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Le management territorial stratégique à la croisée du management territorial et du management stratégique public

ENQUÊTE PRAGMATISTE Situation

1.2. Le management territorial stratégique à la croisée du management territorial et du management stratégique public

« La planification stratégique (…) est inadéquate au secteur public » (Fouchet, 1999, p. 40) car elle repose principalement sur la définition claire d’objectifs, un temps pour analyser les activités et un environnement prévisible ; ce qui va à l’encontre d’un besoin d’adaptation continue propre au service public. Le management stratégique se comprend comme la discipline qui étudie la stratégie ; cette dernière varie en fonction des enjeux historiques et économiques (Saïas et Métais, 2001, p. 184) et, la diversité de son champ se caractérise par l’essor des analyses post-rationnelles (Huault et Perret, 2009, p. 2045). Le management stratégique public renvoie quant à lui à un « management stratégique collaboratif, à la croisée du politique et du rationnel, du planifié et de l’émergent » (Favoreu et al., 2016, p. 477). En outre, le territoire nourrit notamment « une abondante littérature en management stratégique et en management public » (Lauriol et al., 2008a, p. 91) permettant de questionner les modes de coordination les plus appropriées au développement de coopérations fructueuses pour les managers concernés (Lauriol et al., 2008b, p. 187). En effet, le territoire peut jouer un rôle « d’agrégateur, de facteur de cohésion » (Raulet-Croset, 2014, p. 51) ou, a contrario, il peut cristalliser une « lutte pour les places » (Lussault, 2007, p. 30).

« L’engouement rencontré par le management territorial, en particulier auprès des scientifiques et des acteurs de terrain, révèle qu’il répond à un réel besoin de renouvellement dans la conceptualisation, autant que dans les croyances et les pratiques » (Hernandez, 2017, p. 41). Le management territorial se définit comme un ensemble de processus stratégiques, qui permettent de définir et d’adapter les stratégies en fonction des particularismes locaux. Si certains évoquent le « management stratégique de l’espace et des distances » (Lauriol et al., 2008b, p. 183), d’autres ont recours au terme de management territorial stratégique qualifiée comme « nouveau paradigme de l’action publique locale » (Arnaud, 2012, p. 9).

Tout d’abord, nous définirions le management territorial et nous reviendrons sur la figure du manager territorial, qui offrent tous deux des perspectives de renouvellement conceptuel et pratique (1.2.1.). Puis, nous reviendrons sur ce qu’est le management stratégique et nous préciserons les spécificités du management stratégique public, afin de mettre en exergue les liens entre management stratégique public et management territorial, nous permettant de montrer l’intérêt d’un management territorial stratégique (1.2.2.).

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1.2.1. Le management territorial et la figure du manager territorial, quelles perspectives conceptuelles et pratiques ?

« Comme toute notion nouvelle, le management territorial possède un pouvoir de séduction indéniable, encore accru par le fait d’accoler deux mots habituellement à des domaines - conceptuels et pratiques - relativement éloignés l’un de l’autre » (Crevoisier, 1996, p. 47). Dès lors, comment se mettre d’accord sur son utilisation ? Quels sont les caractéristiques du management territorial ? Pourquoi parler de management et non de gestion ? Quels sont les acteurs du management territorial ? À quoi renvoie la figure du manager territorial ? Quelles perspectives le management territorial permet-il de dégager pour l’action publique locale ? Nous allons démontrer que le management territorial est un concept pluridisciplinaire, à la fois contingent et intégrateur, permettant un regard critique104 sur les pratiques des acteurs intervenant dans le territoire.

Le management territorial permet de rapprocher deux domaines initialement éloignés : la science économique et la géographie. Les transformations des politiques économiques ces quinze dernières années ont facilité le passage d’une approche fonctionnelle du développement économique (i.e. espace non autonome support des activités économiques remplissant des fonctions attribuées par un système global) à une approche territoriale (i.e. espace autonome ayant la capacité de définir et de mettre en œuvre son développement économique) (Crevoisier, 1996, p. 50). L’accent est alors mis sur les processus de résolution de problèmes complexes, tenant compte des contingences organisationnelles et territoriales. Le management territorial revendique ainsi une approche pluridisciplinaire (i.e. intéressant notamment la science économique, la géographie et les sciences de gestion) et contingente, qui ne permet pas de définir une meilleure façon (one best way) de le mettre en œuvre.

Pourquoi parler de management territorial et pas de gestion territoriale ? Les logiques gestionnaires font référence à une approche fonctionnelle (i.e. selon les fonctions de l’organisation : gestion des ressources humaines, gestion comptable et financière, gestion des stocks, etc.) relevant de la gestion des ressources matérielles et immatérielles (Dupuis, 2015, p. 153). Les logiques managériales renvoient aux activités de l’organisation qui se comprennent

104 Un regard critique renvoie au « travail critique du chercheur, que l’on peut ici entendre comme l’exercice du

doute, de l’analyse, de l’évaluation et du jugement » (Huault et Perret, 2009, p. 5). Ce regard/travail critique ne

relève pas des études critiques en management (i.e. critical management studies), qui s’organisent notamment autour de trois principes : la dénaturalisation, l’anti-performance et la réflexivité (Grey et Willmott, 2005, p. 5).

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comme « l’ensemble des processus de finalisation, d’organisation, d’animation et de contrôle des organisations publiques, visant à développer leur performance générale et à piloter leur évolution dans le respect de leur vocation » (Bartoli, 2005, p. 98). Selon Dupuis (2015, p. 154), le management territorial cherche à mettre en cohérence ces deux logiques et à articuler trois registres d’action :

➢ Le management des organisations qui se focalise sur la gestion des ressources et la performance organisationnelle ;

➢ Le management des territoires qui repose sur la gestion de la performance territoriale, la création de partenariats, la définition et la mise en œuvre de projets de territoire ; ➢ Le management des politiques publiques qui fait prévaloir la gestion de la performance

des services publics.

Par cette articulation, le management territorial revendique un caractère intégrateur puisqu’il met en cohérence des logiques (i.e. managériales et gestionnaires) et des registres d’actions (i.e. organisationnelles, territoriales et publiques).

Hernandez (2017, p. 41) identifie « les idéologies véhiculées à l’échelle territoriale pour comprendre comment celles-ci sont susceptibles d’influencer les acteurs intervenant dans le territoire » afin de mettre en perspective leur impacts sur les pratiques de management territorial. Elle choisit d’utiliser l’expression de « local washing » pour désigner l’ensemble des idéologies qu’elle a identifiées, liées au développement durable, à l’attractivité territoriale et au phénomène de métropolisation. « Même si le local washing est encore probablement plus présent dans les idées et les discours que dans les actions, il est susceptible, de renforcer la croyance dans l’efficacité des outils de management territorial » (Hernandez, 2017, p. 87). En cela, le management territorial permet de poser un regard critique sur les pratiques des acteurs qui interviennent dans le territoire. Selon une définition systémique du territoire, il n’y a pas de territoire sans acteur ; les acteurs étant l’un des trois sous-systèmes qui composent le territoire. Dès lors, quels sont les acteurs en charge de la résolution des problèmes de management territorial ? Quels acteurs peuvent être associés à une démarche de management territorial ? Quelle est la différence avec les managers territoriaux ? Tous les acteurs sont-ils des managers ?

Pour rappel, à l’instar de Paugam (2010, p. 44) « qu’il soit individuel ou collectif, l’acteur désigne en général le support des conduites sociales ». De plus, à l’instar de Desmarais et Abord de Chatillon (2008, p. 768) « par manager, nous entendons toute personne en situation

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d’encadrement de subordonnés (…) notre volonté est d’employer le terme dans son sens fonctionnel de membre de l’encadrement ou d’encadrant ».

Les organisations publiques locales sont les premières concernées par les démarches de management territorial. Les élus et les managers des collectivités territoriales105 que sont les communes, les départements et les régions, ainsi que de leurs groupements, appelés les Établissements Publics de Coopération Intercommunale106 (EPCI), interagissent avec les élus et les managers des organisations centralisées et déconcentrées. Le Tableau 14 ci-dessous définit les modalités de déconcentration et de décentralisation de l’État unitaire français, qui se caractérise par l’existence d’un seul pouvoir politique détenu au niveau national, dont les décisions s’appliquent sur l’ensemble du territoire national (à la différence de l’État fédéral ou de la confédération).

Tableau 14 : Caractéristiques des processus de déconcentration et de décentralisation de l’État unitaire français

Source : Tableau adapté du site vie-publique.fr107 (2019)

Les élus et les managers des organisations publiques décentralisées agissent de concert avec ceux des services de l’État (e.g. ministères) et des organisations déconcentrées pour résoudre les problèmes de management territorial ; l’attribution des compétences donnant la primauté à

105 Aussi désignées sous le nom de collectivités locales, les collectivités territoriales sont des personnes morales de droit public distinctes de l’État, qui bénéficient d’une autonomie juridique et patrimoniale. La gestion des collectivités territoriales est assurée par des assemblées délibérantes élues au suffrage universel direct et par des organes exécutifs qui ne peuvent pas être élus. Sont des collectivités territoriales : les communes, les départements et les régions. Pour aller plus loin : https://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/categories-collectivites-territoriales/qu-est-ce-qu-collectivite-territoriale-ou-collectivite-locale.html 106Un Établissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) est un établissement public qui regroupe des communes soit pour assurer certaines prestations (e.g. ramassage des ordures ménagères, transports urbains), soit pour élaborer des projets de développement économique, d’aménagement ou d’urbanisme. Sont des EPCI : les syndicats de communes, les communautés de communes, les communautés urbaines, les communautés d’agglomération, les syndicats d’agglomération nouvelle et les métropoles. Pour aller plus loin : https://www.vie-

publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/intercommunalite-cooperation-locale/que-sont-etablissements-publics-cooperation-intercommunale-epci.html

107 Site Vie-publique.fr (2019) : https://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/principes-collectivites-territoriales/qu-est-ce-que-deconcentration.html

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l’une ou l’autre des collectivités territoriales et de leurs groupements selon les différents domaines d’action (Marcou, 2012, 2015a, 2015b ; Pontier, 2012, 2015).

En outre, relancée à la fin des années 1990 (i.e. avec la loi Chevènement108 de 1999), l’intercommunalité, qualifiée de « design institutionnel innovant » (Offner 2006, p. 27), renvoie aux « différentes formes de coopération locales entre les communes » (Site Vie-publique.fr109, 2019). Toutefois, parce qu’elle participe à accroître le millefeuille administratif, l’intercommunalité est « parfois jugée opaque, peu démocratique et couteuse » (Offner, 2006, p. 29). Pourtant, « quand les insuffisances de la coopération intercommunale sont pointées, elles mettent en exergue le non-achèvement du processus plutôt que son inefficacité » (Hernandez, 2017, p. 71) ; la faute incombant au législateur, puisqu’il ne donne pas les moyens nécessaires aux acteurs (Offner, 2006, p. 46).

Plus largement, si la territorialisation de l’action publique va de pair avec la déconcentration et la décentralisation, le constat est celui d’une « complexité territoriale » comprise comme la « superposition des niveaux de collectivités et l’indétermination de leurs compétences, l’entrelacs des différents modes de scrutin et de désignation des dirigeants, et le recouvrement anarchique des découpages spatiaux correspondants » (Montane, 2001, p. 26). Pour clarifier les responsabilités des acteurs de l’action publique locale, le Tableau 15 ci-dessous synthétise la répartition des compétences pour les différentes collectivités territoriales françaises et leurs groupements.

Tableau 15 : Synthèse de la répartition des compétences pour les collectivités territoriales françaises et leurs groupements

Source : Tableau traduit de Carmouze, Hernandez et Serval (2019, p. 11)

108 Loi no 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite loi Chevènement.

109 Site Vie-publique.fr (2019) : https://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/intercommunalite-cooperation-locale/comment-definir-intercommunalite.html

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« La mise en œuvre des politiques publiques nationales est nécessairement territorialisée, et elle peut faire appel, soit aux services extérieurs, ou déconcentrés, des ministères ou à leurs établissements publics, soit aux collectivités territoriales dont le rôle est alors défini et encadré par la loi » (Marcou, 2012, p. 13). Les collectivités territoriales et leurs groupements sont parfois contraints par la loi de travailler avec certains acteurs, mais ils peuvent aussi choisir d’en associer d’autres. D’ailleurs, à la suite de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, la nouvelle rédaction de l’article 72 alinéa 3 de la Constitution reconnait aux collectivités territoriales, un « pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences ». Ces dernières ont donc la liberté de choisir comment mettre en œuvre une démarche de management territorial pour laquelle elles sont compétentes.

Pour illustrer ces choix contraints et non contraints d’associer des organisations publiques ou privées et des citoyens à la résolution de problèmes, nous évoquons l’exemple des conférences territoriales de l’action publique et la démarche « Faire autrement » (INET110, 2018).

Tout d’abord, que sont les conférences territoriales de l’action publique ? Instaurées par la loi MAPTAM111 de 2014, chaque région doit mener des conférences territoriales de l’action publique. Elles peuvent notamment servir à « débattre et rendre des avis sur tous les sujets relatifs à l’exercice de compétences et à la conduite de politiques publiques nécessitant une coordination ou une délégation de compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements » (Site Vie-publique.fr112, 2019). Elles regroupent : le Président du conseil régional, les Présidents des conseils départementaux, les Présidents des EPCI de plus de 30 000 habitants et ceux de moins de 30 000 habitants ayant leur siège dans chaque département, ainsi qu’un représentant pour chaque catégorie de commune (i.e. moins de 3 500 habitants, entre 3 500 et 30 000 habitants et plus de 30 00 habitants) dans chaque département. Le constat est donc celui d’un choix contraint dans le cadre des acteurs associés par la région à la conférence territoriale de l’action publique.

110 Ouvrage intitulé « Un autre regard sur les territoires », issu des projets collectifs réalisés par les élèves administrateurs de l’Institut National des Études Territoriales (INET). Pour aller plus loin : https://inet.cnfpt.fr/s-informer/publications-inet/autre-regard-territoires-promotion-gaston-monnerville

111 Loi n°2014-58 du 27 janvier 2014 de Modernisation de l’Action Publique Territoriale et d’Affirmation des Métropoles, dite loi MAPTAM.

112 Site Vie-publique.fr : https://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/collectivites-territoriales/intercommunalite-cooperation-locale/que-sont-conferences-territoriales-action-publique.html

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Ensuite, nous présentons l’exemple de la démarche Faire autrement. Communauté d’agglomération113 fondée en 2001, Plaine Commune devient un établissement public territorial114 en 2016, constituée de neuf communes du département de Seine-Saint-Denis et plus de 430 000 habitants en 2018. En novembre 2017, les élus de Plaine Commune décident de mettre en œuvre la démarche Faire autrement. C’est une « approche transversale qui vise à systématiser dans les politiques publiques la prise en compte des enjeux de sobriété financière et écologique, d’innovation et d’association des agents, habitants et partenaires du territoire » (INET, 2018, p. 44). Dans le cas de cette démarche, l’EPCI choisit librement d’associer systématiquement les agents, les habitants et les partenaires du territoire dans la définition des politiques publiques.

Nous avons mis en perspective les acteurs publics nationaux et locaux qui adoptent des pratiques de management territorial. En outre, le partage des rôles entre l’État et les collectivités territoriales relève d’un double mouvement : « l’émancipation institutionnelle des collectivités territoriales par rapport à l’État et l’intégration croissante des collectivités territoriales dans les politiques publiques de l’État ou de l’Union européenne » (Marcou, 2012, p. 6). Les acteurs du management territorial recouvrent donc aussi une dimension internationale et européenne, qui fait écho au phénomène de glocalisation (i.e. articulation des dynamiques global/local) des activités économiques (Benko, 1999). Les territoires infranationaux entrent désormais en concurrence au niveau mondial ; le niveau national n’étant plus le medium entre le local et l’international (Zimmerman, 2005). Sont donc aussi concernés par des problèmes de management territorial : les élus et les managers des organisations publiques européennes (e.g. commission européenne, parlement européen) et internationales (e.g. élus et managers de villes jumelées115).

113 Une communauté d’agglomération est un Établissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) (cf. note de bas de page110), qui regroupe plusieurs communes sur un territoire d’un seul tenant et sans enclave.

114Un Établissement Public Territorial (EPT) est nouvelle structure administrative qui a le statut d’Établissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) (cf. note de bas de page110), créé en 2016 dans le cadre de la création de la Métropole du Grand Paris.

115 Selon la loi n°92-125 du 6 février 1992 d’administration territoriale de la République, titre IV « De la

coopération décentralisée », art. 131 « les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent conclure des conventions avec des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements ». Première forme de coopération

entre collectivités territoriales, le jumelage se définit comme un contrat politique entre deux collectivités locales, sans limite dans le temps, dont le champ d’action pluridisciplinaire requiert la participation directe des citoyens, un moyen de sensibilisation et d’initiation à la mobilité, un cadre d’action et de projets internationaux, un espace d’échanges d’expériences et d’opinions et une source d’apprentissage. D’après l’Agence Française du Conseil des Communes et Régions d’Europe (AFCCRE) la commune de Marseille est jumelée avec treize villes (e.g. Abidjan, Dakar, Haïfa, Kobe, Marrakech, Shanghai, etc.). Dans ce cas, les projets de jumelage renvoient donc à des

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Les acteurs privés et les citoyens peuvent-ils être considérés comme des acteurs du management territorial ? Les paradigmes post-nouveau management public impliquent « une action co-construite avec différentes parties prenantes, citoyens, entreprises, associations et impliquant une réelle modification du rôle des managers territoriaux » (Soldo, 2018, p. 124). Le lien entre les modalités de l’action publique (e.g. processus de déconcentration, de décentralisation et intercommunalité) et le management territorial étant démontré, le renouvellement du management public implique une modification des pratiques de management territorial. Les managers des organisations publiques territoriales agissent donc de concert avec les managers des organisations privées (avec ou sans but lucratif) et les citoyens. Pour exemple, l’Agence d’Urbanisme Pays d’Aix-Durance (AUPA), association créée en 1978, « apporte une aide stratégique à la décision en matière d’urbanisme et veille à la cohérence des politiques publiques » (Site Aupa.fr116, 2019). De plus, l’application Imagin’Est, lancée en 2017 par la région Grand Est, est un outil numérique collaboratif dont l’objectif est de recueillir l’avis des habitants « sur un certain nombre de débats initiés par la Région sous forme de questions, de s’informer sur les dispositifs régionaux et de lancer eux-mêmes des discussions » (Site Grandest.fr117, 2019).

Que sont les managers territoriaux ? Tous les acteurs du management territorial sont-ils des managers ? Si le terme de manager territorial est utilisé par les chercheurs en management territorial, d’une part ce n’est pas la seule appellation (e.g. managers publics, décideurs publics, cadres dirigeants territoriaux, acteurs) et, d’autre part, sa définition renvoie à des réalités différentes selon les auteurs.

Tout d’abord, pour Serval (2015, p. 3) les managers territoriaux se comprennent comme les « élus et administratifs qui décident et mettent en œuvre l’action publique locale ». Selon Hernandez (2017, p. 91) « les organisations publiques territoriales disposent de plusieurs « boîtes à outils » managériales (…) Les managers territoriaux ont la possibilité de puiser dans ces trois boîtes » ; les managers territoriaux étant donc considérés comme les managers des organisations publiques territoriales. Selon Soldo (2018, p. 110) « le projet culturel de territoire a ainsi émergé comme modalité d’action structurante et se voit aujourd’hui couramment mobilisé par les managers territoriaux », qui renvoient dans ce cas aux « décideurs publics »

pratiques de management territorial qui reposent sur des échanges entre les élus et les managers de la commune de Marseille et ceux des villes jumelées.

116 Site de l’Agence d’Urbanisme Pays d’Aix-Durance : https://www.aupa.fr/agence/aupa-une-ingenierie-au-service-territoires

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(Soldo, 2018, p. 120). Les managers territoriaux se comprennent donc comme les managers des organisations publiques territoriales, entendus comme les élus et les administratifs en charge de l’action publique locale. Ensuite, si Dupuis (2015, p. 153) préfère le terme de « cadres dirigeants territoriaux », ces derniers sont compris comme les élus, les Directeurs Généraux des Services (DGS) et leurs Adjoints (DGA) travaillant dans les organisations publiques territoriales. Toutefois, selon Raulet-Croset (2008, p. 139), « la définition des acteurs participants118 est contingente au problème et à son inscription locale » ; ces acteurs étant compris comme les acteurs publics locaux (e.g. acteurs du monde agricole tels que les chambres d’agriculture), les acteurs privés (e.g. syndicats, agriculteurs, entreprise d’eau minérale) et les acteurs scientifiques (e.g. équipe pluridisciplinaire de l’INRA119). De même, Tissone et ses collègues. (2018, p. 4) considèrent que « la boîte à outils des pratiques de management territorial externe peut également être utilisée par d’autres acteurs territoriaux tels que la sphère privée, la société civile et le monde universitaire120 ».

Les managers territoriaux regroupent ainsi différentes catégories d’acteurs impliqués dans la résolution d’un problème local complexe :

➢ Les managers publics internationaux, européens, nationaux et locaux (e.g. issus des organisations publiques centralisées, déconcentrées et décentralisées) ;

➢ Les managers privés (e.g. issus des entreprises, des associations avec/sans but lucratif