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Partie V : Discussion générale et perspectives

II- 1-3-2 les marqueurs moléculaires

Les études de génétique des populations ont largement contribué à la compréhension des flux migratoires. En effet, les flux migratoires d’une population peuvent être analysés via la diversité génétique de la population (Sunnucks, 2000). Slatkin (1985) montre que l’étude des flux de gènes d’une population peut servir de paramètre pour l’analyse de la dispersion. Les marqueurs moléculaires sont des fragments d’ADN qui sont associés à une part du génome. L’analyse de ces marqueurs dans une population permet de déterminer la structure génétique de la population ; entre plusieurs populations ces marqueurs aident à déterminer des variations ou similitudes génétiques. Des échanges de gènes ou flux de gènes peuvent être déduits de ces analyses. Il existe plusieurs types de marqueurs moléculaires. Les plus courants sont les marqueurs RFLP (Restriction Fragment Lenght Polymorphism), RAPD (Random Amplified Polymorphic DNA), AFLP (Amplified Fragment Length Polymorphism) et les marqueurs microsatellites.

Les marqueurs RAPD ou ADN polymorphe amplifié au hasard sont très peu utilisés dans les études de génétique des populations, à cause de la difficulté à reproduire la technique (Xu et al. 2002). A l’aide des marqueurs AFLP, Martinelli et al (2007) ont analysé la diversité génétique des populations de la noctuelle Spodoptera frugiperda piégées dans les parcelles de maïs et de cotonnier au Brésil. Ils ont montré que les populations n’étaient pas spécifiques à la plante hôte et que les populations infestant les parcelles de cotonnier pouvaient également infester les parcelles de maïs. Dans ce même but, en Iran, Mozaffarian et al (2007) ont utilisé les marqueurs AFLP pour analyser les flux de gènes des populations de la pyrale de la grenade Ectomyelois ceratoniae. Ils ont montré qu’il n’y avait peu ou presque pas de migration et que les populations de pyrales d’origine géographique différente étaient

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génétiquement bien distantes entre elles. Ils ont montré aussi qu’il n’y avait pas de spécificité des individus d’une population donnée à la plante hôte.

Les microsatellites sont des séquences d'ADN répétées en tandem courts de un à six nucléotides comme unité de répétition. Dans le domaine de la génétique des populations, les marqueurs microsatellites sont les plus utilisés parce qu’ils présentent un taux de mutations élevé qui améliore l’estimation de la diversité dans une population ou entre populations (Sunnucks 2000). Dans les populations d’H. armigera en Australie, Scott et al (2005) sur 5 années d’étude (de 1999 à2003) ont montré que les populations d’ H. armigera ne présentaient pas le même schéma de migration tous les ans. L’étude a permis de corréler les flux génétiques aux flux migratoires. Par exemple, ils ont observé, pour les années 2001-2002, qu’il y’avait peu de variation génétique entre les populations de régions différentes et peu d’isolation par distance et inversement pour les autres années. Ils ontconclu que les déplacements des populations d’H. armigera pendant les années, autres que 2001-2002, étaient des déplacements locaux de courtes distances et que les populations entre régions ne se mélangeaient pas alors que pour les années 2001-2002 les déplacements étaient plutôt sur de longues distances. Malgré ces résultats, plusieurs études montrent que l’analyse des microsatellites pour déterminer la structure des populations des lépidoptères en général n’est pas toujours satisfaisante. Endersby et al (2007) ont analysé 8 microsatellites des populations d’H. armigera de la région de Victoria en Australie. L’étude a conclu qu’il n’y avait pas de structuration génétique ni entre les populations échantillonnées à différents endroits ni entre populations échantillonnées à des temps différents.

Malgré l’intérêt des microsatellites pour les études de migration, cet outil présente des inconvénients quant à leur utilisation pour l’analyse des populations de Lépidoptères. Des études montrent que le développement des microsatellites chez les lépidoptères est à la fois laborieux et sans garantie de résultats (Zhang 2004; Delamaire 2009, Nève et Meglécz 2000). Cette difficulté de développement des microsatellites serait liée à un déficit en loci microsatellites chez les lépidoptères (Zhang 2004; Delamaire 2009) et une forte proportion d’allèles nuls (Sinama et al. 2011). Vassal et al (2008) après avoir rencontré des difficultés pour déterminer la structure génétique des populations d’H. armigera piégés en Afrique centrale et de l’ouest, ont remis en cause l’utilisation des microsatellites pour l’analyse des déplacements des insectes lépidoptères.

Partie II : Étude de l’origine géographique d’H. armigera

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Une autre technique de biologie moléculaire consiste à l’analyse de la flore bactérienne (ou profil bactérien) présente dans et sur le corps d’un insecte. Il s’agit d’analyser le polymorphisme bactérien présent chez un individu au sein d’une population. En effet, les insectes forment avec les communautés bactériennes qui partagent leur habitat des associations pathogéniques ou symbiotiques (Ferrari et Vavre 2011). Le profil bactérien d’un lieu géographique ou d’un habitat peut être alors corrélée à celle observée dans /sur l’abdomen d’un individu. La méthode utilisée pour l’analyse de la flore bactérienne est la DGGE (Denaturing Gradient Gel Electrophoresis) l’électrophorèse sur gel par gradient dénaturant (Myers et al. 1985). Il s’agit d’amplifier la région 16S de l’ADN ribosomale bactérien afin d’analyser le polymorphisme des populations de bactéries hébergées par l’insecte (Muyzer 1993). Les études de Rani et al. 2009 ; Zouache et al. 2011 sur la flore bactérienne hébergée par les populations des moustiques (Aedes albopictus,Aedes aegypti et Anopheles stephensi) ont montré que la flore bactérienne peut être spécifique à un habitat donné. Cette technique est également utilisée pour connaître l’origine géographique des denrées alimentaires : fruits et poissons (Le Nguyen et al. 2008a, 2008b). Une analyse bibliographique de l’utilisation de cette méthode chez d’autres taxons nous a permis de prendre connaissance des autres facteurs influençant la flore bactérienne. Ainsi, Les études de Mrazek et al ( 2008), sur les guêpes Vespula vulgaris et Vespa crabro et celles de Reeson et al (2003) sur la guêpe Vespula germanica ont conclu qu’il fallait exclure toutes corrélations entre l’origine géographique, la taille du nid, l’âge des guêpes, la saison climatique et les profils des communautés bactériennes hébergées par les guêpes. Sur des populations de la noctuelle H. armigera élevées au laboratoire, Hui Xiang et al. (2006) et Priya et al. (2011) montrent que la flore bactérienne peut être aussi liée au régime alimentaire. Des études sur des populations du criquet pèlerin Schistocerca gregaria montrent que le polymorphisme des bactéries hébergées par ces criquets dépend aussi de l’âge des insectes et de leur état de satiété (famine) (Dillon et al. 2010 ).

Encouragé par le travail de Zouache et al (2011) et de Rani et al (2009) sur les moustiques, nous avons essayé de mettre au point l’analyse de la flore bactérienne hébergée par les individus d’H. armigera pour déterminer leur origine géographique (partie II-3). A notre connaissance, aucune étude n’a encore mis au point cette technique chez cette noctuelle. Les résultats de l’étude de Vassal et al. (2008) ne nous ont pas encouragé à utiliser les marqueurs microsatellites pour déterminer leur origine géographique. Il ressort de notre travail que la méthode DGGE pour analyser les déplacement des insectes devrait être completée par

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d’autres analyses. Nous présentons ensuite quelques perspectives suite aux résultats obtenus (partie II-3).

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