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VI. Synthèse et Problématique générale

VII.4. Expérience 2 de décision lexicale visuelle

VII.4.1. Matériel et méthodes

Vingt volontaires (10 femmes et 10 hommes), d’âge compris entre 19 et 29 ans (âge moyen = 24

ans), ont participé à la deuxième expérience de décision lexicale. Tous les participants étaient de langue maternelle française et avaient une vision normale ou corrigée. Tous étaient droitiers (scores compris entre 0.56 et 0.88 au test de latéralité manuelle d’Edimbourg, Oldfield, 1971). Aucun des volontaires n’avait participé aux évaluations subjectives d’AdA ou d’imageablité réalisées pour la première expérience.

VII.4.1.2. Stimuli

Trente-six verbes ont été sélectionnés dans la base de données lexicale française « Lexique » (New et al., 2001). Ces verbes, utilisés sous leur forme infinitive, désignaient des actions effectuées

soit par l’homme (n = 18) soit par les animaux (n = 18 ; Annexe 2.C pour la liste complète des stimuli). Les deux groupes de verbes d’action étaient appariés sur plusieurs variables lexicales pertinentes, telles que la fréquence d’occurrence, la fréquence des lemmes, le nombre de lettres et de syllabes, et la fréquence des bigrammes et des trigrammes (Tableau 7.5). Le nombre de verbes se terminant par « -er » était également comparable entre les deux groupes (13/18 pour la condition « animaux », et 15/18 pour la condition « homme »). L’AdA de ces verbes d’action a été estimé subjectivement, selon la procédure de Gilhooly et Logie (1980), par 15 participants différents de ceux ayant participé à l’expérience. Quinze autres participants ont également réalisé des estimations subjectives d’imageabilité.

Trente-six pseudo-mots ont été construits en changeant une lettre d’un verbe de la langue française, et en respectant les règles orthographiques de cette langue. Les pseudo-mots constituaient ainsi des « pseudo-verbes », et étaient tous prononçables. Ces pseudo-verbes étaient appariés aux verbes sur plusieurs variables lexicales (nombre de lettres et de syllabes, fréquence des bigrammes et des trigrammes), mais aussi sur leur terminaison (i.e. autant de stimuli appartenant à l’une ou l’autre catégorie - 27 sur 36 - se terminaient par « -er »).

Tous les stimuli étaient écrits en lettres minuscules, à l’encre noire, dans la police Geneva, de taille 60 points.

ANIMAUX HOMME ANOVA (par items) PSEUDO-

MOTS ANOVA FQ .63 .72 [F (1, 34) = .2730; p = ns] - - LEM 4.32 11.67 [F (1, 34) = 2.622; p = ns] - - LETT 6.61 6.77 [F (1, 34) = .2402; p = ns] 6.69 ****** BIGR 5609 4627 [F (1, 34) = .9896; p = ns] 4822 [F (1, 70) = .2360; p = ns] TRIG 673 455 [F (1, 34) = 1.445; p = ns] 526 [F (1, 70) = .0498; p = ns] SYLL 2.1 2.4 [F (1, 34) = 1.680; p = ns] 2.25 ******

Tableau 7.5 : Valeurs moyennes de fréquence d’occurrence (FQ), de fréquence des lemmes (LEM), du nombre de lettres (LETT), de fréquence des bigrammes (BIGR) et des trigrammes (TRIG), et du nombre de syllabes (SYLL) pour les 36 verbes désignant des actions spécifiques aux animaux ou à l’homme, et les 36 pseudo-mots. Les résultats des ANOVAs par items sont reportés.

Sur la base des estimations subjectives d’AdA réalisées, nous avons réparti les deux groupes de 18 verbes d’action en items acquis précocement (score moyen d’AdA < 4 ; n = 9) et tardivement (score moyen d’AdA > 4 ; n = 9), et pour lesquels les autres variables lexicales étaient contrôlées (Tableau 7.6). Il faut cependant noter que l’imageabilité différait significativement entre les items précoces et tardifs pour les deux groupes de mots. Toutefois, cette différence étant semblable pour les verbes d’action spécifiques aux animaux et à l’homme (différence de 1 et 1.11 respectivement),

ANIMAUX AdA FQ LEM IMAG LETT BIGR TRIG SYLL Précoces (n=9) 3.35 0.79 5.64 4.61 6.88 5341 647 2.33 Tardifs (n=9) 5.71 0.48 3.01 3.62 6.33 5877 641 1.88 Statistiques 56.56; p < [F(1,16) = .0001] ns ns [F(1,16) = 14.35; p = .0016] ns ns ns ns

HOMME AdA FQ LEM IMAG LETT BIGR TRIG SYLL

Précoces (n=9) 3.31 0.78 18.44 5.29 6.88 4721 430 2.44 Tardifs (n=9) 5.97 0.73 3.73 4.18 6.71 4533 481 2.28 Statistiques 47.14; p < [F(1,16) = .0001] ns ns [F(1,16) = 13.62; p = .0020] ns ns ns ns Tableau 7.6 : Valeurs moyennes d’AdA, de fréquence d’occurrence (FQ), de fréquence des lemmes (LEM), d’imageabilité, (IMAG), du nombre de lettres (LETT), de fréquence des bigrammes (BIGR) et des trigrammes (TRIG) et du nombre de syllabes (SYLL) pour les verbes désignant des actions spécifiques aux animaux ou à l’homme, et appris à des âges différents (items précoces vs. tardifs).

VII.4.1.3. Procédure

L’expérience de décision lexicale visuelle s’est déroulée dans les mêmes conditions et selon la même procédure que la première expérience de décision lexicale (section VII.3.1.3).

VII.4.1.4. Analyses statistiques

Les mêmes variables dépendantes que dans la première expérience de décision lexicale ont été mesurées. Les mêmes analyses ont également été réalisées, à l’exception des régressions multiples « pas à pas » et des analyses de corrélation (en raison du nombre limité de stimuli).

VII.4.2. Résultats

Une première ANOVA par sujets sur l’ensemble des 72 stimuli a révélé des temps de réponse significativement plus longs pour les pseudo-verbes que pour les verbes (677 ms ±244 vs. 605 ms ±158 respectivement, [F (1,19) = 8.014 ; p = .0107]). La précision des réponses ne différait pas significativement entre ces deux catégories de stimuli (2.78 % ±4.59 pour les pseudo-verbes vs. 3.75 % ±4.15 pour les verbes, [F (1,19) = .9209 ; p = ns]).

Par ailleurs, bien que les mots aient été contrôlés sur les principales variables lexicales, les temps de réponse moyens pour les verbes de la condition « animaux » (635 ms ±191) étaient significativement plus longs que pour les verbes de la condition « homme » (575 ms ±112 ; [F (1,19) = 7.567 ; p = .0127]). En revanche, la précision des réponses ne différait pas significativement entre les deux catégories de verbes (4.16 % ±5.94 pour la condition « animaux » vs. 3.33 % ±5.22 pour la condition « homme », [F (1, 19) = .2475 ; p = ns]).

La figure 7.3 présente les temps de réponse moyens pour les 2*18 verbes désignant des actions spécifiques aux animaux ou à l’homme en fonction de l’AdA de ces mots, ainsi que les analyses de régression simple correspondantes. Les résultats montrent qu’alors qu’un effet significatif d’AdA a été obtenu pour les verbes d’action spécifiques aux animaux, cette variable n’a pas influencé les performances pour les verbes se référant à des actions appartenant au répertoire moteur humain. Les coefficients de régression et de détermination (R2) étaient en effet environ trois fois plus élevés pour les verbes de la condition « animaux » que pour les verbes de la condition « homme ».

Figure 7.3: Gauche: Temps de réponse moyens pour les verbes désignant des actions spécifiques aux animaux ou à

l’homme exprimés en fonction de l’AdA ((*), significatif, (ns), non significatif). Droite: Analyses de régression correspondantes, où le temps de réponse moyen obtenu pour chaque item est reporté en fonction de l’AdA. Le coefficient de détermination (R2) et les valeurs de p sont également reportés. Animaux, ronds noirs ; homme, ronds gris.