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Les maladies infectieuses sont un bon exemple des facteurs de risque d’épilepsie ayant plus d’impact en milieu tropical qu’en milieu industrialisé. De plus, les séquelles dues à ces maladies y sont plus importantes en raison d’un retard ou d’un défaut de prise en charge adaptée. S’ajoute à cela des conditions écologiques favorables au développement d’agents pathogènes et la présence de certaines infections spécifiques au milieu tropical. Ceci participant sans doute à la prédominance de l’épilepsie dans ces zones. Ainsi, une cause infectieuse est suspectée en moyenne dans 9 à 26 % des cas.

Les méningites ou les encéphalites à l’origine de crises d’épilepsie peuvent être provoquées par des agents infectieux tels que les virus, les bactéries, les parasites ou encore les champignons. Ces crises peuvent aussi bien être présentes dans la phase aiguë de l’infection que dans les suites de cette dernière. La récurrence des crises est alors due aux lésions neurologiques provoquées par l’infection ou encore par la réponse inflammatoire.

Mandy Nizard | Thèse de doctorat | Université de Limoges | 26 octobre 2016 51 Infections virales

Certains virus, de par leur spécificité de vecteur ou de mode de transmission, ne se retrouvent qu’en zone tropicale. De plus, leur effet délétère sur le système immunitaire peut favoriser la pénétration dans le système nerveux central d’autres agents infectieux opportunistes qu’ils soient viraux, parasitaires, bactériens ou fongiques. Cette synergie infectieuse a été décrite notamment avec la toxoplasmose, les mycoses, la tuberculose et les infections par le virus de l’herpès (Letendre et al., 2009).

Les principales infections virales mises en cause dans l’apparition de crises épileptiques sont :

- le syndrome virus de l’immunodéficience humaine (VIH) : il est présent chez plus de 30 millions de personnes vivant dans les PED (UNAIDS, 2009) et a été décrit dans ces populations comme un facteur de risque d’apparition de crises d’épilepsie (Kellinghaus et al., 2008 ; Modi et al., 2002 ; Persidsky et al., 2006 ; Romanelli & Ryan, 2002),

- la rougeole : bénin dans la plupart des pays industrialisés, ce virus est souvent responsable d’encéphalopathies en milieu tropical (Rey et al., 1970),

- l’encéphalite herpétique : facteur de risque de crises convulsives, en particulier si elle est associée à une infection à VIH,

- l’encéphalite japonaise : présente en Asie, elle y est responsable de 13,0% des épilepsies chroniques (Murthy, 2003 ; Solomon, 2003),

Infections parasitaires

De la même façon que pour les virus, certaines infections parasitaires sont spécifiques aux zones tropicales de par leurs réservoirs naturels, leurs vecteurs de transmission ou encore les mauvaises conditions d’hygiène. Ces infections sont

Mandy Nizard | Thèse de doctorat | Université de Limoges | 26 octobre 2016 52 responsables de crises d’épilepsie ou d’épilepsies séquellaires soit par encéphalopathie diffuse, soit par localisation intracérébrale du parasite. Parmi elles, on remarque que de nombreux helminthes, vers plats (plathelminthes) ou ronds (némathelminthes) sont mis en cause (Garcia & Modi, 2008). On peut notamment citer :

- la neurocysticercose : pathologie parasitaire la plus fréquemment associée à l’épilepsie dans les pays en développement, la cysticercose est provoquée par l’ingestion d’aliments souillés par des matières fécales contenant des œufs de

Tænia solium. On parle de neurocysticercose lorsque le parasite a envahi le

système nerveux central de son hôte (Del Brutto et al., 2005 ; Dongmo et al., 2004 ; Garcia-Noval et al., 1996 ; Medina et al., 2005 ; Montano et al., 2005 ; Murthy & Yangala, 1999 ; Nsengiyumva et al., 2003 ; Preux & Melaku, 1996 ; Rajshekhar et al., 2003 ; Shorvon & Farmer, 1988 ; Vilhena et al., 1999), - le paludisme : parasitose transmise par un moustique majoritairement présent

en zone tropicale. Plusieurs formes existent selon qu’elles mettent en cause l’une des quatre espèces de Plasmodium : P. ovale, P. dificile, P. vivax ou P.

falciparum. Un lien entre P. falciparum et épilepsie a été étudié dans de

nombreux travaux (Ngoungou & Preux, 2008 ; Ngoungou et al., 2006). De plus, des crises épileptiformes sont observées en nombre important dans les cas de paludisme cérébral avec séquelles neurologiques (Carter et al., 2004; Faiz et al., 1998; Ngoungou et al., 2006; Ngoungou & Preux, 2008; Waller et al., 1995; Wattanagoon et al. , 1994),

- la bilharziose ou schistosomiase : les 5 espèces du genre Schistosoma

peuvent être à l’origine de cette affection parasitaire. La contamination se fait par l’ingestion d’eau souillée et peut être à l’origine de crises épileptiques lorsque les calcifications atteignent le cerveau (Betting et al., 2005 ; Levy et al., 1975),

- la toxocarose : les vers ronds du genre Toxocara provoquent une parasitose

Mandy Nizard | Thèse de doctorat | Université de Limoges | 26 octobre 2016 53 augmentation du risque d’épilepsie a été mise en cause dans plusieurs pays tropicaux chez des sujets atteints (Arpino et al., 1990 ; Nicoletti et al., 2002, 2007),

- la toxoplasmose : peut entraîner des crises d’épilepsie chez environ 25% des sujets atteints (Ngoungou et al., 2015). Cette fréquence est augmentée en cas de co-infection par le VIH,

- la paragonimose : essentiellement retrouvée en Asie (Strobel et al., 2005 ; Tran et al., 2004), ce parasite peut atteindre le cerveau et provoquer des crises convulsives, des épilepsies ou d’autres syndromes neurologiques (Choo et al., 2003 ; Higashi et al., 1971),

- l’onchocercose : parasitose uniquement retrouvée en Afrique Subsaharienne, l’onchocercose est aussi appelée cécité des rivières. Son rôle dans l’épilepsie n’est pas encore totalement assuré du fait de nombreux résultats contradictoires mais il semble exister un risque de manifestations épileptiques augmenté synergiquement avec la charge parasitaire (Boussinesq et al., 2002 ; Dongmo et al., 2004 ; Druet-Cabanac et al., 1999 ; Kabore et al., 1996 ; Kaiser et al., 1996 ; Kipp et al., 1994 ; Newell et al., 1997 ; Ovuga et al., 1992 ; Pion et al., 2009 ; Preux et al., 2010),

- la trypanosomiose humaine africaine ou maladie du sommeil : due à

Trypanosoma gambiense, elle peut être responsable de crises épileptiformes

au stade neurologique de la maladie (Senanayake & Román, 1991).

Infections bactériennes

De la même façon que les virus, certaines bactéries peuvent être responsables de méningites ou d’encéphalites causant potentiellement des séquelles cérébrales à l’origine de manifestations épileptiques (Annegers et al., 1988 ; Edmond et al., 2010). En cause notamment les méningites à méningocoques et les méningites

Mandy Nizard | Thèse de doctorat | Université de Limoges | 26 octobre 2016 54 tuberculeuses (Mbonda et al., 1995). De plus, le risque d’épilepsie séquellaire est doublé chez les enfants présentant une co-infection au VIH (Madhi et al., 2001 ; Molyneux et al., 2003).

Infections fongiques

Les infections fongiques associées à l’épilepsie sont plutôt rares à l’exception de la cryptococcose, fréquemment retrouvée en association avec le VIH (Arboix & Salas Puig, 1997). D’autres mycoses comme les aspergilloses et les histoplasmoses peuvent entraîner des crises convulsives, toutefois aucune étude spécifique n’a encore été entreprise sur ce sujet.