2.1 Analyse qualitative observationnelle
Il s’agit d’une étude qualitative observationnelle. La banque de vidéos qui m’a servi de
matériau a été constituée dans le cadre d’une thèse précédente. L’analyse a été faite a
posteriori par une observation d’abord flottante des vidéos, puis focalisée sur différents
éléments de la consultation au fur et à mesure de la construction de ma grille de lecture.
2.2 Déconstruction des a priori
Avant de me lancer dans l’analyse des vidéos, j’ai dû m’interroger sur mes propres a priori
quant à la douleur et au langage non verbal afin d’en tenir compte lors de l’interprétation des
résultats.
Nul n’est naïf face à la douleur et j’y ai été confronté d’un point de vue à la fois personnel et
professionnel.
Sur le plan personnel, je l’ai à la fois ressentie moi-même, et vu ressentir par mes proches.
J’ai pu constater l’efficacité partielle des médicaments antalgiques et l’angoisse que peut faire
naître une douleur de cause inconnue. J’ai également été témoin de la transformation de la vie
que peuvent occasionner des douleurs chroniques.
Sur le plan professionnel, j’ai appris à catégoriser la douleur comme symptôme. J’ai appris à
en préciser les différentes caractéristiques comme la localisation, l’intensité, l’horaire… et à
rattacher à ces signes, différents diagnostics et différentes conduites à tenir face à ces
douleurs. J’ai également construit, au fil de mes rencontres avec les patients, différents
stéréotypes sur des formes de douleurs plus ou moins supportables, des types de patients plus
ou moins endurants ou plus ou moins enclins à se plaindre.
Mes a priori quant au langage non verbal proviennent, eux, de ma culture, de l’imaginaire
collectif et plus récemment de ma découverte de l’hypnothérapie.
51
Culturellement, il existe certains codes et règles implicites qui régissent notre communication
non verbale. Tendre la main lorsqu’on rencontre quelqu’un, hocher la tête pour dire oui, lever
le pouce pour exprimer son approbation, sont autant de codes dont la signification est propre à
un groupe partageant un socle culturel commun, et qu’il serait difficile de transposer à
d’autres cultures.
Dans l’imaginaire collectif, le langage non verbal a quelque chose de "magique" et les mythes
des détecteurs de mensonges, des voyants et autres mentalistes nous font penser que derrière
notre discours choisi, notre corps nous trahirait en disant de nous bien plus que ce que nous
voulons laisser entendre.
Dans ma formation d’hypnothérapie, j’ai appris à observer les signes non verbaux et à les
interpréter comme autant d’indices sur les représentations internes des patients et leur état
d’esprit, dans le but de me synchroniser avec eux et de les aider ainsi dans leur processus
thérapeutique.
2.3 Journal de bord
Tout au long de mes recherches et de ma rédaction, j’ai tenu un journal de bord. (Annexe 3)
Celui-ci se divise en deux parties :
La première est rédigée en ordre chronologique. J’y ai consigné le fruit de mes observations,
réflexions et entretiens réalisés tout au long de mes recherches. Cela m’a permis de suivre
l’évolution de mon travail d’une séance à l’autre et de suivre rétrospectivement le fil de ma
pensée.
La seconde partie m’a servi à consigner l’essence de mes lectures et recherches
bibliographiques, ce qui m’a permis de retrouver facilement les concepts auxquels j’ai été
confronté ainsi que des citations.
J’ai choisi pour mon journal un support papier plutôt qu’un document numérique, qui a pour
avantage de pouvoir être plus facilement transportable et accessible qu’un document
numérique.
52
2.4 Revue de littérature
J’ai construit ma bibliographie à partir d’ouvrages provenant essentiellement des sciences
humaines et sociales.
Les deux ouvrages de David Le Breton et de Claire Marin cités dans la première partie de
mon introduction ont été les points de départ de ma réflexion sur les notions de souffrance et
de douleur.
Mes autres lectures, qui m’ont notamment permis de construire la deuxième partie de mon
introduction, me sont venues au fur et à mesure par association d’idées et renvois. J’ai
effectué une grande partie de mes recherches bibliographiques dans des ouvrages consultés à
la Bibliothèque Nationale de France.
Enfin, j’ai utilisé internet pour piocher dans la "littérature grise" les définitions de certains
concepts.
2.5 Entretiens
Dans la phase préliminaire de mon travail, j’ai réalisé des entretiens de groupe semi-directifs,
auprès de mes proches et amis, pour les interroger sur leur rapport à la douleur et à la
souffrance. (Annexe 4)
Ces entretiens m’ont permis de cerner les ambiguïtés autour des concepts de douleur et de
souffrance, ainsi que les enjeux de consultation en tant que patient qui "a mal".
2.6 Construction de la base de données
J’ai utilisé comme matériau principal de recherche un corpus de vidéos de consultations de
médecine générale. Ce corpus a été réalisé par Victor Guérand dans le cadre de sa thèse en
médecine générale26. Son objectif était de réaliser une base de données vidéos, en allant filmer
26Guerand V. Création d’une base de données de consultations filmées de médecine générale pour la
recherche. Thèse. Université Pierre et Marie Curie, 2016
53
des consultations dans différents cabinets à travers la France, et en remplissant des fiches
d’information concernant les patients et les médecins.
Cette banque de données sert déjà à plusieurs travaux de thèses s’inscrivants dans un projet de
partenariat entre les sociologues de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales et le
département de médecine générale de l’université Paris Sorbonne, sous l’impulsion du Pr
Philippe Cornet pour la médecine et de Maud Verdier et Michel de Fornel pour les sciences
sociales. Elle pourrait à l’avenir, servir à de nombreux autres travaux de recherche.
L’utilisation de ces données a été validée par un comité d’éthique pour une durée de cinq ans,
avec la nécessité de consulter les vidéos au sein du département de médecine générale
uniquement, sur un poste dédié et sécurisé.
2.7 Sélection du corpus de vidéos
Les vidéos étant indexées par motif de consultation, j’ai répertorié celles dont le motif faisait
référence à une douleur physique ou morale.
J’ai ensuite créé une grille avec toutes les vidéos sélectionnées (Annexe 5)qui m’a permis par
la suite de suivre l’évolution de mes visionnages.
2.8 Référencement des vidéos
Les vidéos sont désignées par deux ou trois lettres et un numéro à deux chiffres.
Les lettres correspondent aux initiales des médecins chez qui elles ont été enregistrées et le
numéro correspond au numéro de la consultation chez ce même médecin.
Dans mes résultats, les extraits de vidéos sont désignés par leur référence en lettres et en
chiffres.
Les temps affichés en minutes (‘) et secondes (‘') correspondent aux moments de la vidéo
dontils ont été extraits.
La lettre P désigne le patient.
La lettre M désigne le médecin.
54
Dans le document
THESE SORBONNE UNIVERSITÉ
(Page 46-50)