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Intérêt de l’imagerie dans la détection des complications post-greffe pulmonaire

4. Complications immunologiques

4. Complications immunologiques

L’incidence du rejet chronique est plus élevée après transplantation pulmonaire qu’après transplantation d’autres organes solides ; en effet, les couples donneur-receveur ne sont pas appariés selon les antigènes du complexe majeur d’histocompatibilité (Ag HLA). Le poumon contient de multiples cellules immuno-compétentes, présentant les allo-antigènes du donneur aux lymphocytes du receveur : le processus de reconnaissance immunitaire est initié dès la mise en place du greffon.

4.1 Rejet hyperaigu

Il survient dès le déclampage, et se traduit par une congestion massive et brutale de tout l’organe transplanté avec arrêt définitif de sa fonction. Cette complication est donc toujours fatale au patient. Le mécanisme est lié à la présence chez le receveur d’anticorps dirigés contre des épitopes présents sur les cellules endothéliales de l’organe greffé, entraînant une fixation tissulaire vasculaire du complément, avec vasoconstriction initiale intense dans le greffon puis coagulation en masse [22].

La radiographie, rarement réalisée, retrouverait une infiltration homogène et diffuse de tout le poumon greffé [13].

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4.2 Rejet aigu

Il survient à partir du cinquième jour, le patient étant protégé jusqu’à cette date par les perfusions de sérum anti-lymphocytaire. 80% des rejets surviennent dans les trois premiers mois, et particulièrement le 8ème et 9ème jour après la greffe [21]. L’incidence du rejet aigu prouvé par biopsie pendant la première année post-opératoire se situe entre 40 et 50% [23-25], puis la prévalence du rejet diminue progressivement pour atteindre un taux faible au-delà de la première année. Les manifestations cliniques de rejet, inconstantes, sont non spécifiques et peuvent comporter dyspnée d’effort puis de repos, une toux, une fièvre, une baisse du VEMS, voire une hypoxémie de survenue aiguë. Les principaux diagnostics différentiels sont la surcharge volumique et l’infection. Le diagnostic formel nécessite un prélèvement histologique par biopsie transbronchique, qui mettra en évidence un infiltrat lymphocytaire péri-vasculaire parfois accompagné d’une infiltration du chorion péri-bronchique [10].

La radiographie de thorax peut être normale. Parfois, l’association de lignes septales et d’épanchements pleuraux sans augmentation concomitante de l’index cardio-thoracique ou de redistribution vasculaire est en faveur du rejet aigu, avec une sensibilité de 68% et une spécificité de 90% [15, 26].

Les signes tomodensitométriques sont le reflet de l’infiltration cellulaire constatée en histologie et associent un oedème interstitiel avec un aspect de verre dépoli diffus (souvent de distribution basale), puis des condensations alvéolaires péri-hilaires, des épaississements septaux, une diminution de volume du greffon pulmonaire, et parfois des épanchements pleuraux des bases. L’atteinte est bilatérale et symétrique (figure 14) [19]. Ces signes scanographiques sont rapportés avec une sensibilité de 35 à 65% pour le diagnostic de rejet aigu ; l’absence d’opacités en verre dépoli permet d’exclure ce diagnostic [13].

Quand un œdème interstitiel survient entre le cinquième et le dixième jour, les signes TDM se superposent à ceux de l’œdème de reperfusion, mais la chronologie des événements est évocatrice. Des opacités ou des épanchements septaux qui apparaissent, se majorent ou persistent au-delà du cinquième jour doivent faire évoquer le diagnostic de rejet aigu [19]. L’amélioration rapide des signes après renforcement de l’immunosuppression constitue un test diagnostique (figure 15).

108 Figure 14

Patient greffé bi-pulmonaire il y a 1 mois. Infiltrat en verre dépoli péri-bronchique, épaississements des septa inter-lobulaires, épanchements pleuraux bilatéraux par suffusion : rejet aigu.

Figure 15

Même patient que la figure 14 : à gauche, radiographie initiale avec images interstitielles et verre dépoli diffus bilatéral, auxquelles se surajoutent des opacités alvéolaires de prédominance péri-hilaires et des épanchements pleuraux des bases. A droite, radiographie de contrôle 3 jours après renforcement des immunosuppresseurs : amélioration rapide confirmant a posteriori le diagnostic de rejet aigu.

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4.3 Rejet chronique

Il peut survenir à partir du 4ème mois mais est rare avant le 6ème mois. Il affecte jusqu’à 60% des receveurs après 5 ans [27]. Il est ainsi la première cause de décès à long terme [28]. Sa manifestation est la bronchiolite oblitérante (BOS), caractérisée par un tissu de granulation organisé en polypes obstruant la lumière des bronchioles, associé à des degrés divers à une fibrose interstitielle et à une vasculopathie chronique. Le rejet aigu est le principal facteur de risque de BOS. Les autres facteurs de risque sont l’infection pulmonaire à CMV ou autre virus et la discordance de groupe HLA [24].

Cliniquement le patient présente une dyspnée croissante, une toux productive et une baisse progressive du VEMS.

A la radiographie, différents signes peuvent être observés : hyperinflation pulmonaire, diminution de la vascularisation périphérique, atélectasie sous-segmentaire, opacités linéaires et bronchectasies. Souvent, la radiographie est normale.

Les signes tomodensitométriques sont avant tout ceux de l’obstruction bronchiolaire, c'est-à-dire une distension avec hypodensité relative des zones de parenchyme situées en aval de l’obstruction. La distension s’accompagne d’une redistribution vasculaire tardive vers les territoires normalement ventilés. Le parenchyme présente ainsi un aspect hétérogène dit « en mosaïque ». Cet aspect caractéristique est démasqué sur des acquisitions réalisées en expiration, en raison du trappage aérien dans les zones pathologiques (figure 16). Si ce signe semble reproductible [29] sous couvert cependant d’un monitoring précis de l’expiration, il est cependant d’une sensibilité non optimale, variable selon les études et comprise entre 50 et 83% [28, 30, 31]. Une modification des bronches proximales est souvent associée aux signes parenchymateux : les bronches sont dilatées et malaciques, se collabant en expiration, avec parfois des bronchectasies et un épaississement des parois bronchiques (figure 17). Des épaississements septaux et des réticulations sous-pleurales constituent des signes de fibrose, d’apparition plus tardive [19].

Le traitement consiste en un renforcement et/ou une modification du traitement immunosuppresseur.

110 Figure 16

Patient greffé uni-pulmonaire pour dystrophie emphysémateuse évoluée. Parenchyme du poumon natif homogène en coupes inspiratoires, en expiration (reconnue au bombement de la face postérieure de la trachée), apparition de plages hypodenses au sein du parenchyme condensé correspondant à un piégeage expiratoire distal (flèche blanche) signant la BOS.

Figure 17

Patiente greffée pulmonaire il y a 3 ans, acquisition inspiratoire (en haut à gauche), bronches dilatées et à parois épaissies mieux visibles sur l’image agrandie (en bas). Acquisition expiratoire (en haut à droite) : zones de piégeage (têtes de flèches blanches) juxtaposées avec des zones de parenchyme sain (têtes de flèches oranges).

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