et l’incapacité de maintenir les bras au-dessus de la tête durant le temps de l’examen.

Pour chaque patient, le poids et la taille au moment de l’examen ont été relevés afin de pouvoir calculer l’indice de masse corporelle (IMC).

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Trente patients d’une précédente étude prospective non encore publiée, qui ont été examinés entre juin et septembre 2012, ont constitué le groupe de référence (ci-après le groupe DE-FBP). Les critères d’inclusion et d’exclusion étaient identiques. Ils ont bénéficié d’un angioscanner pulmonaire en double énergie simple source selon le protocole classique « pleine dose », acquis sur la même machine et reconstruit en utilisant la rétroprojection filtrée (FPB).

Enfin, 35 patients ayant également une suspicion clinique d’embolie pulmonaire ont été inclus de manière prospective et consécutive entre mai et juin 2013 afin de constituer un groupe de comparaison (ci-après le groupe SE-IR). Les critères d’inclusion et d’exclusion étaient identiques. Ces patients ont bénéficié d’un angioscanner pulmonaire en simple énergie, acquis à 100kV sur la même machine.

2.2 Acquisition

Les angioscanners des 3 groupes ont tous été réalisés sur le même scanner simple source (Discovery CT750 HD, GE Healthcare, Milwaukee, Wisconsin, USA).

Pour les 50 patients du groupe DE-IR, le protocole d’acquisition en double énergie a été spécialement adapté afin d’aboutir à une dose d’irradiation similaire à celle délivrée par un angioscanner simple énergie acquis à 100kV sur la même machine, à savoir un PDL de 260 mGy.cm (seuil obtenu par un recueil des doses de cet examen dans notre service pendant les 3 mois précédant l’étude, via le serveur d’archivage de dose DACS DoseWatch). Dans ce but, le courant fixe a été abaissé à 275mA et une reconstruction itérative (ASIR Adaptive Statistical

Iterative Reconstruction, GE Healthcare, Milwaukee, Wisconsin, USA) a été utilisée avec un niveau d’itération fixé à 50%. Le temps de reconstruction était d’environ 20 images par seconde, soit moins de 30 secondes par examen. Les autres paramètres d’acquisition étaient : tensions à 80 et 140kV, temps de rotation de 0,6 seconde (eq. 165mAs), collimation de 64 x 0,625mm, pitch de 1,375, injection automatique de 50ml de Iomeprol 400 mg/ml (Iomeron, Bracco, Milan, Italie) à un débit de 3,5ml/sec suivie de 30ml de sérum salé isotonique, déclenchement par méthode de suivi du bolus avec une ROI placée dans le tronc de l’artère pulmonaire et un seuil à 60 Unités Hounsfield (UH). Ce seuil est inférieur à celui habituel en raison d’un temps de déclenchement légèrement plus long en DE.

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Pour les 30 patients du groupe de référence DE-FBP, les paramètres étaient identiques, à l’exception de la charge qui était fixée à 375mA (eq. 225mAs) et de la méthode de reconstruction des images qui était uniquement de la rétroprojection filtrée.

Pour les 35 patients du groupe de comparaison SE-IR, le protocole CTPA habituel a été utilisé, à savoir : tension à 100kV, modulation automatique du courant avec un maximum à 430mA (indice de bruit à 25), temps de rotation de 0,6 seconde (eq. 258 mAs maximum), collimation de 64 x 0,625mm, pitch de 1,375, paramètres d’injection identiques avec un seuil de déclenchement de l’acquisition à 100UH (seuil habituel). Les images étaient reconstruites avec la technique de reconstruction itérative ASIR et un niveau d’itération fixé à 50%.

2.3 Analyse des images

2.3.1 Analyse qualitative

Tous les dossiers ont été analysés qualitativement par deux radiologues spécialisés en imagerie thoracique (MO et AL, avec respectivement 7 et 5 ans d’expérience en tomodensitométrie) sur une console dédiée Advantage Workstation en version 4.6 et à l’aide du logiciel GSI Viewer (GE Healthcare, Milwaukee, Wisconsin, USA). Une évaluation subjective de la qualité d’image globale selon une échelle à 5 niveaux (tableau 1) a été menée de manière indépendante par les deux lecteurs. Les notes supérieures ou égales à 3/5 étaient considérées comme étant de qualité diagnostique.

Tous les examens ont été analysés une seule fois sur les reconstructions médiastinales, c’estàdire en filtre mou. Les images étaient affichées en fenêtre parenchymateuse (avec un centre à -700UH et une largeur à 1500UH) et médiastinale (centre à 50UH et largeur à 350UH), et le contraste pouvait être adapté de manière dynamique par le lecteur. Pour les groupes DE-IR et DE-FBP, la note finale était attribuée uniquement après analyse dynamique des images monochromatiques entre 40 et 100keV (concept de « spectral-surfing ») et une lecture attentive des images iode-spécifiques dans les plans axial, coronal et sagittal.

Les éventuels cas discordants, définis par un écart de note d’au moins 2 points entre les deux lecteurs, devaient être ré-évalués par un troisième lecteur expert (MYJ, avec 25 ans d’expérience en tomodensitométrie thoracique).

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1

Opacification minime ou absente

Examen non diagnostique

2

Opacification faible

Gros troncs artériels visibles sans diagnostic de certitude

3

Opacification limitée

Suffisante pour un diagnostic

4

Bonne opacification

Jusqu’aux artères segmentaires

5

Excellente opacification

Jusqu’aux artères sous-segmentaires Tableau 1

Echelle qualitative en 5 niveaux utilisée pour l’évaluation des CTPA.

2.3.2 Analyse quantitative

L’analyse quantitative a été effectuée par le même opérateur (MO) sur les reconstructions monochromatiques à 65keV pour les groupes DE-IR et DE-FBP, et sur les reconstructions médiastinales en filtre mou pour le groupe SE-IR. Des mesures systématiques de l’atténuation en UH et de la déviation standard ont été réalisées pour chaque patient à l’aide de régions d’intérêt circulaires moyennant au minimum 5mm² et intéressant le tronc de l’artère pulmonaire, une artère pulmonaire principale (droite ou gauche, selon le côté ayant le moins d’artéfact de durcissement de faisceau), une artère pulmonaire lobaire inférieure (droite ou gauche) et un muscle érecteur du rachis dorsal non atrophique. Pour chacune de ces 4 positions, les mesures ont été répétées 3 fois et moyennées.

L’atténuation artérielle moyenne et le bruit moyen (correspondant à la moyenne des déviations standards) ont été utilisés pour calculer le rapport signal sur bruit (SNR), correspondant à la division de l’atténuation moyenne par le bruit moyen, et le rapport contraste sur bruit (CNR), calculé selon la formule (atténuation artérielle moyenne - atténuation du muscle)/bruit moyen décrite par Yuan et al. [13].

2.4 Analyse Statistique

L’agrément entre les évaluations qualitatives des deux lecteurs a été calculé à l’aide d’un coefficient Kappa de Cohen linéaire. Les données qualitatives ont été analysées avec un test non paramétrique de Kruskal-Wallis. Les données qualitatives ont été comparées selon un test

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D’éventuelles corrélations entre la qualité d’image, le SNR, le CNR et l’IMC ont été recherchées dans le groupe DE-IR par un test de Pearson.

Un p<0.05 était considéré comme significatif.

3. Résultats

Tous les résultats sont donnés, sauf si mention contraire, sous la forme “moyenne ± déviation standard”.

3.1 Population

Les populations des 3 groupes d’étude avaient des caractéristiques démographiques similaires : l’âge, le sex-ratio et l’IMC n’étaient ainsi pas différents entre les 3 groupes, comme rapporté dans le tableau 2.

DE-IR

50 patients

DE-FBP

30 patients

SE-IR

35 patients p

Age

(ans) 64.8 ±16.2 (30 – 92) 64.4 ±18.6 (21-91) 65.8 ±15.5 (35-87) 0.9159 (Student’s t test)

IMC

25.6 ±4.5 (15.2 – 35.3) (17.6 26.2 ±4.6 – 35.4) (18.6-36.1) 25.7 ±4.4 0.5984 (Student’s t test)